Et voici donc le dernier chapitre de la semaine. J'avais pensé à la diviser en deux, mais finalement... Poster un chapitre de 1500 mots puis un autre de 4000 mots ne me tentait pas vraiment. Tout dans le même panier !


Je Te Guiderai

Chapitre IV


- N'enlève pas ton pull, Rose, s'il-te-plaît...

Hermione finissait de préparer le sac de sa fille, tentant de ne rien oublier pour le week-end. Il était déjà presque dix heures du matin, et elle avait prévu d'arriver pour l'heure du déjeuner. Mais deux heures et demi de route les attendaient jusqu'à Devon où se situait le Terrier, et elle avait prévu de partir plus tôt. C'était sans compter sur Rose et sa manie de ne pas se laisser habiller par sa mère.

Sur les coups de dix heures, pourtant, elle parvint à tourner la clé dans la serrure de la voiture, Rose confortablement installée à l'arrière. Un peu de musique ainsi que quelques jouets suffirent à la calmer pour le trajet, et c'est affamée qu'Hermione arrêta le moteur de la voiture, à quelques mètres de la demeure des Weasley. En moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, Molly sortit de la maison et se dirigea au pas de course vers la voiture. Hermione n'eut que le temps de refermer la porte derrière elle avant de sentir les bras de Molly se refermer sur elle.

- Hermione, ma chère, quel plaisir de te voir !, s'exclama-t-elle avec un sourire radieux. Et cette chère petite Rose !

Rapidement, Hermione sortit sa fille de son siège afin de la confier à Molly. Cette dernière n'hésita pas à prendre sa petite fille dans ses bras, la couvrant de baisers.

Hermione ne put s'empêcher de sourire : voir Rose partager de si beaux moments avec sa grand-mère était un pur bonheur, et elle s'en voulut de ne pas le faire aussi souvent qu'elle le devrait. Elle laissa Molly amener Rose à l'intérieur afin de la protéger du vent glacial qui soufflait en cette période de l'année, et sortit le sac de voyage qu'elle avait préparé du coffre. Lorsqu'elle pénétra à son tour dans la maison où elle avait passé de nombreux week-ends par le passé, une délicieuse odeur de viande marinée atteignit ses narines. Des cris de joie s'échappaient du salon, et Hermione ne fut pas surprise de voir que toute la famille était réunie, à l'exception de Charlie qui vivait toujours en Roumanie. Même Bill, Fleur et leur fille Victoire étaient présents. Rose n'était évidemment plus dans les bras de Molly, mais était désormais confortablement assise sur les genoux de Ginny. Tous tournèrent la tête vers elle lorsqu'elle pénétra dans la pièce, et ce fut le moment des retrouvailles et embrassades. De temps à autre, alors qu'elle serrait dans ses bras un autre membre de la famille Weasley, elle entendait le rire si précieux de Rose, visiblement ravie d'être entourée par tant de personnes à la fois.

- Hermione, souffla Harry en la prenant dans ses bras. Combien de temps avons-nous passé sans nous voir ? Six mois ?

- Cinq mois et quelques jours plus exactement, tu n'étais pas là la dernière fois que Rose et mois sommes venues au Terrier, répondit-elle en le serrant contre elle. J'avais besoin de...

- Tu n'as pas à t'expliquer. Nous le comprenons tous, l'interrompit-il en posant une main réconfortante sur son épaule.

Le visage d'Harry Potter n'avait pas beaucoup changé avec les années. Il avait toujours des yeux d'un vert intense, et sa cicatrice restait toujours aussi visible. Il avait cependant troqué ses lunettes rondes contre un modèle plus contemporain, ce qui modifiait subrepticement son apparence. Son physique, en revanche, avait évolué. Il avait pris du muscle avec le temps, sa formation poussée d'Auror y étant sûrement pour quelque chose. Depuis presque six mois, il dirigeait d'une main de fer le bureau des Aurors, après un parcours quasi sans faute pendant les huit dernières années.

Son fils, James Sirius Potter se trouvait à côté de son oncle George, près de la cheminée. Hermione se figea en notant la ressemblance de plus en plus frappante entre James et son père. Cela faisait presque six mois qu'elle n'avait pas vu le petit garçon qui allait sur ses cinq ans, six mois de trop.

- Étonnant, n'est-ce pas ?, lui glissa Harry à l'oreille, un soupçon de fierté dans la voix.

- Je ne t'ai certainement pas connu lorsque tu avais cinq ans, mais si on me le demandait, je dirai que James est ton sosie, avoua Hermione avec un sourire. Et tu le laisses côtoyer George ? Je veux dire, George est un oncle incroyable avec Rose, mais connaissant son penchant pour les farces et attrapes...

- Oh, James est déjà un vrai farceur, Hermione, répondit Ginny en s'approchant d'elle, Albus Severus Potter dans les bras.

Elles s'embrassèrent, tandis qu'Hermione jetait un coup d'oeil à Rose qui était désormais dans les bras d'Arthur. Rassurée, elle prit doucement Albus dans ses bras, et le petit garçon de presque un an lui jeta un regard surpris.

- Il ne doit pas te reconnaître, expliqua Ginny.

- Il est vrai que ne nous sommes pas beaucoup vus depuis ta naissance, n'est-ce pas mon bonhomme ?, lui murmura Hermione avant de déposer un baiser rassurant sur son front. Un autre sosie d'Harry Potter en perspective...

- Quand aurais-je donc une fille qui me ressemble ?, se lamenta Ginny. Tu as de la chance d'avoir Rose, Hermione, elle est splendide.

Hermione acquiesça avec fierté. Rose était effectivement splendide, avec ses boucles auburn qui entouraient son visage. Ses yeux étaient de la même couleur que ceux de sa mère : elle ressemblait en tous points à sa mère. Ses cheveux étaient cependant plus souples que ceux d'Hermione lorsqu'elle était plus jeune, mais c'était bien la seule différence entre elles deux.

- J'imagine qu'elle tiendra son intelligence de sa mère également, soupira Harry en levant les yeux au ciel, un sourire au coin des lèvres.

- C'est tout le mal que je lui souhaite, répondit Hermione avec un clin d'oeil.

Soudain, la voix de Molly Weasley retentit dans la maison.

- A table ! Il est bientôt treize heures, les enfants doivent mourir de faim !

Effectivement, une fois à table, Rose se mit à manger avec appétit ce que Molly lui avait préparé, tout comme Albus, James et Victoire. Le déjeuner se déroula dans la bonne humeur, et Hermione retrouva le sourire qu'elle avait perdu la veille au soir, au départ de Severus Snape.

- Comment se passent les affaires, Hermione ?, demanda soudain Arthur, alors que Molly s'arrêtait près de la jeune femme afin de lui servir une part de gâteau.

- Très bien, je ne pourrais pas être plus satisfaite, vraiment. Les ventes se sont envolées avec la rentrée des classes le mois dernier, et les choses se stabilisent depuis. J'ai une clientèle très fidèle.

- Tu m'en vois ravie, ma chère, répondit Molly en posant une main maternelle sur son avant-bras. Ron aurait été heureux de savoir que tu reconstruis ta vie.

Un silence gêné s'installa autour de la table, et Hermione baissa rapidement les yeux vers la part de gâteau qui se trouvait désormais dans son assiette. Elle finit par hocher lentement la tête.

- Je le pense aussi, murmura-t-elle avant de picorer dans son assiette, une manière comme une autre de ne pas avoir à affronter les regards emplis de tristesse de tous ceux qui avaient eu la chance de côtoyer Ron pendant tant d'années.

Avec le temps, le chagrin de la jeune femme s'était transformé en quelque chose de légèrement différent : elle était toujours aussi triste et dévastée par la perte de celui qui avait partagé sa vie pendant sept ans, voire plus si l'on comptait les années qu'ils avaient passées à Poudlard, mais cette tristesse était désormais couplée à une certaine reconnaissance. Elle lui était reconnaissante pour lui avoir donné Rose Elisabeth Weasley, la prunelle de ses yeux, la personne pour qui elle était prête à tout sacrifier. A vingt-sept ans, elle avait désormais un but dans la vie, et cela n'avait été possible que grâce à Ron et à l'amour qu'ils avaient partagé pendant tant d'années. Il n'était plus là, certes, mais une preuve de leur amour était restée en ce monde, près d'elle.

Les rires et discussions enjouées du début de repas s'étaient évanouis, laissant place à une certaine mélancolie partagée par tous.

A la fin du repas, Hermione posa sa main sur le bras d'Harry qui était à sa gauche, tandis que Rose jouait paisiblement avec Albus dans le parc à jouets.

- Harry, pouvons-nous discuter... en privé ?, précisa-t-elle.

- Bien sûr, acquiesça le jeune homme, pris au dépourvu.

Ils se dirigèrent vers l'ancienne chambre de Ginny et Hermione referma la porte derrière elle, prenant soin d'insonoriser la pièce. Harry prit place sur le lit de Ginny, invitant Hermione à faire de même, mais cette dernière préféra rester debout.

- Comment se passe ton travail en tant qu'Auror, Harry ?, questionna Hermione, tentant de s'exprimer sur un ton neutre.

- La routine... Rien n'a vraiment changé depuis que j'ai été nommé à la tête du bureau des Aurors, j'essaie au maximum de toujours m'occuper des missions de terrain.

- Je vois... Et il y a-t-il de nouvelles menaces qui pèsent sur le Monde Sorcier ?, insista-t-elle. Cela fait plusieurs mois que je ne m'intéresse plus à tout cela et...

- Et tu devrais continuer, Hermione, l'interrompit Harry en fronçant les sourcils. Tu n'as pas à t'inquiéter de quoique ce soit, ce sont les affaires du Ministère et de mon Département en particulier. S'il y a quoique ce soit, sois-en sûre que nous nous en occupons.

- Bien sûr, bien sûr, bafouilla-elle. Mais il y a des choses que j'aimerai savoir, des choses que... Avez-vous eu des nouvelles de Merkhov ?, parvint-elle à dire dans un souffle.

Un silence pesant s'installa entre eux. Lentement, Hermione alla s'asseoir près de son meilleur ami, les lèvres pincées.

- Harry...

- Tu te fais du mal pour rien..., soupira ce dernier.

- J'ai besoin de savoir. Je t'en prie, Harry...

- Nous avons en effet eu des informations concernant Merkhov récemment, finit-il il par lâcher. Il se situerait en Russie aux dernières nouvelles, mais nous ne prévoyons pas d'attaque dans les prochaines semaines. Nous ne voulons pas refaire la même erreur que l'an dernier...

Hermione hocha la tête, tandis qu'elle essayait tant bien que mal de refouler les souvenirs qui menaçaient de lui revenir et de la submerger.

- Est-il toujours aussi dangereux ?, souffla-t-elle.

- Nous le soupçonnons... Il se fait plus discret depuis sa victoire de l'an dernier, pour une raison que nous ignorons. Mais nous ne doutons pas de son influence de plus en plus grandissante, malheureusement.

- Que comptez-vous faire ?

- Nous attendons. Nous sommes à la recherche d'une faille dans son réseau, d'une piste nous permettant de l'arrêter sans perte humaine... De notre côté tout du moins.

Hermione se tut, et Harry posa une main sur sa cuisse.

- Hermione, fais-moi confiance. Nous l'arrêterons un jour ou l'autre. Cela prendra sûrement du temps : cela fait des années que nous n'avons pas été confrontés à un mage noir aussi puissant que Merkhov. Mais je te promets que la mort de Ron ne restera pas impunie, je te le promets...

Une larme silencieuse coula le long de la joue de la jeune femme, tandis qu'elle essayait de sourire, avec difficulté.

- Je te fais confi...

Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase : un cri strident émanant du rez-de-chaussée l'interrompit.

- James Sirius Potter !, hurla Molly Weasley alors que des rires d'enfants retentissaient dans la maison.

Fronçant les sourcils, Harry se dirigea vers la porte, suivi d'Hermione qui essuyait tant bien que mal ses larmes. Ils descendirent rapidement les escaliers avant d'être accueillis par une odeur nauséabonde, alors que George et James se trouvaient en retrait, les larmes aux yeux à force de rire.

- Qu'est-ce qui se passe ?, demanda Harry à son fils, tandis que Ginny se dirigea vers lui, Albus dans les bras.

- Il se trouve que ton fils, James Sirius, a jugé bon de jeter une bombabouse en plein milieu du salon, expliqua-t-elle, le regard perçant.

- Oh, Gin, tu ne peux pas dire que ce n'était pas hilarant, répondit George en tapant dans la main de James.

- Je ne cautionne pas tes bêtises, George, et je te prierai de te comporter décemment en présence de mes enfants. Ils n'ont pas besoin d'être dévergondés par leur oncle. Par ici, James, va demander pardon à mamie et papy.

Traînant des pieds, James se résigna tout de même à suivre sa mère, alors que Rose se dirigea d'un pas rapide vers Hermione, en se bouchant le nez d'un geste comique. Hermione l'attrapa au vol, et la serra doucement contre elle.

- Ton cousin James en fait des bêtises, ma chérie, murmura-t-elle contre l'oreille de la petite fille qui gloussa doucement en réponse.

XxX

La journée avait été difficile pour Hermione Granger. Samantha avait été odieuse, comme à son habitude, la gratifiant de commentaires déplacés qui n'avaient fait que renforcer son malaise. Cela faisait plusieurs semaines que Ron était en mission, plusieurs semaines qu'elle vivait seule dans leur appartement en plein cœur de Londres en compagnie de Rose, la boule au ventre. Elle avait reçu deux ou trois lettres de la part du jeune rouquin, et elles étaient toujours brèves et concises : Ron n'avait jamais été très doué pour écrire, que ce soit des devoirs ou des lettres adressées à celle qui partageait sa vie depuis déjà sept ans. Hermione ne s'y attardait pas cependant. Elle le savait occupé, et ne souhaitait pas qu'il se détourne de son objectif principal : terminer cette mission au plus vite afin de rentrer auprès des siens.

Être la compagne d'un Auror émérite n'était pas de tout repos, Hermione le reconnaissait bien volontiers. De temps à autre, elle retrouvait Ginny lorsque Ron et Harry n'étaient pas présents, afin de ne pas être seule. Car Rose était adorable, mais elle n'avait qu'un an elle ne pouvait décemment pas tenir une conversation digne de ce nom avec sa fille.

Pour une raison qui lui était inconnue, ce jour-là, la boule qu'elle avait au ventre semblait plus importante. Peut-être était-ce dû aux provocations constantes de Samantha, elle ne le savait pas. Hermione avait visité ses patients un à un en fin d'après-midi, prenant le temps de leur parler pendant quelques minutes afin de s'assurer de l'évolution de leur état de santé, et après sa tournée quotidienne, elle s'était enfermée dans son bureau afin de ne pas avoir à supporter les jacassements de sa collègue. Il était déjà plus de huit heures du soir, et elle mourrait d'envie de rentrer chez elle après être passée au Terrier afin de récupérer Rose. Elle avait fait installer une cheminée magique dans son bureau, la permettant de relier les trois lieux les plus importants de sa vie : Ste. Mangouste, le Terrier, et son propre appartement.

Alors qu'elle classait rapidement les derniers dossiers de la journée, une certaine agitation prit possession du couloir, la forçant à se lever. Là, elle vit une horde de médicomages en blouse verte se diriger vers le sas des urgences, comme s'ils avaient le diable à leurs trousses. Hermione parvint à agripper le bras d'un de ses collègues, un certain Sebastian.

- Que se passe-t-il ?, lui demanda-t-elle, alors que le jeune homme semblait pressé de se rendre aux urgences.

- Une dizaine d'Aurors, visiblement torturés lors d'une mission. Nous devons être le plus discrets possible, ordre du Ministère, dit-il rapidement avant de rejoindre les autres médicomages.

Le cœur de la jeune femme manqua un battement. Sa respiration se fit erratique à mesure qu'elle avançait d'un pas peu assuré vers la dizaine de brancards qui étaient disposés les uns à côté des autres, entourés par la vingtaine de médicomages qui avaient pris possession des lieux.

Elle s'arrêta à quelques mètres de la scène de carnage, la tête emplie des râles que certains Aurors lâchaient de temps à autre. Son regard passait d'un brancard à un autre, tentant vaguement de distinguer si une tête rousse se trouvait entre les patients.

Sa boule au ventre était de plus en plus insupportable, et elle sursauta lorsqu'une main se posa sur son épaule.

- Hermione, ne restez pas ici, déclara fermement Eterna Jones, une médicomage que la jeune femme respectait beaucoup.

- Non, je dois aider, je..., commença-t-elle d'une voix tremblante, tandis que ses yeux ne lâchaient pas les brancards. Elle était comme obnubilée par leur présence dans l'hôpital.

- Docteur Granger, insista Eterna d'une voix plus forte. Rentrez donc chez vous.

Ce fut le moment où tout bascula. De l'autre côté de la pièce, son prénom fut prononcé. Cela n'avait été qu'un râle, certes, mais Hermione l'entendit très distinctement. Elle se retourna abruptement, et se dirigea au pas de course vers le brancard où gisait Ron. Il était en piteux état, son torse dénudé était parcouru de bleus de diverses tailles, et son visage semblait meurtri.

- Ron..., murmura-t-elle en lui prenant la main.

Il tenta tant bien que mal de lui adresser un sourire, mais cette tentative aboutit sur une grimace éloquente : il souffrait.

- Que s'est-il passé ?, parvint-elle à demander au médicomage qui était en train de piquer le bras de Ron afin de lui administrer une potion.

- Doloris, très probablement, bien que les bleus que vous pouvez voir ne sont évidemment pas du fait de ce sort.

Hermione serra un peu plus fort la main de Ron dans la sienne, essuyant comme elle le pouvait les larmes qui commençaient à couler le long de ses joues.

- Hermione..., souffla Ron, avant d'avoir une autre grimace de douleur. Hermione, ne pleure pas. Dis à Rose...

- Non, non, non, arrête ça tout de suite, Ron Weasley, l'interrompit-elle alors que de nouvelles larmes faisaient leur apparition dans ses yeux couleur noisette. Tout va bien se passer, il faut simplement que tu te reposes...

Elle ne pouvait pas croire que Ron, son Ron, se trouvait là, allongé sur un brancard. Mais il ne pouvait pas mourir, non, il ne pouvait pas la laisser seule avec sa fille, avec leur fille.

Soudain, la main d'Eterna se posa encore une fois sur son épaule, mais Hermione ne se retourna pas.

- Hermione, laissez-les travailler, vous ne les aidez pas en restant ici, murmura la médicomage à son oreille.

- Il a besoin de moi, Eterna, il...

Tout alla très vite alors. Hermione fut tirée en arrière, contrainte de lâcher la main de Ron, tandis qu'un autre médicomage prenait sa place. Elle entendit confusément quelques termes, comme « arrêt cardiaque », « commencez le massage », tandis que la médicomage la tenait fermement dans ses bras, l'empêchant de glisser au sol. Ce fut le moment où Hermione sentit que, malgré toute sa bonne volonté, elle ne pouvait pas retenir les gens qu'elle aimait auprès d'elle : un jour ou l'autre, ces derniers s'en allaient, pour vivre leur vie de leur côté ou pour mourir.

XxX

Hermione se réveilla en sueur dans son lit, et se rendit compte que ses joues étaient trempées de larmes. Encore ce même cauchemar, ce cauchemar qui avait été terriblement réel un an plus tôt. Doucement, elle essuya ses larmes, reniflant de temps à autre. En temps normal, elle prenait des anxiolytiques afin de se calmer, au grand désespoir de ses parents, mais elle était à court de médicaments depuis quelques jours, son médecin refusant dorénavant de lui en prescrire.

Ce cauchemar, elle l'avait fait tous les soirs pendant plusieurs mois. Ce moment où la vie de Ron s'était arrêtée, ce moment où elle n'avait rien pu faire pour qu'il reste à ses côtés, ce moment de totale impuissance face à la mort... Ce jour-là, Ron était mort, aux urgences de Ste. Mangouste, après qu'elle lui ait interdit de lui dire ce qu'il voulait que Rose sache. Pendant des semaines, elle s'en était voulue, préférant focaliser son attention sur des détails plutôt que sur la dure réalité : Ron était mort.

Elle avait démissionné sur le champ, se sentant nauséeuse rien qu'à l'idée de retourner là où l'homme qu'elle avait aimé malgré ses défauts avait rendu son dernier souffle. Personne ne savait que Ron souffrait de problèmes cardiaques. Hermione pensait que Ron lui-même n'en était pas au courant. Selon Harry, qui était également présent lors de la mission mais qui s'en était par chance sorti sans blessures graves, Ron avait été torturé par Merkhov lui-même, le mage noir qu'ils traquaient alors. Son calvaire avait duré plusieurs heures, mais il s'en serait sorti si son cœur n'avait pas été aussi faible. Merkhov avait réussi à s'enfuir, profitant du chaos général afin de s'éclipser sans que personne ne s'en aperçoive.

Les funérailles de Ron eurent lieu en petit comité, le Ministère ne souhaitant pas que les méfaits de Merkhov, mais surtout l'incompétence du Ministère concernant cette mission qui avait mal tournée, ne soient connus par le monde sorcier. Molly s'était emportée, arguant que son fils méritait tous les honneurs, mais le Ministère n'avait pas cédé. Hermione n'avait rien dit, comme rendue muette après la perte qu'elle venait de vivre.

Rose avait donné l'impression de comprendre ce qui se passait autour d'elle : souvent, elle se réveillait dans la nuit, en pleurs, alors qu'elle faisait ses nuits depuis plusieurs mois déjà. Hermione se contentait de la bercer tendrement, serrant contre sa poitrine le seul vrai souvenir que Ron lui avait laissé : leur fille. Il n'avait eu l'occasion de la connaître que pendant un peu plus de dix mois. Il ne la vit pas faire ses premiers pas, ni dire ses premiers mots. Il ne la verrait pas aller à Poudlard un jour, même si Hermione y était réticente. Mais malgré tout cela, Hermione espérait que sa fille grandisse en se souvenait du héros qu'était son père : il avait été un enfant puis un adolescent insouciant, s'emportant pour des raisons futiles, mais il avait évolué en un homme charismatique et bienveillant, se souciant du bien-être de sa famille avant le sien.

Il avait été enterré à l'arrière de Terrier, près de Fred. Hermione ne s'était plus rendue sur sa tombe après son enterrement elle n'avait plus envie de souffrir à la vue de cette plaque en granit qui lui rappelait son amour perdu. Elle préférait lui parler le soir, dans la chaleur réconfortante de son lit, lui racontant les frasques de Rose. Une partie d'elle voulait croire que Ron l'entendait, qu'il était dans un lieu agréable, et qu'il lui souriait de là-haut. Elle voulait y croire.

Lentement, Hermione se laissa aller contre les oreillers et tenta de retrouver les bras de Morphée.

XxX

« Hermione Granger aperçue à Ste. Mangouste

La célèbre médicomage, connue pour ses recherches ayant abouti à des découvertes notables dans le domaine de la médecine magique, a été aperçue à l'hôpital Ste. Mangouste dans le courant de la semaine dernière. Un an après avoir qu'elle ait démissionné avec perte et fracas – une démission liée selon nos sources à la soudaine disparition de l'Auror Ron Weasley (voir notre dossier page 8) -, une employée de Ste. Mangouste nous a confié l'avoir aperçue déambulant dans les couloirs de l'hôpital.

« Elle semblait perdue, avec ses grosses lunettes et son foulard sur les cheveux. Je ne pense pas me tromper en disant qu'elle souffre d'un syndrome post-traumatique lié à la disparition de son compagnon, qui n'a d'ailleurs toujours pas donné de signe de vie depuis un an déjà. »

Notre source, qui souhaite garder l'anonymat, rajoute que le docteur Granger était connue pour ses sautes d'humeur à répétition ainsi que... »

Severus jeta la Gazette du Sorcier sur son bureau avant de se passer une main lasse sur le visage. Hermione Granger souhaitait passer inaperçue mais n'avait finalement pas réussi à ne pas attirer l'attention sur elle. Cette « employée » qui avait fait part de ses découvertes à ce torchon devait pourtant se rendre compte de l'absurdité de ses propos !

- Un syndrome post-traumatique..., grommela-t-il en surveillant du coin de l'oeil sa potion qui mijotait à quelques mètres de là.

Alors qu'il devait travailler sur le remède pour la maladie qui affectait bon nombre de patients, Severus devait également concocter de nombreuses potions nécessaires au bon fonctionnement de l'hôpital : des potions anti-douleurs en tout genre, du Poussos ou encore des potions de Mémoire.

Le Maître de Potions pouvaient presque les réaliser les yeux fermés, mais ces potions prenaient toutefois du temps, énormément de temps. C'est la raison pour laquelle il repoussait ses recherches au moment où il retrouverait Hermione.

Pourquoi l'avait-il appelée par son prénom, d'ailleurs ? Cela lui avait semblait si évident lorsqu'elle avait été sur le point de partir, mais avec le recul, Severus se demandait si cela avait été une bonne idée. La jeune femme avait par la suite commencer à l'appeler Severus également, donnant une autre dimension à leur relation, qui sortait peu à peu du cadre professionnel. Une semaine s'était écoulée depuis qu'il avait posé les yeux sur elle dans sa librairie, et il avait appris plus à ses côtés que pendant ses presque sept mois à travailler à Ste. Mangouste en compagnie de Samantha Jones.

Les méthodes d'Hermione l'impressionnaient. Elle semblait faire preuve d'un grand détachement lorsqu'ils abordaient les questions d'ordre médical, faisant la part des choses entre le relationnel et la recherche. Évidemment, c'était exactement le point de vue de Severus, mais il craignait que ce ne soit pas celui de la jeune femme : il l'avait connue plus entière, se laissant emporter par ses émotions plus que de raison. Oh, elle n'était pas une élève qui s'emportait aussi facilement que ses deux comparses, Potter et Weasley, mais elle faisait parfois preuve d'une sensibilité qui l'empêchait d'avancer dans la bonne direction. Cela ne semblait être qu'un souvenir désormais.

Et la jeune femme avait grandi, assez grandi pour fonder une famille avec Ron Weasley, le célèbre Auror qui avait disparu un an plus tôt. De nombreuses rumeurs circulaient sur ce dernier : il avait parfois été vu en Roumanie, parfois en plein cœur de Londres... Certains avançaient même qu'il était mort, mais le Ministère n'avait jamais confirmé ou infirmé ces rumeurs.

- Ce ne sont pas tes affaires, Severus, grommela-t-il pour lui-même avant de se lever afin de vérifier si la potion anti-douleur prenait bien la teinte rosée qu'elle devait avoir.

Sa potion était une des meilleures, et l'hôpital lui était fort reconnaissant de mettre ses connaissances à leur disposition. Celles de Samantha Jones prenaient plusieurs minutes avant d'agir, tandis que les siennes avaient une efficacité immédiate, ce qui lui valait les compliments et remerciements de bon nombre de patients.

Severus n'avait jamais été quelqu'un de très attentif, ni de très démonstratif. Ses débuts en tant que Maître des Potions à Ste. Mangouste avaient été laborieux, le contact – pourtant nécessaire – avec les patients le mettant terriblement mal à l'aise. Les premières semaines avaient été un calvaire, si bien qu'il s'était demandé s'il pouvait continuer à vivre ainsi, entouré de patients qui demandaient une présence constante.

Et pourtant, il avait mis de côté ses réticences, et l'arrivée à l'hôpital de Daniel Ertwing, deux mois auparavant, avait été pour lui une révélation : l'homme lui ressemblait en tout point. Non pas physiquement, mais leurs caractères étaient identiques. Daniel n'avait pas apprécié le fait de devoir rester à Ste. Mangouste, et Severus avait du user de tous ses atouts afin de faire de son séjour à l'hôpital le plus agréable possible. Daniel s'était ouvert à lui, et cela avait permis à Severus de faire la même chose. Une véritable amitié s'était développée entre eux pendant ces deux mois, et Severus comptait sur ses recherches et celles d'Hermione afin de le sauver, lui ainsi que tous les autres patients.

XxX

Lorsque Severus s'arrêta devant l'appartement de la jeune femme, il prit une profonde respiration avant de sonner à la porte. Il entendit des pleurs d'enfant avant que le visage d'Hermione n'apparaisse dans devant lui, tandis que Rose hurlait à plein poumons, blottie dans les bras de sa mère.

- Je suis désolée, soupira Hermione, elle n'arrête pas de pleurer depuis tout l'heure... Entrez donc.

Le pas hésitant, Severus entra dans l'appartement, prenant soin de refermer la porte derrière lui alors que la jeune femme tentait toujours de calmer Rose.

- Est-ce un problème d'ordre... médical ?, questionna Severus.

- Elle se plaint de douleurs à l'estomac depuis deux heures, mais le pédiatre ne répond pas pendant la nuit, et le...

Le reste de sa phrase resta coincé dans sa gorge alors que Severus s'approchait calmement d'elle, sortant sa baguette magique par la même occasion. Hermione eut un mouvement de recul involontaire, arrêtant net Severus.

- Je ne lui ferai rien de mal, promit-il à voix basse, plantant son regard ténébreux dans celui de la jeune femme.

Finalement, Hermione hocha lentement la tête et tourna Rose en direction de Severus, afin que son estomac soit visible. Les pleurs de la petite fille s'arrêtèrent net lorsque la baguette de Severus entra en contact avec son ventre, et elle lui adressa un regard interrogateur.

- Merci, Severus, souffla Hermione. Je n'ose pas utiliser la magie sur elle, j'ai toujours cette peur de mal faire après temps de temps sans avoir pratiqué.

- Je comprends, la rassura Severus.

- Je vais la coucher maintenant. Asseyez-vous, je n'en ai pas pour longtemps.

Elle disparut dans le couloir, le laissant seul dans le salon. Severus se dirigea vers le canapé moelleux et prit place, laissant son regard errer d'un bout à l'autre du salon. De nombreux cadres mettaient en scène Rose et Hermione, tandis que d'autres représentaient la famille Weasley. Un autre couple se retrouvait sur certaines photographies, et Severus en déduit qu'il s'agissait des parents d'Hermione.

Plusieurs minutes s'écoulèrent, et Hermione finit par le rejoindre, un sourire aux lèvres.

- Merci encore. Rose essayait d'ailleurs de prononcer votre prénom, sans succès, j'en ai peur, dit-elle avec un sourire alors qu'elle prenait place dans le canapé près de lui.

- Je ne lui en tiendrai pas rigueur, répondit Severus avec un rictus.

- Que direz-vous de travailler ici, ce soir ? Je ne pense pas que nous ayons besoin de chaudron ou de fioles, et nous serons plus à l'aise dans le salon, ne pensez-vous pas ?

Severus acquiesça, avant de sortir l'exemplaire de la Gazette du Sorcier du jour de sa mallette.

- Avant que je n'oublie..., dit-il d'une voix traînante en lui tendant son exemplaire.

Fronçant les sourcils, Hermione le prit délicatement, et le déplia afin de lire le gros titre. Severus nota que ses lèvres étaient pincées à mesure qu'elle avançait dans sa lecture. Après quelques minutes, elle déposa lentement le journal sur la table basse.

- Qui peut bien être cette employée, à votre avis ?, lui demanda-t-elle dans un souffle.

- Je vous retourne la question, Hermione. Qui peut bien vous vouloir du mal au point de divulguer ce genre d'informations sans vous en informer au préalable ?

Hermione laissa échapper un rire empli de cynisme avant de lever les yeux au ciel.

- Je ne sais pas, commença-t-elle sur un ton léger, semblant être à la recherche d'une réponse qui prenait du temps à venir. Samantha Jones peut-être ?

Severus revêtit son éternel rictus avant de lui répondre.

- Le contraire m'aurait étonné. Mais ne vous en faites pas, très peu de médicomages vous ayant vu ce jour-là, cette rumeur sera tuée dans l'oeuf. Je n'ai entendu personne en parler aujourd'hui, par exemple.

- Si vous restez enfermé dans votre bureau toute la journée comme je vous soupçonne de le faire, il est fort probable que vous n'ayez rien entendu, en effet, rétorqua Hermione avec un sourire. Mais peu importe... J'imagine que si je souhaite prendre part à ces recherches, il me faudra un jour ou l'autre retourner à Ste. Mangouste, à visage découvert cette fois.

Severus haussa un sourcil étonné.

- Est-ce vraiment ce que vous désirez ?

- Je ne sais pas, soupira Hermione en se triturant nerveusement les mains. Mais je ne me vois pas non plus vous faire venir tous les soirs ici, étirant ainsi vos journées de travail.

- Cela ne me gêne absolument pas, la rassura Severus de sa voix grave, son regard posé sur elle. Les conditions de travail auraient pu être pires...

Hermione se mit à rougir légèrement. Le baiser que Severus avait posé sur sa main trois nuits auparavant lui revint en mémoire, et elle secoua légèrement la tête afin de repousser ces idées de son esprit. Ce n'était décemment pas le moment ni le lieu pour avoir ce genre de pensées.

- Avez-vous de nouvelles informations, d'ailleurs ?

Severus sembla reprendre ses esprits au moment où Hermione reprit la parole, et il sortit précipitamment d'autres documents de sa mallette.

- J'ai fait quelques recherches concernant la possibilité d'un virus, ou d'un sort. Ce genre de sort de masse n'est pas fréquent, loin de là. Un virus me semble plus probable, mais je n'arrive pas à faire le lien entre les centaines de patients. Cela sera un travail qui nous prendra énormément de temps, j'en ai peur.

- Et c'est pourtant un travail que nous devons mener..., compléta Hermione en prenant la première partie des documents qu'il avait déposés sur la table basse. Nous devons écarter toutes les pistes qui ne donnent rien avant de nous focaliser sur ce qui semble logique.

- Je suis d'accord, murmura Severus. Mettons-nous au travail.

XxX

Il était tard dans la nuit quand Severus se leva du canapé, s'étirant légèrement afin de détendre ses muscles endoloris. Hermione déposa leurs deux tasses de café dans le plateau avant de se lever également.

- Il ne s'agit pas d'un virus, donc..., dit-il d'une voix ensommeillée.

- Nous n'avons pu étudier que les trois quart des patients, ne soyez pas si impatiente, Hermione.

Elle hocha la tête en souriant.

- Effectivement. Quand pourrons-nous continuer nos recherches ?

Severus eut un moment d'arrêt alors qu'il se penchait afin de récupérer sa mallette, désormais pleine de documents.

- Vous aviez parlé de venir à Ste. Mangouste, n'est-ce pas ?, tenta-t-il d'une voix douce.

- Exact... Puis-je venir dès demain ?, demanda-t-elle en penchant légèrement sa tête sur le côté.

- Évidemment, acquiesça Severus. Tentez d'être à l'heure cette fois, conclut-il sur un ton amusé alors qu'il se dirigeait vers la porte.

Hermione tourna doucement la clé dans la porte, et lui laissa le chemin libre. Mais avant que Severus ne franchisse la porte, elle se hissa sur la pointe des pieds et lui déposa un baiser sur la joue, le prenant totalement au dépourvu. Le contact entre leur deux peaux fut bref, mais assez long pour qu'il ne se pose pas la question de savoir s'il avait vraiment eu lieu.

- Bonne nuit, Severus, murmura Hermione avant de refermer la porte derrière lui, juste après qu'il ait marmonné la même chose.

Décidément, les choses ne se passaient pas comme il l'avait prévu.


Nous avons donc la réponse concernant le "mystère Ron"... N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez !

A la semaine prochaine.