Disclaimer: Cette histoire est une oeuvre de fiction basée sur le monde d'Harry Potter développé par J. K. Rowling! Aussi, tout ce que vous reconnaîtrez comme lieux, personnages et événements appartiennent à la grande prêtresse :) En revanche, l'intrigue et les OC sont à moi!

Ceci étant dit, j'espère que cette histoire vous plaira :)

Même si vous ne commentez pas tous les chapitres, j'espère que vous prendrez parfois le temps de me faire part de vos avis, de me dire les moments que vous avez trouvé intéressants !

J'essaie de mettre à jour assez régulièrement, et vos encouragements m'aident à surmonter la flemminite aiguë dont je souffre depuis des années.

Cette fic est complètement une Jily, mais comme le sous-entend le résumé, la situation de James est compliquée dès le départ donc ne soyez pas surpris si le triangle entre Lily, James et le OC ne disparaît pas au bout de trois chapitres :)

Voilà, j'espère sincèrement que vous vous amuserez à lire cette histoire :)

Bonne lecture!

GNRM


CHAPITRE 1 : La copine de Marlène - LILY


– Lily Evans ! Dans mon bureau, tout de suite !

Le cri de Mrs Casino sortit Lily de sa torpeur. Elle se hâta de contourner la table sur laquelle elle rêvassait jusqu'alors en faisant semblant de travailler, et accourut au « bureau » de son employeur, qui était en fait séparé du sien par une simple paroi de verre.

– Oui, Madame ?

D'ordinaire, Lily se traînait de ce côté de la pièce sans grand enthousiasme; Mrs Casino l'appelait rarement pour quelque chose d'assez intéressant pour qu'elle prenne la peine de masquer l'air de profond ennui continuellement peint sur son visage. Cependant, depuis quelques jours, la jeune femme bondissait au moindre appel de son employeur. Car elle attendait, espérait le projet de ses rêves, et son instinct lui soufflait qu'on allait enfin le lui confier. Aujourd'hui. Il faisait beau et chaud, la vie était belle, l'univers semblait lui signifier qu'elle aurait le fin mot de l'histoire aujourd'hui. Son cœur battait d'ailleurs vite d'excitation et d'anticipation. Son moment était surement venu. Car il ne pouvait s'agir que de cela. Il ne devait s'agir que de cela.

Lily avait en effet réuni les documents nécessaires pour l'établissement du projet de fête des noces d'argent de Mr et Mrs Brown il y avait déjà une semaine, et savait que le dossier n'avait été confié à personne encore. Or, ses quatre autres collègues étaient actuellement débordés et travaillaient déjà sur d'autres dossiers importants. Lily était la seule employée libre. La seule. Et peut-être bien que les sous-entendus très lourds et peu discrets qu'elle avait glissé ici et là dans chaque conversation, dès que l'occasion s'était présentée, avaient convaincus la patronne de lui confier cette mission. Mrs Casino ne pouvait que lui confier le dossier.

– En quoi puis-je vous aider ? demanda-t-elle aimablement.

Elle alla même jusqu'à afficher un grand sourire, qui, pour une fois, était sincère, et attendit patiemment que l'énorme femme en face d'elle, installée sur un pauvre fauteuil dont les pieds menaçaient de lâcher, daigne enfin lever la tête du contrat qu'elle était en train de lire afin de lui répondre. Mrs Casino l'ignora pendant quelques secondes, le temps d'apposer énergiquement sa signature pleine de boucles sur la dernière feuille du dossier, puis releva la tête. Ses sourcils redessinés lui donnaient en permanence un air étonné, voire ahuri, qui aurait pu faire rire si le reste de son visage n'était pas figé en des traits peu amènes qui ôtaient à quiconque toute envie d'être amusé.

– Eh bien ? aboya-t-elle. Vous êtes encore là ? Apportez-moi un café, voyons ! Vous savez très bien que j'en bois un tous les jours à quinze heures pétantes, pourtant ! Dépêchez-vous donc!

Un poids tomba dans l'estomac de Lily et son sourire s'évanouit aussitôt. Le café… bien sûr, elle avait complètement oublié. Elle parvint cependant à masquer sa frustration et sa déception, et à ressortir un sourire de façade. Elle était si près du but… Si elle lui donnait son fichu café, elle recevrait peut être son fichu projet.

– Bien sûr, Madame.

Serrant furieusement les poings, Lily tourna les talons et se rendit dans la salle de repos pour préparer la boisson. C'était la tâche qu'elle détestait le plus accomplir, car il lui rappelait bien trop cruellement les postes sous-payés de serveuse qu'elle avait occupés préalablement afin de payer ses factures.

Aller chercher des cafés pour Mrs Casino ne faisait officiellement pas parti de ses attributions: Lily avait postulé six mois plus tôt pour un poste de décoratrice dans cette agence miteuse, après deux années difficiles passées à infructueusement chercher un poste convenable une fois diplômée de Poudlard. Elle avait naïvement pensé que ses notes maximales la recommanderaient auprès des meilleures agences, mais ne s'était heurtée qu'à des portes closes. Les agences étaient en effet réticents à lui donner une chance face à son inexpérience et son jeune âge. Beaucoup s'étonnaient même qu'une jeune femme au palmarès aussi brillant ne veuille pas se professionnaliser en Médicomagie ou alors dans quelque branche prestigieuse du ministère, et trouvaient même son choix professionnel suspect. D'autres étaient carrément effrayés par ses compétences et par le salaire qu'il faudrait verser à une employée aussi diplômée s'ils en venaient à l'embaucher. Pourtant, Lily n'avait pas de prétention ni d'attente extraordinaires, mais sa bonne foi n'avait convaincu personne.

Lorsque La Bonne Fée l'avait recontactée suite à sa candidature, elle avait naïvement cru que sa chance avait tourné, mais Mrs Casino ne lui confiait que des tâches subalternes et sans intérêt, sans aucun rapport avec son poste. Cependant, Lily s'accrochait – elle était persuadée que sa patronne finirait bien par lui confier un contrat digne de ce nom afin qu'elle puisse enfin montrer l'étendue de ses talents.

Pour le moment, malheureusement, le seul talent dont elle avait pu faire preuve était celui de préparer le café et d'agrafer ensemble un paquet de feuilles préalablement correctement assemblées.

Lorsque Lily retourna dans la pièce qu'elle partageait avec Mrs Casino, elle tenta de masquer son découragement pour ne pas griller ses cartes. Après tout, peut-être que la chef envisageait de lui en parler maintenant. Elle n'avait absolument rien dit sur le dossier, il n'avait probablement pas encore été attribué et par conséquent elle conservait toutes ses chances. Mais oui, réfléchis Lily, se dit-elle intérieurement, si cela avait été le cas l'heureux élu s'en serait déjà vanté. Les projets ne pleuvaient pas sur l'agence mal cotée, et chacun redoutait de se retrouver sans client.

Lily posa la tasse sur un recoin du bureau et attendit patiemment. Mrs Casino ne leva pas les yeux du magazine de décoration qu'elle feuilletait à présent, mais ses mains trouvèrent tout de même la tasse, et elle sirota longuement son café, l'air satisfait. Lily croisa les bras. Casino pouvait l'ignorer tant qu'elle pouvait, elle ne se dégonflerait pas, pas cette fois. Au bout d'une minute dont chaque instant se fit sentir, la grosse femme ne put faire semblant d'ignorer la jeune femme qui attendait, et leva la tête.

– Oui ? demanda-t-elle sèchement, visiblement ennuyée.

Lily déglutit, mais prit son courage à deux mains :

– Je me demandais… avez-vous déjà réfléchi à la personne à qui vous confierez l'organisation des noces d'argent des Brown ?

Le cœur battant, elle observa avec impatience Mrs Casino siroter une gorgée interminable avant de lui répondre :

– J'y ai en effet réfléchi.

Lily attendit, mais la grosse femme ne semblait pas disposée à en dire plus. Elle insista cependant :

– Et donc ?

Mrs Casino leva un sourcil devant son impatience, mais ne répliqua pas. Elle avança une main dodue vers le dossier que la jeune femme avait préparé, et le parcourut rapidement avant de reprendre sur un ton bienveillant:

– Je sais que vous souhaitiez vous exercer sur ce dossier, Lily Evans, vous avez été parfaitement claire sur le sujet. Je suis très contente de voir un si bel enthousiasme chez une si jeune employée. Vous avez sélectionné d'excellents prestataires, le plan budgétaire viable... je suis réellement impressionnée. Je ne regrette pas du tout de vous avoir embauchée.

– Merci, Madame, répondit humblement Lily.

L'excitation bouillait dans ses veines. Son moment de gloire était enfin arrivé !

– Cependant, poursuivit Casino, la faisant ainsi brutalement redescendre sur terre, après mûre réflexion, j'ai décidé de le confier à Nathan Smith. Je compte le lui annoncer à la réunion de seize heures.

– Je… pardon ?

Lily en tombait des nues. Elle dut se forcer à rester polie.

– Je ne vous pas oubliée, Lily Evans. Vous n'avez pas assez d'expérience pour que je vous fasse entièrement confiance, mais vous travaillerez en compagnie de Nathan Smith pour vous faire les armes. Ou plutôt, sous ses ordres. J'espère que vous ne le générez pas dans son travail, Lily Evans, Nathan Smith est un excellent décorateur. J'attends que vous l'assistiez de la même manière que vous m'assistez. Mais ouvrez l'œil : vous pourrez apprendre deux ou trois petites choses, et s'il fait un rapport favorable à votre sujet, je vous confierai la prise de rendez-vous avec mes clients, et la gestion de mon agenda peut-être.

Devant l'air ahuri de Lily, frappée par l'horreur de la situation, elle ajouta :

– Eh bien, vous ne me remerciez pas ?

La jeune femme se força à émettre les formules attendues et rejoignit son bureau.

Des larmes de rage et d'humiliation menaçaient de couler, mais elle refusait de se laisser aller avec cette... truie à quelques mètres d'elle. Elle se contenta de trier les archives en silence, tâche qu'elle avait inlassablement répétée depuis son embauche six mois plus tôt, et serra les dents. Intérieurement, elle imaginait mille façons de torturer Casino, mais savait que même si l'envie était très alléchante, elle devrait se contrôler. Elle était coincée dans un cercle vicieux : les boîtes dignes de ce nom dans le secteur de la décoration magique ne l'engageraient pas sans une expérience professionnelle, et la seule boutique disposée à lui laisser en avoir une n'était qu'une enseigne insignifiante. Si elle restait, elle perdait son temps. Si elle partait, on ne l'embaucherait pas ailleurs dans ce domaine.


JE N'ARRIVE PAS A Y CROIRE ! s'exclama Lily, furieuse, quelques heures plus tard.

Devant sa mine déconfite, son collègue, le fameux Nathan Smith, l'avait invitée à boire un verre pour lui changer les idées à la sortie du travail. Ils avaient leurs habitudes au Trois Balais, mais avaient décidé sur un coup de tête de changer d'environnement et d'essayer un nouveau bar dont ils avaient repéré la publicité dans la presse. Le pub en question était agréable et commençait seulement à se remplir, mais ils étaient parvenus à trouver deux chaises au bar et sirotaient des cocktails colorés. Nathan était sincèrement désolé pour la jeune femme, et s'était battu lors de la réunion de groupe afin qu'elle obtienne le droit de réellement travailler avec lui sur le projet Brown, ce dont elle lui était reconnaissante.

– Et elle ose me dire qu'elle ne me fait pas confiance ! reprit-elle. Je me sens vraiment exploitée! Depuis que je suis arrivée, elle a aimé chacune de mes propositions, suivi chacune de mes suggestions ! Angie est même en train de mettre en œuvre un projet que j'ai imaginé toute seule, et qu'elle n'a pas voulu me confier !

– Elle pense seulement que tu manques encore un peu d'expérience, tenta Nathan avec douceur. Sois patiente.

– Et comment veut-elle que j'en gagne si elle ne permet que de faire du café ? rugit Lily. J'en ai vraiment assez de ce travail ! Elle refuse même de me confier l'organisation d'anniversaires de gamins !

– Ne baisse pas les bras, dit sévèrement Nathan. Tu es douée pour ce métier, tu as toujours tellement d'idées. Les noces des Brown vont te permettre de faire tes preuves. Je suis certain que tu seras géniale sur ce projet. Tes premières recherches sont plutôt impressionnantes.

Le visage de la rouquine s'éclaira.

– C'est vrai?

– Bien sûr! J'ai pas demandé à travailler avec toi simplement parce que je t'aime bien, je l'ai fait parce que je pense que tu as vision fraîche et atypique des choses qui pourraient aider à rendre ce projet exceptionnel. Ma tante sera alors obligée de reconnaître que tu as beaucoup de talent et de te confier plus de projets. Soit patiente, moi aussi, lorsque j'ai commencé, c'était très difficile…

Il posa sur l'épaule de Lily une main qui se voulait réconfortante, mais qui s'éternisa un peu trop au goût de la jeune femme. Cela eut au moins pour avantage de lui ôter immédiatement toute envie de se plaindre plus longtemps. Elle ne voulait pas qu'il se croie permis de pouvoir la consoler de façon aussi familière.

Nathan était l'un de ses anciens camarades de classe, et elle avait eu la bonne surprise de constater qu'ils travaillaient dans la même entreprise lors de son premier jour. Ils n'avaient jamais été proches à Poudlard, mais s'étaient découvert des affinités en devenant collègues et rapidement amis. Nathan était le seul employé de l'agence à ne pas laisser ses envies de promotions l'empêcher de se montrer bienveillant envers Lily, et cette dernière appréciait tellement sa compagnie qu'ils passaient souvent quelques heures ensemble après le travail. Elle n'ignorait cependant pas qu'il nourrissait des sentiments concrets envers elle, mais s'appliquait à les ignorer royalement pour garder son amitié.

– Je sais, répondit-elle dans un soupir. Tu as raison.

Elle se redressa sur son siège, se mettant ainsi subtilement hors de portée de la main de son ami, et but une nouvelle gorgée de Bierraubeurre.

– Je suis désolée, je ne suis pas de très bonne compagnie, aujourd'hui, reprit-elle en se passant la main dans les cheveux.

– Ça ne me dérange pas du tout, assura Nathan avec un sourire moelleux. Et puis, je t'ai invitée pour ça, non ?

Lorsqu'il étirait les lèvres, de petites fossettes se dessinaient et accentuaient son charme indéniable. Il était plutôt beau garçon : ses yeux verts, d'une nuance plus claire que ceux de Lily, étaient soulignés par de longs cils bruns de la même couleur que les boucles soyeuses qui poussaient sur sa tête bien faite. Malgré sa robe de travail, Lily devinait sans mal sa carrure prononcée et fort admirable, héritage de son passage dans l'équipe de Quidditch de Serdaigle à Poudlard. Oui, Nathaniel Smith était indéniablement séduisant, mais Lily n'avait jamais ressenti la moindre inclinaison pour lui. Et son caractère très agréable ne suffisait pas à pallier ce manque d'attirance physique. Il était un ami, et puis c'est tout.

La colocataire de Lily, Marlène McKinnon, l'avait traitée de folle et autres surnoms tout aussi affectifs la première fois qu'elle avait rencontré Nathan. Marlène avait trouvé le jeune homme absolument délicieux, et seule son intime conviction qu'il serait parfait pour son amie l'avait retenue de proposer au bel Apollon de reporter ses attentions sur elle. Lily l'avait bien dit et répété de maintes fois qu'elle n'était inexplicablement pas attirée par Nathan, et que ne serait-ce qu'imaginer l'embrasser lui était insupportable, Marlène ne voulait rien entendre : Nathan était parfait pour Lily, et cette folle finirait par ouvrir les yeux.

– Tu es un amour, dit Lily avec un sourire. Mais changeons de sujet, parle-moi de toi. Comment ça va en ce moment ? J'espère que ça se passe mieux avec tes parents... Dis moi tout.

Nathaniel était issu d'une famille ancienne et riche, qu'il avait récemment contrarié en abandonnant ses études de droit afin de travailler comme organisateur d'événements. Une fois remis de son infarctus, son grand-père l'avait déshérité dans l'espoir de lui faire changer d'avis, mais fort heureusement il avait obtenu plus de soutien de la part de ses parents. Ces derniers s'étaient finalement résignés à son choix professionnel, qu'ils considéraient tout de même comme passablement honteux, mais insistaient afin que Nathan maintienne une vie sociale digne de son rang.

Nathan haussa les épaules, l'air indifférent.

– Oh, ais je n'ai rien de spécial à raconter. Ma mère est toujours en plein préparatifs du bal de l'Équinoxe et elle me harcèle pour que je me choisisse enfin une cavalière.

– Elle a raison, c'est tout de même dans un mois, et elle voudra prendre le temps de faire dessiner la robe de l'heureuse élue pour que tout soit parfait. Pourquoi tu ne te décides pas ?

– J'aurais aimé inviter une personne qui me plaise vraiment, dit Nathan avec un soupir.

Lily se redressa sur sa chaise, mal à l'aise. Le jeune homme l'avait invitée quelques semaines plus tôt, assurant que ce ne serait qu'en tant qu'amis, mais Lily avait prétexté un engagement pour ne pas avoir à l'accompagner. La mère et le fils Smith l'appréciaient beaucoup trop pour qu'elle prenne le risque de leur donner la moindre miette d'espoir. La déception de Nathan avait été cruelle et évidente, mais il avait gardé bonne figure devant la jeune femme. Un vrai gentleman.

– Je croyais que tu n'y accordais pas tant d'importance, à ce bal ? le taquina-t-elle gentiment.

– Je déteste les fêtes de ma mère, mais étant donné que je suis obligé d'y assister, autant y aller en bonne compagnie.

– Pourquoi tu n'invites pas Alexandra ? demanda Lily avec curiosité.

Alexandra Price était une amie d'enfance de Nathan qui venait souvent le chercher à la sortie du travail. Elle se comportait de façon très sèche avec Lily, l'objet de toutes les convoitises de son meilleur ami. Ironie du sort, Nathan n'ignorait pas les sentiments qu'elle avait pour lui mais n'était aucunement intéressé par la belle brune.

– J'ai peur qu'elle se fasse des idées si je l'invite, qu'elle l'interprète mal et pense qu'elle a une chance avec moi.

Lily se retint de rire, et afficha plutôt un air qui se voulait compatissant.

– J'ai une très jolie copine à te proposer si tu n'arrives pas à te décider, dit-elle avec enthousiasme.

– Proposes toujours.

– Tu te souviens de mon amie Marlène ? Elle te trouve carrément mignon et je pense qu'elle serait ravie de t'accompagner. Si ça t'intéresse, je peux lui demander si elle est libre.

– Euh… pourquoi pas, dit Nathan sans grand enthousiasme.

Lily porta son verre aux lèvres. Au même moment, un client bruyant accoudé au bar près d'elle rit fort et eut un geste brusque, si bien qu'elle renversa quelques gouttes de boisson sur sa robe. Son voisin se tourna aussitôt vers elle et se confondit en excuses :

– Oups ! Je suis vraiment désolé, mademoiselle ! s'exclama-t-il de sa voix forte en lui tendant une serviette. Toutes mes excuses.

– Ce n'est pas grave, répondit-elle

En croisant le regard de Lily, l'attitude de l'inconnu changea totalement, comme si l'on avait pressé un bouton : il esquissa un sourire en coin qui se voulait charmeur et ajouta d'une voix suave :

– Je voulais dire : je suis vraiment désolé, très jolie demoiselle.

Lily fronça les sourcils, mais décida de l'ignorer et se contenta d'accepter le mouchoir pour éponger sa robe. Pendant qu'elle s'affairait, elle réalisa que l'homme la fixait toujours. Aussi, elle leva les yeux, l'air ennuyé, croyant avoir à faire à un séducteur persistant lambda. Elle était décidée à lui donner une leçon primaire de bonnes manières, mais se retint en constatant que l'homme avait abandonné son sourire enjôleur pour une expression de perplexité singulière.

– Euh… Oui ? finit-elle par demander sur un ton incertain, devant le silence qui s'éternisait.

Elle se demanda même si elle n'avait pas quelque chose de coincé entre les dents, tant il la fixait intensément, et se passa le plus discrètement possible la langue dessus.

– C'est bizarre, répondit-il lentement, mais j'ai vraiment l'impression de vous connaître.

En d'autres circonstances, elle aurait suspecté une tentative de séduction, mais il semblait toujours aussi sincèrement intrigué. Lily lui accorda plus d'attention, et lui trouva également un air familier. Il s'agissait d'un jeune homme d'apparence très séduisante, et d'à peu près le même âge qu'elle. Il portait les cheveux longs, qu'il laissait retomber élégamment sur ses larges épaules, avait des yeux d'un gris profond et des traits parfaitement dessinés. Il était beau, très beau, et elle n'avait d'ailleurs rencontré qu'un seul homme d'une beauté aussi ravageuse que la sienne de toute sa vie. Elle le connaissait, en effet, l'avait même côtoyé pendant quatre ans, et s'étonna de ne pas l'avoir reconnu plus tôt.

– Sirius Black ! s'exclama-t-elle, stupéfaite, au moment même où il s'écriait : « Lily Evans ! »

Lily replaça une mèche derrière l'oreille, nerveuse et se sentant légèrement fébrile à cause de ces retrouvailles inattendues. Sirius Black. Woaw.

– Incroyable ! poursuivit-il en écarquillant les yeux, et en l'observant de haut en bas. Tu as complètement… fondu depuis le lycée, je veux dire : t'es superbe ! Woaw ! Je me souviens de toi, la copine à Marlène ! Qu'est-ce que t'as changé !

Il se confondait en compliments, mais Lily ne savait pas très bien si elle devait se sentir flattée ou agacé qu'il soit aussi impressionné par sa perte de poids depuis son adolescence (et qui, d'ailleurs, n'était pas aussi conséquente que ce que ce goujat insinuait ! pensa-t-elle férocement). Cependant, une chose était certaine dans tout ce qu'il avait dit : elle n'avait jamais aimé qu'on réfère à elle comme étant « la copine de Marlène ». C'était comme si elle n'avait pas d'identité propre si ce n'était que par sa qualité d'amie de la bombe du collège. Ayant passé toute sa scolarité à devoir rappeler son nom à tous ceux qui la rencontraient, elle appréciait moyennement ce surnom, bien qu'elle n'en ait jamais voulu à Marlène.

– Euh, merci, dit-elle, un peu mal à l'aise. Toi, tu… n'as pas changé du tout.

Sirius Black avait été l'un de ses camarades à Poudlard. Ils n'avaient jamais été proches car il avait trois années de plus qu'elle, cependant, comme tous les contemporains de la jeune femme, personne n'ignorait qui il était. C'était Sirius Black. Il était l'un des élèves les plus populaires, brillants et beaux de sa génération, mais en réalité Lily ne l'avait jamais apprécié. Elle avait même été l'une des rares personnes, exception faite des Serpentards, à ne pas avoir eu une admiration sans borne pour lui, et probablement la seule fille à ne pas tomber en pâmoison sur son passage. Lily l'avait toujours trouvé trop conscient d'être populaire, brillant et beau, et cela lui avait conféré une insupportable arrogance qui avait définitivement immunisé Lily à son charme. A l'époque, Marlène l'avait une fois de plus taxée de « folle à lier », tant elle le trouvait magnifique et ne comprenait pas l'entêtement de son amie.

– Ben qu'est-ce que tu deviens ? s'exclama Sirius, tout sourire, en prenant place sur le tabouret à côté d'elle. C'est dingue ! Tu fais quoi, toute seule, dans ce pub ?

– Euh… Je ne suis pas seule, protesta Lily. Je te présente mon…

Mais Sirius ne l'écoutait déjà plus, tout excité par cette rencontre fortuite. Il se mit à faire de grands gestes vers le fond de la pièce.

– Les mecs ! hurla-t-il à un groupe de garçons installés à une table, par-dessus le brouhaha de la foule. Regardez sur qui je viens de tomber ! Vous n'allez pas le croire !

– Euh, Sirius…

Deux des amis de ce dernier approchèrent, perplexes, tandis qu'un troisième se dirigeait vers les toilettes. Lily les reconnut beaucoup plus rapidement que Sirius. Ils avaient beaucoup moins changé depuis Poudlard.

– Regardez, c'est Evans ! dit Sirius d'une voix surexcitée. Elle était avec nous à Poudlard ! En quatrième ou cinquième année quand on passait nos ASPICs!

– Qui ça ?

La copine à Marlène !

– Tu rigoles ! Où ça ?

– Mais là, idiot ! La superbe nana en face de toi !

– OOOOH, C'EST DINGUE ! s'écria le premier en la reconnaissant, qu'elle identifia comme étant Remus Lupin, le moins désagréable du groupe. Ça va Lily ? T'as vachement changé !

Lily serra à contre cœur la main qu'il lui tendait. Remus était très grand et bâti finement. Elle l'avait connu très réservé, mais il avait les joues rouges et elle en conclut que l'alcool l'avait débridé. Tout comme son ami, avec ses cheveux châtains hirsutes et sa barbe de trois jours, il avait un certain charme, dans le style bucheron. Il recula pour laisser place au deuxième ami, plus petit et beaucoup moins charismatique, dont l'apparence banale contrastait complètement avec les deux premiers. Elle mit quelques temps à se souvenir de son nom : Peter Pettigrow.

– Content de te revoir, Lily, dit-il timidement.

– Salut, Peter, salua-t-elle en lui serrant la main.

– C'est vrai que t'as beaucoup, beaucoup maigri, ajouta Peter en hochant la tête d'un air appréciatif.

Il pensait faire un compliment, mais ne parvint qu'à froisser la jeune femme.

– C'est ça, merci, dit-elle d'une voix raide.

– Tu viens boire un verre avec nous, proposa aimablement Remus. Ce serait sympa d'avoir de tes nouvelles.

– Je ne peux pas, tenta de nouveau Lily, je ne suis pas seule. D'ailleurs, je vous présente…

Mais une fois de plus, elle fut interrompue.

– Ben qu'est-ce que vous foutez là ? s'étonna une quatrième voix qui passa la tête entre Sirius et Remus. Vous m'avez acheté un verre ?

Lily se raidit de nouveau, mais pour des raisons différentes. Son poil se hérissa sur le bras. La quatrième personne, la quatrième voix, elle l'aurait reconnue entre mille. Elle détestait son propriétaire, qui se trouvait être l'être qu'elle avait méprisé le plus au monde au temps où elle étudiait : le populaire et odieux James Potter, qui avait passé sa jeunesse à faire des blagues stupides à tout le monde et à l'ignorer complètement lorsqu'il s'adressait à Marlène. Ses frasques répétées s'étalant sur les pages des magazines féminins dont raffolait Dorcas Meadowes, l'autre meilleure amie de Lily, indiquaient qu'il avait probablement peu changé depuis Poudlard.

– Regarde sur qui on vient de tomber : c'est Lily Evans ! dit Remus d'une voix surexcitée.

– Qui ça ? dit Potter d'un air absent.

Lily sentait l'agacement monter en elle. Étrangement, cette phrase venant de Potter l'énervait beaucoup plus que provenant des autres.

– Tu sais, la copine de Marlène ! insista Sirius. Celle dont Peter était amoureux lorsqu'on était en septième année.

Peter devint rouge pivoine et sembla vouloir disparaître sous terre. Lily rougit et fronça les sourcils. Elle avait oublié, mais effectivement Pettigrow avait eu un petit faible pour elle. Elle se souvint aussi l'avoir repoussé sans douceur, dégoûtée par tout ce qui avait un lien de près ou de loin avec Potter.

Peter se fit légèrement charrier par ses amis, qui éclatèrent de rire devant sa gêne, mais très vite l'attention se reporta sur Lily. Potter plissa le regard en observant la rousse jusqu'à ce que son cerveau dépoussière l'image qu'il avait floue de la petite rousse ronde qu'auparavant il croisait en effet de temps en temps dans la salle commune de Gryffondor.

– Ah oui ! Evans ! dit-il, très content de l'avoir identifiée. Bien sûr. Ça me revient.

Il la regarda sans gêne de haut en bas et hocha la tête d'un air appréciateur. Lily lui jeta un regard noir. Dieu, ce qu'elle le détestait !

– Eh bien, je ne t'aurais jamais reconnue, s'exclama-t-il avec un sourire charmeur. Tu es devenue une très belle femme, dis donc. Très, très jolie…

– Salut, Potter, dit-elle sèchement. Toi par contre, tu n'as pas changé.

Il ne perçut pas, ou décida d'ignorer, le sarcasme pourtant évident de la voix peu avenante de Lily, pour se frayer un chemin jusqu'à elle entre ses amis.

– Ça doit faire quoi, cinq ans, six ans qu'on s'est pas vus ?

– Je suppose, dit-elle vaguement.

Elle espérait que le ton glacial de sa voix lui ferait comprendre qu'elle n'avait aucune envie de renouer aucune sorte de contact avec lui d'une part et qu'elle souhaitait couper court à la conversation d'autre part, mais Potter semblait si impressionné par sa nouvelle apparence qu'il lui accordait cette particulière attention qu'il ne réservait qu'aux belles femmes.

– En tout cas, je suis très content d'être tombé sur toi, dit-il sans se démonter. Tu viens boire un verre avec nous ?

– Désolée, dit Lily en se levant brusquement, surprenant les quatre amis. En fait, je comptais y aller. Je travaille tôt demain. Pas vrai, Nathan ?

– Tout à fait, dit celui-ci, qui n'avait pas apprécié d'être ignoré tout au long des retrouvailles. J'allais te le proposer. On y va ?

Il bondit de sa chaise et aida Lily à remettre sa veste d'un air très protecteur. Potter les regarda en silence tout le long, tout sourire ayant déserté de son visage.

– C'est ton copain ? demanda-t-il sans cérémonie.

– Quoi ? Non! répondit aussitôt Lily, choquée par tant d'aplomb.

Du coin de l'œil, elle perçut la déception de Nathan mais décida de l'ignorer. Après tout, c'était la vérité. Le pauvre avait surement compris que l'idée même d'une telle union le dégoûtait... Elle s'excuserait plus tard.

Potter ne put retenir un petit sourire satisfait.

– Et je ne vois pas en quoi ça te concerne, d'ailleurs, ajouta-t-elle d'une voix tranchante.

– C'était juste pour savoir, dit-il d'une voix évasive. En tout cas, ça m'a fait plaisir de te revoir.

– C'est ça, dit Lily en prenant son sac. Eh bien, à la prochaine, lança-t-elle au groupe avant de s'éloigner.

Non mais quelle poisse, vraiment ! Voilà ce qui arrivait lorsqu'on changeait de bar! Ne jamais changer ses habitudes! Elle espérait intérieurement qu'il s'écoulerait encore des années avant qu'elle ne les croise de nouveau.

Elle ignorait encore qu'il se passerait à peine quelques heures avant qu'elle ne croise de nouveau la route de James et de ses amis. Et qu'il ne se passerait plus jamais plus de quelques heures pour qu'elle le croise, encore, et encore, et encore.

Ce n'était, malheureusement pour elle, et pour Nathan, que le début.