Dans une cité chaleureuse et verdoyante, une jeune fille à la peau lumineuse se tenait debout dans le parc devant un rosier en fleur. Ses cheveux ébènes et bouclés descendaient en cascade dans son dos. Une fine broche en or retenait ses mèches rebelles. Ses prunelles de braise contemplaient les roses. Elle portait une robe blanche. Bien que c'était l'hiver, la jeune adolescente ne ressentait aucunement le froid. Bientôt la neige allait tomber. Et Noël approchait à grand pas. Même si sa "famille" ne la fêtait pas, elle aurait aimé avoir un foyer plus chaleureux. Le château, où elle vivait, avait une atmosphère lugubre et menaçante. Elle rêvait de partir... Oui... Elle en rêvait...
Le crépuscule tombait lentement pour faire place à la nuit. La jeune fille soupira. Comme si la vie l'ennuyait. Comme si l'objet de ses désirs lui avait arraché. Trop soudainement.
Délicatement, la jeune fille cueillit une de ses fleurs en faisant attention à ne pas se faire piquer. Elle fit une moue dubitative. Elle appuya son doigt sur une des épines que possédait la rose.
"_ Abîmer vos doigts par cette fleur risque de vexer votre père, Princesse, fit une doucereuse et masculine."
Comme si elle devait faire attention à ce que son père disait. Elle leva les yeux au ciel. Son interlocuteur l'observait avec sérieux. Il n'était pas spécialement grand. Il avait une taille raisonnable. Cet homme avait un visage angélique mais extrêmement pâle pour un humain. En-dessous de ses yeux rougeâtres, de longs cernes violet étaient présents. Comme s'il s'amusait à jouer avec son état de santé. Il était habillé tout de noir.
"_ Ce n'est pas lui qui sera blessé. Alors qu'est-ce que cela peut bien lui apporter? Répondit-elle avec un certain mépris dans la voix."
Ce garde, gentil mais ô combien dangereux, était un joyau pour le paternel de cette jeune fille. Effectivement, il possédait un don. Un don mortel dont la jeune fille ne voulait pas en être la victime. Elle l'appréciait mais sans plus. Dommage qu'il écoutait son Maître avec une pareille dévotion, elle aurait pu... L'aimer un peu plus que cela...
L'adolescente n'avait jamais apprécié son père. Et elle ne pourrait jamais lui pardonner ce qu'il avait fait à sa mère biologique. Jamais. Elle le détestait plus que tout. Bien évidemment, il le savait et tentait de se faire racheter. Mais le mal était fait. Rien ne pourrait être comme avant. Et encore...
"_ Il m'a envoyé pour vous dire de vous préparer. Les invités de ce soir attendent votre venue avec impatience. Que dirait votre mère si jamais elle vous voit dans cette tenue?"
Qu'est-ce que sa "mère" faisait dans la conversation? Sa vraie mère était morte. Et ce n'était pas celle, qui l'avait adopté, qui allait la sermonner sur son style vestimentaire.
"_ Vous savez qu'aujourd'hui est un grand jour pour vous. Vous allez..., reprit le garde.
_ Oui. Je sais. C'est pour me présenter devant votre communauté. Pour faire partie des vôtres, interrompit-elle, glacialement.
_ Qu'est-ce qui vous énerve, Princesse? Votre père serait blessé de savoir dans quel état vous êtes.
_ Mon père se contrefiche de mon état. Et tu sais pertinemment la source de mon énervement, Alec Volturi!"
Le dénommé Alec Volturi émit un long soupir et n'insista pas. Les deux personnes se retournèrent sous le grincement silencieux des cailloux. Un autre homme venait. Beaucoup plus grand. Sa stature était plus imposante.
"_ Votre père savait que vous alliez dire cela et m'a envoyé pour vous escorter, fit le nouvel arrivant.
_ Tu es sûr que c'est vraiment escorter et pas tenir en laisse comme un vulgaire toutou qu'il a prononcé ? Rétorqua-t-elle, de mauvaise humeur. Je n'aime pas ce genre de soirée. Je ne vois pas pourquoi je viendrais. Je ne suis pas un chien qui doit faire le beau quand son maître claque des doigts."
Cela avait fait grincer les dents des deux autres hommes. Qu'importe! Elle aimait les provoquer. D'ailleurs c'est ce qu'elle réussissait le mieux. Mais le plus jouissif, c'était de mettre en colère son père. Ah ça! C'était bien un événement qu'elle ne voulait pas rater. Elle eut un sourire. Un sourire où on pouvait lire sa malice.
"_ Votre mère vous attend dans vos appartements. Elle m'a l'air très remontée contre vous, continua le géant.
_ Très bien. Je vous suis, céda-t-elle en faisant mine d'être vaincue."
Alec l'observa un moment. Il se méfiait de ce que cette fille pouvait manigancer. Elle arrivait toujours à ses fins. Surtout quand elle avait une idée bien en tête. Et là, c'est bien ce qu'il l'inquiétait. Qu'est-ce qu'elle allait bien faire pour tourmenter les Seigneurs de Volterra? Les rois du monde des vampires? Les deux vampires l'emmenaient vers ses appartements. Une grande dame à la longue chevelure doré et aux prunelles de feu l'accueillit avec un certain mécontentement. Sa "mère".
"_ Je me demandais quand tu allais daigner arriver, fit-elle, quelque peu en colère.
_ Calmez-vous, ma mère. Je suis arrivée, n'est-ce pas le plus important?"
Sa mère adoptive la foudroya du regard. Sa fille fit comme si rien ne s'était passé. Comme à son habitude.
"_ Commençons autrement nous serons vraiment en retard.
_ Au pire, ce n'est guère important. Il y aura tellement de monde qu'on ne remarquera même pas notre absence, rétorqua-t-elle.
_ Bien au contraire, Isis, nous sommes la famille royale, notre absence sera tout de suite pointée du doigt."
La jeune fille soupira. Encore ce nom... Ce n'était pas le sien. Elle ne l'avait jamais considéré comme le sien.
"_ Et tu sais bien que ton père n'apprécie guère que l'on soit en retard.
_ Oui, je sais, dit-elle en faisant une mine désolée."
Sa mère adoptive la conduisit vers un paravent. Plusieurs robes de soirée étaient suspendues à des cintres. La première qu'elle essaya était une longue robe fourreau en mousseline. Elle était noire et assez sobre. Elle la présenta devant la vampire.
"_ Tu es belle ainsi, Isis, se réjouit-elle."
La dénommée Isis fit une moue peu convaincue. Son habit était trop sombre. Elle n'aimait pas. Elle retourna derrière le paravent. La deuxième qu'elle saisit était une robe noire... Ses parents aimaient le noir car c'était une couleur noble pour eux. Et qui reflétait aussi leur nature. La jeune fille ne le niait pas. Mais ce n'est pas le noir qui la mettait en valeur. Cette robe soulignait ses formes mais... Ce n'était pas son coup de coeur. Elle remit la robe sur son cintre. Une troisième robe... Au bonheur de la jeune adolescente, le vêtement n'était pas noir mais rouge. Mais elle ne l'essaya pas. Le rouge lui faisait rappeler le sang de ses victimes. Ce n'est pas qu'elle a pitié des humains qu'elle tuait, non. C'est juste que le rouge revenait bien trop souvent dans les soirées entre vampires. C'est ce que sa mère ne cessait de lui répéter.
"_ Pourquoi ne l'essayes-tu pas?
_ Le rouge revient trop souvent lors de ces soirées."
Evidemment, la vampire secoua négativement de la tête. Qu'est-ce que sa fille pouvait bien l'énerver quand elle avait quelque chose en tête. Les deux femmes entendirent les pas déterminés venir vers leurs appartements.
"_ Les Maîtres vous attendent, fit une voix féminine.
_ Isis, tu as intérêt à te dépêcher avant que je ne choisisse moi-même ta robe pour cette soirée, s'énerva-t-elle.
_ Voulez-vous que j'en fasse part au Maître, Madame?
_ Non, Heidi. Dîtes lui de patienter encore quinze minutes.
_ Bien, Madame."
L'adolescente saisit une autre robe. Une bleue royale et en mousseline. Cela lui plaisait bien. Elle mettait sa silhouette en valeur. Elle avait des manches qui retombaient sur le bas de ses épaules. Son décolleté était arrondie mais pas profond. La jeune fille la montra à sa mère adoptive.
"_ Es-tu décidée à la portée?"
Sa fille se mit devant un miroir et se contempla. Elle fit un demi-tour sur elle-même. Pour voir ce que cela donnait.
"_ Peut-être...
_ Peut-être? Isis... Oui ou non?"
Sa mère espérait que la réponse serait oui. Mais au lieu de cela, la jeune fille retourna derrière le paravent. Au grand dam de sa mère. Elle attendit plusieurs minutes avant de se décider à garder la robe qu'elle portait actuellement. Quelqu'un venait. Sa démarche était rapide. La jeune fille avait reconnu à qui ces pas appartenaient. Cela lui arracha un sourire satisfait. Elle sentait qu'elle allait bien s'amuser.