Hello,

Je vous parle en bas de page, je ne veux pas vous retenir.

Juste un petit point d'éclaircissement : pour moi Harry meurt quand il arrive à Pré-au-Lard avec Ron et Hermione après s'être infiltré dans Gringotts.

Je parle de la mort de Fred et des autres Weasley, qui arrive plus tard dans cette histoire.

Je suis désolée s'il y a plein de petites fautes, je voulais publier avant de tout effacer encore une fois. J'y reviendrais surement.

Bonne lecture,

Ne m'en voulez pas,

Surtout toi Lil's,

A-L


La salle est blanche, le silence est rouge.

«

- Est-ce que je suis morte ?

- Je ne sais pas, je ne suis jamais mort.

- Tu es un ange alors.

- Pardon ? Est-ce que c'était vraiment une question ?

- Là d'où je viens, les garçons n'ont pas des yeux comme les tiens.

- Ils sont comment leurs yeux ?

- Injectés de sang ou cernés. Parfois les deux. Souvent déshumanisés. Les tiens, ils ont gardé leur pureté. Tu les as lavé ? Peut-être que tu as juste beaucoup pleuré.

- Peut-être que j'ai juste de beaux yeux.

- Inutile de chercher à me séduire. J'ai un petit ami, tu sais.

- Ah oui ?

- Ouais, il vient de me tuer.

- Rose, je crois qu'on peut convenir que tu n'es pas morte.

- Non. Sinon tu es réel et si tu es réel je dois faire attention à ce que je dis. Je suis tellement fatiguée de faire attention.

- Que tu sois en vie ne veut pas dire que je sois réel.

- Tu me fais mal à la tête.

- Tu t'es pris un sérieux coup, tu devrais peut être changer de petit ami.

- Sans doute, mais tu sais ce que c'est… Il faudrait avant changer de vie, changer de galaxie, changer tout ce qui nous nuit, cette constante nuit. Autant le garder, je veux bien le tuer mais pas nier ce qui nous unie.

- Je crois que je vois ce que tu veux dire. Je suis fatigué de changer le monde.

- Toi aussi tu as un petit ami ?

- Une petite amie. La plus belle femme du monde.

- Alors tu n'existes pas. La plus belle femme du monde c'est ma sœur.

- C'est bien ce que je dis.

- Tu es l'amant mystère d'Adastré ?

- Je suis ton ami mystère aussi, Rose.

Je ne vous ai pas tout dit. Pardon, j'étais occupée à rester en vie.

- Le pourvoyeur de dragon ?

- J'aime ce nom.

On entend un grand boum dehors. Ça fait un sacré bruit la mort.

- Des gens meurent dehors.

- Des gens meurent demain et hier. Des gens meurent. Tu veux faire une partie d'échec ?

- Pourquoi faire une partie ? Ma vie est une totalité d'échecs. Tu sais, j'ai vraiment cru… Je suis stupide. Je pensais vraiment avoir trouvé un ancien contact de mon oncle Charlie, un moyen de faire rentrer des dragons dans Poudlard, d'enflammer tous ces connards. J'écrivais juste à Voldemort et un de ses bâtards.

- Tu prononces son nom.

- Le taire à quoi bon ? Il est là, il va tous nous tuer, je t'ai dit, j'en ai assez de faire attention.

Un échiquier apparaît. Une table. Deux chaises. Je dois être morte. Les choses n'apparaissent pas dans ma vie, elles disparaissent.

- Tu t'entendrais bien avec ma mère. Elle est toujours en colère.

- Elle doit avoir ses raisons.

- C'est ta tante qui m'a demandé de t'envoyer ces lettres. Elle était très impressionnée par ton petit plan, tu sais ça aurait pu marcher.

- Heureuse d'avoir distrait la reine.

Il a un petit rire et commence à bouger ses pions. Il serait temps que je réfléchisse aux miens.

- Elle fait attention à son héritière.

- À sa bouffone.

- Le terme n'existe pas au féminin.

- Passer pour une idiote en disant la vérité n'est pas un job pour une femme, c'est sa vie. Qu'est ce que je verrais si je sortais d'ici ?

- Ginny Weasley. À tous les coins de couloir.

- Tu me laisserais sortir ?

- Non. C'est la guerre dehors.

- C'était déjà la guerre hier.

- Je suis ton ange gardien, non ?

- Tu es dans la résistance, tu n'es pas un ange.

Il a un petit sourire sur le côté. Oh Adastré, si ce qu'il dit est vrai, je vois ce qui t'a fait craquer. Moi, j'ai passé l'âge de me laisser séduire par les sourires taquins de beaux bruns, j'ai déjà dérapé.

- Tu me plais bien, Rose Weasley. On m'a beaucoup parlé de toi. Enfin, si je peux dire que Scorpius parle beaucoup. Tu le connais. Il est plus du style à froncer les sourcils et lever les yeux aux ciels comme si sa malédiction était d'être entouré de véracasses inférieurs à sa majesté. Ouais, Scorpius ça doit être ma personne préféré du monde entier. Et ça fait sept ans qu'il ne parle que de toi, j'étais pressé de te rencontrer.

- Tu es un espion.

- Tu l'as dit toi-même, Rose, il n'y a pas d'anges. Il n'y a pas de camps. L'ordre est mort et le désordre a renié ses cendres un soir de décembre. Il n'y a pas de méchants et de gentils, il y a la survie.

- Crois-moi. Il y a des teintes de noir plus foncés.

- Et le blanc s'est délavé. Au milieu, crève la liberté.

- La liberté. C'est drôle comme idée. C'est vraiment une préoccupation du coté blanc. Moi parfois, je me battais juste pour respirer, alors ma liberté…

- Tu as survécu.

- Sans le fils du diable je n'aurais pas pu. Tu sais, je crois que le noir m'a délavé.

- Tes cheveux sont rouges, Rose Weasley. Il fut un temps, cela voulait dire quelque chose.

- Les temps se finissent ce soir, tu n'entends pas ? Je vais sortir, tu sais, même si je dois écraser ton corps.

- Tu as déjà tué quelqu'un, Rose ?

- Non, mais je suis déjà morte plusieurs fois. Ça doit compter, non ?

- Tu n'as senti que ta vie quitter tes doigts. Tu n'as vu que ton sang à terre. Toi, tu as frôlé la mort jamais ton âme. Tu ne sais pas ce que c'est de devenir une arme. Tu ne sais pas ce que c'est d'écraser son âme. De la tordre. Tu es entière, Rose. En pièces détachées mais entière.

- J'ai tué mon père.

- Moi aussi.

- Avec un sort ?

- Avec la mort.

- Il y a longtemps ?

- Un an. Je n'ai pas pu le sauver. Je suis guérisseur. Mais ce monde n'a jamais conspiré à faire de moi qu'un tueur.

Je caresse son bras. Il ne sursaute pas. Il jette sa tête en arrière. Comme un million de fois Adastré je t'ai vu faire.

- Alors, souris, il touche à sa fin.

- Plus personne ne sourit vraiment.

- Il y a un petit couple de jardiniers chez ma tante Astoria… Ils doivent avoir la quarantaine passée… Elle, elle est belle à avoir coupé le ciel pour dévorer le soleil. Lui, lui, lui, il a la tête de ceux qui ont perdu la guerre. Comme si on pouvait gagner une guerre… Eux, je peux te jurer qu'ils ont le plus vrai sourire de cette terre. Un été, je les ai vu danser dans un jardin d'hiver. Il ressemblait à une jeune premier. Dans un monde qui ne fait que mourir, ne sous-estime pas le pouvoir d'un réel sourire. J'ai connu un gosse, dans un couloir à deux pas d'ici, qui a vendu le monde avec son sourire. C'est avec le même sourire que je le tuerais. Je viens de prendre ton fou. À toi de jouer.

- Tu joues diablement bien.

- C'est mon père qui m'a appris à jouer. C'était le meilleur joueur du monde.

- Mon père était le meilleur joueur du monde.

- Je veux bien t'accorder Adastré, mais nous n'avons pas le même père.

- Non, peut être que mon père est juste devenu le meilleur joueur quand ton père est mort. Hugo est en sécurité.

- Pardon ?

- Tu n'osais pas demander.

- Tu lis dans mes pensées ?

- Tu m'as laissé entrer.

- C'est plus facile que de te bloquer. Je te montre ce que je veux te montrer. C'est un tour que m'a appris Tom. Tu sais celui qui va tous nous tuer. Tu en as déjà entendu parler ?

- Vaguement. Je suppose qu'on a un Tom dans chaque camp.

- Un salaud imbu de lui-même qui tue l'amour de sa vie pour deux grammes de pouvoir en plus ?

Sa main a tremblé. Il s'est tout de suite rattrapé. Mais sa main a tremblé. Mes pions commencent à gagner, j'ai juste du sacrifier un chevalier.

- Un sale gosse qui doit tous nous sauver qu'on voudrait détester mais qu'on ne peut qu'adorer. Mon Tom ne s'appelle pas Tom. Crois-moi, il en a l'odeur et les peurs.

- Votre Tom, c'est Teddy Lupin. Mon Tom a du sang sur les mains.

- Oh Teddy n'est pas notre Tom…

La porte s'ouvre. Il n'y avait pas de porte. Andromède Malfoy nous regarde ses grands bleus pleins de larmes, elle les essuie rageusement. Lui et moi, on s'est levés en même temps. Un même mouvement. Comme si tout ceci devait se passer depuis longtemps. Elle court vers moi, embrasse mon front et se retourne vers lui :

- Je viens de perdre deux hommes, dis-moi que tu as une bonne nouvelle à m'annoncer.

- Elle dit qu'il a tué la Dolohov. Il est au cachot. Je veux y aller.

- Hors de question. Ce n'est pas ta mission.

- Tu ne décides pas de mes missions. Surtout celle-là.

- Ginny a été très claire. Vous restez dans cette pièce. Tu ne fais pas le poids. Quand bien même Merlin lui-même viendrait me le demander je ne te laisserais pas passer.

- Tu as de jolies mains. Des années de Malfoy et leurs soins. Elles sont blanches, je voudrais que ce soir ce soit encore le cas. Je prierais pour tes mains. Je prierais pour ton âme. Je prierais alors que je ne crois pas. Je m'agenouillerais devant ce que je ne vois pas. Mes mains n'ont plus de blancheur, terminé la pâleur, je n'ai plus peur. La seule chose qui me reste c'est mon putain de cœur. Je ne laisserais pas Voldemort le tuer et encore moins Ginny Weasley. Chacun ses déités. La mienne, on peut encore la sauver.

Andromède va pour répondre quand il entre. Le serpent a perdu sa peau. Je te vois, Scorpius. Je te vois. Tom m'avait dit de ne pas hésiter, de viser le cœur. De ne pas faire d'erreur. J'attrape l'inconnu et je plante ma baguette dans sa gorge. Plus personne ne bouge.

- Weasley…

- Ne prononce pas mon nom, Malfoy. J'ai été trop idiote. Trop sotte. Vous savez ce m'a dit votre sœur ? La famille avant tout. Le sang c'est ce qui nous lie tous. Vous n'êtes pas mon sang. Vous êtes ceux qui ont arrêté de le faire circuler. Vous êtes ceux qui ont fait disparaitre les Weasley. Il n'y a pas de bien mais il y a définitivement le mal. Je n'écouterais plus aucun de vous. Laissez-moi sortir ou je le tue.

- Rosie… Rosie… Tu sais de quel côté je suis, ils sont avec moi. Rosie combien de fois je t'ai emmené à ta mère ? Tu sais que tu peux me faire confiance.

- Pourquoi, Andromède ? Parce que tu as la transe de l'élégance ? Parce que tu ne m'as pas tué ? Vous me faites rire. Blaise, toi… Vous croyez que de ne pas me tuer fait de vous des modèles de bonté. Tu es dans ta phase post ado révoltée. Moi, c'est ma vie. Je n'ai pas le choix. Je ne peux pas démissionner. Vous m'avez tout pris, même ma vengeance. Je veux juste sortir. Je m'en fous de mourir. Je veux juste que ce soit à ma manière. Je n'en peux plus de virevolter entre vos mains.

Je sens une larme toucher ma main. Je ne pleure pas. C'est lui. Il doit avoir dix-sept ans. Un gars comme ça, j'aurais pu l'aimer en d'autres temps. Un jeune guerrier trop vite usé. Et maintenant, je dois le tuer. Il me dit, la voix claire :

- Tu parles comme une Tom.

- Moi aussi je suis une héritière. Il faut bien que je sois meurtrière.

Scorpius sourit. Ce salaud m'a tout pris. Mon cœur en extra c'était gratuit. Et il sourit :

- Tu sais qu'elle te tuerait vraiment ?

- Je n'en doute pas une seconde. Tu verrais comment elle a envoyé valser ma dame toute à l'heure…

- Tu aurais dû te coiffer, tu as quand même de grandes chances de mourir ce soir quoiqu'il arrive.

- Tu veux parler ? C'est quoi cette coupe ? Tu ne devais pas te couper les cheveux cet été ?

- Heu cet été, hum, j'étais un peu occupé.

Je crois que j'ai rougi. Mon sang est vraiment traitre.

- Ugh. Je ne veux pas savoir. Dégueu.

Andromède tape du pied agacée :

- Vous êtes conscients que des gens meurent dehors pendant que vous vous livrez à votre virile parade amoureuse ?

- Je suis surtout conscient que quelqu'un va mourir ici si tu ne laisses pas Weasley sortir.

- Les ordres sont les ordres.

- Désolé vieux, tu vas mourir parce que Ginny Weasley t'a puni dans ta chambre. Ne t'inquiète pas, Adastré se remettra.

- Scorpius ! Arrête tes bêtises elle ne va pas le tuer.

- Non, mais elle peut drôlement l'endommager. Et on ne va pas se mentir, sa gueule c'est son seul atout à ce garçon.

Je l'aurais tué. Il faut que vous le sachiez. Parfois, on pense que les choses ne se passent pas parce qu'elles ne se seraient pas passées. Je pourrais… Vous mentir, je pourrais. Si je disais que si l'enfer n'était pas rentré dans cette pièce, si le rouge du silence ne s'était pas accroché à nos corps hors balance, je ne l'aurais pas tué, je mentirais. Je l'aurais tué.

Mais elle est rentrée. À plat ventre. Les bras lacérés. Un bout de l'épaule droite à moitié déchiquetée. Ses jambes nues écharpées. Un cadavre récalcitrant. Une morte qui ne s'est pas rendue compte qu'il fallait partir en mourant. Adastré.

Il m'a jeté à terre. Scorpius a reculé. Scorpius qui n'a jamais reculé pour me laisser Adastré, Scorpius qui avait pleuré lorsque de l'appendicite elle s'était faite opérée, Scorpius qui disait que c'était la seule femme qu'à jamais il aimerait. Il a reculé. Plus rien n'importait. Le monde achevait de s'écrouler.

J'étais comme figée. Gabrielle était morte. Papa était mort. Frank était mort. Dahlia était morte. Adastré allait mourir. On entendait que leurs voix à tous les deux. Je crois que Scorpius et moi, le silence nous avait dévoré. Et ces tristes gosses continuaient de déclamer leur parodie de conte de fée :

- Tout va bien, shhh, tout va bien.

- Je suis en train de crever, sombre idiot. Rien ne va. Je suis à peu près sure qu'on peut voir mon poumon droit.

Une table apparaît sous elle ainsi que divers baumes et potions. Il a dit qu'avant de tuer, il guérissait. Elle, quand elle était petite, elle était ballerine. Depuis, on l'a cassé ma jolie porcelaine de Chine.

- Et tu ne l'as pas maquillé ? Merlin Zabini, je t'ai connu plus soignée.

- Eh. C'est moi qui meurs, c'est moi qui blague.

- J'ai toujours été plus drôle que toi.

- J'ai toujours été plus belle que toi.

- Je sais, tu m'as fait une énorme faveur en sortant avec moi.

- Je te répondrais bien mais j'ai mal quand je parle.

- Alors arrête.

- Ça me fait mal de respirer, je devrais arrêter aussi ?

- Jamais.

Je sens un bras passer autour de mes hanches et un baiser froid sur mon front. Ce sont les lèvres d'Andromède. J'ai envie de lui dire d'aller se faire foutre. La guerre m'a rendu grossière. Après lui avoir appliqué ses baumes et autres charmes il passe sa main sur l'une de ses jambes et lui demande :

- Est-ce que tu sens ma main ?

- Je ne sens plus ma jambe.

- Je vois.

- C'est grave n'est-ce pas ? Je vais mourir ? Mon cœur, réponds moi.

- Je dois la couper. Le maléfice est trop imprégné. Si je ne la coupe pas, il va te tuer.

- Laisse-moi crever.

- Je suis désolé, Adastré.

Il lève sa baguette et elle tente de stopper sa main. Elle semble me voir enfin et me regarde les yeux plein de larmes, la fièvre la fait délirer :

- Rose ! Rose. S'il te plait. Arrête-le Rose. Tu te souviens quand tu es arrivée, je t'ai prêté toutes mes poupées. Je te les ai donné. Rose. Je t'ai prise dans mes bras. Tu me donnais des coups de pieds, tu hurlais, tu disais que jamais tu ne m'aimerais. Et moi, je t'aimais. Je t'aurais toujours aimé. Au moins, quand tu me lançais mes jouets, tu souriais. Je ne t'ai jamais laissé. Ne me laisse pas. Ne le laisse pas. Rose. Je ne veux pas vivre comme ça.

Je prends sa main brulante et tremblante, je ne la regarde pas, je ne peux pas la regarder :

- Je suis désolée, je ne peux pas vivre sans toi.

Elle me crache à la figure. Scorpius attrape son autre main. Elle ne le regarde pas. Elle regarde l'autre :

- Tu vas le faire pourquoi ? Pour moi ? Pour nous ? Je ne t'ai jamais aimé. Je ne t'aimerais jamais. Qui pourrait t'aimer ? Tu n'as même pas pu sauver ton père. Tu… Tout ça, c'est de ta faute. Je ne t'aime pas. Tu ne comptes pas pour moi. Tu ne comptes pour personne. Tu finiras seul. Tu m'entends : seul. Tu es un meurtrier. Un assassin. Arrête de te prendre pour quelqu'un de bien. Je te déteste. Prie que je meurs. Prie. Si je survie, je te mettrais au supplice. Je ne t'ai jamais aimé.

Il jette sa tête en arrière. J'ai envie d'essuyer les larmes qui coulent sur son visage qui n'a pas encore perdu toutes les rondeurs de l'enfance. Il est tellement facile d'imaginer quel bambin il a été. Ils n'ont pas encore fait tomber toutes les marques de ses sourires. Il essuie ses yeux de pauvre petit garçon amoureux.

- Est-ce que tu veux que je t'endorme ?

- Pourquoi, tu n'as pas le courage de me faire face ? Ferme les yeux si tu veux.

- Je ne pourrais jamais arrêter de te regarder, Adastré.

- Je serais heureuse si je ne te voyais plus du reste de ma vie.

Un drap apparaît. Il recouvre ses jambes. Un mouvement sec. Un cri. Le drap se referme sur le vide. Adastré a fermé les yeux. Scorpius embrasse son front, elle serre sa main de toutes ses forces et lâche la mienne. Je suis seule.

Je m'avance vers la porte et Malfoy attrape mon bras, je le repousse :

- N'essaie pas de me retenir.

- Non. J'étais contre l'idée que tu restes ici dès le départ. Tu n'es pas une princesse à préserver. Si Ginny Weasley veut garder sa conscience tranquille, c'est son problème. Pas le nôtre.

- Il n'y a pas de nous Malfoy. Pas de notre. Tu peux les flouer, je sais qui tu es.

Andromède pose sa main sur mon épaule :

- Regarde bien ce qui est arrivé à Adastré. Il y a des monstres dehors. L'armée s'est levée. Si je vous laisse sortir, jamais je ne vous reverrais. Si je vous garde ici, jamais vous ne me pardonnerez. Au diable Ginny. C'est ta vie. Ce n'est pas un jouet qu'on t'a prêté. On t'a déjà trop usé. Je resterais ici avec Adastré. Je m'occuperais des blessés. Allez y tous les trois. Et revenez moi. Toi aussi, Scorpius Malfoy. Tu sais ce qu'on dit chez nous ?

Scorpius regarde ses chaussures et répond tout doucement :

- Le sang a un sens.

- Le sang a un sens. Jamais ne crois que le tien n'a pas d'importance. S'il se fait tuer, je vous tuerais tous les deux.

- Sur ces belles paroles, j'ai déjà assez perdu ce soir. Scorpius, Rose, vous allez à droite. Je vais à gauche.

Adastré se relève péniblement et murmure :

- Attends, idiot. Attends. Ne te fais pas tuer. Tu ne t'en sortiras pas aussi facilement. Je vais faire de ta vie un enfer. Pour ça il faut que tu vives. Tu m'entends ? Il faut que tu vives.

- Tu es la pire hypocrite du monde, mon amour.

- Personne ne t'a demandé de tomber amoureux de moi, imbécile. Reviens-moi. Ne crois pas, ne pense pas un instant, une seconde, un battement de ton cœur d'idiot, qu'une jambe amputée m'arrêtera. Je te retrouverais. Où tu iras… Tu es à moi.

- Je dirais à la mort d'attendre.

- Dis-lui que tu m'appartiens. Dis-lui où je suis. Dis-lui d'avoir peur d'Adastré Zabini. Dis-lui que pour ta vie je lui en donnerais mille autres en sursis. Dis-lui que la mort me doit ce que le temps m'as pris. Rose, Scorpius, restez en vie. »

La porte se claque. Noir complet. Je sens la main de Scorpius se glisser dans la mienne. Je ne la repousse pas. Dans le noir mon orgueil ne voit pas. Je me retourne vers l'autre, je ne lui ai même pas demandé son nom. À quoi bon ?

«

- Scorpius, tu sais où vous devez aller. Moi, j'ai deux trois vampires à tuer pour venger Adastré et votre Tom à retrouver.

Je place ma main sur son avant bras :

- Tu ne sais pas ce dont Tom est capable.

- Tu ne sais pas ce dont je suis capable. On a chacun son rôle à jouer. Si ce que tu dis est vrai, s'il a tué Dahlia Dolohov, on a une histoire à régler lui et moi.

- Laisse-moi venir avec toi. C'était mon amie. Je veux la venger.

- Elle n'était rien pour moi. C'est pour ça que j'irais seul. Je peux garder les yeux grands ouverts. Je ne fermerais pas les yeux.

Ma main s'enlève toute seule. Réminiscence de cauchemars qui n'étaient pas les miens. C'est presqu'avec la voix de ma mère que je lui réponds :

- Fais attention, la dernière fois qu'un brun aux cheveux en l'air a refusé de fermer les yeux, on a trainé sa dépouille dans tout Pré-au-Lard. Les bris de verre de ses lunettes se sont enfoncés dans sa paume fermés. Et le monde en miettes est tombé.

Pour toute réponse il embrasse mon front avant de chuchoter :

- Reste en vie, Rose Weasley. On a une partie à terminer. Je prierais bien Merlin de te garder, mais j'ai plus confiance en Malfoy.

Scorpius lui répond en riant :

- Aie confiance en elle. Si elle ne me tue pas, elle sauvera ma peau. Fais attention à toi vieux frère. Et ramène le nous. Ne laisse personne t'arrêter. Pas même Ginny Weasley.

- Scorp', il a vraiment tué Dahlia ? »

Une explosion nous propulse en arrière. J'aurais dû lui demander son nom. Je crois qu'autrefois, on l'appelait Révolution.


C'est étrange de se relever dans le noir. Je ne sais pas où commence mon corps et où finit le sien. Je ne sais pas si le sang sur lequel je marche était celui de quelqu'un se battant pour le bien. À la fin, nous ne sommes que des charpies de chiens.

Les lumières s'allument, Scorpius me fait signe de me taire.

Eden Diggory et Cygnus Lestrange se font face.

Ils ont tous les deux quittés Poudlard avant que je n'y rentre. Mais même moi je connais leur histoire. On n'est que ça, un paquet d'histoires, de légendes plus ou moins vivantes. Un éclair roux passe. Elle me sourit. Elle doit être Ginny. Mais elle est bien trop jeune. Un autre la suit. Et un autre. Une rousse galaxie. Ce ne sont que des perruques, des potiches en postiches. Il faut maintenir Ginny en vie. Il faut qu'à chaque coin, on sache pourquoi on se bat. Eden Diggory ne se bat pas pour Ginny Weasley. Il se bat contre Cygnus Lestrange.

Deux des héritiers des plus grandes lignées de sangs purs. Une mourra ce soir. Ils se sont toujours détestés. Ils ont monté les rangs dans chacune de leurs armées. Tout ça pour un jour pouvoir enfin s'affronter. La guerre ce n'est qu'un prétexte. La guerre c'est toujours un prétexte.

«

- Diggory, est ce que tu es venu pour danser ou pour me tuer ?

- Tu es pressé de mourir Lestrange ? Satan aura la gueule de ta mère, ne trouve pas ça étrange.

- Et toi ? Tu n'as pas hâte de rencontrer ton cher frère ? Cédric c'est ça ? Il a démissionné avant ta naissance. C'est l'histoire de ta vie ça non ? Les gens te quittent toujours. Et je les gagne à la fin. Hier, elle m'a donné son corps, lui il m'a donné son titre. Je suis le champion de Poudlard. Je suis ce qu'est Poudlard. Demain, je l'épouserais ici. Je me rappelle de comment tu la regardais… Elle et Poudlard ont toujours été qu'à moi.

Elle, c'est Iphigénie. Promise enchainée qu'on méprise. Le sort de Diggory fait exploser le mur.

- Tu crois ? Tu crois que Poudlard c'est toi ? Tu crois nous avoir enterré ? Poudlard c'est moi. Tu nous as recouvert de terre. Vous nous avez coulé sous des litres de terre. Ouais, vous nous avez enterrés. Vous pensiez nous tuer, vous nous avez créés. Vous ignoriez que nous étions des graines. Sous la terre, on a appris à vous faire taire. Méfie-toi des branches Lestrange. Elles repoussent. Poudlard, c'est nous.

- Tu parles beaucoup. Je t'ai tout pris, Diggory, tout.

Cygnus en finissant sa phrase crache un peu de sang. Une ombre noire passe à côté de moi. Je sens le sourire de Scorpius dans mon cou. Ce n'est pas une ombre mais des voiles noires. Une veuve noire. Et pourtant sa voix est claire comme le jour :

- Tu vois, le soucis, c'est que je ne suis pas à prendre. Ni à vendre. À craindre. Oui, j'étais à craindre. Tu vas geindre. Tu pensais avoir gagné ? Non, tu ne savais même pas qu'il y avait une bataille. Aucun de vous ne nous pensez de taille. On a su prendre la faille. Ce soir, la bataille n'est pas contre Voldemort mais contre chaque fruit de ses entrailles. Tous ses héritiers vont crever. Vous étiez trop accaparés pour voir nos fleurs pousser. Une femme t'a tué Cygnus Lestrange. Tu as cru qu'elle t'appartenait sans jamais savoir qui elle était. Mes amis m'appellent Nini, mes ennemis m'appellent Iphigénie.

Il finit de convulser et meurt sans même un baiser.

- C'était obligatoire l'accoutrement de veuve sicilienne ?

- Tu n'as jamais eu aucun sens du spectacle, Diggory. Tu n'as pas été élevé par Astoria Malfoy.

- J'ai été élevé par Ginny Weasley. Crois-moi, je m'y connais en spectaculaire.

- Tu ne m'en veux pas trop de l'avoir tué avant toi ?

- Je me doutais que tu avais commencé à l'empoisonner. Tu as toujours eu le même air quand tu faisais une bêtise. Je m'en fous, je voulais juste te sauver.

- Tu connais mon nom, Eden, les filles se sauvent elles même chez moi. Je n'ai pas besoin de héros.

- Tu n'as jamais eu besoin de personne.

- Et tout le monde a toujours eu besoin de toi, Eden. Je dois rejoindre ma sœur dans la salle sur demande. Si on survit, tu m'invites à manger ce soir ? Tu me dois toujours un premier rendez-vous.

- Deal. »

Elle court dans les escalier, Eden va dans l'autre sens, Scorpius l'appelle :

«

- Malfoy ! J'ai cru que tu étais mort après qu'Adastré, Teddy et toi avez été séparés.

- C'est ça ton plan, Diggory, me tuer pour inviter ma sœur à sortir sans danger ?

- Merlin, qu'est ce qui se passe dans vos têtes à toi et toute ta famille pour que vous pensiez être le centre du monde ?

- Ginny Weasley ne t'a pas dit ? Les Malfoy sont le cœur de la guerre.

Une des ombres rousses s'arrête à coté de nous, d'instinct, je lève ma baguette. Scorpius l'abaisse doucement. La jeune fille fait tomber sa perruque rouge et révèle une avalanche de boucles blondes vénitiennes. Elle a de la boue sur le visage, du sang sur les mains et un sourire qui hurle sur les chemins. Elle me prend dans ses bras et laisse des traces de sang sur ma chemise bleue. Je repense à la fleur rouge sur le cœur de papa. Mon corps se raidit, je sens la main de Scorpius qui se refroidit.

- Pardon, tu avais l'air de quelqu'un qui avait besoin d'un câlin. Scorpius Malfoy n'est pas le plus grand fournisseur de chaleur humaine qui soit. Crois-moi.

Eden la jauge sévèrement :

- Reed… Qu'est-ce que tu fais la ? Tu devais t'occuper des blessés.

- Je m'en occupe. Je blesse.

Elle a mille dents dans son sourire blanc, cette enfant. Elle a à peine quinze ans. Scorpius lâche ma main et lève un sourcil :

- Reed ?

- Quoi ? Tout le monde avait un nom de code, j'en voulais un aussi. Mais toi, Scorpius, tu peux m'appeler comme tu veux, mon chéri.

Ma main se referme sur les ténèbres. Je sens une boule de jalousie monter dans ma gorge. Maman m'avait dit qu'elle ne s'était jamais sentie aussi en vie qu'à l'agonie. Qu'il y avait que sur les champs de bataille qu'avec son extrême humanité, elle signait ses ultimes retrouvailles. Il fallait être désespérément humain pour voir les lendemains. Je soupire :

- Cette guerre est une farce ridicule, laisse la choisir son nom de scène.

- Tu me plais bien, Rose Weasley. Ça te dit de venir blesser deux trois mangemorts avec moi ?

- Rose reste avec moi. Diggory, prends la carte. On va en avoir besoin. Ma cousine a perdu une jambe pour la récupérer, ne te fais pas tuer avant de leur avoir donné. Tu sais quoi en faire.

Il tend un bout de parchemin froissé à Eden qui s'en va en courant sans le remercier. J'ai à peine le temps de lui demander si c'est la fameuse carte du Maraudeur, celle dont mon père m'a tant parlé et que Bellatrix utilisait pour me torturer, qu'il s'écroule sur le mur en miettes. Reed réagit avant moi :

- Scorpius, tu es blessé !

- Jolie sens de l'observation.

Dans le noir je n'avais pas vu, mais lors de l'explosion un bout de bois de la longueur de mon bras s'est enfoncé dans son sein droit. J'avais ma main sur le sein gauche depuis trop longtemps.

- Non.

Reed me regarde, ses yeux marrons grands ouverts :

- Rose ?

- J'ai dit non. Scorpius Malfoy. J'ai dit non. Pas cette fois, pas encore une fois. Pas à cause d'une stupide explosion. Un incident débile. Si tu veux crever, crève. Mais fais le debout comme un homme. La baguette à la main. Une chute ? Tu vas me laisser pour une chute ? Non.

- Rien à dire, je l'aime vraiment bien. Elle est trop bien pour toi, Malfoy.

Scorpius a un petit rire et ses longs doigts froids effleurent mon visage. Je secoue la tête. Non. J'ai dit non. Son rire s'accentue et il se met à tousser :

- Tu parles d'une guerre, c'est Roméo et Juliette à chaque fin de couloir. Ridicule. On est ridicules, Weasley.

- On nait ridicule, Malfoy. C'est pas nous, c'est le monde. Il se termine ce soir.

- Il n'y a pas de nous Weasley. Il n'y a que toi. Tu dois sortir de là.

- J'ai dit non. Non. Tu entends ? La poutre elle est dans ton oreille ? Non.

- Reed. Tu dois l'emmener. Elle doit voir ce qui va se passer.

Elle le regarde et elle a perdu ses quinze ans. Elle a perdu son enfance. À peine éclose, elle est déjà fanée.

- Quand j'avais cinq ans, tu as passé l'été au refuge. Avec tes grands yeux bleu-vert et tes superflues subterfuges. J'ai dit à tout le monde que j'allais t'épouser. Personne ne m'a jamais écouté. Je n'étais pas Rose Weasley, à quoi ça servait ? Ma vie n'était pas en danger. J'étais une des sauvées. Toi, toi tu t'es arrêté. Tu m'as écouté. Ce soir, je ne t'écouterais pas. Chacun a son combat. Elle jouera le rôle qu'elle voudra.

- Tu vas le chercher ?

Elle explose de rire et les éclats font trembler les murs. Un millier de particules de poussières. Elle a déterré le rire qu'on avait tous déféré.

- Jusqu'au bout de la terre. Jusque dans l'antre des ténèbres. Souhaite moi bonne chance, vieux frère, je vais en enfer. Ils disent qu'il a tué Dahlia, que tu l'as vu. Je m'en fous. Tu parlais de Romeo et Juliette. Je ne t'épouserais pas, Scorpius Malfoy. Moi c'est Tybalt, mon combat. Il y a bien des formes d'amour. Et il y a celui qui transcende tout. C'est lui. L'amour de ma vie c'est lui. Je ne les laisserais pas me le prendre encore une fois. Je ne le laisserais pas se pendre encore une fois.

Une fois Tom avait dit : « je passais une très agréable journée dans le sud de l'Espagne avec une fille à la beauté de lys ». Dahlia ne lui suffisait pas. Il lui en fallait une plus jeune. Plus maniable. Combien d'entre nous, Tom ? Ça te fait rire de voir les filles essayer de te sauver ? Je vais te tuer, Tom. Je ne laisserais pas le rire mourir.

De nouveaux les bruits d'un duel nous rejoignent. Ils meurent tout aussi tôt. Scorpius Malfoy ne voudrait partir qu'en silence. Je pose ma tête sur son épaule gauche et il passe son bras autour de moi. Je vais rester là. Reed nous regarde en pleurant. Partez. Partez. Je vais rester là. Je ne veux pas continuer. Partez.

Un homme au visage rond apparaît des décombres. Il a des balafres plein le visage et un écart dans les dents de devant. Le destin ne veut pas me laisser crever en paix. Ce sourire je le connais :

- Qu'est ce qui se passe avec le sang Weasley et l'idée de bruler les couvre-feu ? Tu ne devrais pas être là, Rose Weasley.

- Vous devriez être mort, monsieur Londubat.

- Depuis dix-sept années. Tu sais, Rose, c'est Halloween, la mort c'est démodée.

- Quand mon père passera cette porte, alors oui la mort sera ajournée. En attendant, elle est instantanée.

Scorpius, entre deux toux, murmure :

- Je suis désolé pour Frank, Neville.

Ses yeux s'embuent quand il répond :

- Moi aussi, mon garçon, moi aussi. Je suis désolé d'être en vie alors qu'il est parti. Ton père m'a sauvé la vie, il y a près de deux décennies. Il est temps que je paye ma dette ou que je meurs en essayant. Plus rien ne me retient. Toi et moi on va essayer de t'emmener à l'étage, fiston.

Reed a disparu. Je ne l'ai pas vu partir. Elle me ressemblait, je l'ai peut-être rêvé. Les amoureuses de Tom, autant les laisser crever.

- Weasley. Je le suis si tu sors.

- Tu es si pressé de te débarrasser de moi ? Tu aurais dû me tuer comme ce cher Tom te l'a demandé.

- J'ai toujours eu la tête dure. Pars maintenant.

Pas maintenant.

- Ce ne sont pas des adieux.

- Tu ne peux pas dire non à la mort, Rose Weasley.

- Regarde-moi faire. J'ai grandi avec Adastré Zabini. Ce ne sont pas des adieux.

- Alors pourquoi tu pleures ?

- Parce que tu meurs. Et que j'ai peur.

- Ce sont des adieux.

- Il n'y a pas de Dieu à qui revenir, Scorpius. Dieu, Merlin, il avait raison, tout ça est mort. En moi, c'est à jamais décédé. Je n'ai plus que mes yeux et un monde qui n'est pas le mien. Qui n'est pas le bien. Bientôt, je ne verrais même plus. Le mal, le bien. Il doit y a avoir une différence. Tu ne peux pas mourir d'avoir cherché. Je refuse. Tu ne peux pas mourir de ce monde. Tu ne peux pas mourir d'avoir trop écouté la voix de ceux qui ne t'entendaient pas. Tu es celui qui transite au bord de la vie, pas celui qui meurt. Ça ne devait pas se passer comme ça. Tu ne devais pas mourir comme lui, pour rien. Ce ne sont pas des adieux. On retournera à la terre simplement. Celle qui nous a porté à défaut de nous aimer. Ce sont des à jamais.

- Moi aussi, j'aurais préféré mourir pour toi. Moi aussi.

Je me relève et essuie la poussière sur ma jupe. Je me tourne vers lui, il a déjà les yeux fermés. Neville essaye de le soulever. Ouvre les yeux, Scorpius. Regarde-moi. C'est moi. Ouvre les yeux. Je t'en supplie. Il ne fait rien :

- Pour ce que ça vaut, je n'ai jamais rêvé de t'épouser. Je n'ai jamais fait de projets. Je ne suis pas Reed, je m'appelle Rose Weasley. Mais ne t'avise pas de partir avec l'image d'une autre fille sous les paupières. Elle ne t'aimera jamais plus que moi.

J'escalade le mur en ruine quand je l'entends m'appeler :

- Weasley ! Joyeux anniversaire. »

Bouffon. Merlin. Dieu. Sauvez-le.


Une furie s'élance sur moi, ses longues griffes s'accrochent à mon bras. Je ne lui résiste pas. J'ai dit que je sortirais. Je suis sortie. Ça y est. Je n'ai plus de rôle à jouer. Laissez le rideau tomber. La furie s'écrase morte sur moi. En face, Reed et sa baguette levée, le sourire aux lèvres toujours accroché :

- Tu es trop vielle pour mourir jeune, Rose !

- Et toi tu es trop jeune pour tuer.

- On est toujours trop jeune pour tuer. Je tire dans les jambes. Je blesse, je t'ai dit. Je ne suis pas une tueuse, juste une rodeuse.

Tom m'a appris à viser le cœur.

- Rentre, je t'en prie. Tes parents doivent s'inquiéter.

- Où ? Où veux-tu que je rentre ? Ma famille est ici. Tu ne comprends pas. C'est lui. Je le sauverais. C'est lui.

- Il se fout de toi !

- Tu crois ? Parce qu'il se foutait de toi ? Est-ce qu'il t'a déjà menti sur ce qu'il était ? Sur la noirceur qui le rongeait ? Il ne t'a jamais protégé ? Réponds moi. Dis-moi qu'il était un menteur et j'accepterais de le voir comme un tueur.

Je repousse d'un sort le bout de mur qu'un géant lance en sa direction.

- Peu importe. J'importe peu. Il a tué Dahlia. Il l'a tué. Je l'ai vu. Je n'oublierai jamais. Tu ne peux pas comprendre.

- Alors c'est comme ça avec vous les Weasley ? Une erreur et on efface tout le reste des petits bonheurs ? Hugo m'a dit que ton père avait des colères. Il voulait anéantir le monde et regrettait l'instant d'après. Est-ce que tu l'aurais renié ? Est-ce que tu l'aurais abandonné ? Lui, il ne t'aurait pas abandonné.

Un petit garçon meurt à nos pieds. Les vivants l'enjambent comme si de rien n'était.

- Mais est-ce que tu t'entends ? Tu défends un tueur. Tu le compares à mon père ! Tu n'as pas le droit de parler de mon père. Tu ne sais pas ce qu'il a vécu.

Elle lance un sort dans le dos d'un colosse qui essayait de couper le bras d'Hanna Abbot.

- Nous y voilà. Est-ce que tu sais ce qu'il a vécu ?

- Je sais qu'il est dangereux, ses propres sœurs me l'ont dit. J'aurais dû les écouter. J'aurais dû le tuer.

- Peut-être qu'on te disait que tu étais dangereuse pour lui et que jamais tu ne les écoutais. Tu es une Weasley, tu n'écoutes jamais. Tu ne peux pas tuer les gens pour une erreur. Tu peux mourir pour une erreur. Mon père m'a appris à vivre différemment. À ne pas tuer pour la vie, à ne pas vivre pour les morts. Longtemps j'aurais voulu porter ton nom. Mais tu sais quoi, je suis heureuse d'être l'héritière d'autres valeurs. Je n'ai que les cheveux de roux.

- Ce soir, ils seront dans le noir de ta tombe.

- J'ai de plus belles choses qui m'attendent dans la tombe. Ma tombe a une plus belle vue que leur monde. J'ai une tombe avec vue sur mon père.

Elle roule vers l'entrée des donjons. Un boulet échoue entre nous et créé un fossé.

- Reed, pourquoi est-ce que tu te bats ?

- Pour que les gens vivent. Pour te revoir, Rose Weasley. Pour tous vous revoir. Pour avoir un monde meilleur que la mort. Tu as vécu sans but Rose, tu devrais te trouver vite une raison de mourir. »


Je ne l'ai pas vu depuis sept ans. Je n'ai jamais assisté aux festins de la répartition. Je n'en étais pas digne. Je mangeais aux cuisines avec les autres sangs empoisonnés. Avec mes frères d'une autre portée. En sept ans, on n'oublie un visage. Parfois, je peine à me rappeler celui de Gabrielle. Je ne sais plus si elle avait un grain de beauté au-dessus de l'œil droit ou en dessous du gauche. Et puis qui se souvient encore de la belle Gabrielle ? Je n'ai jamais oublié le visage de Lord Voldemort.

Il me soulève par le cou. Il rit. Ce n'est pas un rire. C'est un grincement. Le rire, c'est quand Hugo vole les cerises de mon panier alors que le sien est plein. Ce n'est pas ça un rire. Ce n'est pas un grincement. C'est un bruit. Voldemort c'est un bruit qu'on a paré. Une mascarade.

Il me jette à ses pieds et pose son genoux sur ma colonne vertébrale. Tom est à ses côtés. Je pense à tout ceux partis le chercher, pour le sauver ou le tuer. Bien sûr, le toutou était derrière son maitre, planqué. Je ne cache pas mes pensées. Je vois son rictus forcé et ses sourcils froncés derrière ses boucles brunes. Le long serpent du lord me montre ses crocs. Chéri, j'en ai maté de plus coriaces. Blaise, derrière le reptile, regarde le ciel. Il cherche toujours la lune en plein soleil.

Blaise. Je l'avais oublié. Blaise, s'il te plait, lis mes pensées. Oncle Blaise, ne meurs pas pour moi. Oncle Blaise, je ne faisais que passer. Ta dette est payée. Oncle Blaise… Regarde-moi. J'ai peur. Je n'y arriverais pas sans toi. Je ne veux pas partir avec son visage. C'est à toi, toujours à toi, de m'emmener vers d'autres rivages. Oncle Blaise, suis moi que je ne te suive. Regarde-moi.

Son regard croise le mien. Ses yeux sont secs. Il ne m'a jamais aimé.

Les combats cessent. Je sens une présence derrière moi. Je lève ma tête et le Lord donne un coup de pied dans mon estomac. La douleur n'est rien. Je roule jusqu'aux pieds de l'autre silhouette. Elle m'aide à me relever et murmure : tu as les yeux de papa. Elle caresse mon visage tendrement : tout ira bien, mon enfant. Je suis désolée, je suis en retard, je ne te laisserais plus maintenant. Tout ira bien, mon enfant.

Sa capuche tombe.

Je ne l'ai jamais vu et je sais déjà qui elle est. Ginny Weasley. La vraie. La foule se tait.

«

- Alors c'est toi, toi qui te fais passer pour la veuve Potter ?

Il ne lui laisse pas le temps de répondre et lui envoie un sortilège de Doloris. Son corps se tord. Il continue. Encore et encore. Je ne peux pas regarder, je ne peux pas arrêter de voir. Ses yeux manquent de sortir de leurs orbites. Ses mains se replient. Elle va mourir. Tout ça pour ça, j'ai envie d'hurler. Enfin il cesse, elle essuie le sang qui coule de sa bouche et sourit. Elle a deux fossettes à chaque joue et des lèvres charnues. Les mêmes que moi.

- C'est tout ce dont tu es capable, Lord Voldemort ? Même pas mal.

Elle prend ma main dans la sienne et me place derrière elle. Comme si elle savait que je ne fuirais pas. Son pouce caresse ma paume. J'ai passé tant de temps à la détester. Et au dernier moment, elle est venue me sauver.

- Tu n'es pas une Weasley. Si c'était le cas, cela dit, le tableau serait touchant. Les deux dernières héritières Weasley prêtes à mourir ensemble… En parlant d'héritière, qu'on me ramène Andromède Malfoy. Que son père et elle sachent ce qu'il advient quand on me trahit. Votre sang vous a trop longtemps protégé.

Ginny explose de rire, ses yeux brillent, elle n'a jamais vécu que pour cet instant :

- Je ne suis pas une Weasley ? Coupe mes veines, tu y trouveras de l'or au milieu du rouge. Tu sais que tu ne peux pas me toucher. Harry Potter est mort pour moi. Pour me protéger. Une fois encore, tu as négligé la magie du sang. Tu parles de pureté à longueur de journée sans savoir ce qu'elle est.

- J'ai tué Potter et quand j'en aurais fini avec Malfoy, je te tuerais aussi. Mais d'abord, mon exemple.

Je sens la main de Ginny se refermer sur la mienne quand ils amènent Andromède. Une partie de ses cheveux blonds sont brulés. De son nez du sang continue de couler. Son cou n'est pas courbé. Elle reste reine à la fin de l'éternité. Sereine quand les temps lui sont comptés. Je me souviens de toutes les histoires qu'elle m'a conté.

- Andromède Malfoy ! J'ai beaucoup entendu parler de toi. Quel dommage… Un si joli minois, un si beau sang… Quel dommage.

Il frôle son visage d'opale de ses mains et elle lui crache dessus :

- C'est ce que ta mère a dit quand tu es né, charlatan ? Elle aurait mieux fait de te jeter avec l'eau du bain.

- C'est amusant que tu parles de famille, c'est à celui qui a été élevé comme ton frère à qui j'ai demandé de te tuer.

- Je suis sûre qu'il a été ravi

Tom parle enfin :

- Enchanté, à vrai dire.

Un Phœnix vole dans le ciel, il est venu pleurer Andromède, la plus jolie des merveilles. Blaise avance en silence. Le lord le prend par l'épaule. Tom leur sourit. Sa main s'ouvre et se referme sur le vide avant de se glisser dans sa poche. La main de Ginny se desserre légèrement. Quelque chose vient de se passer. Je ne sais pas quoi et le lord se remet à parler :

- Zabini, est-ce que tu connais l'histoire d'Andromède ? La mère d'Andromède avait proclamé que sa fille était la plus belle du monde. Que ses cheveux de fils d'argent étaient plus étincelants que ceux d'Aphrodite elle-même. Que ses yeux bleus avaient en eux plus de beauté que le corps entier de la déesse. Aphrodite envoya un monstre marin pour défendre son honneur. Il causa au pays d'Andromède la terreur. Le seul moyen qu'on trouva pour l'apaiser a été d'enchaîner la jeune fille à un rocher en offrande au monstre. Là où l'histoire devient intéressante, c'est que certains disent que ce monstre était le propre frère d'Andromède transformé par la déesse. Tu ne trouves pas ça passionnant, mon cher Blaise ?

- Follement. Mais je pense qu'on peut faire plus. Enterrons ce soir toutes les divisions. Tous les symboles de ces sangs de porc. Détruisons le chapeau de Griffondor, que plus personne ne puisse nous dire saigner rouge et or.

Voldemort fait apparaître un chapeau élimé.

- Excellente idée, comme toujours ! Tiens. Nous tuerons la fille puis le chapeau. Ce soir, la révolution brule.

Le vieux chapeau usé a l'air tout petit dans les grandes mains d'oncle Blaise. Ginny a recommencé à respirer.

Tom, toujours tout sourire, s'avance vers Andromède :

- Un dernier mot pour la fin ?

- Oui. Je te l'ai dit il y a quelque mois, si ceci devait arriver, je te laisserais tirer le premier. Mais tu as encore le choix. Je sais ce que tu penses. Tu crois avoir élevé pour ça. Pour ce moment. L'héritier. Tu crois que ta vie ne sert qu'à ça. Tu te trompes. Pour moi, pour Nini, pour nous tous, tu as toujours été plus que ça. Plus que tout, qu'eux tous, tu es à moi. Peu importe ce que tu choisis, je ne cesserais jamais de t'aimer. Ils peuvent tous te voir comme un héritier, c'est moi qui t'ai élevé. C'est moi l'ainé. J'aurais dû mieux vous protéger. Ne fais pas ce que tu as à faire, fais ce que tu veux faire.

Il la regarde longuement avant d'exploser de rire. Ce salaud se fend la poire. Il regarde Lord Voldemort qui lui rend son sourire goguenard. Qui les tuera tous ?

Ginny s'éclaircit la gorge :

- Milord, tu oublies que si je ne suis pas morte, c'est que quelqu'un de ton camp m'a laissé en vie... Je te dirais qui, si tu laisses la petite en vie.

- Que m'importe je les tuerais tous. Tom. Exécute la.

J'ai vu ce sourire mille fois. Celui qui remonte sur le côté droit. Celui de ses plus grandes farces. Celui qui disait que Dahlia allait encore hurlé. Celui que vous ne pouviez vous empêcher d'aimer.

J'ai envie d'hurler et de me ruer sur lui, mais des bras me retiennent. Derrière mes larmes, je distingue ceux du joueur d'échec. Je pousse un hurlement de rage et Tom se tourne vers moi. Il regarde par-dessus mon épaule et très vite se tourne vers Andromède. Toujours le même sourire. Ginny ne bouge pas. Elle boit la scène de ses grands yeux noisettes. Il va la tuer. Il va la tuer. Il va encore tuer. Et elle ne fait rien. Cinq silhouettes encapuchonnées se placent à coté de nous. Elle a l'audace de sourire.

Il pose sa baguette sur le crâne d'Andy et dit, son sourire encore dans la voix :

- Finite incantadum.

Les cheveux d'Andromède s'enflamment. Il va la bruler. Mais, le sort n'est pas le bon. C'est le sort qui annule un sort. Je ne comprends rien. Le feu continue de prendre ses cheveux. Je réalise qu'alors que si je croyais tout d'abord qu'ils prenaient feu, ils ont juste pris la couleur du sang en ébullition. Comme si on en avait chassé un faux blond. Andromède a toujours été blonde, non ? Elle se relève d'un bond. Blaise explose de rire et lance le chapeau en l'air avant d'en sortir une longue épée et de trancher la tête du serpent de Voldemort.

- Merlin, tu es un gamin, héritier ! Révéler ses cheveux… J'aurais vraiment voulu te tuer, ça sera pour une prochaine fois. Eh, à propos de ça, Voldemort, c'est moi qui à l'époque devait tuer Ginny Weasley, au cas où tu l'aurais oublié. Je pense que c'est le bon moment pour t'annoncer que j'ai depuis longtemps démissionné ?

Le lord le regarde pris de court et lève sa baguette pour le punir. Blaise se baisse et balance l'épée à Tom. Ce dernier se tourne vers Ginny Weasley. Elle lui hurle :

- JAMES, MAINTENANT.

Il sort une pierre de sa poche, la jette en l'air et la coupe avec l'épée. Elle disparaît. Lord Voldemort se tient la poitrine. Il nous tourne le dos.

- Très intéressante ton histoire sur Andromède. Très intéressante… C'est quelque chose de très paternel de raconter des histoires à ses enfants… Quand j'étais petit, on me racontait une autre histoire. Tout aussi cruelle mais bien plus belle. Celle de ma future victoire sur toi. C'est comme ça qu'elle s'appelle : Victoire. Pas Andromède. Victoire Weasley. Et ouais, Aphrodite ne fait pas le poids face à elle, monstre.

Le lord se reprend de son instant de faiblesse et relève sa baguette :

- Tu es fou ! Les Weasley sont tous morts !

- Ah ouais ? Alors regarde-moi lever les morts, Lord Voldemort.

Les cinq silhouettes baissent leurs capuches. Cinq hommes roux dont deux identiques.

- C'est impossible !

- Il y a un proverbe d'où je viens : Impossible n'est pas Potter.

- Harry Potter est mort ! Je l'ai tué !

- Et Zabini l'a enterré. C'est un très mauvais fossoyeur, tu l'auras remarqué. Mais tu as raison, Harry Potter est mort. L'an dernier, dans son lit, entouré de ceux qu'il aimait. Plus vivant que tu ne le seras jamais. Harry Potter est mort, mais il n'a jamais cessé de vivre. Tu n'as tué que l'horcruxe ce soir-là. Celui que tu avais créé malgré toi. Et ce soir, Blaise a tué le dernier, quant à moi j'ai détruit ta nouvelle pierre philosophale. Celle que je t'avais aidé à créer. Ton armée n'est pas encore arrivée. Tu as retrouvé ta mortalité. Nous pouvons enfin avoir le combat d'homme à homme que tu as toujours refusé à mon père.

La magie vibre autour de lui. Voldemort doit la sentir :

- Dans une heure, je reviendrais t'affronter. Tu vas mourir, Potter.

- Tu es un lâche, Tom Jedusort.

- Tu es un traitre.

- Je suis l'héritier d'Harry Potter.»

Le lord disparaît. Tous ses généraux le suivent sauf un. Je n'ai pas le temps d'enregistrer tout ce qui vient de se passer que Bellatrix se précipite vers Ginny. Je la pousse avant qu'elle ne se prenne un sort rouge en pleine poitrine. La haine de Lestrange se rabat sur moi :

- Oh petit bébé Weasley, comme j'ai attendu ce moment... Comme j'ai rêvé de te tuer… Combien de fois, je suis rentrée dans ton dortoir pour caresser ta douce peau blanche en songeant à ton sang qu'un jour je ferais couler… Ce jour est enfin arrivé.

À côté de moi, le combat fait rage entre les enseignants et les membres de la résistance. Blaise est au prise avec le chef de la meute de loup garous et les frères Weasley affrontent Rosier et les Carrow pendant que Ginny protège un groupe de première année. Personne pour me sauver.

- Pas si je te tue avant.

Nos sorts ricochent et s'entrecroisent. Bellatrix a très rapidement l'air de ne plus s'amuser et se met à me lancer des sorts de plus en plus mortels. Un éclair vert frôle mon oreille et attire l'attention de Blaise encore en plein combat. Il reste figé là. Le loup garou se jette sur sa gorge et l'héritier a juste le temps de le pulvériser avant qu'il n'arrache la tête de Zabini. Blaise court vers moi.

- Oh Zabini, Zabini, Zabini… Ne sois pas pressé, je vais te tuer. Mais tttt, chacun son tour. D'abord Weasley.

Elle me lance un autre sort que mon protego bloque à peine. Zabini se place devant moi et lui lance un Avada en hurlant :

- Pas ma fille, salope. »

Il a visé en plein cœur. Elle ne sourit plus. Elle ne sourira plus. Au milieu du chaos et des sorts qui s'entrecroisent, oncle Blaise pose ses mains sur mon visage et embrasse mon front. Je passe mes bras autour de son cou et il me soulève un peu :

- Rose Weasley, combien de fois il me faudra te répéter de ne pas te faire tuer.

- Encore une fois. Encore mille fois. Ne me laisse pas.

- Je dois aller me battre, ma petite. Et puis… tu as retrouvé ta famille.

- C'est toi ma famille. C'est maman. C'est tante Daphné. C'est Hugo. C'est Adastré. Eux, je ne les connais pas.

- Tu les aimeras.

- Jamais plus que toi.

- Voilà ce qu'on va faire, Rosie. Tu restes en vie, je reste en vie. Et si les Weasley pensent que je vais leur donner ma morveuse comme ça, ils viendront se battre contre nous. Toi et moi, on forme une équipe. »


Les combats ont cessés. Au loin, on entend, dans la foret, la vraie armée du lord autour de lui se regrouper. C'est la fin du début.

Reed court de toutes ses forces vers mon joueur d'échec et Tom avant de leur pincer les bras :

- Lily ! Tu étais supposée rester planqué ! Toi aussi Albus. Vous étiez censés rester avec Rose. Vous auriez pu vous faire tuer.

- On savait que tu serais perdu sans nous. Et ils étaient tous là à dire que Voldemort avait pris son emprise sur toi, que maman essayait de te regagner et tout un tas de conneries… On devait venir te sauver les fesses !

- Ce que ta petite sœur essaye de dire…

- Ma petite sœur ?

- Quand elle se lance dans les armées de l'ennemi sans filet de sauvetage, c'est ta petite sœur. Quand elle tue une furie à mains nues, c'est ma petite sœur. Donc, James, ce que Lily essaye de dire c'est que tu nous manquais. Je voulais pas crever sans t'avoir revu.

Il prend le dénommé Albus dans ses bras et le serre contre lui :

- Moi vivant, tu ne mourras pas.

Je m'avance doucement et plante ma baguette dans sa nuque :

- Dommage que tu n'aies plus beaucoup de temps à vivre.

- Rose… Je peux tout t'expliquer…

- Je me fous que tu sois le fils d'Harry Potter ou de Merlin lui-même. Tu as tué Dahlia.

Une ombre passe dans les yeux de Lily. Ginny Weasley referme sa main sur ma baguette.

- Da… Dahlia, Merlin. Je l'ai oublié. Maman, je dois y aller. Je reviendrais pour le combat, je…

Elle embrasse son fils sur la joue et pose un doigt sur ses lèvres. Je comprends pourquoi elle n'est jamais venue me voir. Elle me rappelle papa. Je dois lui rappeler aussi. J'entends son cœur qui se brise, chaque fois qu'elle me regarde.

- Pars mon fils. Victoire avait raison, tu n'es pas qu'un héritier. Tu peux choisir ton destin. Tu l'as déjà fait une fois, tu te souviens ? Quoique tu aies pu en penser, quoique Zabini ait pu me souffler, quoiqu'ils aient imaginé, de toi je n'ai jamais douté. Tu es mon fils. Tu es son fils. Tu es tellement plus que ça. Tu es tellement plus que moi. Mon tout petit garçon. Pars et reviens moi.

Il essuie les larmes qui coulent sur les joues de sa mère et les portent à sa bouche.

- Je reviendrais maman. Je te le promets. Je prends Rose avec moi, j'ai besoin d'un garde du corps et elle ne laissera personne d'autre qu'elle me tuer.

Les mots semblent faire le même écho dans la tête d'Albus que dans la mienne et il se tourne vers moi :

- Rose, où est Scorpius ?

C'est Lily Reed qui répond, les lèvres rouges la voix blanche :

- Il est mort, Albus. »


Il s'est écroulé. Je ne sais pas quand les hommes ont commencé à devenir un jeu de domino. Être des pions n'étaient pas assez. De ce que j'ai compris, Scorpius ne devait pas mourir. Il devait me faire disparaitre dans la salle sur demande avec Albus et Re… Lily. Son prénom c'est Lily. La petite sœur de To… James. Peu importe. Je ne baisse pas ma baguette. Il n'a pas versé une larme pour Scorpius. Moi non plus. L'héritier de la supercherie court vers les donjons, je le suis, toujours prête à le tuer. Rien n'a changé.

Scorpius s'est fait tuer. Il n'y a pas de tueur. Pas de responsable. Pas de coupable.

Quand tout ça, peu importe ce que ça est, sera terminé, j'irais m'allonger.

Je ne crois pas que je me relèverais.

Voldemort a volé à ma vie toute valeur, James Potter a pillé ma candeur, ce soir un mur s'est écroulé sur mon cœur.

Il n'y a que pour Scorpius Malfoy que Rose n'a jamais rimé avec grandeur.

Mon amour, je n'ai plus peur.

À toute à l'heure.


Il n'essaye pas de me parler en descendant les escaliers. Après tout, il sait que je ne l'ai jamais écouté. Je me contentais de regarder et je n'ai pas vu ma famille sous mon nez. Je crois que parfois je le ressentais. Avec lui, je l'ai tout de suite ressenti. C'est pour ça que je ne l'ai jamais fui. Je n'en ai jamais eu envie. J'ai toujours eu ce sentiment de sécurité, malgré les cris. Ma vie s'est écrite en nuances de gris.

La mort de Dahlia est noire.

L'ancienne salle commune de Serpentard est jonchée de blessés. Il faut slalomer entre les corps démembrés. La guerre est un sport de l'horreur. Aux pieds des escaliers, il y a une silhouette brune allongée. Elle a les yeux fermés. Ses épais sourcils foncés pour une fois ne sont pas froncés. Elle a l'air endormi, il l'a tué. Je dois vous souler mais je ne pourrais jamais l'oublier. Il a tué Dahlia. On a trop banalisé le meurtre, désacralisée la perte. Vous pensez qu'un deuil se fait en quelques minutes. Idéalement je quitterais cette histoire avec le soleil dans les yeux, le vent dans le dos et un nouvel amant. Je vous emmerde. Vous et votre bon sens, votre envie d'aller plus vite, d'en savoir plus. Je ne veux pas en savoir plus. Je voudrais que Dahlia respire plus, mais Scorpius ne respire plus.

Il plie ses genoux pour être à son niveau et caresse son visage, il chasse les insolentes mèches brunes qui sont venus chatouiller son nez. Elle est désespérément mignonne. Elle n'a jamais été sublimement belle, irréelle. C'était une fille de la vraie vie. Une beauté à dimension humaine. Mon père aurait dit : un joli petit brin de fille. Ma baguette tombe de mes mains. Mon père aurait adoré Dahlia. Peut-être qu'ils prennent le thé à l'heure qu'il est.

Il lève à son tour sa baguette et dit tout doucement :

«

- Vigilaveris aurores.

Rien ne se passe. Je ne sais pas ce que j'attendais. Même lui n'a pas le pouvoir de réveiller les morts. Il croise enfin mon regard. Son visage est baigné de larmes. Il jette rageusement sa baguette à terre, elle atterrit à côté de la mienne. Je soupire. Mon sourire est froid et ma voix glacée :

- Tu sais quoi, je crois que je vais te laisser en vie. La mort serait une délivrance. Je veux que tu vives chaque seconde en sachant que tu l'as tué. À chaque fois qu'on te dira que tu es un héros, que tu es un martyr, aussitôt tu entendras son rire. Quand on te félicitera, tu la verras. Quand une pauvre folle t'aimera, tu ne verras que ses bras. Dahlia, elle ne te quittera pas. Le monde ne valait pas sa vie. Tu mérites de vivre sans elle.

- Tu ne comprends pas, Rosie, elle devrait se réveiller. Ça ne devait pas se passer comme ça.

- Bien sûr que je comprends, James, c'est bien James ? Toi et toute ta bande vous avez encore une fois cru que vous étiez Dieu. Vous avez joué avec la vie des gens. Vous avez voulu donner le rythme de leur souffle. L'harmonie de leur existence. Mais ça a échoué. Tu n'es pas un petit dieu, peu importe ce qu'on t'a appris. Tu es juste un abruti qui a tué sa petite copine parce qu'il se pensait plus fort que la mort. Voldemort est le mal. Mais ce sang, il est sur tes mains."

Il relève le corps inerte de Dahlia et le serre contre sa poitrine. Son corps est agité de soubresauts. Je me rappelle de la tempête. Elle l'a emporté ce jour-là. Et tout le monde a perdu. Ses yeux sont rouges. Je ne l'avais jamais vu pleurer. Je l'ai tant aimé. Je crois que c'est ce qui me déchire le plus, j'aurais enfin le droit de le faire, j'aurais enfin le droit d'aimer mon cousin. Je ne serais pas une traitresse. Merlin, c'est mon cousin. James Potter, tu m'as tout pris. Toi y compris.

Deux corps se lèvent parmi les blessés. Les jumeaux Lestrange. Ces enfoirés s'étaient caché. James me pousse par terre et protège le corps de Dahlia de son propre corps. Il la respecte plus dans la mort. Sa baguette est restée à terre. Une fois, Blaise m'a raconté que James Potter, l'original James Potter, celui qui est mort pour sa femme au lieu de la tuer, est mort parce qu'il a laissé sa baguette dans le salon. Il se sentait tellement en sécurité qu'il avait oublié que le mal rodait. On était tellement déchirés qu'on avait tout deux oublié que la mort ne nous avait pas encore attrapé.

Je crois que j'ai crié.

C'est à ce moment qu'elle a fait son entrée. Je n'aurais jamais qu'à hurler pour qu'elle se dépêche d'arriver. Elle viendra toujours me sauver.

Ses boucles chocolats tirées en arrière, elle se jette sur eux. Un instant, je crois qu'elle va les attaquer à mains nues. Elle pourrait les abattre d'un regard. La baguette chez elle, c'est pur tour de magie. Ils se tournent vers elle, elle en abat un, James récupère sa baguette et fait tomber l'autre. Soldat. Il m'a dit qu'il a eu une enfance. Je me demande combien de temps il a eu cette chance. Aux portes de l'enfer, il a conservé ses réflexes de combattant. Je ne serais jamais un soldat.

Elle le remercie puis me sourit.

Maman.

Elle me prend dans ses bras et que le monde aille se faire foutre, elle ne me lâchera pas. Pas cette fois. Maman, garde moi. Maman. Maman. Maman.

Elle me tient toujours d'un bras et se tourne vers James :

- Qu'est-ce que tu as encore fait, mon petit ?

- Je…

Les larmes l'empêchent de parler. Elle s'accroupit et m'emporte à terre avec elle. Elle ne me lâchera pas.

- Shhhh, tout va bien. Dis-moi.

- Tante Hermione… Je n'arrive pas à la réveiller… J'ai lancé ce sort pour ralentir son cœur, pour qu'ils ne voient pas qu'elle était encore vie, je les ai soumis à l'imperium pour qu'ils la déposent ici… Je devais avoir trois heures, mais son cœur, je crois qu'il s'est arrêté.

Je me mords les lèvres pour ne pas lui dire qu'il l'a peut être juste brisé. Je n'ai même plus la force de le détester. Je veux juste rentrer à la maison avec maman. Je n'ai plus de maison.

- Jamesie, mon chéri, tu as de la magie comme je n'en ai jamais vu de ma vie. Tu es l'enfant qui écrit ses prophéties. Et tu ne t'es pas reposé la dessus, tu me parles toujours de sort que j'aurais rêvé inventer. Tu as un don. Mais tu n'as jamais appris à le contrôler. Avec Voldemort tu n'as fait que l'explorer, l'exploiter. Ta magie, c'est comme ton amour, tu en as trop à donner, tellement que tu le laisses déborder. Concentre toi. Affine ton mouvement. Un coup sec du poignet. Tu vas y arriver. Je crois en toi.

Je me demande ce qu'elle voit quand elle le regarde. Le fantôme de son meilleur ami. L'ombre de la meilleure partie de sa vie. Une force magique sans aucun sursis. Moi, je vois juste un gamin meurtrier et apeuré avec le poids du monde sur ses épaules affaissées. Il ferme les yeux, tourne son poignet, donne un coup sec :

- Vigilaveris aurores. Dahlia, réveille toi. Mon amour, je t'en prie.

Sa bouche reste blanche. Les pétales sont tombées. Je ne sais pas ce que je croyais. Je sens mes larmes tomber. Le monde est flou. Le monde est fou.

- Si c'est demandé si gentiment… J'aurais jamais cru qu'il fallait juste que j'arrête de respirer pour que tu apprennes la politesse, Potter.

Le sourire me dévore le visage et sans penser, je lui crie sans virages :

- Dahlia, tu savais !

Elle me tire la langue :

- Depuis hier soir seulement ! Je suis rentrée dans sa chambre pour le tuer et il a tellement flippé qu'il m'a tout raconté…

James lève les yeux aux ciels :

- Ce n'est pas exactement ce qui a eu lieu…

- Bref, tu crois vraiment que j'aurais couché avec un Malfoy ? Je ne m'appelle pas Rose Weasley.

Elle me lance son plus beau sourire, la main de maman se resserre sur mon bras, les larmes cessent de couler. Scorpius, un instant j'avais oublié. James embrasse le front de Dahlia et maman me fait signe d'y aller. Il plante son regard brun dans le mien, le même que Ginny Weasley :

- Je sais que je ne suis pas ta personne préférée du monde entier, Rosie chérie, mais n'enterre pas Scorpius avant d'avoir vu son corps. Personne ne l'a vu mort. Si Scorpius était mort, je veux croire que je le saurais. Albus, Lily, Scorpius, Victoire, Dominique, Fred et toi, que vous le vouliez ou non, vous faites partie de moi. Si on me tuait, je le sentirais.

Dahlia le regarde et a un petit rire, insolence de l'innocence :

- Attends, depuis quand toi tu n'es plus la personne préférée du monde entier de Rose Weasley ? Merlin, je suis morte au moment où le monde s'effondrait. »

Non Dahlia, le monde tient encore debout. Le pire arrive. Et il viendra pour toi comme pour moi.

Parfois, quand je repense à cette journée, je me demande si on a bien fait de la réveiller. Si elle avait su la suite, peut-être qu'elle aurait demandé à James de vraiment la tuer.


Maman m'entraine dans un couloir désert. Les murs sont troués de silence. Elle m'attire sur un rebord de fenêtre et s'assoit. Elle a le regard sévère, tout d'un coup, ses lèvres se pincent. Mon cœur penche :

«

- Rose Jane Weasley ! Merlin, on aurait pu croire qu'en grandissant avec Daphné Greengrass et Blaise Zabini, tu aurais appris à t'attacher les cheveux. Comment tu es supposée te battre avec des cheveux plein les yeux ?

Ça c'est ma mère pour vous. La praticité avant tout. Être mère avant d'être à tous. Même au milieu d'une guerre et de ses champs de bataille déserts.

- Tu ne vas pas me dire d'aller me cacher dans un endroit protégé ?

- Ma fille n'est pas une planquée. Tourne moi le dos que je te natte tout ça.

Je sens sa main rêche passée dans mes cheveux. Ce ne sont pas les douces mains de Daphné, ce sont les mains d'une femme qui a fait la vaisselle et la guerre. Ce sont les mains de ma mère. Elle pourrait me natter les cheveux en un sort, mais ça la rassure de frôler mon cou, de s'assurer de mon pouls. Je sens ses mains assurées trembler, elle m'a demandé de me retourner pour ne pas que je la vois pleurer. Oh, maman…

- Ils m'ont dit qu'Hugo allait bien…

- À l'heure qu'il est ton frère est à son stage de basket. Je dois aller le récupérer dans deux jours. Si jamais je ne suis pas là, des parents moldus de ses copains le ramèneront au refuge. Il se rendra compte qu'il est vide et qu'on est partis mourir sans lui. Il me détestera à vie. Je lui ai promis de lui ramener une surprise. Il s'imagine que je vais lui apporter les pâtisseries françaises de ta cousine Dominique qu'il adore. Les garçons à cet âge n'aiment plus les fleurs. Et pourtant, je vais lui apporter la plus jolie des roses.

Je caresse son genou :

- Vous avez l'air heureux.

Ses mains expertes s'arrêtent :

- Rose, comment veux-tu que je sois heureuse sans toi ? Je t'ai attendu toute ma vie. J'ai grandi dans des vestiaires non loin d'ici. La journée, il y avait Ron, Harry… Mais la nuit… Comme j'ai pu me sentir seule la nuit. Je n'avais pas d'amie. J'ai croisé, en descendant, Pavarti. Elle a depuis la mort de Lavande le même regard que j'avais à la mort d'Harry. J'ai toujours rêve de trouver une femme forte, indépendante, puissante, impossible à dompter avec qui tout partager. Je t'ai reconnu dès que tu es arrivée. Ron était l'autre partie de mon cœur, Harry l'autre côté de mon âme et toi, toi, tu étais en entier tout ce que j'avais espéré. Tu es mon rêve devenu réalité Rose Weasley.

- Je ne suis pas forte, maman. Je les ai laissé gagner.

- Tu crois ? Il me semble que tu leur as tout pris. Tu ne t'es jamais fait prendre. Tu es restée toi et ils n'ont jamais réussi à le prouver, même si tu leur as toujours montré. Tu sais, ils ont toujours dit que la relation entre James et toi était dangereuse, ils t'ont dit de l'éviter non ? Ils avaient peur que s'il montrait trop de compassion pour toi on devine qui il était. Drago Malfoy disait que tu le ferais tuer. Blaise, lui, le pensait vraiment dangereux. Il pensait qu'à force de rester avec Voldemort il devenait comme lui. Harry, lui, il savait. T'avoir près de lui et ce qui lui rappelait sans cesse son humanité.

- Ça n'a pas été trop dur de le retrouver pour le perdre aussi vite ?

- Au moins, cette fois, j'ai pu lui dire à bientôt.

- Il est parti heureux ?

- Avec sa femme aux bouts des doigts, sa fille au creux des bras et ses fils sous les yeux. Lui, l'orphelin qui n'avait jamais rien…

Il aimait à dire qu'il était né comme un mendiant et mort comme un messie. Pardon, de vous interrompre, mais je n'en pouvais plus des hurlements de Daphné et Blaise. Si j'entends encore une once de cynisme, je crois que je vais tuer mon bras droit.

- Ginny ! Comment les choses vont la haut ?

Ginny hausse les épaules et me regarde silencieusement. Ma mère attache mes cheveux et nous laisse toutes les deux. Ma main se lève mais je ne la retiens pas. Dans moins de deux jours, quoiqu'il arrive, on doit aller chercher Hugo. Quoiqu'il arrive.

Après, j'irais rejoindre Scorpius. Je ne pleure pas. Je n'oublie pas.

- On m'a dit que tu me détestais, Rose.

- Je ne te déteste pas.

- Tu sais, nous les Weasley, on a les oreilles qui rougissent quand on ment.

- Je ne te détestais pas, je t'en voulais. Et maintenant…

- Et maintenant tu te demandes quel genre de monstre abandonne son fils au lord noir alors qu'elle aurait pu le sauver de Poudlard.

Je me mords les lèvres :

- Je…

- Ce n'est pas grave, Rose. Tu as le droit de me poser ces questions. Celles-là et toutes les autres. Abandonner James a été la chose la plus dure que j'ai jamais faite. Hier, j'ai ordonné à Dahlia Dolohov, une gamine de dix-huit ans, dont mon fils est fou amoureux, de tuer une quinzaine de mangemort, ce n'était pas facile non plus… Mais laisser mon fils…

- Tu as demandé à Dahlia de tuer James ?

- Non, mais quand elle n'a pas vu son nom sur la liste elle a commencé à douter de moi, de la résistance. Tu ne le sais sans doute pas, mais la semaine dernière certains de mes membres ont improvisé la destruction d'un manoir sang pur. Dedans dormait une petite fille de cinq ans. Ils ont violé la mère et laissé brulé la fille. Ce n'était pas la première fois. Dahlia, elle le savait. Elle l'a su avant moi. Il y a des pourris partout. Je les ai tué moi-même.

- Tu n'aurais pas juste pu les enfermer ?

- Est-ce que j'aurais pu ? Oui, ça m'était possible. Tu as surement vu ma fille, Lily, Reed comme elle se fait appeler ces jours ci… Elle a tout juste seize ans. Elle est venue ici pour blesser et non tuer. Je tuerais quiconque pourrait la blesser, elle et son idéale. J'irais en enfer quoiqu'il arrive.

- Tu ne veux pas la laisser comme tu as laissé James.

Elle s'assoit sur le rebord à côté de moi et ferme les yeux.

- Quand l'avada a percuté Harry, j'ai cru que mon monde s'arrêtait. Je me suis jetée dans la mêlée et j'ai tué tous les mangemorts qui me séparaient de son corps. Zabini venait de voir sa mère se faire tuer par Bellatrix. Il devait enterrer le corps d'Harry. Je connaissais Blaise Zabini, le bellâtre aux yeux verts et à la peau doré. Le suiveur de Malfoy. Le don Juan des serpents. L'amant de Grengrass. Je n'ai pas reconnu l'homme dévasté qui me faisait face. Il en a profité pour me stupefixier, tout le monde m'a cru morte en me voyant tomber.

- Et au même moment, tante Daphné faisait de même avec maman et papa.

- La révolution doit son existence à un couple de sangs purs trop occupé à s'aimer pour savoir communiquer. Si Voldemort savait… Ce soir-là, il n'a tué que l'horcruxe en Harry. Ta mère t'a expliqué ce que c'était ? Inconsciemment il avait laissé un bout de son âme putréfiée dans mon cher Harry. Harry a fini par se réveiller. Blaise nous a aidé à nous échapper et Astoria, mon amie de toujours, a juré avoir vu le Terrier bruler. C'était la fin des Weasley. Puis, ma belle-sœur Fleur est tombée enceinte. On savait comment les petits étaient raflés à onze ans, on ignorait encore comment enlever la trace… Astoria a fait semblant d'être enceinte et a recueilli la petite. Mon frère Bill l'a appelé Victoire, comme un présage. Bill ne cessera jamais de croire. On a fait de même avec Dominique, deux ans plus tard. Quand on a appris à faire disparaitre la trace, elles étaient bien trop grandes. Bill et Fleur ont été embauchés comme jardiniers et ont pu voir leurs enfants grandir.

- Mais pas toi.

- Mais pas moi. Quand j'ai accouché de James, j'ai juré de reconquérir le monde pour lui. J'ai promis. Mon fils serait heureux. Albus et Lily sont arrivés et pour la première fois depuis la disparition de Ron et Hermione, nous étions heureux. Et puis, il y a eu l'attaque des géants. Mes parents se sont fait tuer. Tout le campement s'est fait massacrer. Harry a été blessé. Luna est morte. Roxane, la dernière de mon grand frère Fred a été empalé sur un arbre. Ma douce Roxane. Je vois encore son petit visage brun et ses joues rondes. Elle a laissé nos jours vides. James venait d'avoir sept ans. Il pouvait déjà faire apparaitre un patronus corporel et faisait de la magie sans baguette. C'était un prodige. Mon tout petit. Il est venu me voir dans ma tente et il m'a dit : jolie maman, il faut que ça cesse. Toute cette douleur. Dis maman, fais la taire. Je ne l'ai pas donné. Il s'est donné tout seul. Comme j'en ai voulu à Harry. On lui avait tellement tout caché qu'il voulait tout dire à son fils. Ne pas avoir pour lui de secret.

- Il lui a dit où était l'orphelinat de Voldemort ?

- Oui. James a sonné l'alarme à incendie dans l'orphelinat le plus proche. Attendu que tout le monde soit sorti. Puis il a fait exploser le bâtiment. Le temps qu'on soit au courant, il était trop tard. Voldemort lui tendait la main. J'ai mordu la main d'Harry jusqu'au sang. Je voulais hurler. Je voulais mourir. Je ne pouvais pas le laisser. Qu'ils me prennent moi, mais pas lui.

Il est tellement simple de l'imaginer, il y a dix ans, à peine vingt-six ans, se débattant contre le sauveur qui se transformait pour elle en tueur. Ginny Weasley est une gosse en rébellion à la tête d'une révolution.

- Tu lui as pardonné ?

- À Harry ? Il n'y était pour rien. Il y a laissé son cœur ce jour-là. Tu demandais s'il était mort heureux ? Il ne connaissait la joie réelle que l'été quand James nous revenait. Le reste du temps, il était présent, souriant, mais son cœur, son cœur était absent. Sa famille avait besoin de lui, c'est ce qui le raccrochait à la vie. Mais Harry n'est jamais tout à fait revenu. Je ne pouvais pas être avec mon fils, parce mon visage était trop visible, alors j'ai décidé qu'il verrait mon visage partout. J'ai commencé l'offensive. Des centaines de guerriers portant mon visage. Zabini appelait ça du narcissisme, Harry disait que c'était génialissime. J'étais morte de toute manière, ils avaient pris ma vie.

- Non, à James, tu lui as pardonné de t'avoir laissé ?

- Tu es bien la fille d'Hermione. Tu poses les vraies questions. Tu sais personne savait que Tom était James à part ma famille, les Malfoy bien sûr et le couple Zabini… J'ai dû plus d'une fois mentir à mes troupes et préparer de fausses attaques sur mon propre fils. Lui pardonner…. Oui et non. Rien n'a jamais été pareil. Maintenant, lui et moi, on est toujours en colère. On n'arrive plus à se parler. Je lui ai dit de se méfier de Dahlia, il m'a envoyé balader. Je lui ai dit que tu étais dangereuse, il m'a balancé sur la poudreuse. Je lui envoie Eden ou Teddy, ce sont les seuls qui ont encore du crédit auprès de lui… Et il a toujours raison mon petit. Pour toi, pour Dahlia, pour comment récupérer et détruire la pierre philosophale, il a toujours raison, ça fait rire ma Lily. Depuis que son père est parti…

- De quoi est-ce qu'il est mort ?

- Il jouait au Quidditch avec ma nièce Lucy et il est tombé.

- Tout simplement ?

Elle a un sourire immense :

- Ils ne l'ont pas tué. Il est juste mort. En faisant quelque chose qu'il adorait au milieu des gens qu'il aimait. Des gens qui l'aimaient.

- Pourquoi tu n'es jamais venue me voir ?

- Tu le sais, non ? Tu as les yeux de mon père, mais tu as la bouche de Ron. Ses longs cils blancs. Son visage anguleux. Ses fossettes. Quand je te vois, Rose Weasley, j'ai envie de pleurer. Même ton prénom. Je commence Ro et le n menace d'apparaître. Je ne suis pas venue parce que je suis une égoïste. Tout en toi me rappelle qu'il est mort. Je ne lui ai jamais dit que je l'aimais.

Ma main se referme sur la sienne.

- Il parlait de toi tous les jours. Comment tu avais effrayé le chat d'oncle Charlie, comment tu lui avais appris à piquer l'argent que Percy caché sous son lit, comment tu l'entrainais à ne pas pleurer aux blagues de Fred et Georges, comment vous écoutiez les histoires de Bill tard le soir… Maman c'était Harry, mais papa, c'était toi son héros. Il ne m'a jamais parlé que de l'amour que tu avais pour lui.

Elle essuie ses larmes et fronce les sourcils :

- Et je t'ai laissé… Quand ils t'ont attaqué à la fin de la sixième années, j'ai voulu venir te chercher. Je savais ce que tu subissais toute l'année, dès ta première année le petit Scorpius nous avait dit que si tu ne voyais pas ta mère, tu allais te jeter par la fenêtre de la tour de Serdaigle…

Weasley, pense à moi le 23 juillet.

- Ça ressemble bien à un truc que Malfoy dirait.

- Ce gosse était ce que cette guerre a fait de mieux… Mais ta sixième année, c'était un nouveau niveau dans l'horreur. James était persuadé qu'ils allaient te tuer. J'avais les mains encore pleine de terre du corps de son père. Alors, je suis partie te chercher.

- Je t'ai vu ce jour-là, j'ai cru avoir rêvé.

- C'est moi qui rêvais. Blaise Zabini ne t'aurait jamais laisser partir. Il l'a dit toute à l'heure, tu es sa fille. Et moi, je suis une étrangère. »

Je n'ai pas le temps de lui répondre qu'une paire de bras me soulève. Puis une autre. Et une autre. On m'embrasse et on caresse mes cheveux. Mille et un mots doux. On cherche à qui je ressemble le plus. Bill, le seul des cinq que je connaisse, conclue : À aucun, elle est bien trop jolie. L'un des jumeaux réplique : Bien plus jolie que tes filles ! . Bill fait la moue pendant que les deux autres ne cessent de me sourire. Je devrais me sentir étouffer au milieu de ces inconnus. Je me sens respirer.


« Ah, Rose, tu es venue. Je pensais que ta nouvelle famille allait te garder. Tu t'es souvenue que j'existais ?

- Arrête de faire ta reine du drame, Adastré. Je ne pourrais jamais t'oublier. Tu me dois deux gallions.

- Oh tu sais, mon petit ami me doit une demi jambe.

- Je sais que tu m'en veux aussi. Je ne regrettes pas.

- Même maintenant ?

- Pourquoi maintenant ?

- Même maintenant que tu veux mourir ?

Je m'allonge à côté d'elle. Elle prend ma main dans la sienne. Je pourrais presque m'endormir.

- Je n'ai jamais eu autant de raison de vivre. Mon frère, ma mère, une famille qui a le sourire de mon père… Blaise, Daphné et toi toujours sur terre.

- Et pourtant…

- Il n'est plus là. J'ai déjà connu ça. C'est pas le type de souffrance qui s'en va. On n'a jamais eu des étoiles pour faire des vœux et cet enfoiré a filé. J'avais rien eu le temps de souhaiter. J'ai plus de cœur, juste de la rancœur. Et quand elle partira, quand je lui pardonnerais, comme je lui ai toujours pardonné, rien ne battra plus dans ma poitrine. Je ne sais pas si je vais mourir, je sais que sans lui je vais partir. »

Iphigénie, non pardon, Dominique rentre en claquant la porte de la salle des blessés. La silencieuse Nini, celle qui ne fait pas un bruit. Son beau visage par la colère est défiguré. Je me rappelle qu'elle a du sang de vélane. Elle peut charmer comme le soir où elle a sauvé Adastré et elle peut aussi devenir une monstruosité. Albus, Lily et Victoire la suivent en courant. Elle se jette sur Neville et parvient à le plaquer au mur :

«Où est-il ? Où est Scorpius ?

- Dominique…

- Où est mon petit frère ? Où est ce qu'il est ?

- Il est parti…

- Où ? Il ne serait pas parti sans moi.

- Il est mort, ma chérie.

- Non.

Lily me regarde. Le non de Dominique fait écho au mien. Non. Il y a mille ans, j'ai dit non. Je me suis levée et j'ai dit non. Qu'est-ce qu'il m'est arrivé ? Eden place sa main sur son bras. Elle le repousse sans le regarder :

- Ne me touchez pas ! Montrez-moi son corps, s'il est mort, montrez-moi son corps ! »

Les hurlements de Dominique sont soudain recouverts par la voix de Voldemort. L'heure est écoulée. Il faut aller se battre.


Ginny ne se trompait pas, James a toujours raison. Scorpius est en vie. J'aurais préféré qu'il soit mort.

Ils ont volé son corps et l'ont accroché sur une croix au milieu du stade de Quidditch. Son sang laisse une marre noirâtre sous ses pieds nus. Devant, Voldemort sourit. À ses côtés le général Dolohov se tient droit, la mine austère.

James serre les poings. Je dépose une bise sur sa joue. Il enroule ses bras autour de moi et souffle dans mon oreille. Je ne veux pas mourir en guerre. Pas avec lui. Je ne veux pas mourir en garce. Je veux le voir donner à Voldemort le coup de grâce. Je le serre près de mon cœur et pardonne ses erreurs. Fais ce que tu as à faire, Potter.

Albus et Lily se glissent à côté de moi pendant que James part affronter son destin. Le joueur d'échecs et la fille à qui tout réussit.

Voldemort et James échangent des sorts, les deux armées les regardent hypnotisées. Le Lord a récupéré ses forces. Ils entrent dans une danse macabre, absence de transe. Voldemort explose d'un rire sinistre :

«
- N'oublie pas qui t'a appris à te battre, Potter.

- Ingrat comme ton physique, Jedusort, qui t'a appris le sort que tu viens d'utiliser ? Qui l'a inventé ? Moi.

- J'ai pillé tout ce que tu savais, tu m'as rendu plus fort encore. Tu es juste un gosse qui va payer son arrogance.

- Et toi tu es laid. Écoute, on a chacun nos défauts. Moi au moins, je peux respirer par le nez.

La foule explose de rire. Voldemort brandit sa baguette vers nous. James en profite pour lui lancer un sort qui touche ses cotes. Il m'avait toujours dit de viser le cœur. Je ne saurais jamais où s'arrête Tom et où commence James.

- Assez, gamin. En garde !

Leurs sorts se croisent et se bloquent. L'éclair vert de Voldemort est peu à peu aspirer par le bleu de celui de James. Une explosion retentit. Ils sont tous les deux propulsés à terre. James se relève le premier. Voldemort agite sa baguette, rien ne se passe :

- Tu vois, Jedusort, j'aurais pu te tuer. Certains diront que j'aurais dû te tuer. Mais ma petite cousine m'a rappelé quelque chose que mon père m'a souvent répété… Il y a des sorts pire que la mort. Je viens de te vider de ta force magique. Tu vas vivre. Vivre comme un moldu.

Personne n'aurait pu prévoir ce qui allait se passer après. Sur le papier, la guerre était gagnée. Le papier, ça se déchire. Une lueur a brillé dans les sombres yeux bleus de Dolohov. Il s'est glissé derrière le Lord affaibli et a explosé sa tête à terre. Dahlia a été la première à réagir. Je n'oublierai jamais le triste espoir dans sa voix de toute petite fille :

- Papa ?

Il a explosé de rire, lui a tourné le dos et a hurlé à l'armée de sangs purs :

- Le sang mêlé Jedusort est mort ! Obéissez moi. Battez-vous pour votre sang.

James a voulu s'interposer, rien ne s'est produit. Son sort avait aspiré sa magie à lui aussi. Le père Dolohov l'a envoyé à terre. Lily à côté de moi a poussé un rugissement de lionne. Dahlia l'a prise par la main, Ginny les a rejoint et ensemble elles ont couru vers le nouveau chef des armées. Je voulais les accompagner. Je voyais encore le corps de Scorpius de son sang s'égoutter. Tout faire pour m'en rapprocher. Dominique, Victoire et Astoria étaient en première ligne pour le sauver. Blaise et Drago essayaient de s'engouffrer dans une faille. Albus m'a retenu par la manche. Derrière nous la serre était en feu et on entendait des hurlements d'enfants. J'ai regardé une dernière fois le corps de Scorpius, j'ai senti le regarde d'Albus suivre le mien. La même hésitation. Une petite fille a hurlé. Mes pieds se sont mis à avancer.

L'aquamenti ne parvenait pas à retenir l'incendie. Le feu était magique. Il n'y avait pas d'autres solutions que de porter les enfants et d'en faire léviter le plus possible. Tante Daphné est venue nous aider. Le toit de la serre sur elle s'est effondré. J'ai enlevé les pierres une par une, mes mains étaient en sang. J'ai entendu sa respiration. Ses mains avaient été brulées. Vingt minutes plus tôt je m'en moquais. De leur douceur, je riais. Daphné. Quel monstre ingrat tu as élevé. J'ai vu une petite main s'agiter entre les pierres. J'ai voulu la tirer. Elle a cessé de bouger. L'enfant avait arrêté de respirer. Sa petite main est restée là, en l'air. Drapeau mort. Daphné m'a hurlé de m'en aller.


Je suis passée devant ma mère qui se battait contre cinq aspirateurs d'âme, elle m'a fait un clin d'œil. Son patronus a brillé avec encore plus d'intensité. Hermione Granger n'a jamais peur.


James m'a attrapé par le bras. Je ne l'ai pas vu se relever. Il m'a gracié de son plus beau sourire de canaille :

«

- Rosie ! J'ai une surprise pour toi ! Regarde le ciel.

J'ai levé la tête. Une dizaine de dragons.

- Mes dragons ? Mais Albus a dit que c'était un piège… Qu'il n'y avait jamais eu de dragon.

- Eh, j'allais pas refuser à ma cousine préférée sa revanche. Si elle veut des dragons, elle a des dragons. Ils sont dressés pour attaquer que les personnes portant un masque. Et s'ils brulent ce château de malheur, tant mieux. Maintenant, excuse-moi, mais mon futur beau-père a l'air à deux doigts de tuer ma mère. Et si Ginny Weasley est un leader insupportable, ma maman fait les meilleurs tartes aux citrons de la terre.

Impuissante, j'hurle dans son dos :

- Mais James, tu n'as plus de pouvoir ! »

Non, mais il a de la ressource. Il balance au visage de Dolohov de la poussière ce qui permet à Ginny de passer derrière lui et de se rapprocher du corps de Scorpius. Je cours derrière elle. Lily est propulsée à mes pieds. Dahlia semble à bout de force.

«

- Lily, Lily-jolie, tu m'entends ?

- Rose ? Je ne te vois pas Rose.

- C'est rien. Ta chute a dû te faire mal à la tête. Ferme les yeux.

- Rose, Rose, Rose, je ne te vois pas… Rose.

- Ça va aller, tout va bien se passer.

- Est-ce que Dahlia gagne ? Son père…

Elle a le visage en sang et tient encore debout seulement parce que James vient d'intercepter en pleine poitrine le sort que lui réservait son père. Elle tombe à genoux, protège le corps de James dans un ultime effort…

- Oui. Il est presque anéanti, tu n'entends pas James qui rit ? Et regarde ! Ta mère détache Scorpius. Cet abruti nous a fait peur pour rien. Ne t'endors pas Lily, tu vas rater la meilleure partie. Dominique vient d'éventrer une Furie. C'est le coup de main Weasley, ça. Oh, Neville vient d'éteindre le feu sur la serre, une petite main s'agite pour qu'il la prenne dans ses br…

Lily a un petit rire et une toux douloureuse :

- Tu es une bien meilleure menteuse que James. Tu es comme Albus. Quand j'étais petite, il me disait que grand-mère Weasley avait tissé les étoiles pour me protéger. Et qu'elle me regardait chaque nuit derrière la laine de la voie lactée. Tout ce qu'il disait, j'y croyais. Albus est en vie ? Dis la vérité.

- Oui, il aide encore à la serre.

- Maman ?

- Je ne la vois pas, mais je vois ses sorts.

- James ?

- Je ne sais pas. Il est à terre.

- James n'est pas du genre à mourir en silence. Il va bien. Tout ira bien.

- Tu voulais te battre pour revoir…

- Et j'ai perdu la vue. Je sais encore à quoi tu ressembles, je sais encore ce qui nous rassemble. C'est assez pour vivre. »

Et un instant je l'ai cru. J'ai cru que ce serait assez. Maman a posé sa main sur mon épaule puis elle a couru vers Dahlia, Victoire s'est assise à côté de Lily. D'instinct je me suis levée. Je savais ce qui allait se passer.

Maman s'est mise devant le général et il a craché à terre. Derrière eux, un dragon crachait son feu sur les lignes ennemis. Maman n'a pas réfléchi. Elle s'est juste retournée et sa bouche a articulé un silencieux : pardon.

Puis elle l'a attrapé par la taille et l'a entrainé avec elle dans les flammes. Il ne restait plus d'eux deux que de la cendre. Hugo pourrait l'attendre jusqu'à la chaleur en décembre. Elle ne reviendrait plus. Elle ne reviendra plus.

Un monde est né quand mon père est parti, ce monde est mort avec ma mère.

Scorpius sur sa croix a gémi.

J'ai senti la rage en moi exploser. Je ne sais pas combien j'en ai tué. Pas assez. Beaucoup trop. Tous ceux qui se tenaient entre lui et moi. J'aurais déchiré les cieux. J'aurais bravé Dieu. Je ne m'en souviens plus. Je les ai tous tué. Et c'est ce moment qu'a choisi Scorpius pour arrêter de respirer.

J'ai donné un énorme coup de poing dans sa poitrine meurtrie. Il n'avait pas le droit. Pas maintenant. Son cœur est reparti. J'ai détaché les liens à la main. Ma baguette avait trop de sang. Son corps est tombé sur le mien. Poids lourd et soulagement de velours. J'ai senti son cœur battre faiblement contre mon épaule. Il était en vie.

Il s'est mis à pleuvoir. Son sang a délavé mes larmes.


Dans deux jours…

L'air est sec, le soleil tape sur ma blouse noir. Je remonte mes lunettes de soleil. L'Espagne n'a pas le même climat que le nord de l'Ecosse. J'ai encore cinq minutes.

Ils ont nommé Blaise premier ministre. Daphné a dit qu'elle ne serait pas étonnée s'il avait sauvé tante Ginny, juste pour prendre ce poste en temps voulu. Drago a trinqué en riant. Ginny a souri silencieusement. Blaise ne les a pas regardé. Il m'a attrapé par le bras et m'a serré une dernière fois contre lui. Je suis partie sans dire au revoir à personne d'autre.

J'ai laissé ma baguette entre les lits de Lily et Adastré. Albus m'a regardé faire sans rien dire. James et Dahlia étaient déjà partis.

Ils reviendront.

Pas moi.

Je n'y retournerais pas.

J'ai trempé la baguette que m'avait laissé mon père dans trop de sang. Et on a carbonisé le mien.

Les sportifs sortent du gymnase. Il les dépasse tous d'une tête. Je les entend rire et le charrier : mortel ta passe Granger, tu pensais que le coach était un coéquipier ? Il la cherche des yeux. Il ne me voit pas tout de suite. Je sens l'inquiétude le prendre. Je lève la main. Il crie mon prénom. Un de ses amis me siffle. Il explose de rire et me prend dans ses bras.

«

- J'aurais dû savoir que tu étais là ! C'était tellement évident. Mais l'année n'est pas terminée et tu ne viens jamais pour la Toussaint… J'ai laissé ton cadeau dans mon casier je vais…

- Tttt, tu ne vas nulle part. Parle moins vite, sac à puces, je ne comprends rien. Comment tu pouvais savoir que j'étais là ?

- Bah je l'ai vu lui, Rosie-pot-pourri !

- Premièrement, cette insulte est nullissime même pour toi. Deuxièmement qui est là ? Hugo. Dis-moi.

Il se recule et fronce les sourcils. Ce gosse a toujours été beaucoup trop intelligent.

- Rose, qu'est ce qui se passe ? Où est…

Non. Ne dis pas son nom. Pas maintenant. Je ne suis pas encore prête. Une main se pose sur mon épaule. Je ne sursaute pas. Je ne l'ai jamais vu arriver. Je suis habituée.

- Hugo, pourquoi tu n'irais pas chercher le cadeau de Weasley ? On t'attend là.

- Weasley ? Par Morgane, vous deux vous avez les parades amoureuses les plus dégoutantes et déroutantes de l'histoire. Je vais chercher le cadeau, mais quand je reviens, je veux des explications.

Je continue de sourire. Je souris jusqu'à m'en faire mal aux dents. Même quand il a le dos tourné, je continue de sourire au cas où il se retournerait. Enfin, quand il est entré dans le gymnase, je fais face à Scorpius. Il enroule son bras autour de ma taille. Il a une cicatrice au-dessus de l'œil droit et la même cicatrice que moi au-dessus de la lèvre supérieure. Pas trop mal pour un macchabé.

- Je vais bien.

- Je ne t'ai pas demandé comment tu allais. Par contre, je vais te demander de te tirer.

- Non.

- Je ne rentrerais pas avec toi. Hugo et moi, on va partir et personne ne nous retrouvera.

- Tu lui as demandé son avis ?

- On nous a demandé notre avis à nous ?

- Et regarde ce que ça a donné. Il a ses amis ici. Il a Lily. C'est sa meilleure amie.

- Je ne peux pas y retourner, Scorpius.

- Je sais.

- Alors qu'est-ce que tu me demandes ?

- Quelque chose de bien plus difficile.

- Rien n'a jamais été facile.

- C'était trop difficile de me dire adieu ? Tu es passé voir tout le monde sauf moi.

- Qu'est-ce que tu en sais ? Tu étais inconscient.

- Albus me l'a dit, c'est lui qui m'a demandé de venir chercher Hugo aussi. Je savais que tu serais là.

- Tu veux que je le laisse, c'est ça ?

- Oui.

- Il est tout ce qu'il me reste.

- Ce n'est pas un objet. C'est en traitant les gens comme des propriétés qu'on créé des James, des Voldemort ou des Rose Weasley.

- Je suis salement esquintée, hein ?

Son pouce caresse ma joue. Mes yeux se ferment. Mémoire du corps. Mémoire de la chaire.

- Pas à l'extérieur, pour ce que ça compte… Tu pourrais toujours faire tomber n'importe quel idiot fou amoureux de toi.

- Les apparences sont sauves. Tante Daphné serait heureuse.

- Adastré t'en veut tu sais.

- Tu sais, quand tu disais que c'était la fin de leur monde, je n'avais jamais réalisé qu'on en faisait partie. Ils vont créer un nouveau monde et je n'en veux pas. Scorpius, la seule chose que je veux c'est ma mère et le seul truc qui s'en rapproche c'est les yeux de mon petit frère. Et toi, tu veux que je reste seule. Que je le laisse sans rien lui dire comme elle l'a fait avec moi. Est-ce que tu sais combien je l'ai détesté ?

- Oui.

- Je ne veux pas que mon petit frère me déteste. Je le fais déjà assez.

- Alors dis-lui.

- Tu veux que j'ai un lien pour me forcer à revenir.

- Non.

- Tu me laisserais partir sans me retenir ?

- Oui.

- Tu devais être fou amoureux de moi, Scorpius Malfoy. »

Hugo revient. Son sourire et son paquet à la main. Encore une fois, je vais tout déchiqueter.


Scorpius nous fait transplaner jusqu'au refuge. Lily, un bâton à la main attend devant l'entrée. Hugo, toujours en pleure, embrasse ma joue et lâche ma main. Elle entend ses pas et tombe dans ses bras.

Je leur tourne le dos et continue ma route.

Seule.

Il s'appelait James Potter, qu'ils ne disent pas qu'il était des leurs comme ils l'ont dit de Merlin.

Elle s'appelait Ginny Weasley, qu'ils ne disent pas qu'elle était des leurs comme ils l'ont dit de Merlin.

Elles s'appelaient Victoire et Dominique Weasley, qu'ils ne disent pas qu'elles étaient des leurs comme ils l'ont dit de Merlin.

Je m'appelle Rose Weasley, qu'ils ne disent pas que j'étais des leurs comme ils l'ont dit de Merlin.

Elle s'appelait Hermione Granger, il s'appelait Ron Weasley, il s'appelait Harry Potter, ne prononcez plus leurs nom. Laissez-les en paix.

«

- Weasley ! Merlin, je me suis fait crucifier il y a moins de 48 heures, est-ce que tu pourrais marcher moins vite ?

- Je ne bluffais pas, je ne rentre pas Malfoy.

- Moi si.

- C'est ton soucis.

Il me prend par les épaules.

- Non, c'est ton soucis. Je suis ton soucis, Weasley. Leur monde peut bien s'écrouler, ça ne va pas changer. Je suis à toi et tu es à moi, ça a toujours été comme ça. Alors ouais, je rentre. Mais c'est pas la bas chez moi. Ce monde n'est pas le mien même si je m'en sors bien. C'est toi mon monde.

- Je suis une épave qui vient de perdre sa mère et qui ne s'en remettra sans doute jamais. Je ne suis le monde de personne, Scorpius. Je suis un cataclysme.

- Je t'ai dit que tu pouvais partir, je n'ai jamais promis de ne pas te suivre.

- J'ai cru crever quand j'ai pensé qu'ils t'avaient tué, ne me le fais pas regretter.

- Oh, donc il est trop tôt pour te rappeler que tu as enfin avoué être follement amoureuse de moi ? »

Pour toute réponse, je lui enfonce mon coude dans le ventre. Une de ses cicatrices explose. Ça sera toujours ainsi. Peu importe combien de couches de temps viendront se coller à nos souvenirs meurtris, la moindre brise nous rappellera qu'on n'est pas guéris. Qu'on ne guérit pas de la vie. La paix est leur mirage, on leur a laissé. Ses illusions leur avaient manqué.

La chaire est à vif. Mais Scorpius, quand tu me souris, j'aurais presque trouvé un sens à ma vie.

Tu fredonnes une chanson en andalou, j'en invente les paroles :

Il est facile d'aimer des cœurs sans tendresse,

Je reviendrai, traversant mer et pays,

Et je te raconterai ce qu'il advint de moi…


Maintenant vous savez tout…

Damn. Si vous saviez combien j'ai stressé avant de publier ce chapitre, je n'étais plus sure de rien. J'ai commencé cette histoire parce que je savais que Tom était James. J'avais cette image tellement précise en tête. Et Rose, à la base Rose était là juste pour se faire duper, pour permettre la supercherie… Puis, vos reviews où vous aimiez tous Tom m'ont fait douter...

Est-ce que tout cela n'était pas un peu trop facile ?

J'ai choisi de garder ce twist. Il y en a d'autres que j'ai effacé, James devait mourir, Scorpius aussi. Finalement, Hermione est morte… Je ne suis pas sure que ce soit moins douloureux.

J'espère ne pas vous avoir déçus, j'espère que ce chapitre était assez clair…

Je tiens sincèrement à tous vous remercier. Je n'ai jamais eu un pareil soutien que pour cette histoire. Vous m'avez permis d'écrire cette histoire en 72h à peine. Merci. Mille fois merci. Aux anonymes comme aux habitués.

Et à toi aussi, surtout, ma Lil's, pour tes mots dans l'ombre qui me poussent à mettre mes écrits dans la lumière.

À bientôt avec Fred « Bakary » Weasley,

A-L