Lucy

Un piège simple mais efficace. Je n'avais rien vu venir, tellement perdue dans mes pensées. Et je suis tombée dedans, à pieds joints et avec le sourire en plus ! Quelle idiote ! Lorsque ma magie et ma force me furent volées, ils m'entrainèrent dans la ruelle sombre où ils se cachaient. Je ne pouvais rien faire. Mes bras, mes jambes, même ma voix, ne m'obéissaient plus. Leurs mains commencèrent à se mouvoir le long de mon corps, leurs doigts pervers avaient défaits ma blouse et mon soutien-gorge, défense dérisoire, tomba à mes pieds. Moi, je ne fis rien. Je ne pouvais rien faire. Prisonnière.

Si impuissante ! Bats-toi, Lucy, bats-toi ! Romps le charme ! MAINTENANT.

Seul mon souffle saccadé et mes yeux qui s'agrandissaient sous la peur, la panique et l'horreur, exprimaient mon terrible dégoût face à l'abomination que ces hommes s'apprêtaient à me faire subir.

-« Belle prise ce soir » grogna de plaisir le plus grand des trois, sûrement le chef.

Bouge ! Bouge !

C'était inutile, à cause du sort, j'étais paralysée, livrée à leurs pulsions obscènes.

-« Je passe en premier ! Après, vous vous démerdez ! » cracha leur chef tout en ne me quittant pas des yeux.

Ses mains se posèrent sur mon ventre et remonta lentement jusqu'à mes seins. Il semblait se délecter de la peur qui se lisait dans mes yeux.

Non !NOON ! NOOOOOOON ! Arrête. ARRETE ! Je t'en supplie. Arrête !

Je sentais ses mains palper, caresser, pincer mon corps.
Ses doigts, soudain, abandonnèrent mes seins meurtris et tout en me regardant, il attrapa ma cuisse et il fit remonter sa main, lentement. Il retroussa ma jupe et posa ses grosses paumes sur mes fesses. Les malaxant, les caressant. Entretemps, sa bouche s'écrasa sur la mienne et lécha lentement mes lèvres que je gardais désespérément scellées. Ses mains toujours sur mes fesses, il me regarda avec un sourire tordu et sa bouche descendit le long de mon sein gauche. Il se colla encore plus à moi et sur ma cuisse, je sentis une bosse dure. En comprenant la nature de cette protubérance, mes yeux s'agrandirent sous la répulsion.

Tout mon corps, tout mon être se déchirait. Souillée. Salie. Mes larmes coulèrent sur mes joues. Des larmes de honte et de désespoir.

Dans mon esprit, une litanie, une prière, une supplication.

Arrête ! Arrête ! Arrête !

Respirer devient de plus en plus difficile

Plus de fierté. Plus d'honneur. Plus de dignité. Cela allait me briser. Je le savais. Pire, ils le savaient et cela ne faisait que les exciter d'avantage.

Soudain, le charme qui m'emprisonnait se rompit et, avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, les mains sur mon corps disparurent. Je me sentis glisser le long du mur, plaquant mes bras sur ma poitrine, la compressant jusqu'à l'étouffement. Des sanglots s'échappèrent de ma gorge tandis que mes larmes redoublèrent. Je sentis un frisson parcourir mon échine et bientôt, ce fut tout mon corps qui fut pris de tremblements, de spasmes irrépressibles. Une affreuse nausée me prit. La bile me monta aux lèvres mais rien ne put passer outre leur barrage.

Des larmes plein les yeux, je ne voyais plus rien. A peine distinguais-je deux silhouettes au sol. Il me semblait aussi qu'une autre se faisait battre par une ombre aux yeux rouges. Ce dernier ne semblait pas pouvoir s'arrêter. Une odeur de rouille me parvint. Du sang.

Ma respiration devint sifflante et un hoquet s'échappa de mes lèvres.

Natsu

Un coup dans le ventre du glaçon. Un autre dans la tronche de la conserve. Je m'amusais bien !

Zut, le nudiste réplique.

Grognant, je me jetais sur lui.

Cette odeur !

Je relevai la tête. Les larmes de Lucy. Je reconnaitrais cet effluve entre mille. C'était, de loin, celle que je détestais le plus.

Lucy, qu'est-ce qui se passe ?

Arrêtant soudain tous mes gestes, j'analysais la provenance de ce parfum haï, ignorant les regards interrogateurs du reste de la guilde. C'est vrai que ce n'est pas habituel que je m'arrête avant l'arrivée d'Erza.

Lucy, j'arrive !

Ne réfléchissant pas plus longtemps, je me dégageai d'un geste de la poigne du percé et me ruai vers la sortie de la guilde.

-« Oy, l'allumette, qu'est-ce que t'as ? » demanda la voix de Grey alors que j'étais déjà dehors.

Lucy est en danger ! Je ne comprenais pas comment je le savais mais cette certitude me serra le cœur si fort qu'une douleur presque intenable me transperça. Mais cela ne m'arrêta pas.

Si quelqu'un a osé toucher à ma Luce !

Rien qu'à cette pensée, une colère noire courut dans mes veines.

L'odeur se fit plus forte, j'y suis ! Je tournai le coin de la ruelle et je m'arrêtai une seconde. Une microseconde. Avant que la plus folle des rages ne s'empare de moi !

Lucy, MA Lucy, contre le mur, ne portait plus que sa jupe retroussée sur sa taille, un grand blond pétrissant ses fesses et mouvant les lèvres sur sa poitrine. Deux idiots rigolaient en le regardant faire. Les yeux chocolat étaient emplis d'un désespoir abyssal et de douloureuses larmes coulaient sur ses joues. Un cauchemar. Cette image se grava instantanément au fer rouge dans ma mémoire et dans mon cœur.

Apercevant la pierre bleue que tenait un des hommes, je me précipitais vers lui.

Un sort d'immobilisation !

D'un coup, la pierre se brisa et j'éloignais le pervers de ma partenaire. Du coin de l'œil, je vis Lucy glisser le long du mur, ses pleurs s'amplifiant. Un voile rouge me tomba alors devant les yeux et je perdis toute maîtrise. Ma rage me contrôlait. Plus rien ne m'atteignait. La soif de sang et de vengeance emportait tout.

Soudain, un sifflement, un hoquet. Je me retournai et mon cœur, mon pauvre petit cœur se brisa. Lucy tremblait de tout son corps. Elle leva les yeux vers moi et dans ceux-ci, je vis une déchirure. Une déchirure dans son âme.

-« Luce » soufflais-je doucement en m'approchant d'elle.

M'accroupissant devant elle, je voulus la toucher mais elle s'éloigna vivement en retenant un hurlement de terreur. Alors, sans faire de geste brusque, j'enlevais ma tunique et la lui tendis pour qu'elle se couvre. Mais elle ne fit rien et continua à regarder le sol en tremblant. Devant son manque de réaction, je la lui mis sur les épaules, faisant bien attention de ne pas la toucher, sachant que dans son état, elle ne le supporterait pas. Me mettant à côté d'elle, je lui présentais ma main, lui demandant de passer son bras dans la manche. Je ne la forçais pas. Elle me regarda faire, ses tremblements et ses larmes ne s'arrêtant en rien. Doucement, elle décolla son bras de sa poitrine, engouffra sa main dans le tissu et rabattit vite le revers sur ses seins. Je lui fis un petit sourire encourageant et me plaça de l'autre côté. Ici, il n'y avait pas de manche. Je lui tendis encore une fois ma main, l'invitant à passer son bras. Ce qu'elle fit. Une fois mise, elle serra la tunique contre son corps, s'enveloppant dedans, comme pour se protéger. Ses tremblements diminuèrent. Tout doucement, j'approchais mes mains pour boucler le ceinturon afin que la tunique tienne en place. Me voyant approcher, sa respiration s'arrêta et ne recommença qu'une fois que mes doigts éloignés.

Je me levai et lui tendis la main, pour qu'elle la prenne cette fois. Elle me regarda intensément pendant un moment. Ses larmes se tarirent. Je lui souris pour la rassurer.

-« Na-Natsu ? »

Ce fut presque inaudible mais je l'entendis quand même. Mon sourire s'élargit. Et doucement sa main se plaça dans la mienne. Je la serrais, si heureux qu'elle soit là. Je l'aidais à se relever, prenant grand soin de la toucher que là où elle était couverte et malgré cela, à chaque fois, un frisson l'agitait. Et à chaque fois, mon cœur hurlait de rage et de douleur.

-« Lucy, je vais te porter jusqu'à chez toi. Tu y seras en sécurité. D'accord ? » lui dis-je d'une voix douce.

Après un moment d'hésitation, elle hocha la tête. J'ouvris mes bras pour qu'elle y vienne. Elle devait y venir d'elle-même, lui imposer un contact physique, après ce qu'elle avait enduré, la ferait fuir. Un pas, deux pas et elle fut devant moi. Mais je ne refermais pas mes bras sur elle, bien que j'en mourrais d'envie. Tout mon corps appelait son corps. Dans mes bras, elle était en sécurité. Et moi, je ne demandais que ça. Petit à petit, ses deux bras s'enroulèrent autour de mon cou et elle s'approcha de moi, me donnant ainsi la permission que j'attendais. Mes bras se refermèrent sur elle. Je voulais tellement la serrer sur mon cœur mais je n'osais pas. J'avais peur. Peur de la faire fuir. Peur qu'elle croit que son cauchemar recommence. Peur de lui faire peur.

A ce moment, Grey et Erza arrivèrent et s'arrêtèrent en nous voyant.

Vous en avez mis du temps ! Mais c'était sûrement mieux comme ça.

Ils fixèrent la scène qui se déroulait devant eux, les yeux agrandis par la surprise et l'incompréhension. Lucy dans mes bras, tremblant de tout son corps, vêtue de ma tunique, moi qui la serrais avec précaution contre mon torse et les trois hommes par terre en sang. Ils firent vite le lien entre l'état de ces trois inconnus et mes mains tachées de rouge, ce que je n'avais même pas remarqué. Grey voulut parler mais Erza l'en empêcha. Elle regardait par terre, près du mur, les vêtements et le soutif de Lucy, déchirés. Et elle comprit. Dans ses yeux, je vis brûler la haine, la haine à l'état pur. Le regard de Grey suivit le même chemin. Je lus dans ces yeux le choc, bien vite remplacé par la même étincelle inquiétante. Erza me fit signe d'emporter Lucy chez elle et m'indiqua qu'eux allaient finir le boulot ici. Allaient-ils les tuer ? Ou les faire emprisonner ? Je ne savais pas ce qu'elle avait en tête. Et je m'en fichais. L'important maintenant, c'était Lucy. Glissant un bras dans le creux de ses genoux, je la pris dans mes bras et en courant, l'amena chez elle. Durant tout le trajet, elle garda sa tête enfouie dans mon cou.

Lucy

La silhouette se tenait devant moi.

Encore un ?! Noon !

-« Luce » entendis-je. « Luce » ? Dans ma tête, tout s'embrouillait, s'emmêlait, tournoyait et dans ce maelström, je ne ressentais qu'une seule chose. Peur. Panique. Terreur.

Quelque chose me toucha.

Non ! Ça ne peut pas recommencer !

La dangereuse main s'éloigna et quelques instants plus tard, je sentis une légère caresse sur mon dos. Mes bras enserrant toujours ma poitrine, je vis des yeux verts si foncés qu'ils en apparaissaient noirs. Ils reflétaient une telle tristesse. Une main me montra une manche. Je regardai le vêtement sans comprendre mais mon bras, lui, savait ce qu'il fallait faire. Difficilement, je décollai mes doigts de ma poitrine et les plongeai dans le tissu, le rabattant bien vite sur moi. Et je recommençai, cette fois avec l'autre bras. Serrant le tissu sur moi, je me sentis un peu mieux. L'odeur que le vêtement dégageait m'apaisait. C'était chaud, doux et cela me protégeait. Mais encore une fois, des mains s'approchèrent de moi. Ma respiration se bloqua dans ma gorge mais elles s'éloignèrent bien vite, heureusement, et mes poumons se gonflèrent à nouveau.

Un bruit devant moi, quelqu'un se lève. Lentement, les larmes diminuèrent et je pus distinguer la personne qui me faisait face. Cheveux roses, les mêmes yeux verts foncés que j'avais vus plus tôt, il me sourit. Je le connaissais. A mesure que l'état de choc se dissipait, je pus mettre un nom sur ce visage.

-« Na-Natsu ? »

Natsu, c'est mon….partenaire, ami. Il me tendait la main. Natsu. Je plaçai la mienne dans la sienne. Une douce pression. Natsu.

Il m'aida à me lever. Il me toucha à travers le tissu.

Non !

Un frisson de peur, les sueurs froides revinrent.

-« Lucy, je vais te porter jusqu'à chez toi. Tu y seras en sécurité. D'accord ? »

Une voix. SA voix. La voix de Natsu. Ce prénom m'apaisait. Je le répétais en boucle dans ma tête. Il m'ouvrit les bras. Je le regardais. Oui. Natsu. Dans les bras de Natsu, je suis en sécurité. Encouragée par ce sentiment, je m'approchais. Natsu est chaud, doux et il protège. Comme le tissu autour de mon corps. J'enroulais mes bras autour de son cou et sentis ses bras se refermer sur moi.

Sers-moi ! Sers-moi fort Natsu ! le suppliais-je en silence. Dans ses bras, je suis en sécurité. Cette certitude s'était renforcée. Il me tenait contre lui. Je le sentis vaguement bouger puis il me souleva et se mit en route. J'enfoui ma tête dans son cou, respirant son odeur et laissant mon corps se réchauffer doucement à son contact.

Pendant le trajet, je ne bougeais plus, laissant lentement la crise d'angoisse se dissiper.

Natsu est venu me sauver! Il me ramène chez moi !

Le bruit d'une porte qui claque me fit lever la tête. On était chez moi. Ce décor familier me fit du bien. Mon coéquipier traversa mon appart' et me posa sur mon lit. La douceur familière de mes draps ainsi que l'odeur de ma lessive me poussèrent à vite me blottir sous la couette et à poser ma tête sur l'oreiller. Natsu s'était accroupi devant mon lit, me regardant dans les yeux avec inquiétude.

-« Merci » articulais-je difficilement.

Il me fit un petit sourire et se leva.

-« Pars pas ! ». J'avais essayé d'élever la voix mais ce ne fut qu'un murmure qui sortit de ma bouche. Il se retourna quand même.

-« T'inquiète, je n'allais pas partir, Luce ! » m'assura-t-il.

Vaguement rassurée, je ne tins plus et mes yeux se fermèrent. Je m'endormis.

La ruelle.

« Belle prise ce soir »

Leur regard plein de concupiscence.

Les mains, les lèvres sur mon ventre, mes seins, mes fesses.

Un hurlement.

Je me réveillai en sursaut. Les draps collaient ma peau. La peur courait dans mes veines. J'avais revécu les événements d'hier. Je sentais encore ses mains sur moi comme si il était là.

-« Luce… »

Il s'approcha de mon lit. D'un coup, je rejetai mes draps, me levai et me jetai dans ses bras.

-« Merci ! Merci d'être intervenu ! Merci ! » répétais-je à son oreille, tandis que mes larmes tombaient sur son épaule.

Il me serra dans ses bras et à son contact, je me calmai. Sentant sûrement les battements de mon cœur et ma respiration ralentir, il se décolla et me regarda. Eclairés par le soleil matinal, il plongea son regard dans le mien, voulant sûrement savoir quelles émotions m'agitaient.

La peur à la pensée de ce qui se serait passé s'il n'était pas intervenu et que mon cauchemar recommence.

Le soulagement d'être chez moi, en sécurité, loin de ces hommes.

La gratitude envers lui qui avait éloigné cet homme de mon corps.

La honte d'avoir été réduite à un objet.

Le dégoût à la sensation toujours présente de ses mains, de ses lèvres sur mon corps.

Il soupira tristement. Il aurait voulu m'éviter ça, je le savais. Une de ses mains se posa sur ma nuque et il toucha mon front du sien. Je fermai les yeux.

-« Tu veux te laver ? » me demanda-t-il.

Me laver ? Sentir l'eau chaude sur mon corps, le laver là où il m'a touché. Faire disparaître ses traces…Comment je n'y ai pas pensé avant ?!

-« Oui !»

Il s'écarta et fouillant dans mes tiroirs, il sortit un pyjama à manche longue et le pantalon assorti.

Je sentis une grande vague de tendresse traverser mon corps à cette vue. Il savait que je me sentirais mieux dans des vêtements couvrants, épais.

Je jetai un œil sur ce que je portais.

La tunique de Natsu ? C'est pour ça qu'il est torse nu !

Je ne me souvenais pas. Quand ? Mon « sauvetage » était un peu flou dans ma tête.

Entretemps, il s'était approché et me tendit mes vêtements. Les prenant en lui faisant un petit signe de tête en guise de remerciement, j'entrai dans ma salle de bain.

Me débarrassant de ce que je portais, je me mis vite sous l'eau chaude. Je me savonnai, me calmant en respirant le parfum si familier de mon gel douche et de mon shampooing. Je me lavai une, deux, trois fois mais la pression de ses mains et de ses lèvres restait gravée sur mes hanches, mes fesses et ma poitrine. Je frottai de plus en plus fort, la panique monta en moi et bientôt de grosses plaques rouges apparurent là où l'éponge avait fait de violents allers-retours. De frustration, je me remis à pleurer, laissant l'eau emporter mes larmes. Je restai sous la douche un long moment et j'évacuai ma douleur en essayant d'oublier ses mains invisibles qui me parcouraient le corps. Je compris soudain quelque chose et cette révélation vint me frapper comme un coup au ventre. Si Natsu n'était pas intervenu, je me serais fait violer. Trois fois. De suite. Dans cette ruelle. Evidemment je l'avais déjà compris mais là j'en saisissais toute la portée et mes larmes redoublèrent. Quand je n'en eus plus une seule dans mon corps, je coupai l'eau et sortis de la douche.

Je dois être forte ! Ne pas l'inquiéter ! Ravale tes larmes !

Je m'habillai rapidement et sortis de la salle de bain.

En m'entendant, Natsu se retourna vers moi et il vit.

-« Luce, t'as pleuré ? »