Je suis retombée sur un extrait de l'épisode 16x05 il y a quelques temps, où Ellie parle de ses "trois jours de décrochage mental" et vu les regards entre elle et Nick, on ne nous a pas tout dit! Cet OS pourrait être ce week-end en question, ou bien un autre les années suivantes, choisissez ce que vous préférez ;)


Ellie avait une tradition. Chaque année, quand les beaux jours s'installaient, elle se réservait trois jours pendant lesquels elle se coupait du reste du monde. Elle aimait appeler cela son "décrochage mental annuel". Pas de téléphone, de télévision ou d'ordinateur, et c'était généralement l'occasion pour profiter de la nature. Elle avait commencé ce rituel après son divorce, quand elle avait décidé de s'accorder du temps pour elle.

Après de longs détours, et au moins une heure de retard sur le planning qu'elle avait prévu, elle arrêta enfin la voiture à la lisière d'une forêt de Virginie.

- Si tu m'avais laissé prendre mon téléphone, on aurait pu mettre le GPS et ne pas se perdre.

- Mais c'est le but de week-end Nick. Se couper de la technologie pour se retrouver soi-même.

- En attendant, c'est cet endroit que tu n'arrivais pas à retrouver, répliqua Nick d'un air narquois.

Ellie se contenta de lever les yeux au ciel. D'accord, elle pensait se souvenir du chemin mieux que cela. Ils étaient venu dans ce coin pour une enquête, quelques mois auparavant, et elle avait tout de suite songer à y revenir pour sa retraite annuelle. Une belle forêt, une rivière et un lac, des chemins de randonnée, l'endroit avait beaucoup de potentiel pour la saison estivale.
Mais entre la découverte de cet endroit, et ce week-end, il s'était écoulé un certain temps, beaucoup d'enquêtes et d'autres choses qui avaient occupées la mémoire de Ellie. Et pour sa défense, l'une des routes avait été fermée depuis la dernière fois, et la déviation conseillée lui était totalement inconnue.

- Alors, quelle est la version officielle? demanda Nick en aidant Ellie à sortir ses affaires de camping du coffre.

- La version officielle de quoi?

- De ce week-end? Tu n'as pas dit à McGee que je venais avec toi, fit-il remarquer.

- Je n'ai rien dit parce qu'il ne l'a pas demandé, répondit Ellie. Et puis c'est toi qui a insisté pour venir.

Ellie était consciente qu'il y avait de la mauvaise foi dans sa réponse. Au travail, si elle ne s'était pas étendu sur les détails de son week-end, c'était précisément pour éviter ce genre de question de la part de ses collègues.

- Je n'ai pas insisté, répliqua Nick.

Il s'approcha de Ellie qui chargeait un sac sur son dos, et se pencha jusqu'à ce que son visage soit au niveau du sien. Elle pouvait sentir son souffle sur sa joue.

- J'ai gagné ce pari à la loyale, murmura-t-il. Tu ne te rappel pas?

Elle détestait quand il faisait cela. Elle aimait, mais elle détestait également. Il savait qu'il arrivait à la troubler quand il se trouvait aussi proche, et il en profitait.

- Viens, on a encore le camp à monter, dit Ellie pour changer de conversation en s'éloignant de Nick.

Nick jeta un autre sac en travers de son dos, un sourire en coin face à la réaction de Ellie.

Leurs affaires en main, ils s'enfoncèrent dans la forêt pendant quelques minutes. Ils s'arrêtèrent une fois arrivée à un endroit jugé convenable. En l'occurrence une petite clairière, à l'ombre du soleil de ce début d'été.

Malgré leur détour sur la route, il était en tôt et ils purent monter leur camp et partir en randonnée suffisamment tôt pour profiter de la fraîcheur de la matinée. Le silence de la forêt n'était rompu que par le chant des oiseaux et les plaisanteries de Nick. Ellie appréciait toujours d'une manière particulière les moments qu'ils passaient ensemble hors du cadre du travail. Elle se sentait plus libre, dans ses actes, dans ses paroles et surtout elle appréciait la compagnie de Nick plus qu'elle ne lui avouerai jamais.
C'était peut-être pour ça qu'elle l'avait laissé gagner ce pari. Car si Ellie devait choisir quelqu'un pour l'accompagner ce week-end, elle n'avait que Nick en tête.

Après quelques heures de marche, ils s'arrêtèrent déjeuner au bord d'un cours d'eau. Les pieds dans l'eau, Ellie savourait chaque instant de ce paysage si différent des rues animées de Washington. Elle aimait sa ville d'adoption, mais pour une fille de la campagne de l'Oklahoma, c'était toujours un plaisir de se retrouver au milieu des arbres, au milieu de nulle part. En face d'elle, Nick dévorait la fin de son sandwich et faisait la conversation. Plus Ellie le regardait, et plus elle se disait que, si elle connaissait beaucoup de facettes de Nick, elle venait juste de découvrir le Nick en vacances. Celui en t-shirt et bermuda. Il avait l'air détendu, plus qu'elle ne l'avait jamais vu.

- Je crois que nous avons largement mérité une pause, déclara Nick une fois qu'ils eurent fini de manger. Je vote pour une petite séance de bronzage!

- Je te conseil de de garder ça, déclara Ellie en le voyant à attraper le bas de son t-shirt.

- Pourquoi? Tu as peur de ne pas pouvoir te contrôler? Parce que si tu t'inquiètes de ma vertu, je dois t'avouer que…

- Je voulais dire qu'il y a du sumac vénéneux dans le coin, qui pourrait recouvrir ton joli dos de pustules rouges urticantes. Mais c'est toi qui vois, le coupa Ellie en haussant les épaules.

Elle avait fait assez de camping avec sa famille pour ne plus se faire avoir. Elle avait appris à reconnaître ce poison.
Nick hésita quelques secondes avant de se décider à enlever son t-shirt qu'il étala sur l'herbe avant de s'allonger dessus.

- Je tente ma chance Bishop. Le soleil m'appelle!.

- Ne viens pas chouiner dans ma tente ce soir parce que ça te gratte.

Ellie glissa un regard sur son dos musclé avant de se souvenir qu'elle était censée avoir l'air agacé.

- Je te laisse en tête-à-tête avec le soleil, dit Ellie en se levant après avoir remis ses chaussures.

Tu vas où ?

- De l'autre côté de la rivière. Je vais aller explorer un peu, je pense.

- Fait attention à ne pas te perdre en jouant au scout, la taquina Nick.

- Mon sens de l'orientation est très bon!

- Bien sûr, on a vu ça à l'aller.

Ellie lui lança quelques brins d'herbes arrachés en représailles. C'était étrange de voir comment ces chamailleries étaient devenues leur moyen de fonctionnement. Elles étaient aussi naturelles qu'un "bonjour" le matin et un "bonne nuit" quand ils parlaient tard le soir.

L'agent hésita à prendre son téléphone, mais se ravisa pour n'emporter qu'une paire de jumelles afin d'observer les oiseaux et autres animaux qu'elle pourrait croiser.

À quelques dizaines de mètre de l'endroit où ils s'étaient arrêter, le niveau de la rivière baissait, et des rochers permettait de la traverser à gué. Même si l'eau n'était pas profonde, Ellie préférait ne pas tenter le diable.

Elle posa prudemment les pieds sur les grands rochers plats. L'eau ruisselait doucement entre les pierres, sans se préoccuper de leur présence. Sans se préoccuper de les rendre glissantes. Malgré toutes ses précautions, à mi-chemin, le pied que l'agent venait de poser glissa, causant une chute inévitable. En l'espace d'un instant, Ellie se retrouva les fesses dans l'eau et mit quelques secondes à comprendre ce qui lui arrivait.

Au loin, Nick se redressa en entendant ce "splash", curieux d'en connaître la cause. Il ne put retenir un rire en voyant Ellie sortir de l'eau, ruisselante. Partout où Ellie passait, on ne s'ennuyait jamais. Après s'être assuré qu'elle n'avait rien, il s'autorisa à se moquer.

- Évite d'enlever ton t-shirt pour sécher. Il y a du sumac dans le coin, répéta-t-il d'un ton moqueur.

Ellie lui décrocha un regard noir. En fouillant dans son sac à dos, elle fut d'abord contente d'y avoir laissé son téléphone, puis déçu de ne pas y avoir de rechange. Elle avait laissé ses vêtements dans la tente. Elle enleva son débardeur et fut tentée de lancer le vêtement humide sur Nick pour se venger, mais préféra l'étendre au soleil. Lui au moins avait une chance de sécher, contrairement à son short qu'elle allait devoir continuer à porter. Heureusement pour elle, les températures de la journée lui permettaient de rester quelques heures avec sa brassière de sport et son short.

- Tu me rejoins pour bronzer? demanda Nick qui s'était tourné sur le dos.

- Je crois que je n'ai pas le choix, répondit Ellie en grommelant.

Elle avait bien songé à aller marcher pour sécher, mais ses chaussures trempées rendaient l'idée beaucoup moins plaisante. En restant une petite heure au soleil, avec un peu de chance ses affaires auraient le temps de sécher avant qu'ils ne repartent.

Avant de s'installer, Ellie se tartina de crème solaire, consciente qu'elle avait toujours plus tendance à rougir qu'à bronzer. Puis elle s'allongea dans l'herbe sur le ventre, et le laissa aller à profiter de cette pause bien méritée. Elle venait à peine de fermer les yeux, quand elle sentit la main de Nick sur son épaule. Il laissa courir son index par deux fois sur son omoplate, prétextant des bouts d'herbe collés sur sa peau, pour lui éviter un bronzage "tâche de rousseur".

Ellie ne fit aucun commentaire afin de dissimuler sa gêne. Les contacts avec Nick lui procuraient toujours un effet particulier, et le fait que Nick soit torse-nu à côté d'elle n'aidait pas. Elle sentait toujours sa sensation de sa peau sur son épaule, et se mit à songer à ce que cela aurait donné si elle lui avait demandé de lui étaler de la crème solaire dans le dos. Ses mains larges massant son dos. Avec n'importe qui d'autre cela aurait été un geste d'entraide anodin, mais avec Nick cela prenait tout de suite des dimensions plus...sensuelles. Ellie cligna des yeux plusieurs fois pour se sortir cette image de la tête, ce n'était vraiment pas le moment de penser à ça. Elle tourna la tête de l'autre côté, pour n'avoir que la nature sous les yeux, consciente que le rouge de ses oreilles n'était pas seulement dû à la chaleur de l'été.

Une petite heure plus tard, Nick et Ellie se mirent à nouveau en route pour continuer leur randonnée. Les chaussures de cette dernière n'avaient pas complètement sèches, mais cela lui procurait une sensation de fraîcheur qui n'était pas désagréable. Ils finirent leur ballade au bord d'un lac pittoresque. Ils profitèrent de la récompense de leur longue marche en échangeant peu de mots. La fatigue était l'une des causes. L'autre était que la simple compagnie de l'autre pour profiter de ce moment était suffisante.

Ils prirent le chemin du retour avant que la fin de l'après-midi ne soit trop avancée. La lumière commençait à décliner quand ils arrivèrent enfin à leur camp. Ils étaient épuisés par autant de marche, mais c'était une fatigue que Ellie appréciait. Cela voulait dire que l'objectif de ce séjour était accompli: sa journée avait été bien remplie, et elle s'était vidé la tête de tout ce qui l'attendait à Washington.

Dans sa tente, Ellie se changea et se nettoya sommairement avec quelques lingettes. Quand elle ressortit, elle eut la surprise de voir que Nick, en plus d'avoir fait de même, avait commencé à allumer un feu de bois.

- Tu sais que c'est interdit de faire des feux en pleine forêt? lui demanda Ellie en s'avançant.

- Ce n'est pas vraiment du camping s'il n'y a pas de feu pour faire griller le repas et quelques chamallow, répliqua Nick en la regardant à travers les flammes qui commençaient à monter.

- Tu as amené des chamallow?

L'estomac d'Ellie se mit à gronder pour montrer son intérêt face à cette nouvelle.

- Bien sûr, tu me prends pour qui Bishop?

Après un dîner cuit au feu de bois, ils prirent plaisir à retomber en enfance et griller leurs guimauves au bout de bâtons. Il y eut un certain nombre de ratés, mais ils dégustèrent de bon coeur ceux qu'ils purent sauver. C'était un moment de joie et de quiétude qu'aucun élément extérieur ne venait perturber. Il n'y avait personne, aucun détail pour leur rappeler qu'ils n'étaient pas censés se trouver ici tous les deux.

Qu'ils n'étaient pas censés regarder le feu tomber à l'état de braises en étant collés l'un contre l'autre. Ellie la tête lovée dans le cou de Nick, son bras à lui l'enlaçant pour caresser son épaule.

Qu'ils n'étaient pas censés échanger un regard aussi long en se souhaitant bonne nuit.

Mais ils le faisaient quand même. Parce que dans cet endroit loin de tout, ou le temps semblait s'être arrêté, ils avaient l'impression de pouvoir faire ce qu'ils voulaient.

ll était plus de deux heures du matin quand Ellie fut sortie du sommeil par une drôle de sensation dans sa tente. L'esprit encore embrumé, elle tâtonna autour d'elle pour trouver sa lampe. Elle trouva étrange la sensation de froid pendant qu'elle cherchait l'objet. Puis le bruit qui tapait contre la toile de tente la réveilla un peu plus: la pluie. Elle n'était pas violente, mais semblait durer depuis un moment sans intention de s'arrêter.
Ellie sentit une goutte tomber sur sa joue et grimaça. La lampe ne fit que lui révéla ce qu'elle venait de comprendre : sa tente prenait l'eau. Deux nouvelles gouttes roulèrent doucement sur son bras et Ellie jura. Elle avait pris toutes les précautions du monde pour monter sa tente, et avait vérifié son matériel avant de partir, comment cela pouvait-il arriver?

Elle ramassa en vitesse son sac et ses affaires qui avaient déjà commencé à prendre la pluie. Décidément, elle avait un problème avec l'eau aujourd'hui. Son sac sur la tête, elle alla frapper à la tente de Nick. Il lui ouvrit encore tout ensommeillé. Il la regarda débarquer dans sa tente sans trop comprendre ce qui arrivait.

- Ma tente a pris l'eau, je viens chercher l'asile ici, expliqua Ellie à Nick qui affichait toujours une moue d'incompréhension sur son visage endormis.

- Tu as vraiment quelque chose avec l'eau aujourd'hui.

- Oui, j'avais remarqué, grogna Ellie en étalant son sac de couchage.

Elle grogna à nouveau, constatant que le bas de son duvet était tout humide.

- Si ça se trouve tu offensé une sorte d'esprit de la nature.

- Tu devrais te rendormir au lieu de continuer à dire n'importe quoi.

- Ou bien, c'est la technologie qui te demande de revenir à elle.

- Bonne nuit Nick.

- D'accord, mais tu viens avec moi, dit-il en attrapant Ellie qui essayait de trouver une position pour dormir. Sinon, tu vas continuer à t'agiter comme une puce, et aucun de nous ne va dormir.

Il passa ses bras chauds autour de la taille de Ellie pour la ramener contre lui et qu'elle arrête de bouger. Passé les premiers instants de surprise face à cette proximité, elle commença à se détendre. Nick, lui, s'était déjà rendormi. Ellie sentait sa respiration régulière dans son cou et bientôt, bercée, elle s'endormit à son tour.

Leur répit fut cependant de courte durée. Cette fois-ci, ce fut Nick qui réveilla Ellie. La malédiction de la tente non-étanche semblait s'être étendue, et s'était à présent dans celle de Nick qu'on pouvait voir un filet d'eau couler contre la toile. Ils attendirent quelques minutes, croisant les doigts en espérant que la fuite de s'arrête. Mais il n'en fut rien. Une déchirure laissait librement couler l'eau, et ils n'avaient rien pour la réparer. S'ils ne voulaient pas passer le reste de la nuit les pieds dans l'eau, ils allaient devoir regagner la voiture.

Ils empaquetèrent quelques affaires dans leur sac de randonnée et, la lampe d'Ellie en main, s'enfoncèrent dans la nuit. La voiture n'était pas très loin, mais sous la pluie et en pleine nuit n'importe qu'elle distance semblait interminable.

Les deux agents arrivèrent trempés à la voiture, et se dépêchèrent de se mettre à l'abri dans l'habitacle.

- Tu n'avais pas dis que tu t'occupais de regarder la météo?

- Ils avaient annoncé qu'il y aurait "quelques nuages" cette nuit, objecta Ellie en essorant ses cheveux dans un t-shirt. Quelques nuages mon oeil !

Ellie enfonça les clés dans le tableau de bord et alluma le chauffage.

- Tourne-toi, demanda-t-elle à Nick pendant qu'elle se contorsionna pour passer sur le siège arrière. Je vais mettre des vêtements secs. Et ne regarde pas dans le rétroviseur, je te surveille.

- Tu sais, je t'ai déjà vu presque…

- Ne finis pas cette phrase! le coupa Ellie

Nick ne put retenir un sourire en coin. Il se tourna face à fenêtre passager comme Ellie le voulait. Quand elle eu fini, il prit un malin plaisir à réclamer la même chose.

- Dit l'homme qui montre ses muscles dès qu'il en à l'occasion, rétorqua Ellie en détournant le regard pour fouiller dans son sac.

Nick rejoignit Ellie à l'arrière de la voiture. La plupart de leurs affaires étaient restées dans la tente, et ils allaient devoir se contenter d'un plaid qui traînait dans la voiture d'Ellie pour passer la nuit. Nick cala son dos contre la portière et allongea ses jambes sur la banquette autant qu'il lui était possible de le faire. Une fois installé, il offrit ses bras à son amie. Ellie était trop fatiguée et trop frigorifiée pour refuser une offre si tentante. Elle tira le plaid sur eux posa la joue contre le tissu doux de son sweat.

Pour la première fois de la journée, ils purent enfin s'endormir au sec.

Quand ils ouvrirent les yeux le lendemain matin, la pluie avait cessé. Ils sortirent prudemment dehors, les pieds endoloris de la marche de la veille et le dos ankylosé de la nuit dans la voiture. Ils retournèrent jusqu'à leur camp en évitant les flaques sur le chemin.

Sur place, ils constatèrent que les tentes étaient toujours bien debout, si ce n'est qu'elles n'étaient plus étanches du tout. Tout ce qu'ils avaient abandonné à l'intérieur avait besoin de sécher.

- On peut peut-être les mettre au soleil pendant qu'on se promène aujourd'hui? suggéra Nick en essayant d'être optimiste.

La réponse de dame nature ne se fit pas attendre. Une fine pluie se mit à tomber, recouvrant le paysage alentours de gouttelettes d'eau. Nick et Ellie échangèrent un regard dépité, le reste du week-end était fichu.

Ils replièrent leurs affaires sous la pluie qui, cette fois, avait au moins le mérite d'être en partie retenue par le feuillage des arbres. Quelques heures plus tard, ils étaient de retour dans l'appartement d'Ellie. Tout avait été déballé et mis à sécher dans la salle de bain. En vidant le sac de nourriture, Nick mit la main sur la poche de guimauve.

- On a même pas tout manger, une honte, lança-t-il pour détendre l'atmosphère.

- On était supposé les finir ce soir, lui rappela Ellie, toujours déçue de la fin anticipée de son week-end.

- Ça peut toujours se faire.

- Comment ça ? demanda Ellie depuis le salon.

- Je peux rester ici. Tu es censé être en congé jusqu'à demain midi, et moi avec ma soeur pour sa permission, pourquoi annuler nos plans? Il n'y aura pas de rando, mais si tu as une bougie et des fourchettes, on peut s'arranger. On peut même planter la tente dans le salon si tu veux, au moins elle ne risquera pas de fuir.

- Tu es fou Nick Torres, lui répondit Ellie avec un sourire jusqu'aux oreilles.

- Tu ne peux pas dire non au camping à la maison!

Il avait eu raison, elle n'avait pas pu dire non. Allongée au milieu du salon, sur des couvertures réquisitionnées dans ses placards, Ellie fixait le drap au-dessus de sa tête, perdue dans ses pensées. Nick avait fini par l'avoir sa tente dans le salon. Après la construction de la tente-drap, ils avaient passé le reste de l'après-midi à parler, jouer aux cartes et grignoter des chamallow fondus à la bougie.

La fatigue était arrivée plus vite que prévu, accompagnée des premières courbatures. Épaule contre épaule, les deux agents étaient allongés dans leur abri de fortune, entourés de coussins.

- Pourquoi es-tu comme ça avec moi? demanda Ellie dont les paupières devenaient de plus en plus lourdes.

- "Comme ça" comment ?

La voix de Nick aussi trahissait sa fatigue.

- Attentionné, dit Ellie après un instant de pause. N'importe qui serait rentré chez soi après le fiasco de cette nuit. Mais tu as créé une tente au milieu de mon salon pour finir ce week-end jusqu'au bout. Pourquoi?

- J'aime quand tu es heureuse. Et ce week-end te rendait heureuse, alors je ne pouvais le laisser complètement tomber à l'eau. Sans mauvais jeu de mot.

Ellie esquissa tout de même un sourire. Elle allait mettre un moment à se réconcilier avec la pluie. Elle avait fini par plonger son regard dans celui de Nick, comme c'était si facile de le faire. Ils n'étaient éclairés qu'à la lumière d'une lampe de chevet, mais elle pouvait voir chaque détail de son visage. Ou bien était-ce parce qu'elles les connaissaient par coeur à force de les avoir observés à la dérobé, chaque fois que son collègue venait à son bureau.

Son regard toujours ancré dans celui de Ellie, Nick avait attrapé sa main gauche et s'était mit à faire danser ses doigts entre les siens.

- Je devais passer trois jours avec toi. Je ne pouvais pas laisser la météo m'enlever ça, dit-il finalement.

Plus personne ne parla ensuite. Par crainte de dire quelque chose de trop qui briserait cet instant suspendu dans le temps. Ils continuèrent de profiter du spectacle qu'offrait la vue de l'autre et s'endormirent ainsi. Main dans la main.

Nick était parti plus tôt le lendemain, comme ils l'avaient prévu. Ils avaient jugé qu'il serait mieux que Nick aille travailler dès le matin, pour ne pas attirer les soupçons en les voyant arriver en même temps.

Pour la pause déjeuner, Ellie avait rejoint ses collègues dans leur diner favoris. Assis sur les banquettes Nick, McGee, Kasie et Palmer l'écoutaient raconter son week-end. Une version un peu arrangée, qui occultait la présence de Nick, mais pas ses mésaventures.

- Qu'est-ce que tu as à l'épaule? demanda Kasie quand Ellie enleva sa veste pour échapper à la chaleur.

- Je ne sais pas, sûrement une irritation. J'ai pris des coups de soleil, confia Ellie.

Elle avait remarqué, ou plutôt sentit, les brûlures dans la matinée. À tous les coups, cela venait du moment où elle s'était allongé dans l'herbe pour bronzer.

- C'est marrant, on dirait un coeur, repris la scientifique en regardant de plus près.

Ellie se contorsionna pour apercevoir l'objet de l'intrigue. Effectivement, elle avait une petite tâche un peu plus rouge que le reste, dont la forme faisait penser à un coeur. Elle haussa les épaules, incapable de fournir une explication à Kasie, avant de reprendre la conversation avec les autres.

En sortant du restaurant, Nick et Ellie échangèrent un regard complice. Personne ne semblait avoir deviné leur manège. Pour les autres, un journée ordinaire suivait son cour mais pour ces deux, c'était le début d'un autre secret. S'ils avaient pu parler, ils auraient dit qu'ils commençaient à devenir un peu trop bon à ce genre de jeu.