Petit commentaire avant de commencer…

            Bon. Nous allons gentiment ignorer la fin du tome V en ce qui concerne la mort de Sirius, et continuer notre petite histoire comme si de rien n'était. Je pense que personne ne m'en voudra?

            L'histoire se continue sur deux niveaux, comme auparavant, et chaque chapitre du deuxième trimestre se penchera sur un personnage particulier.

            Concernant la mort de Plume… *Lychee ravie par toutes les reviews qu'elle a reçues*… J'FAIS C'QUE J'VEUX, MWAHAHAHAHAHAAAAH!!! Vous verrez bien dans quelques chapitres…

Sangs, deuxième trimestre.

Chapitre I

Raven.

Le trois janvier. Rentrée du Nouvel An à Poudlard.

Les effectifs scolaires totalisaient treize Gryffondors, dix Serdaigles, onze Poufsouffles et trois Serpentards. Plus un certain nombre d'individus suspects qui n'avaient certainement pas leur place dans les dortoirs qu'ils occupaient.

La quasi-totalité des parents avaient retiré leurs enfants de l'Ecole, terrifiés par l'annonce du "léger incident" de Noël. Le moral était au plus bas. Anéanti, Dumbledore avait installé bon nombre de sorciers et de Mercenaires dans les chambres désormais vacantes. Les quelques rares adolescents restant, déjà assez angoissés, avaient de plus l'immense privilège d'assister à des cours quasi-particuliers. Et chacun s'attendait, au fond de lui, à voir apparaître un Mangemort au détour du couloir.

Charmante ambiance, donc.

Le Pr Chourave ôta ses gants en soupirant.

- On en reste là pour aujourd'hui, dit-elle seulement. Vous pouvez y aller.

Harry, Hermione et Ron échangèrent un regard, puis reposèrent les ciseaux à ongles avec lesquels ils taillaient méticuleusement leurs Bonzaïollis. Il restait encore une demi-heure avant la sonnerie, mais ils n'étaient pas surpris. Leurs professeurs n'avaient jamais été moins motivés que depuis une semaine, excepté Plume, peut-être. Ce qui n'était pas pour leur remonter le moral.

- Il n'y a même plus d'intérêt à étudier, ronchonna Hermione en ôtant sa blouse.

- Ca, Hermy, c'est quelque chose que je n'aurais jamais pensé entendre sortir de ta bouche, sourit Ron. Remarque, je n'aurais jamais non plus pensé être d'accord avec toi.

- Comment peux-tu espérer garder le moral quand les profs eux-même se morfondent?! explosa la brunette. J'ai cru mourir ce matin avec Binns!

- Sans parler des trois heures en presque tête-à-tête avec Snape, marmonna Harry.

- Et encore, on est la classe la plus nombreuse, coupa Ron. Pensa à Ginny qui se retrouve juste avec Colin Crivey… Nous, au moins, on est quatre.

Ils se tournèrent tous les trois vers Draco qui rageait ses affaires, un peu plus loin. Le seul septième année à part eux.

Alors que tous les fils et filles de Mangemorts avaient depuis longtemps déguerpi, le blond restait là. Harry savait que c'était sur ordre de son père et de Voldemort lui-même, et que cela arrangeait bien Dumbledore en même temps. Il savait aussi que son vieil ennemi maigrissait de jour en jour. Et qu'il était d'une pâleur à faire peur.

- Malefoy?

Le Serpentard leva sur lui un regard indifférent.

- Tu manges avec nous?

Hermione et Ron hésitèrent, puis l'invitèrent également du regard. Le blond eut un reniflement ironique.

- Bien sûr. Et je pourrai raconter à mon Maître que j'ai fait ami-ami avec Potter le Survivant.

- Ca te permettra de mieux nous espionner, le coupa Hermione. Dépêche-toi de boucler ton sac, on t'attend.

Le blond hésita, puis les suivit sans un mot.

Une demi-heure plus tard, ils étaient installés dans la Grande Salle, à présent lugubrement déserte, devant le repas préparé par les Elfes de maison fidèles au poste. Un peu plus loin, un petit groupe d'adultes, dont Plume, Raven Whitewinter, Charlie et Killian Zachary, avalaient morosement leur pitance.

- Je préférais encore quand les deux abrutis mettaient le bazar, maugréa Ron en faisant allusion à une mémorable bataille de brocolis orchestrée par leur professeur de DCFM et son ami blond.

- Rien ne t'empêche de les remplacer, répliqua Harry sans conviction.

Le rouquin ne répondit même pas.

- Vous avez des nouvelles de Melilot? demanda Hermione au bout d'un moment. Elle était sympa…

- Ne parle pas d'elle au passé! protesta Ginny en s'installant avec eux. Salut tout le monde. Je suis passée à l'infirmerie. Rien. Elle dort, c'est tout. Charlie est très inquiet. (Elle sourit légèrement.) Il a l'air d'avoir le béguin…

- Elle a quatorze ans! protesta Ron. Et puis il faudrait déjà qu'elle se réveille…

- Le professeur Zachary cherche une solution! rétorqua vivement Hermione. Et il n'y a pas de raison qu'elle ne trouve pas!

Ginny eut un gloussement moqueur et lui balança un coup de coude.

- Ce cher Pr Zachary, mmh? Le mec trop beau avec qui tu bosses tous les soirs? C'est vrai qu'il a de beaux yeux, et un joli petit c –

- Ginny!

Hermione était rouge comme une brique.

- Ouiiiiiiii? fit innocemment la cadette des Weasley. J'au dit quelque chose qui ne fallait pas?

- Non je ne… Il y a des gens autour de nous, fit sèchement la brunette.

- Oh, allez, c'est vrai qu'il est beau quoi…

Harry et Ron échangèrent un regard épuisé et même Draco, qui n'avait pas encore ouvert la bouche, leva les yeux au ciel. Les rares adolescentes demeurées au Château n'avaient d'yeux que pour les nouveaux locataires.

- Whitewinter aussi est bien, mais il préfère les mecs, continua Ginny. (Les trois garçons recrachèrent leur bouchée mais n'eurent pas le temps d'intervenir qu'elle enchaînait.) Mais Tamalo'th est plus sexy! conclut-elle joyeusement. Et plus amusant.

- Ce type est dangereux, marmonna Ron entre deux bouchées de pommes de terre.

- Pas plus que toi quand tu postillonnes, rétorqua sa sœur. Ferme ta bouche!

- Je ne postillonne pas! s'indigna le Gryffondor.

- Harry, un parapluie s'il te plaît, demanda imperturbablement Ginny au brun qui dissimulait un sourire.

- Harry, dis-lui!

- Attends, je mets ma capuche.

Draco eut un bruit étouffé à côté d'eux, et Hermione lui tapota gentiment le dos.

Ron lança un regard foudroyant à son ami, puis lui plaqua froidement son assiette – pleine – sur le visage.

Le reste dégénéra très vite et Raven et Plume vinrent joyeusement participer.

- Dix jours de cachot.

- Trois tours du parc à poil en courant.

- Laver les dents du Calamar Géant.

- Ramoner toutes les cheminées du Château.

- S'habiller trois jours en filles.

- Elle est super celle-là!

Grand Chef et Griffe Percevent rivalisaient joyeusement de propositions de punition pour les deux amis.

- Messieurs, messieurs, les interrompit gentiment Dumbledore, avant de se tourner vers Raven et Plume qui attendaient, penauds. Bon. Ecoutez-moi, tous les deux, soupira-t-il. Vous êtes l'un et l'autre responsables de l'entraînement d'une grande partie des individus présents à Poudlard. Vous êtes l'un et l'autre deux parmi les plus dangereux êtres que j'ai jamais rencontrés. Vous possédez l'un et l'autre des pouvoirs qui font soigneusement réfléchir Lord Voldemort lui-même. Et vous êtes l'un et l'autre les deux plus grands gaspilleurs de purée qu'il m'ait jamais été donné de rencontrer.

- Mais – protesta Raven.

- Suffit! (Les deux fautifs rentrèrent la tête dans les épaules.) Je ne veux pas savoir qui a commencé. Mais je constate que c'est toujours vous que l'on retrouve quand il se passe quelque chose. (Dumbledore se radoucit un peu.) Tout le monde n'a pas votre expérience et vos capacités. Vous pouvez parfois vous permettre de rire de tout, vous le devez, même, pour ne pas tout lâcher. Mais les autres ne peuvent et ne doivent pas. C'est compris?

Plume et Raven hochèrent sagement la tête.

- Pour conclure, si l'envie vous prend de faire une bataille de purée, faites-la en privé.

- C'est Sev qui va être content pour ses appartements, murmura Plume.

Dumbledore sourit puis les congédia, avant de reprendre sa conversation avec les deux autres dirigeants. Les deux amis se retrouvèrent dans le couloir, se regardèrent, puis soupirèrent en chœur avant d'éclater de rire.

- JE M'ENNUIE! gueula Raven à tous vents.

- Et tes sorciers? demanda Plume en lui emboîtant le pas.

- Mes sorciers… Et bien il y a les doués, et de ce côté là, pas grand-chose à faire. Ensuite il y a les autres, et malheureusement rien à faire non plus… Non, sérieusement, ils ont très bien progressé. Et l'idée de MacGonagall semble très bien fonctionner: ils ont appris des trucs intéressants des Elfes et des Mercenaires. Mais dans tous les cas, j'ai rien à faire.

- Creuse un trou et mets-toi au fond. Je viendrai te prévenir quand ça commencera.

- Tu sais… dit Raven à voix basse. J'ai presque envie que ça commence. Comme ça ce serait terminé. Au lieu d'attendre, comme maintenant…

- Plus on attend, plus on a la possibilité de s'entraîner.

- L'ennemi aussi.

- Un partout. Et tes parents, quoi de neuf?

- Voyons, mais mes parents ne veulent pas se mêler à ça! fit Raven d'un ton ironique. Pour être honnête, ils attendent de voir qui prendra l'avantage.

- Mon père leur a fait des propositions…

- Je sais. Il faut croire qu'il n'a pas proposé assez. C'est le haut de gamme, mes parents, tu sais. Pas des demi-Moldus comme ton père…

Plume éclata de rire.

- Ils ne lui ont quand même pas sorti ça en face!

- Tu ne les connais pas. Tu fais quoi, là?

- J'ai un cours. J'ai réuni les 5ème, 6ème et 7ème années. Tu veux venir?

- Malefoy sera là?

Plume eut un sourire goguenard.

- Ouais. Allez, viens.

Raven observa Plume donner ses instructions à ses élèves. Le temps de la théorie était passé. Les cours étaient à présents consacrés à la défense – et à l'attaque. Avec ou sans baguette. Le blond s'approcha et entreprit de réexpliquer à une pauvre brunette de 5ème année un peu perdue comment envoyer un Stupefix simplement par l'esprit. La fille réessaya et réussit sans problèmes, ravie. Il s'éloigna sous ses remerciements.

- Vous êtes plutôt doué.

Potter le regardait avec curiosité. Raven sourit.

- C'est un coup à prendre. Tiens? C'est nouveau, ça?

Le garçon suivit son regard et saisit la fine chaîne qui entourait son cou.

- Oh. C'est un cadeau de Sirius. Pour Noël, rougit-il un peu.

Un grand sourire authentiquement pervers fleurit sur les lèvres de Raven, qui ne fit aucun commentaire et partit rejoindre Plume un peu plus loin.

- Qu'est-ce qui te prend? s'étonna celui-ci.

- Rien, rien… Pendant qu'on y est… Où est Malefoy?

Plume lui indiqua du doigt une forme étendue sur l'herbe, un peu à l'écart.

- Il fait la sieste. Dispensé. Avec ce que mon père lui a fait subir comme entraînement, il n'a pas besoin du mien. Il maîtrise déjà tout ça. Et je n'ai pas le temps de le faire travailler à part.

- Les autres élèves ne posent pas de questions?

- Plus personne ne pose de questions en ce moment, fit simplement le demi-elfe. Et puis depuis que Harry le laisse en paix, ça va mieux.

Le jeune professeur eut ensuite un sourire malicieux.

- Ca t'intéresserait de le faire travailler?

Raven le regarda d'un air surpris, puis piqua un formidable fard en secouant la tête.

- J'ai pas le temps! bégaya-t-il.

Plume le fixa d'un air éberlué.

- J'y crois pas! T'es sérieusement atteint, alors?! C'est la meilleure de la décennie…

Il éclata de rire devant le visage vexé de son ami.

- J't'emmerde.

- Je n'aurais jamais imaginé que… te voir timide! Allez, viens…

Il entraîna Raven vers Draco. Le cœur du jeune assassin fit un bond à la vue de l'adolescent endormi, les cheveux éparpillés sur l'herbe…

* Je suis gravement et foutrement atteint.*

- Malefoy!

Deux yeux glacés.

- Professeur? Oh… bonjour, M. Whitewinter…

La réponse de Raven ressemblait plus ou moins à un gargouillis.

- Malefoy, puisque je n'ai pas le temps, c'est M. Whitewinter qui va s'occuper de vous.

* M'occuper de lui… gyaaaaaah… Reprend-toi Raven!*

Le jeune homme lui jeta un regard plus que dubitatif, que Plume intercepta.

- Ne vous fiez pas à son air innocent et naïf: Raven est sans doute l'un des meilleurs combattants du monde sorcier…

Draco semblait très sceptique.

- Bon, je vous laisse. Si vous avez besoin d'armes ou de quoi que ce soit d'autre…

Il les abandonna et retourna à ses élèves. Les deux blonds restèrent face à face, deux yeux noirs contre deux yeux gris acier.

- Alors, que comptez-vous m'apprendre? demanda l'adolescent d'une voix traînante.

Raven reprit quelque peu son sang-froid et lui fit un charmant sourire.

- Le mieux serait déjà que je sache de quoi tu es capable. Que dirais-tu d'un petit duel?

- Comme vous voudrez, Monsieur.

Visiblement, le jeune homme ne tenait pas farouchement à être tutoyé. Raven soupira mentalement.

- Quand vous êtes prêt, M. Malefoy.

Tous deux ôtèrent leurs manteaux, firent quelques gestes d'échauffement, empoignèrent leurs baguettes et se placèrent face à face. Draco avait l'air profondément ennuyé, et ne semblait pas considérer son adversaire comme réellement dangereux…

Il déchanta très vite.

A son premier sortilège mollement lancé, il se retrouva projeté au sol et atterrit rudement sur l'herbe avec un juron.

- Leçon n° 1, ne jamais sous-estimer l'adversaire! chantonna Raven. J'avais toujours rêvé de dire ça… ajouta-t-il d'un air rêveur.

Draco se releva, les yeux flamboyant.

* Kyaaaaa… L'est trop choupinou!*

Le jeune homme contra avec facilité les sorts que lui envoyait à toute vitesse l'adolescent, s'approcha imperceptiblement, et profita d'une seconde de répit pour… lui faire un croche-pied. Puis s'assit sur son dos. Et si les yeux de Draco avaient pu tuer, on aurait retrouvé des morceaux de son corps à dix kilomètres à la ronde.

- Ca va?

- Allez vous faire – laissez-moi me relever.

Raven obéit complaisamment et ils continuèrent à se battre.

C'est-à-dire que pendant dix minutes, il évita nonchalamment les attaques magiques, puis physiques d'un Draco de plus en plus furieux. Quand il estima que le jeune Mangemort était à bout, il s'arrêta et se laissa tomber à terre, souriant.

- Bon. Et si on parlait?

Draco inspira profondément, puis hocha la tête et s'assit lentement à côté de son "professeur", les yeux froids.

- Tu… vous êtes beaucoup trop colérique et sûr de vous, M. Malefoy.

Silence.

- Vos coups sont lancés sans réflexion, vous vous précipitez sans réfléchir… ce qui serait parfaitement efficace sur un adversaire moyen, mais pas sur moi… Vous n'avez même pas rechercher si j'avais un point faible.

- Parce que vous en avez un? répondit sèchement Draco en se redressant et en renfilant son manteau.

- Heu… non. Mais j'aurais pu.

Raven se tut un moment, absorbé par la gorge pâle que le col du manteau ne recouvrait pas…

- Enfin bref. Sinon, vous possédez une force assez exceptionnelle et une rapidité hors du commun. Je pense que –

- Allons donc!

Draco eut un ricanement amer.

- Vous m'humiliez pendant un quart d'heure, pour ensuite me dire que je suis exceptionnellement rapide?!

- Je ne vous humilie pas, M. Malefoy. Ce n'était nullement mon intention

- Ben voyons!

L'adolescent commença à s'éloigner à grands pas.

- M. Draco Malefoy!

La voix de Raven, tout-à-coup beaucoup moins sympathique, arrêta l'adolescent sur place. Il se retourna et rencontra le regard de son instructeur, noir et froid. Un peu comme Snape dans ses très, très mauvais jours.

- Avant d'aller pleurer dans un coin ou sur l'épaule de je ne sais qui sur l'injustice profonde de la vie, laissez-moi vous dire que si vous refusez l'idée que l'on puisse être meilleur que vous en quoi que ce soit, vous ne ferez certainement pas long feu.

Le ton était tout simplement… glacial. Draco se surprit à baisser les yeux et eut un sursaut de colère: de quel droit ce type, tout Assassin qu'il prétendît être, se permettait-il de lui donner des leçons?

Le silence s'éternisait.

Raven eut un petit soupir et sourit.

- Et si cela peut soigner votre ego blessé, sachez que je ne suis pas n'importe qui et qu'à mains nues, je peux certainement en remonter à Plume lui-même.

- Oh.

Re-silence.

- Je n'ai rien à vous apprendre que vous ne sachiez déjà, M. Malefoy. Simplement, rappelez-vous de temps en temps que ce n'est pas parce que les autres n'ont pas enduré ce que vous endurez qu'ils sont forcement plus faibles que vous, mmh?

- Oui. Je vous remercie.

Draco se détourna à nouveau sans le regarder, et rejoignit les autres.

Raven resta songeur. Ce gosse – ce n'était qu'un gosse après tout – était tout simplement désespéré. Et tout seul.

* Et Merlin que c'est difficile…*

Ne devoir compter que sur soi, ne pas pouvoir s'approcher des autres par peur

* Il faudrait juste qu'il comprenne…*

Mouiche. Le garçon n'était déjà pas d'un tempérament très ouvert. Peut-être une amitié avec Potter?

* Mais rien de plus, alors; il est pour moi! En tous cas il est trop beau. Son petit air froid et arrogant, son regard fier, et puis ses cheveux ébouriffés…*

- Raven, tu baves.

- Plume, je t'aime.

- Moui, moui… Ca s'est mal passé, pourtant, non?

Raven regarda brusquement son ami.

- Hein?!

- Il avait l'air furieux, avec des larmes de rage au coin des yeux, et il marmonnait je ne sais quoi…

- Oh non… OUIIIIINNNN QU'EST-CE QUE J'AI FAIIIIIIT?!

- Pleure pas vas… t'es pas doué, c'est tout.

§§§§§§§§§§§§

Huit ans et demi plus tôt:

Plume dormait tranquillement, à côté de lui, le nez enfoui dans les oreillers, les cheveux éparpillés en tous sens. Comme d'habitude, quoi. Sa nuque fine, la ligne adorable de son dos et la chute de ses reins, effleurée par le drap, auraient poussé Severus à aller dire bonjour au Diable lui-même au fin fond des Enfers, sans hésiter. Il caressa la hanche de l'adolescent du bout des doigts, pensif.

Encore deux semaines…

Il se renfonça dans le lit, attirant le corps tiède à lui. Plume poussa un petit soupir et l'entoura de ses bras, sans se réveiller.

Encore deux semaines…

Il lui mordilla doucement l'oreille.

- Plume…

Son amant – il jubila à cette pensée – soupira à nouveau, battit des paupières, et lui offrit son regard encore embué de sommeil. C'était probablement le moment de la journée que Severus préférait.

- Mais que faites-vous dans mon lit, Pr Snape? murmura l'adolescent.

Severus l'embrassa.

- Des tas de choses fichtrement intéressantes et hautement réprouvées par la morale. Entre parenthèses, ceci est mon lit.

Plume gloussa de joie.

- On s'en fiche.

- Oui.

Ils se séparèrent quelques instants plus tard. Severus lui caressa la joue.

- Dans deux semaines, tu présentes tes ASPICs.

Son élève écarquilla les yeux.

- Ah bon?! Je n'étais pas au courant!

- Oh, la ferme, rétorqua l'homme en lui tirant les cheveux. Que… qu'as-tu prévu de faire ensuite?

- Ah. Attend.

Plume sortit du lit, et partit fouiller dans la poche de son pantalon, qui avait atterri sur l'abat-jour d'une lampe.

- Tiens.

Severus, un bras passé autour de sa taille, jeta un coup d'œil curieux au parchemin couvert d'encre rouge. Puis la signature lui sauta aux yeux et il pâlit.

- Tu ne vas –

- Lis-la avant de parler.

Il s'exécuta.

" Cher M. Plume Jedusor Taralo'th Percevent,

Il a été porté à notre attention votre cas de polysanguinité des plus complexes. Vous n'ignorez pas, je suis sûr, la raison d'être de notre association. Nous avons également appris de source sûre que votre situation dans le monde sorcier était des plus mitigée, et que le retour parmi les Elfes vous était tout simplement refusé. Ce pour quoi, nous avons la curiosité de vous proposer une place parmi nous.

Cette proposition reste valable aussi longtemps que vous le désirerez. Je dois reconnaître qu'elle n'est aucunement désintéressée, et que le Cercle souhaite depuis longtemps se rapprocher du Ministère de la Magie et des Clans Elfiques. Vous constituez ce qu'on pourrait appeler une prise de choix concernant ces objectifs.

J'aimerais au passage vous signaler la présence de quelques membres de votre famille, encore inconnus de vous, parmi nous. Bien que je doute que ce facteur puisse réellement influencer votre décision, je désirais vous en faire part.

Nous vous attendons sans fautes le premier Septembre.

                        Le Grand Chef,

                                   Dirigeant des Mercenaires du Cercle Ecarlate."

- Original, commenta Severus.

- Oui, hein?

Le Mangemort observa son amant.

- Tu t'es déjà décidé?

- Oui.

- Tu leur as déjà répondu?

- Pas encore.

- Ah.

Severus hésita.

- Est-ce que… est-ce que tu voudrais passer les vacances chez moi?

Plume sourit.

- Oui.

Plume passa ses examens haut la main.

La dernière nuit fut consacrée à une bringue monstrueuse avec ses amis. C'est dans un état de décomposition avancé qu'il leur souhaita au revoir, le lendemain matin, leur promettant de leur écrire, avant de retourner se coucher, remerciant au passage le ciel que Severus ait pris l'habitude de passer sa première journée de vacances à trier ses papiers.

Le lendemain à l'aube, ils saluèrent Dumbledore qui n'avait fait aucun commentaire sur le choix – les choix – de Plume, et quittèrent Poudlard.

Plume jeta un dernier coup d'œil au château qui disparaissait au détour du chemin, puis rejoignit Severus en courant.

- Il faut marcher jusqu'à où pour pouvoir transplaner?

- Jusqu'aux portes de l'Ecole.

- Tu ne veux toujours pas me dire où on va?

- Non.

Ils avaient jeté un sort de Rétrécissement sur leurs bagages, et avançaient à grands pas. Plume avait abandonné sans regrets son uniforme pour sauter dans un de ses jeans noirs trois fois trop larges, et un T-shirt bordeaux qui lui arrivait aux genoux, et dont l'encolure lui dénudait la clavicule, ses grosses chaussures noires au pied, un cordon de cuir autour du cou. Severus avait laissé tomber ses encombrantes robes noires pour une paire de jeans et une chemise noire, le col ouvert.

- Hé. M. Severus Snape.

- Quoi?

- Tu es très beau comme ça.

Le jeune professeur se retourna et s'approcha de lui en souriant.

- Je vais te violer contre un arbre.

Plume répondit à son baiser en riant.

- Viens là.

Severus lui passa un bras autour du cou et ils transplanèrent.

Leur lieu d'arrivée était une forêt calme, tapissée de mousse, aux hauts arbres fiers. L'homme jeta un coup d'œil autour de lui puis lui fit signe de le suivre.

Ils débouchèrent sur un chemin de terre, agréablement ombragé.

- C'est loin?

- Oh, au moins trois heures de marche.

La maison apparut trente secondes plus tard au détour de la route. Ce devait être une ancienne ferme, toute de pierres grises. Un grand bâtiment principal, dont un côté s'ouvrait dans leur direction et l'autre à l'intérieur d'une large cour, présentait de larges baies vitrées. Un autre bâtiment, plus petit, formait un angle de la cour, qui se fermait ensuite par un mur. Une large terrasse descendait du bâtiment jusqu'à un bout de pelouse qui ressemblait actuellement à une forêt vierge.

Severus grimpa sur le perron et effleura de sa baguette la serrure de la porte, qui s'ouvrit avec un léger grincement.

- Reste là. Je vais d'abord ouvrir les volets.

Plume obéit et s'assit sur les marches de vieille pierre, laissant son regard vagabonder sur le chemin qui partait sur sa gauche, et la pelouse qui s'étendait sur sa droite, jusqu'à un bout de rivière, plus loin sous les arbres.

- C'est bon. Laisse ton sac dans l'entrée.

L'adolescent s'exécuta et regarda autour de lui. En face à gauche, un escalier. En face à droite, un bout de couloir avec une porte à gauche – sous l'escalier –, une en face – donnant sur la cour –, et une à droite. A gauche, un alignement de portes vitrées. A droite, idem.

- Le salon, dit Severus en entrant dans la pièce de gauche. Et après, la bibliothèque, qui sert aussi de bureau.

C'était grand et éclairé. Un peu poussiéreux.

- Ici la salle à manger, continua l'homme en lui faisant retraverser l'entrée. Qui donne…

Il ouvrit une porte.

- Sur la cuisine.

Vue sur la cour, avec un puits au milieu.

- Le débarras…

Au fond de la cuisine.

- … et on rejoint l'entrée.

Par la porte qu'il avait aperçue au tout début.

- Ici, l'ancienne cave. J'y ai installé mon laboratoire. (Severus hésita.) Honnêtement, ça doit être le chantier. On monte?

Plume le suivit comme dans un rêve. On arrivait sur une mezzanine qui donnait sur le salon. Cinq portes s'ouvraient sur le palier. Severus commença par celle de gauche.

- Ma chambre…

Plume jeta un coup d'œil curieux. Un lit immense. Une bibliothèque dans un coin, bien entendu. Une grande fenêtre qui laissait entrer des flots de lumière.

Severus ouvrit la porte suivante, en face de l'escalier.

- La salle de bain…

Une baignoire énorme – une piscine.

Porte suivante.

- Toilettes…

Quatrième porte. Un escalier en colimaçon.

- Le pigeonnier, sourit son ex-professeur.

Ils y grimpèrent rapidement. C'était une petite chambre mansardée. Très sympathique. Severus lui fit ensuite signe de redescendre, et ouvrit la dernière porte.

- Et ta chambre. Je pense que ce sera plus pratique que tu aies la tienne, quitte à envahir la mienne dès que l'envie t'en prendra. Ca te va?

Plume hocha la tête, son regard faisant le tour de la pièce. Sa chambre. Wow.

- Je te laisse t'installer. Je vais voir s'il y a de quoi manger pour au moins aujourd'hui.

Une fois Severus sortit, Plume se laissa tomber sur le lit. C'est dans cette position, assis, le regard perdu dans le vague, que son amant le retrouva une demi-heure plus tard.

- Plume?

Severus s'assit à côté de lui.

- Ca va?

Plume le regarda et lui offrit un de ses plus beaux sourires.

- Tu ne peux même pas imaginer à quel point ça va.

Severus le renversa sur le lit.

Plume sortit de la douche en souriant. Deux mois. Deux mois avec Severus pour lui tout seul. Le bonheur est une chose agréable.

Après, il devrait partir, bien sûr. Sev avait son travail. Lui devrait trouver le sien, enfin si l'on pouvait considérer le fait d'être un mercenaire comme un travail.

Il ne savait vraiment pas ce qui l'attendait. Le Cercle Ecarlate avait une réputation horrible; mais dès qu'on interrogeait un peu plus précisément les gens, ils devaient reconnaître leur ignorance à ce sujet. Or après tout, si cette "association" avait pu se maintenir, c'était bien que tout le monde n'y était pas fou, non?

Et puis… Il y aurait d'autres personnes comme lui. Il n'en avait encore jamais rencontré jusqu'ici. Ce serait agréable de ne plus être… à part.

Il commença à rêver: si ces hommes – enfin, "hommes", il se comprenait – pouvaient louer leurs services, c'était qu'ils exerçaient un minimum de contrôle sur eux-même. Peut-être… peut-être pourrait-il apprendre à canaliser ses crises, à en utiliser la force?

* Bienvenue dans la vie active, mon petit Plume.*

Bon, pour l'instant, il était chez Sev. Autant en profiter et en profiter bien.

Laissant de côté ses affaires, il noua une serviette autour de sa taille, et partit explorer plus minutieusement la maison.

Il était vautré sur la confortable moquette du salon, feuilletant un des milliers de livres de la bibliothèque, quand Severus fit son apparition.

- Qu'est-ce que tu fais ici dans cette tenue?

Plume sourit à son amant qui le détaillait depuis le seuil de la pièce, un sourcil légèrement relevé.

- Je visitais ta maison. C'est… chouette. Tu as enchanté ta chaîne hi-fi?

- Oui.

- Je pourrai l'utiliser? Me servir dans tes CDs?

- Oui. Et oui.

Severus s'était laissé tomber dans un des atrocement confortables divans et, la tête appuyée sur son poing, souriait légèrement.

- Tu as lu tous les livres de ta bibliothèque? continua l'adolescent.

- Oui.

- Severus, tu as quel âge?

- 29 ans.

- Et tu as lu tous les livres de ta bibliothèque?

- Oui.

- Houlà… Je pourrai me servir aussi? Tu me montreras ton labo? Je pourrai me balader dans la forêt?

- Oui. Oui. Oui.

- Je peux venir sur tes genoux?

- Oui.

Plume s'installa sur les cuisses d'un Severus amusé, qui commença à lui caresser lentement le dos.

- Pourquoi ta maison est-elle pratiquement moldue?

- Parce que j'ai des origines moldues. C'est un héritage. Et étant donné qu'elle n'est pas cachée au regard des Moldus, j'ai préféré la garder comme ça. J'ai quelques voisins très envahissants, soupira-t-il. Je parie qu'ils savent déjà que je suis de retour.

- Ils habitent loin?

- Le chemin rejoint la route qui mène au village à environ 500 mètres de la maison. Il y a un kilomètre ensuite jusqu'aux premières habitations.

Plume posa la tête sur son épaule.

- Ce n'est pas très éloigné, reconnut-il. Tu te fais passer pour quoi?

- Pour un professeur dans un lycée privé à l'autre bout de l'Angleterre. Il va te falloir une couverture, toi aussi. Tu ressembles encore à un gosse…

Plume ouvrit de grands yeux.

- "Amant du professeur Snape", ça ne suffit pas? Non, non, je plaisantais, ajouta-t-il précipitamment en voyant son compagnon froncer les sourcils. Je ne veux pas ternir votre réputation, très cher… Alors… Je serais ton neveu? Pour les vacances?

L'homme resta pensif.

- Ca n'explique pas les suivantes.

Plume eut un grand sourire.

- Parce que tu me réinvites pour les suivantes? Je n'étais pas au courant… Je ne sais pas si je pourrai…

Le regard de Severus se ferma, puis il comprit qu'il se payait sa tête.

- Stupide bestiole, grommela-t-il.

L'adolescent lui tira la langue, et s'installa plus confortablement sur ses genoux.

- Et bien… On dira que mes parents sont morts, ce qui est vrai… Que tu es mon tuteur… Et que pendant les périodes scolaires je suis en pension. Voilà.

L'homme resta pensif.

- Tu vas devoir utiliser mon nom.

Plume sentit son cœur exploser – ce qui était parfaitement stupide, la situation ne correspondant aucunement à une demande en mariage.

- Superbe! Plume Snape. Plume Jedusor Taralo'th Percevent Snape. Plume J.T.P. Snape. Mmh… ça fait bizarre, Plume. Je devrais peut-être aussi changer de prénom?

Severus l'embrassa.

- Non.

Plume guida les grandes mains de l'homme sur ses propres fesses avec un ronronnement, mais Severus le repoussa doucement.

- Vas t'habiller.

- Pourquoi? Tu ne m'aimes pas comme ça?

Le Maître des Potions eut un rictus.

- Je veux bien t'emmener faire des courses comme ça, mais le village va frôler l'apoplexie.

- Oui, je comprends.

La boulangère minaudait de façon outrageante. Plume hésitait entre s'en retrouver scandalisé ou éclater de rire.

- Oooh… Pr Snape, quelle joie de vous revoir! Vous nous avez teeeellement manqué!

- Bonjour, Mme Norton, répondit assez froidement l'"enseignant". Un pain de campagne, je vous prie.

C'était tout à fait tordant de voir le terrible professeur faire ses courses.

- Mais bien sûûûr! Et qui est ce charmant garçon, avec vous?

* Le type avec qui il fait l'amour comme un fou à longueur de nuit, voire parfois…*

- Mon neveu, déclara sèchement l'homme. C'est moi qui l'élève à présent.

- Ooooh…

La femme lui jeta un regard larmoyant compréhensif.

- Si jeune et déjà frappé par le malheur… murmura-t-elle sans se douter que le pôv chéri avait probablement la meilleure ouïe des îles anglo-saxonnes. Tenez! Je vous offre des gâteaux! Choisis, mon garçon!

- Merci madame, répondit poliment Plume. Tonton, un éclair, ça te va? demanda-t-il innocemment.

Les dames présentes dans la boulangerie s'extasièrent sur sa gentillesse, et Severus lui lança son regard spécial "deux trillions de points en moins pour Gryffondor".

- T'as la cote, tonton, rigola l'adolescent quand ils se retrouvèrent dans la rue.

Severus se contenta de lui jeter un regard exaspéré et accéléra le pas.

- PROFESSEUR SNAAAAPE!!!

La femme qui trottinait vers eux semblait mille fois pire que la boulangère.

- Professeur Snape! Oh, comme je suis coooontente de vous retrouver! Comment allez-vous?

La quarantaine, soignée jusqu'au bout de ses ongles manucurés, la femme semblait appartenir à la courageuse espèce des mères-de-famille-à-la-chasse-de-gendres-potentiels.

- Très bien, Mme Goodkind. Comment allez-vous? demanda la pauvre pièce de gibier d'un ton neutre. Laissez-moi vous présenter mon neveu Plume, que j'élève à présent.

La dame Goodkind parut un moment décontenancée, puis serra aimablement la main que l'adolescent lui tendait.

- Plume, voici Mme Goodkind qui habite la première maison sur la route, continua Severus qui semblait vouloir être trèèèès loin d'ici.

- Enchanté, répondit Plume en souriant largement.

- Ooooh! Il faut que vous passiez à la maison, Plume! Je vous présenterai mes filles, quelques-unes unes doivent avoir votre âge! (Le sourire de Plume se crispa et Severus eut un discret reniflement moqueur.) Demain à cinq heures, c'est d'accord? Alors à demain!

Elle s'éloigna avec un dernier signe de la main. Plume regarda son amant.

- Elle a des filles?

- Oui. Sept.

- Tu crois que je peux me casser la jambe cet après-midi?

- Il faut entretenir les relations de bon voisinage…

Ils continuèrent leurs courses, et bientôt tout le village sembla au courant de l'arrivée du "neveu du Pr Snape, un garçon qui semblait a-do-rable". Plume jouait son rôle de gentil garçon à chaque rencontre, et se retenait d'exploser de rire devant l'air traqué de son compagnon.

Puis ils rentrèrent chez eux, et Severus passa le reste de la journée au lit avec son "neveu".

- Plume?

- Mmmoui?

- Il est quatre heures et demie.

Il y avait une certaine part de jubilation dans la voix de son aîné, songea distraitement l'adolescent en levant le nez de son premier bouquin des vacances.

- Et alors?

- Alors tu te lances dans la vie mondaine, aujourd'hui.

L'horreur de la situation lui sauta brusquement à la figure.

- NAAAAAAANNN JE VEUX PAAAAAAAS!!!

- ET SIIIIIIIII!!! fit joyeusement Severus en lui collant une boîte de chocolats dans les mains.

- POURKOÂÂÂÂÂÂ?!!

- PARCEQUEEEUUUUH!!!

Plume jeta sur le canapé livre et chocolats et lui bondit au cou, le renversant sur le tapis.

- Fais-moi l'amour. Ici. Maintenant, lui souffla-t-il à l'oreille d'une voix ronronnante.

Il eut la joie de voir son amant éclater de rire – un vrai rire, un rire joyeux – puis ronchonna quand celui-ci le repoussa avec un sourire carnassier.

- Oh que non. Et n'oublie pas: tu reste au moins une heure, pour être poli.

- Seeeeev! se lamenta-t-il. Hé! Pourquoi tu viens pas, toi?!

- Je n'ai pas été invité, moi, répondit tranquillement l'homme. Amuse-toi bien!

Plume s'achemina vers la demeure de sa chère voisine en traînant les pieds, jetant des coups d'œil envieux aux bois agréablement frais et ô combien plus intéressants que se l'annonçait la visite.

* Jeveuxpasyallerjeveuxpasyallerjeveuxpasyaller…*

Arrivé en vue de la maison, il soupira, se redressa, se recomposa un visage aimable et poli, hurla un bon coup et s'engagea dans l'allée. La porte s'ouvrit avant même qu'il n'eût localisé la sonnette.

- Ah, Plume, vous voilà! Entrez, entrez donc!

Il tendit à son hôtesse la boîte de chocolats, n'ayant même pas à se donner la peine de débiter quelques paroles gentilles puisqu'elle la lui arracha littéralement des mains avant de le propulser dans le salon. Là, dans un silence imposant, une douzaine de personnes siégeaient autour d'une table basse surchargée de thé.

- Mes chers amis, voici Plume Snape, le neveu de notre cher professeur… Plume, laissez-moi vous présenter mon mari, Wilfried… (Plume serra la main d'un homme à l'air sympathique mais trèèèèèès fatigué)… Mme et M. Delauney, qui habitent quelques maisons plus loin… (un couple d'une cinquantaine d'années, l'air gentil)… voici Michael MacArthur, qui vit au village…(un rouquin à l'air désespéré)… et mes filles, Justine, Caroline, Pauline, Amandine, Sandrine, Aline et Patricia.

Toutes les sept brunes, sagement alignées en rang d'oignons… seule la plus jeune, d'une dizaine d'années, perchée sur l'accoudoir, lui sourit malicieusement et lui fit un clin d'œil.

- Et… où est passé Raven? s'exclama la femme.

- Me voilà, je vous prie de m'excuser –

Le blond stoppa sur le seuil du salon, tandis q'un immense sourire – en partie de surprise, mais aussi de soulagement à l'idée de ne plus être seul dans la galère – gagnait le visage de Plume.

- Mais que…?

- Moi aussi, ça me fait plaisir de te revoir!

Raven lui sauta dans les bras avec un cri de joie, puis se rappela où il était, arrêta de l'étouffer et se tourna avec un air d'excuse vers ses hôtes, qui les dévisageaient, surpris.

- Plume est dans le même lycée que moi, expliqua-t-il joyeusement. Dans la même classe, en fait.

- Comme c'est amusant! Vous ignoriez que votre ami vivait par ici, Plume? demanda Mme Goodkind en les faisant rasseoir.

- Totalement! Où habites-tu?

- Le château quelques kilomètres plus loin. Et toi? Je croyais que tu devais partir… pour ta nouvelle fac.

- Plume passe les vacances chez son oncle, intervint la femme.

Le blond eut un regard surpris.

- Ton oncle? Je ne savais pas que tu avais un oncle.

- Mais si, tu sais… mon tonton Severus, répondit tranquillement le demi-elfe.

Raven recracha son thé dans sa tasse.

- Raven? Vous allez bien?

- ' me suis brûlé, je vous demande pardon.

- Le thé est tiède, murmura Plume.

- Ta gueule, fit son ami de même.

- Alors comme ça, vous êtes dans la même classe, intervint M. Delauney. Racontez-nous un peu; Raven reste en général très évasif sur ses cours.

- C'est normal, il n'écoute rien.

- Hé!

Les filles sourirent légèrement sous le regard sévère de leur mère, tandis que la plus jeune rigolait franchement.

- Et les professeurs? coupa Mme Goodkind. Sont-ils compétents?

- Oh, certainement. Surtout celui de… chimie. Très compétent.

Raven s'étouffa avec son gâteau et commença à tousser comme un pauvre cheval asthmatique. Il y eut un silence un peu gêné durant lequel Plume croqua innocemment dans son biscuit.

- Bon, les filles! fit leur hôtesse en frappant dans ses mains. Si vous faisiez visiter le jardin à ces jeunes hommes?

Les sept sœurs se levèrent, suivies par les trois pauvres victimes, et sortirent par la porte-fenêtre.

- De ce côté, le terrain de croquet, commença l'aînée d'un ton peu enthousiaste, ici, la piscine, au fond, la rivière…

* C'est un cauchemar. Charmante forêt vierge du jardin de Severus, où es-tu?*

- On va voir la rivière? proposa Raven.

Ils descendirent vers le fond de la propriété.

- Qu'est-ce que tu fais là? murmura Plume à son ami.

- Comme toi. Chuis piégé. Hep là!

La benjamine venait de lui sauter sur le dos.

- Pat, t'es trop lourde!

- C'est toi qu'es nul, rigola la fillette. Alors t'es un copain à Ravy? enchaîna-t-elle à l'adresse de Plume.

- Ouais. Et toi?

La gamine papillonna des yeux.

- Je suis sa future femme… non, c'est une blague, ajouta-t-elle comme Plume explosait de rire. Il est trop vieux.

- Charmant, grommela le vieux. Fait gaffe, toi, ou tu vas finir dans la rivière.

- Pas chiche, fit Patricia.

- Ah ouais?

- Ouais. Pas chiche!

PLAOUF!

L'enfant émergea de l'eau, qui heureusement ne lui arrivait qu'à la taille, un air éberlué sur le visage.

- Raven!

- Oui, je suis méchant, hein, fit le blond en se penchant pour l'aider.

Plume sourit et poussa à son tour son ami dans l'eau.

Mme Goodkind poussa de hauts cris en les voyant revenir une demi-heure plus tard, tous les dix trempés et rigolant comme des baleines. Elle remercia un peu sèchement les trois garçons de leur visite, et referma violemment la porte derrière eux. En plaisantant, Plume et Raven saluèrent MacArthur qui s'en retourna vers le village, puis s'éloignèrent dans la direction opposée.

- Viveuh les vacaaaaaanceuh –

- Je ne savais pas que tu habitais près de chez Sev.

- Je ne savais pas que Snape était ton oncle, rétorqua le blond. Il s'occupe bien de toi?

Plume gloussa comme un idiot.

- Tu veux te changer chez moi? demanda-t-il ensuite.

- Non. J'habite juste deux kilomètres plus loin. Tu passeras?

- Quand tu veux. Après-demain?

- D'accord.

- Héééééé! Attendez-moi!

Les deux garçons se retournèrent d'un bond.

- Pat, soupira Raven, tu vas avoir des ennuis.

- M'en fous! Dites… Vous savez plein de choses, non?

Raven et Plume échangèrent un regard.

- Et bien… oui, si tu veux.

- Est-ce que vous pensez que c'est possible de voler? demanda sérieusement la fillette.

- Pourquoi dis-tu ça? demanda doucement Raven en s'agenouillant, après un moment de surprise.

- Et ben… (La gamine rougit légèrement.)… avant-hier, je suis montée tout en haut du grand sapin… tu sais, celui où j'ai pas le droit… Et je suis tombée. Et puis…

Elle regarda timidement les deux adolescents qui la dévisageaient.

- Et tu as atterrit sans problèmes?

- Oui. C'est mal?

- Non, pas du tout. Plume, j'ai pas ma baguette. Tu peux faire sans? demanda Raven sans la quitter des yeux.

- Sûr. Patricia, viens voir. (L'enfant s'approcha en hésitant.) Je vais te faire quelque chose, ça ne fait pas mal. Fais-moi confiance, ok?

Il posa délicatement sa main sur le front de l'enfant.

- Revelo.

Une aura bleutée entoura le corps de la fillette, qui poussa un petit cri de surprise.

- Dissimulo.

L'aura disparut. Plume se redressa, échangea un regard avec son ami, puis tous deux se mirent à applaudir avec enthousiasme.

- Miss Patricia, laissez-moi vous annoncer que vous avec des pouvoirs magiques! annonça Raven en souriant.

Pat le fixa comme s'il était fou.

- Ca n'existe pas, les pouvoirs magiques – héééé!

Plume avait tendu la main, et la faisait flotter dans les airs.

- Descend-moi!

Il la reposa doucement au sol.

- Bon, d'accord, ça existe! Et… moi… j'en ai?

- Oui. Ecoute, dans peu de temps, tu risque de recevoir une lettre pour aller à une école de magie. Je pense que tes parents vont être très surpris…

- Et si ils veulent pas?

- Oh, t'inquiète pas, ils finiront par vouloir… Mais surtout, surtout, n'en parle à personne en attendant, d'accord?

Elle acquiesça gravement.

- Vous en avez tous les deux aussi, hein? (Ils hochèrent la tête.) Cool. C'est… c'est dur?

- Pourquoi tu dis ça?

- Parce que vous avez l'air un peu tristes, tous les deux. Enfin bon. J'y vais! Sinon, je vais vraiment avoir des ennuis! Salut!

Elle les embrassa, puis leur sourit et s'éloigna en courant.

- Un élève de plus à Poudlard, remarqua Plume.

- Non. Ils déménagent pour la France dans quelques mois. Enfin, je ne m'inquiète pas pour elle…

Ils firent quelques pas en silence, pensifs.

- On a vraiment l'air triste?

- Chais pas. Elle est peut-être douée.

- Ouais. Mmmh… Finalement j'ai passé un bon après-midi! conclut Plume.

Ce ne serait que de longues années plus tard qu'il rencontrerait à nouveau Patricia Goodkind – en fait lorsque celle-ci commencerait à enseigner les Sortilèges à son fils.

- Quelque chose de prévu, cet après-midi?

Plume se fit la réflexion que dans 107 ans, il adorerait toujours autant la voix de son amant.

- Je vais chez les Whitewinter.

Le regard d'encre se leva vivement sur lui.

- Au Château?

- Non, au Zimbabwe. Bien sûr, au Château. Tu y as déjà été?

- Non, répondit sèchement l'homme en recommençant à écrire.

Plume arrêta de fouiller dans la bibliothèque et se tourna vers lui.

- Je décèle une légère note de désapprobation dans ta réponse ô combien succincte. Qu'est-ce qu'il y a au Château?

- Essaie de revenir vivant.

- Rassure-moi, c'est de l'ironie? Hein, dis?

L'homme ne répondit pas, se relisant.

- Severus je te paaarle? Severus!

Plume tapa du pied, puis ôta langoureusement le premier bouton de sa chemise. Le regard noir revint sur lui.

- Qu'est-ce que tu fais?

- Ouais, ça marche! Bon, sérieusement, qu'est-ce qu'il a ce Château?

- C'est peut-être là qu'on a tué et torturé le plus de sorciers depuis des millénaires. Sois poli.

Plume déglutit.

- Okay.

- PLUUUUUME! MON FREREUH!

- Salut Raven… Sympa la déco chez toi…

On avait sans doute définit le mot sinistre à partir de la demeure des Whitewinter. Le château de Dracula ne devait rien être, comparé à ça. De hautes tours noires de dressaient à l'assaut du ciel, au centre d'un parc lugubre et touffu où Plume sentait pulluler les bestioles pas nettes.

- On s'y fait… Ne t'inquiète pas, ils te laisseront ressortir. Entre!

L'intérieur n'était pas mieux que l'extérieur. Les statues de monstres et autres gargouilles avaient juste diminué de taille. leurs pas résonnaient lourdement contre la pierre froide et noire; de grandes et sombres armures se dressaient aux embranchements; pas de tapisseries, mais des collections d'armes, des tableaux tenebreux de faciès effrayants; des meurtrières ou sifflaient des courants d'air froid…

- Brrrr! Il ne manque plus que –

Plume frôla l'infarctus lorsque Frankenstein – ou son cousin – apparut au détour d'un couloir.

- Ah, Juan, tu peux dire à mes parents que mon ami est là? demanda gaiement Raven.

Un grognement indistinct sortit des lèvres couturées du géant. Plume crut apercevoir une lueur de tendresse dans ses petits yeux, avant qu'il ne se détourne.

- C'est ma nounou, dit tendrement son ami à voix basse. C'est lui qui m'a élevé.

- Raven…

- Quoi?

Plume sourit avec chaleur.

- Tu es exceptionnel.

- Je sais et alors? On y va?

Medusa Whitewinter était une très grande femme, au maintien royal. On devinait sans peine ses origines espagnoles au travers de sa peau olivâtre, de ses cheveux presque bleus tant ils étaient noirs, et de ses yeux de braise. Son visage était d'une beauté presque agressive tant il recelait de force et de confiance en soi. Une robe de velours noir dénudait ses épaules de craie, et lui donnait l'allure d'une antique statue de marbre au contact glacé.

Belius Whitewinter ne déparait en rien sa femme magnifique. De taille encore plus imposante, d'une minceur presque effrayante, il possédait un visage de glace totalement inexpressif, aux yeux noirs épouvantables. Plume mit quelques secondes à comprendre d'où venait cet effet: l'iris emplissait l'œil, en dissimulait le blanc, donnant ainsi l'impression de deux ouvertures sur des ténèbres absolues. C'était de lui que Raven tirait ses cheveux de lin: ils encadraient son visage lisse, coupés assez courts.

- Ainsi c'est vous, le Plume Percevent dont nous parle tant Raven, prononça-t-il d'une voix atone après l'avoir froidement détaillé.

Plume, qui s'était fait beau pour l'occasion et ne regrettait pas la richesse des vêtements choisis, s'inclina courtoisement comme le lui avait appris sa cousine. Il crut voir passer une légère lueur d'approbation dans les yeux de la femme.

- Je suis très honoré d'enfin vous rencontrer, dit-il respectueusement.

- Tiens oui? (Belius semblait vaguement amusé.) Il me semblait pourtant que Raven vous avait mis au courant de nos… activités, ajouta-t-il en coulant un regard neutre vers son fils.

Plume haussa un sourcil.

- Rien à quoi je ne sois habitué, avança-t-il impudemment.

- Comment cela? intervint Medusa.

Sa voix était rauque et aussi hypnotique que son regard perforant.

- Mon père ayant principalement été connu sous le nom de Voldemort, on peut dire que le milieu m'est… familier?

Et toc. Les deux Maîtres Assassins lui jetèrent un regard un tant soit peu déstabilisé. Puis Belius sourit, et il en était encore plus effrayant.

- Ainsi c'est vous, le Plume Jedusor disparu… Intéressant. Raven ne m'en avait rien dit…

- Je l'ignorais, répondit celui-ci d'un ton exempt de toute trace d'émotion.

- Ce n'est pas quelque chose que je crie sur les toits, intervint nonchalamment Plume.

- Dans ce cas, prenons-le comme une marque de confiance, prononça sensuellement la dame des lieux. Irons-nous déjeuner?

Son époux lui offrit son bras, et les deux adolescents les suivirent.

Le repas se déroula dans ce qui semblait être, extérieurement, une atmosphère sympathique. Il fallait les meilleurs dons d'observation pour comprendre que chaque question était soigneusement choisie, chaque réponse mûrement pesée, et que, si les deux adultes piochaient élégamment dans leurs assiettes, Raven n'avait pas touché à la sienne et Plume ne l'avait qu'entamée.

Ce fut avec un indicible soulagement que Plume prit congé des parents de son ami, et s'éloigna avec celui-ci en direction de ses appartements.

- Merci pour tout à l'heure, souffla le blond. Merci.

- Qu'est-ce qu'il se serait passé, sinon?

- Je préfère ne pas en parler.

Plume lui saisit le bras.

- Raven…

- Ca va. Dans un an je pars d'ici. Même si je continuerai leur sale métier… Bon! Au lieu d'aller dans ma chambre, tu veux voir la bibliothèque? Ou les salles de torture, au choix… grimaça-t-il.

- Commençons par la bibliothèque, tu veux?

Ils passèrent, finalement, un après-midi agréable, discutant de la dernière année de Raven à Poudlard, et de l'entrée de Plume au Cercle Ecarlate.

- Annonce ça à mes parents et ils t'adoptent.

- Je ne peux pas laisser mon oncle tout seul…

La nuit tombait déjà quand Raven le raccompagna au portail.

- Je ne t'invite pas à rester là pour la nuit mais… dis… tu reviendras?

Plume lui sourit et le serra contre lui.

- Bien sûr, andouille.

- Merci, Plume.

- C'est moaaaa…

Severus jaillit du salon, le visage furieux.

- Tu as vu l'heure?! demanda-t-il froidement.

- Inquiet pour moi? répondit doucement Plume.

- Là n'est pas la question! Tu aurais pu prévenir! Je ne – qu'est-ce qu'il y a?

Plume se nicha dans ses bras.

- C'est pourri, la vie.

- Souvent, reconnut l'homme. Mais pas tout le temps.

- Severus…

- Oui?

L'adolescent se serra encore plus contre lui, s'y accrocha férocement, la joue contre sa poitrine.

Au bout d'un moment, il renifla et leva les yeux sur lui.

- Alors, tu m'embrasses ou t'attends le déluge?

Les vacances se déroulèrent à toute allure.

Il y eut Severus, bien sûr, la bibliothèque, la forêt, les visites à Raven…

Bizarrement Mme Goodkind ne le réinvita pas. Mais il recroisa plusieurs fois l'une ou l'autre des sept sœurs, notamment Patricia qui lui lança à chaque fois un clin d'œil complice.

Il y eut la foule de petites choses que constituait une vie régulière avec Sev. Les courses, le ménage – non qu'ils furent de vrais maniaques tous les deux – , la cuisine, les engueulades, surtout les réconciliations, la complicité, les siestes dans l'herbe et les potions qui explosaient…

Il y eut les gens du village.

Il y eut la correspondance acharnée avec Charlie, Killian, et sa famille elfique.

Il y eut la lettre pour le Cercle Ecarlate, et la réponse.

Il y eut la mi-juillet, la fin juillet, le début d'août, la mi-août, et trop rapidement la fin août.

Il y eut la dernière visite au château Whitewinter, il y eut le dernier tour au village, il y eut la valise, il y eut le dernier dîner, la dernière nuit et le dernier petit-déjeuner.

Il y eut le dernier long baiser.

Le dernier regard.

Et il transplana.

A suivre.