Titre : Sauve Son Passé En Devenant Son Futur

Note de l'auteur : C'est ma première fic Harry Potter, et certainement ma première fic qui ait une réelle histoire et qui va durer plus que 10 pages en tout et pour tout ! Donc soyez indulgents ! Je suis consciente d'être loin de posséder le génie de l'écrivain, et aussi que ce premier chapitre est *très* lent et ennuyeux… (ouh là, ça donne envie de lire tout ça ! mdr) Mais je promets que la suite devrait être plus passionnante ! Alors, soyez patients également ! Je me rends compte à quel point c'est loooong d'écrire une fic, sans en plus avoir besoin de la relire. Alors si vous trouvez des fautes, toutes mes excuses ! Si quelqu'un voulait se proposer pour me BETAiser… ^^ Je ne serais pas contre ! Je sais que la tournure de mes phrases mériterait révision de temps en temps, donc si quelqu'un se sent à tout hasard motivé par cette histoire… Postez une review et faites moi part de vos idées !

Dédicace : A Sonia qui m'a littéralement forcée à me lancer dans cette aventure. Si cette fic ne lui plait pas, j'espère qu'elle servira quand même à quelqu'un. A Jezebel et Sin qui aime Severus autant que moi ^^, à Arcadiane qui n'aimera pas cette fic car je vais parler des Malfoys ! (lol) A Blue_Mana qui n'aime pas les SS/HP et qui va pouffer de rire si elle lit ça. A ma famille, mes chiens mes chats … euh non, j'en ai pas c'est vrai. Et à vrai dire, si ma mère tombe là-dessus… SVP ne lis pas !!

Notes propres à l'histoire : N'ayant pas fait l'acquisition des traductions françaises d'Harry Potter je ne connais pas les noms français, et je n'ai aucune connaissance de la VF si ce n'est par le doublage français des 2 premiers films. Si certaines choses vous paraissent étranges, je m'en excuse profondément…. Mais Lisez donc la VO !

Chapitre 1 : Où le cauchemar commence

   Par la petite fenêtre qui se trouvait être la seule source de lumière de l'étroite pièce, on pouvait distinguer les lampadaires, quelques étoiles qui n'étaient pas encore cachées par la pollution, et, très loin, une lueur verte qui disparut dans un flash.

  Harry se retourna pour la quinzième fois sur le mince matelas de son lit bon à jeter. La faible lumière qui émanait de la veilleuse de sa table de nuit n'était pas suffisante pour empêcher les cauchemars d'atteindre son sommeil. À presque seize ans, le garçon dont le corps n'était pas encore celui d'un homme ne pouvait plus dormir comme tous les adolescents de son âge, et ce depuis des années. Toute l'innocence qu'il avait pu garder au fil des évènements dramatiques qu'il avait vécu s'était définitivement évaporée quelques semaines auparavant.

« Sirius… »

  Jamais Harry n'avait pleuré, une fois arrivé à Privet Drive. Les larmes ne voulaient pas couler, et il ne les laisserait pas, de toute façon. Il devait se montrer fort, car paraître faible devant son cousin était la plus belle erreur qu'il aurait pu commettre. Pour la première fois depuis des années à passer ses vacances d'été avec sa famille moldue, il n'éprouvait pas de rancœur vis-à-vis de ces derniers. Harry ne pouvait imaginer meilleur réconfort que la perspective d'être enfermé dans sa chambre avec pour unique compagnie, Hedwig, qui, elle au moins, ne chercherait pas de mots pour apaiser sa douleur et sa colère.

  La colère était un sentiment qu'Harry avait maintes fois éprouvé, pourtant, celle-ci n'avait jamais été dirigée vers une autre personne que Voldemort ou le très antipathique professeur de potions, Severus Snape. Non qu'Harry n'ait pas de haine pour Snape à ce moment, bien au contraire. Il le détestait plus que jamais. Après tout, n'était-ce pas la faute de cet homme si   Sirius… Harry sentait sa gorge se serrer à la simple pensée de son parrain. La seule personne au monde qu'il aimait comme un second père l'avait quitté. Tout le monde finissait par l'abandonner, le jeune homme en était certain. Un jour, Harry se réveillerait pour se rendre compte que Ron, Hermione ou Neville étaient partis, morts.

« Non-- ah ! Sirius… Reste !... Nooooon !! »

  Le front humide, les yeux translucides, les pupilles dilatées et le corps tremblotant de fièvre, Harry se trouva assis inconfortablement dans son lit. Sa respiration semblait destinée à se bloquer dans sa poitrine, et il haletait péniblement pour la retrouver.

« Encore ce rêve… C'est la troisième fois cette semaine… Je n'en peux plus ! Je vais devenir fou… » chuchota- t-il, conscient des ronflements de son oncle Vernon dans une chambre non loin de la sienne.

  Les vieux draps qui couvraient encore ses cuisses nues étaient moites, comme tout son corps. La pièce était baignée une insupportable chaleur, et malgré tout, Harry se surprit à grelotter. Toutes les nuits, depuis quelques temps, le sommeil se rapprochait plus de la probabilité que de la certitude. Dès que le soleil disparaissait dans une lueur rougeâtre et que la nuit prenait possession du ciel, Harry se sentait perdre toute l'assurance qu'il avait pu gagner au fil des années passées à Hogwarts. Il ne sentait plus ses doigts de pied, comme si un sort malencontreux les avait gelés. Mais il n'avait pas fait de magie, ni aucune potion qu'il aurait pu tourner en échec. Un vent glacial s'abattait sur sa peau à chaque fois que sa chambre se trouvait plongée dans la nuit, et ce malgré la chaleur étouffante.

« Je suis peut-être en train de devenir fou. Je n'ai jamais entendu parler de ça, mais après tout, il y a tellement de choses que je ne sais pas sur le monde le la Magie. Dumbledore a dit que la maison était protégée… Mais est-ce que Voldemort ne peut pas m'atteindre pour autant ? »

  Harry passa fébrilement ses mains glacées sur son visage, massant ses paupières brûlantes pour essayer de se calmer. À qui pouvait-il en parler ? Il ne pouvait plus faire confiance à personne. Il s'était promis de ne plus compter que sur lui-même désormais. Même si ces fameux rêves étaient plus que des rêves… Mais jamais il n'avait eu de 'vision' auparavant. Par ailleurs, il n'avait jamais cru au don de prémonition ni en quoi que ce soit de ce genre. Pas après avoir eu Trelawney comme professeur de Divination toutes ces années.

  Des  flashs incompréhensibles provenant de son rêve lui apparurent devant les yeux, brûlant sa rétine jusqu'à le forcer à plisser les yeux péniblement. Il était persuadé qu'il fallait en découvrir plus, mais comment ? Si seulement il pouvait rester ne serait-ce que quelques minutes de plus endormi, plutôt que de se réveiller en sursaut comme toutes les fois précédentes. Ces rêves récurrents, Harry ne les comptait plus. Mais ils avaient peu à peu pris vie en lui, et il pouvait se rappeler des mots, des images, des sensations, comme si il avait réellement vécu ces scènes.

« Pourquoi Sirius apparaît-il toujours après ça ? C'est impossible qu'il y ait un lien. » Souffla-t-il, les dents serrées jusqu'à s'en engourdir la mâchoire.

  Les images se bousculèrent dans une nouvelle vague de couleurs et de sensations devant les yeux du garçon. Ses bras encore maigrelets serrés autours de son estomac menaçant de rendre le piteux repas de la veille, Harry tenta avec difficulté de se redresser. Le silence interrompu à intervalles réguliers par les sifflements de Vernon Dursley ne faisait que renforcer sa sensation de malaise. Les deux pieds posés fermement sur le sol de sa chambre, Harry leva les yeux devant lui. Hedwig était là, sur le bureau à moitié bancal, dans sa cage. Sa simple présence le rassura profondément. Plus que tous les amis qu'il pouvait avoir dans le monde magique, Hedwig, un hibou, parvenait sans le moindre effort de mots ou de gestes à calmer Harry. Celui-ci se dressa d'un mouvement fatigué, et approcha une main pour caresser les plumes blanches du bout des doigts.

« Hedwig, dis-moi, qu'est-ce qui m'arrive ? Oui…Toi aussi tu t'inquiètes n'est-ce pas ? Peut-être que je devrais vraiment écrire au professeur Dumbledore après tout… »

  Les yeux verts d'Harry, habituellement brillants de malice, étaient dépourvus de toute lumière, comme privé de leur vitalité. Il balaya la pièce du regard pour la Nième fois, à la recherche d'une mystérieuse solution à ce problème sans nom. Comment se battre contre une chose que son esprit produit ? Comment savoir si Voldemort n'était pas une nouvelle fois responsable de cette torture mentale ? Harry voulait mettre un terme à ces rêves, qui devenaient de plus en plus réels, presque impossible à différencier de la réalité pitoyable dans laquelle il se trouvait. Les Dursleys, complètement inattentifs à la tempête régnant dans son âme, continuaient à le malmener de toutes les manières possibles pour des moldus. Mais ni les quelques agressions verbales de son cousin Dudley ni les besognes qu'il était forcé d'exécuter chaque jour ne pouvaient ôter de son esprit les images troublantes recassées à chaque fois que le sommeil l'emportait.

  Harry jeta un coup d'œil usé sur le vieux réveil reposant sur sa table de chevet. À peine quatre heures. À quelle heure avait-il réussi à s'endormir la veille ? Pas avant vingt-trois heures, certainement. Harry se sentait perpétuellement fatigué, bien que le manque de sommeil lui soit devenu coutumier ces dernières années passées à vadrouiller dans les couloirs de Hogwarts. S'il ne parvenait pas à consommer une réelle nuit de sommeil très rapidement, il ne pourrait plus se tenir sur ses deux jambes sans vaciller.

  Il entreprit de se recoucher, malgré la quasi certitude qu'il resterait ainsi, à fixer le plafond de sa vision floue comme s'il allait s'ouvrir en deux pour laisser s'échapper une chose terrible. Mais que pourrait-il y avoir de pire que Voldemort et ces fichus rêves ? Même la mort devait être plus tranquille, ou du moins c'est l'impression qu'avait Harry ces derniers temps. Pourtant, le jeune homme n'avait jamais, malgré toutes les épreuves auxquelles il avait dû faire face, songé à la mort comme à une chose positive.  

« Peut-être que… c'est Snape qui m'a envoyé ces visions. » murmura Harry d'une voix songeuse.

  Il est le seul à me détester assez pour me jeter un tel sort… Et il connaît sûrement le fonctionnement de la protection de cette maison… Mais pourquoi ? Ces rêves… non, /visions/… Que veulent-elles dire ? Si c'est bien lui… Non, impossible. Il n'a aucun intérêt à ce que je connaisse des choses de son passé.

  Harry émit un léger rire cynique, étouffé par un semblant de sanglot. Il n'allait pas pleurer, mais sa gorge se serra douloureusement, comme pour lui rappeler qu'il en était capable. Il lui semblait que depuis son entrée à Hogwarts, il avait de toute son âme détesté le professeur de Potions, tout simplement en retours du profond mépris que ce dernier démontrait à son encontre. Et aujourd'hui, il était forcé d'endurer des visions qui pouvaient expliquer le comportement de son professeur.

N'importe quoi, ces rêves ne sont peut-être même pas des évènements du passé. De /son/ passé. Personne ne pourrait connaître la vie de Snape, sauf en regardant dans sa pensieve… Ou alors… Dumbledore ? Peut-être qu'il veut me forcer à m'excuser auprès de Snape pour qu'il reprenne les leçons d'Occlumency… Ce n'est pas comme ça qu'il va y parvenir en tout cas. Jamais je ne lui pardonnerai. Je ne leur pardonnerai pas, ni à lui, ni à Dumbledore. Sans eux, Sirius… Il serait encore en vie ! Je ne leur pardonnerai pas.

  Sur ces pensées vaguement ordonnées, Harry succomba finalement à la fatigue.

  // Il plongea au fond des abysses du sommeil, là où personne ne pouvait venir l'aider, où aucun ami de chair de pouvait le trouver, mais où les démons se ses rêves ne tarderaient pas à le rejoindre. Son corps flottait, pourtant, Harry n'avait plus conscience d'en posséder un. Son cœur était déjà lourd de mille maux plus pénibles les uns que les autres, et se tenait prêt à éclater à la moindre pression. Des bruits. Des voix peut-être. Non. Une voix, cette voix, encore elle, toujours elle. Harry voulait courir, mais tout à coup, il n'avait plus de jambes. Son corps était translucide, et il se sentit comme happé par une force inconsistante vers un endroit glacé. Il ne voulait pas y aller, pas à nouveau. Ce lieu lui faisait peur. Il faisait noir, et si froid. Il grelottait, bien que son corps était entièrement recouvert de sueur. Son corps ? Non, ce n'était pas son corps. Celui-ci était plus petit, et rachitique, à peine assez de peau pour recouvrir les os, et nu. Une douleur lancinante signala Harry que certains os étaient brisés. Deux ou trois côtes, et les ligaments de sa main droite. Il ne pouvait plus tenir sa baguette. Sa baguette ! Il devait la trouver, et rapidement ! Sa vie était en danger. Ou bien était-ce sa      vie ?   Harry n'avait pas besoin de savoir où il se trouvait, il pouvait le sentir. La cave, ou le cachot, il n'en était pas certain. Le sol pavé était humide et boueux sous ses genoux nus. Il tâta le sol dans le vain espoir de trouver sa baguette avant que… Un bruit de porte ! Non ! Il devait se cacher ! Mais o ? Une fois de plus il était pris au piège. Il ne pouvait rien faire, comme à chaque fois. Il réprima un sanglot, crispa la mâchoire dans un dernier effort de dignité.  

« Mon garçon, es-tu encore en train de te cacher ? ttt-- C'est très vilain tu sais. Tu sais bien ce qui arrive aux enfants qui désobéissent, Severus. »

  Harry tremblait si violemment à ce moment qu'il pouvait entendre le bruit de ses genoux claquer sur les pavés. Un goût de sang se répandit sur sa langue. Il s'était mordu sans y faire attention. Ses yeux fixaient anxieusement le rayon de lumière rougeâtre qui émanait maintenant de la grosse porte. La silhouette d'un homme à la carrure imposante s'y dessina. Il se mordit la langue plus fort pour s'empêche de hurler lorsque l'homme s'approcha à pas assurés vers lui, prostré à genoux sur le sol crasseux.

« Ah… tu es toujours l ! dit-il d'un ton qui laissait supposer un sourire cruel sur ses lèvres. Lève-toi donc au lieu de rester l ! »

   Quand le garçon manqua à sa requête, il l'attrapa d'un geste brusque par son coude décharné, et en une seconde, Harry se retrouva debout plaqué contre une robe de feutre épaisse et chaude. De la chaleur… Une violente claque du revers de la main sur ses fesses nues le ramena à lui.

« Ce n'est pas le moment de s'endormir. Je n'en ai pas fini avec toi, mon garçon. Où est ta baguette ? »

   L'homme haussait le ton et le secouait toujours par son coude engourdi. Sa tête lui faisait tellement mal qu'il n'arrivait pas à comprendre le sens des mots prononcés. Une seconde claque vint heurter sa joue déjà tuméfiée. Le goût du sang était plus vive que jamais.

« Si tu n'es pas capable de te défendre sans baguette, trouve-l ! »

  Un coup de botte en cuir s'abattit dans son estomac, le renvoyant sur le sol presque évanoui. Mais la poigne de brute de l'homme le tira par les cheveux et sa joue droite fut un moment caressée par une main rugueuse, avant d'être à nouveau frappée jusqu'au sang.

« Tu n'es qu'un bon à rien ! Pas digne d'être mon fils, et encore moins un sorcier ! Cracha-t-il avant de balancer le garçon sur les dalles boueuses du cachot. C'est un jeu, Severus. Quand comprendras-tu que si tu ne gagnes pas, tu finiras comme ta mère ?! » Dit-il d'une voix plus douce, pourtant bien plus terrifiante.

  Harry sentit le tissu qui frottait contre son torse s'écarter, puis deux énormes mains poussèrent sur ses épaules pour le faire s'agenouiller. Non, pensa-t-il. Pas ça ! Il voulait s'enfuir de cet endroit, s'échapper de la boue et l'obscurité, de la douleur… En à peine une seconde, il sentit sa bouche se tordre en un horrible hurlement de douleur. Puis plus rien.

  Il voyait le jeune Severus recroquevillé sur le sol, en proie à une douleur insurmontable. Mais lui, Harry, était sauvé. Il était loin déjà. Son regard embué de larmes se fixa sur la silhouette de l'homme se tenant fièrement au dessus de Severus nu et couvert de blessures, récitant une série de sorts interdits sur un garçon innocent. Il voulait l'aider, courir vers lui et l'emporter dans ses bras, lui donner un peu de sa force. Mais il pouvait déjà sentir son propre corps se dématérialiser, se dissoudre, et la scène devant lui disparut soudainement.

  Harry était dans un champ, ou une prairie. Il tourna la tête, encore remplie de la voix terrifiante de cet homme, et aperçut Sirius, lui souriant chaleureusement comme il l'avait toujours fait.

« Harry ! » il l'appela.

Le jeune homme sentit tout à coup toute la chaleur de cette voix lui irradier le cœur. Il se sentit submergé par une multitude de nouvelles émotions, la joie, la chaleur, la tristesse, la mélancolie… Il reprit finalement possession de ses moyens et courut vers Sirius, qui, pour une fois, ne disparut pas comme dans ses précédents rêves. Peut-être qu'il ne rêvait plus ?

Des bras puissants l'enserrèrent, plein d'un amour qui lui avait terriblement manqué toute sa vie. Harry sentit les larmes couler à nouveau, mais cette fois, c'était des larmes de bonheur. Si je pouvais rester comme ça, Sirius…

« Tu dois venir Harry. Avec lui. » Lui murmura Sirius dans l'oreille.

« Venir ? Où ça Sirius ? Et avec qui ? » Demanda Harry, le visage enfoui dans le cou de son parrain.

« Ici. Et tu sais avec qui, Harry. »

  Sirius desserra son étreinte, et regarda Harry dans les yeux, essuyant les larmes des joues du jeune homme de l'index.

« Il faut venir. Lui, il le peut. Il en est capable. »

« Qu…Quoi ? Sirius, je ne comprends pas ce que tu veux dire ! De qui parles-tu ? C'est Remus ? Dumbledore ? »

  Sirius secoua la tête en souriant presque tristement.

« Je ne peux pas t'en dire plus Harry, ce n'est pas moi qui décide tout ça. Je ne peux pas… » Il finit abruptement sa phrase par un étranglement.

  Le visage de Sirius se décomposa d'un coup, puis un autre sourire bien plus triste pris place sur ses lèvres avant que son image commence à disparaître.//


  Le jour se leva sur Privet Drive alors que le jeune Harry dormait encore, pour la première fois depuis des jours. Hedwig commençait déjà à s'impatienter dans sa cage, certes assez étroite. Harry marmonna dans son sommeil, mais ne s'éveilla pas. Il rêvait peut-être, mais si c'était le cas, c'était un rêve paisible et inoffensif.  Ses paupières papillonnaient légèrement, et il se retourna face au mur, sa main droite attrapa une poignée de tissu de sa longue chemise de nuit. Il commençait à haleter dans son sommeil, ses joues rougissant amplement. Déjà, de fines gouttes de perspiration perlaient sur son front, tandis que sa gorge vibrait de gémissements réprimés.

  Harry ouvrit les yeux en poussant le cri étouffé de quelqu'un qui aurait manqué de s'étrangler. Comme étonné de se réveiller alors que le soleil était déjà levé, le jeune homme se redressa vivement dans son lit, faisant grincer le sommier par la même occasion. Il s'étira du mieux qu'il put sans se lever, puis attrapa maladroitement sa paire de lunettes maintes fois réparées par les sorts d'Hermione. Une fois posées sur l'arête de son nez, elles lui procurèrent automatiquement une vision optimale de l'état des lieux. Hedwig s'impatientait dans sa prison de fer blanc, et donnait de légers coups de becs sur les barreaux pour rappeler à Harry son existence. Balayant le sol du regard, Harry remarqua que ses vêtements étaient éparpillés par terre et que la totalité de sa penderie s'était comme par enchantement répandue sur la moquette. Soupirant une bonne fois, Harry se leva et enfila un pantalon trop grand pour ses maigres jambes. Il avait encore maigri depuis la fin des cours. Les Dursleys avaient apparemment décidé de s'en tenir au minimum tandis que la croissance d'Harry demandait à ce qu'il mange plus que coutume. Peu importait pour Harry, il n'avait pas d'appétit de toutes façons. Ses rêves lui coupaient toute envie d'adolescent normal.

  Mais je n'ai jamais été normal, soupira-t-il une nouvelle fois.

  Il ouvrit la cage d'Hedwig, qui ne perdit pas une seconde pour sortir en marchant de son élégance propre à sa nature jusqu'au bord du bureau. Harry avait déposé dans une assiette les maigres restes de son repas de la veille, et Hedwig en avait laissé à peine pour un petit déjeuner.

« Je suis désolé Hedwig, si je pouvais avoir autre chose pour toi, je t'offrirais tout ce dont un hibou peut avoir envie. Mais on doit se contenter de ce qu'on nous donne pendant un moment. »

  La concernée le fixa avec ses yeux ronds, sans montrer un quelconque changement. Pourtant, Harry pouvait discerner une once de reproche dans ce regard. Si tu écrivais à Ron, ou à Hermione, alors peut-être que j'aurai de quoi manger convenablement, semblait-elle lui dire. Harry baissa les yeux et se passa une main dans ses cheveux déjà ébouriffés. Comment Ron réagirait-il à la rentrée, quand il verrait Harry ? Il serait furieux que celui-ci n'ait pas daigné répondre à ses hiboux, il pouvait en être certain. Hermione comprendrait peut-être mieux, parce que c'était une fille, et que les filles comprenaient mieux toutes sortes de choses. Harry avait surtout peur que Ron vienne le chercher comme il l'avait fait en seconde année lorsque les Dursleys l'avait barricadé à l'intérieur de sa chambre. Ron avait tendance à se laisser emporter par ses émotions, étant quelqu'un d'impulsif et un Weasley par-dessus le marché.

  Malgré tout, Harry était beaucoup trop occupé à penser à ses nombreux problèmes pour culpabiliser vis-à-vis des amis qu'il avait laissés sans nouvelles depuis qu'il les avait quittés à King's Cross. Il devait réfléchir à une façon d'élucider la signification de ces mystérieuses visions. Le plus important était de savoir si elles montraient, comme il avait du mal à le croire, le passé de son détesté professeur de Potions, ou si il s'agissait d'autre chose. Mais comment pouvait-il rêver du passé de quelqu'un d'autre, aussi terrible fut-il ? À moins d'avoir tout à coup fait l'acquisition un nouveau pouvoir de Voldemort, il n'y avait aucune raison de croire qu'Harry avait la faculté de voir le passé. Quel pouvoir inutile, en tout cas ! pensa Harry, soudainement furieux contre quiconque avait décidé de compliquer sa vie qui était déjà loin d'être banale.

  Il entreprit de ranger ses affaires étalées sur le sol avant que sa tante Pétunia ne le force à le faire en lui tirant les oreilles. La seule perspective de supporter les cris de colère et la voix railleuse de Tante Pétunia lui donnaient l'envie de tout ranger sur l'instant. Il ne comprenait pas vraiment comment le placard avait pu se vider tout seul durant le nuit, mais il n'en était plus à un mystère près. Peut-être qu'un autre elfe de maison en rébellion était passé par là. Ou bien son cousin Dudley s'était introduit dans sa chambre à son insu pour s'amuser… Ces suppositions n'étaient hélas que cela, des suppositions moins que probables. Il était évident qu'Harry avait dû user de magie involontaire lorsqu'il dormait. Cela lui vaudrait-il d'être accusé d'utilisation illégale de la magie ? Encore une fois. Il ne se sentait que vaguement ennuyé à cette idée. Finalement, peut-être allait-il finir à St Mungo avec des symptômes de folie passagère. Mais au moins, là bas, ils pourraient certainement le soigner de ces visions, ou lui donner des potions anti-rêves. Il aurait donné n'importe quoi pour une de ces petites fioles miracle de Madame Pomfrey à cet instant précis. Seulement, pour cela, il faudrait en expliquer les raisons, ce qu'il ne pouvait pas de permettre. Je ne vais pas montrer de signe de faiblesse. C'est ce qu'ils attendent tous de moi, et j'en ai assez d'agir comme tout le monde l'attend.

  Harry regarda à nouveau son réveil. Il serait bientôt sept heures trente. Le reste de la maison allait prendre vie au réveil de Dudley, Vernon et Pétunia d'ici quelques minutes. Harry poussa un soupir et enfila un sweat-shirt ainsi qu'une paire de chaussettes plus ou moins propres avant d'avancer vers sa porte en silence. Il fit mine d'écouter pour détecter un quelconque signe de mouvement de l'autre côté. Rassuré par le simple silence entrecoupé de sifflements, Harry ouvrit délicatement la porte et s'extirpa de la pièce aussi lentement qu'il put pour ne pas faire craquer le plancher. Les couloirs étaient décorés comme à leur habitude d'innombrables photographies de Dudley et du reste de la famille. Toute la famille sauf Harry, bien entendu. Le papier peint dépassé avait quelque chose de rassurant pour le jeune homme. Il s'y sentait, aussi étrange que cela puisse paraître, en sécurité.

  Il descendit les escaliers doucement, et suivit le couloir de l'entrée pour arriver jusqu'à la destination prévue : la cuisine. Il devait absolument trouver de quoi nourrir Hedwig, si ce n'était lui-même. Il jeta d'abord un coup d'œil dans le réfrigérateur, et y trouva des tranches de dinde rôtie, dont il s'empara pour les placer dans du papier d'aluminium. Il prit ensuite des tranches de pain grillé délaissées sur la table, et quelques fruits de la corbeille. Son opération terminée, il remonta les escaliers cautionnement avec son butin. Il entendit du bruit dans la pièce du bout du couloir et sentit sa fièvre monter en une fraction de seconde. Il entra dans sa chambre et cacha la nourriture nouvellement acquise sous le matelas. Respirant un grand coup, il ressortit de la pièce avec beaucoup moins de précaution, et fila jusqu'à la cuisine pour préparer le petit déjeuner de sa famille moldue. Dudley déboula dans la cuisine avec la grâce innée d'un hippopotame boulimique, sans manquer de lancer une tape bruyante sur l'épaule droite d'Harry au passage. Harry lui lança un regard mauvais avant de retourner à sa poêle garnie d'œufs brouillés et de bacon.


 « Alors cousin, bien dormi ? Je t'ai encore entendu gémir cette nuit ! Si ça continue je vais demander à papa d'insonoriser ma chambre ! C'est répugnant ! »

  Harry laissa échapper un léger soupir de dépit. Pauvre Dudley, s'il savait à quel point ses remarques le laissaient de marbre. Mais il pouvait au moins essayer de rendre le change pendant un moment. Il servit les œufs au bacon dans une assiette pour Dudley, et deux autres assiettes pour Tante Pétunia et Oncle Vernon.

« Oui, tu devrais lui demander, comme ça je ne t'entendrais plus ronfler comme un moteur toute la nuit. »

  Dudley vit rouge, son visage se crispant comme s'il avait avalé un morceau de bacon de travers. Il frappa du poing sur la table comme son père avait l'habitude de faire.

« Je ne ronfle pas ! Espèce de tordu ! Fils de… !! »

  Dudley n'eut pas le temps de terminer son insulte toute préparée qu'une des maigres mains d'Harry se trouva serrée autours de son gros cou, l'empêchant de prononcer un mot de plus.

« Je te préviens Duddy-kin, pas d'insultes qui concernent mes parents. Tu sais que je serai bientôt en âge d'exercer la magie en dehors de Hogwarts, n'est-ce pas ? Sache que dans le monde des Sorciers, la profanation est un crime autant que le meurtre. »

  Harry desserra ses doigts, voyant que la peau de Dudley virait au violet. Il donna une tape amicale sur la joue du garçon rondouillard, avant de retourner à sa cuisine. Dudley resta prostré pendant de longues secondes avant de tousser bruyamment et de se remettre à manger comme si de rien n'était. Même lui, il pouvait sentir que son cousin avait radicalement changé depuis qu'il était revenu d'Hogwarts cette année. Il avait toujours la même apparence de gamin sous-alimenté, mais son regard lumineux et innocent avait été remplacé par un regard sombre et à moitié fou. Il avait l'air d'être capable de tuer. Dudley avait décidé de croire les yeux d'Harry quant à ce qu'il risquait si il mettait son cousin en rogne. Il avait limité ses insultes à quelques remarques, de peur de se voir transformé en une repoussante créature avant la fin des vacances d'été. Mieux valait rester sur ses gardes avec des gens comme ça.

  L'arrivée des parents de Dudley dans la cuisine transforma le silence tendu en une cacophonie insupportable. Harry finit de préparer le café et le thé, et s'éclipsa dans sa chambre sans demander de comptes. Il avait emporté une tranche de pain de mie et deux ou trois biscuits pour la route. Hedwig lui fit la fête lorsqu'il remplit sa gamelle des tranches de viande qu'il avait chipé pour elle. Il lui caressa le plumage songeusement pendant qu'elle dégustait son petit déjeuner. Il ne pourrait pas supporter de rester dans cette maison jusqu'à la fin des vacances, même en sachant que c'était le seul endroit où Voldemort ne pouvait pas l'atteindre. Il voulait devenir fort, pour venger Sirius et ses parents. Il n'échouerait pas la prochaine fois.

   Alors qu'Harry était plongé dans de délicieuses pensées de victoire et d'images de son pire ennemi mort à ses pieds, il sursauta en entendant des voix qu'il n'était pas sans connaître venir du rez-de-chaussée. Laissant la chouette à son repas, il redescendit les escaliers pour trouver dans la cuisine, apparemment au beau milieu d'une dispute, la famille Weasley au grand complet (ou du moins ce qu'il connaissait de cette famille). Le voyant apparaître dans l'encadrement de la porte, tous les yeux se tournèrent vers lui, et bientôt, les sourires naquirent sur les visages des rouquins.

« Harry ! Merci Merlin, tu es bien vivant ! » s'écria Ron de sa voix enrouée, en courant pour serrer son ami dans ses bras forts. Ron avait encore grandit, et il ressemblait bien plus à un homme qu'Harry.

« Bien sûr que je suis vivant. Je suis désolé de vous avoir inquiétés, tous. Je n'ai pas eu la tête à écrire. » Avoua-t-il non sans une certaine gêne à la vue des regards inquiets des Weasleys.

« Qu…Comment, alors ce n'est pas eux qui t'ont empêché de nous répondre ? »Demanda Ginny, devenue une jeune fille adorable, en pointant vers les trois Dursleys qui semblaient prêts à exploser de rage à leur côté.

« Non, pas du tout. Hedwig a même le droit d'aller se promener cette année. Je suis désolé. Je n'ai écrit à personne d'autre non plus. »

  Les visages choqués des Weasleys étaient amplement suffisants pour qu'Harry se sente tout petit et coupable, mais cela n'empêcha pas Ron se piquer une crise de colère juste devant lui.

« Tu n'as écrit à personne ?? Mais Harry, qu'est-ce qui te prend !? Tu croyais qu'on allait passer toutes les vacances sans aucune nouvelle de toi sans inquiétude après ce qui s'est pass ?? »

  Harry ne trouva rien à répondre. Que pouvait-il dire ? Il ne voulait pas s'énerver contre ces personnes qu'il considérait sa réelle famille, mais si c'était vraiment ce qu'il pensait d'eux, pourquoi ne pas leur avoir expliqu ? Il avait réagit comme un idiot. Évidemment que Ron allait s'inquiéter pour lui ! C'était bien son meilleur ami, n'est-ce pas ? Ne s'étaient-ils pas toujours tout racont ? Il sentit, depuis la première fois de sa vie, les larmes lui monter aux yeux pour ce qui n'était pas de la douleur. Sans réfléchir, il agrippa  le poing serré de Ron et l'attira à lui pour le regarder dans les yeux.

« Je suis vraiment désolé Ron. Je vais tout t'expliquer. J'ai besoin de toi. Est-ce que tu me pardonnes ? »

  Ron sourit de ce sourire qui respirait la franchise et l'honnêteté d'un cœur de Griffondor. Il serra Harry d'un bras musclé et s'écarta de lui pour lui dire en souriant :

« Bien sûr Harry, mais ne m'inquiètes plus jamais comme ça ! J'ai imaginé des tas d'horreurs moi ! On t'emmène au Terrier, Dumbledore a créé une protection avec un groupe d'Aurors pour que tu puisses rester chez nous. »

  Harry sentit son cœur se remplir de chaleur à l'idée qu'une famille déjà si remplie comme les Weasleys ait pris autant de risques pour l'accueillir chez eux. Malgré toutes ses résolutions de ne parler à personnes de ses rêves et de ne pas partager sa douleur d'avoir perdu Sirius, il mourrait d'envie de se sentir bienvenu quelque part. Il tenterait par tous les moyens de protéger cette famille, de ne pas l'impliquer dans ces nouveaux évènements mystérieux. Il faudrait qu'il utilise des sorts de protection pour cela. L'interdiction d'user de la magie ne serait peut-être plus valable une fois dans le monde magique. Et puis il ne restait que quelques jours avant ses seize ans. Il ne tenait pas à ce que ni Ron ni Ginny ou les autres sachent à quel point Harry avait changé, à quel point son âme était obscurcie par les horreurs qu'il vivait chaque nuit dans ces rêves. Il ne voulait pas que le regard que ses amis lui portaient change. Il voulait faire semblant, comme si de rien n'était, et continuer à être le Harry Potter que tout le monde connaissait. Il le fallait, pour son bien et celui des autres. Personne ne devait savoir.


    Le Terrier était toujours aussi animé que dans les souvenirs d'Harry. Malgré toutes ses émotions contradictoires, un pur sentiment de bonheur régnait dans le cœur du jeune homme, comme si ces derniers mois avaient disparus pour ne laisser place qu'à la simple joie d'être entouré des personnes qu'il aimait et qui le lui rendaient bien. Cette douce illusion pourrait certainement perdurer pendant quelques heures avant que les angoisses ne reprennent le dessus, et Harry en profiterait jusqu'au bout. Il avait à nouveau un sourire collé aux lèvres, se sentait déjà un peu plus vivant, au simple contact d'un environnement chaleureux.

« Par la barbe de Merlin, Harry ! Comme tu es maigre ! Depuis combien de temps n'as-tu pas mangé quelque chose de correct ? Et cette pauvre Hedwig, condamnée au même régime ! Vite, les enfants, montez les affaires de notre Harry dans les chambres et descendez m'aider à préparer un déjeuner digne de ce nom ! »

  Madame Weasley, jouant le rôle d'une mère pour Harry, s'agitait déjà dans tous les sens à renfort de coups de baguette pour activer les fourneaux. Ginny lança un sourire en coin à Harry, et partit dans la cuisine aider se mère. Harry se sentait chez lui dans cette famille, et arrivait à en oublier ses problèmes. Ron et les jumeaux portèrent avec lui ses affaires jusqu'à leurs chambres. Celles-ci étaient exiguës mais bien plus agréables que celle qu'Harry occupait dans sa famille moldue. Hautes en couleurs, comme toutes les autres pièces de la maison, les murs décorés d'affiches et de posters de Quidditch, sur lesquels les Chudley Canons répétaient leurs mouvements à l'infini sur des décors féeriques.

  Fred et Georges s'affalèrent sur le lit de Ron, qui s'assit sur la moquette adossé au matelas. Harry s'assit à ses côtés, admirant les quelques changements de décoration depuis l'année précédente.

« Alors, Harry. Tu as promis de m'expliquer, j'attends. »

« Oui Harry ! T'as intérêt à nous raconter quelque chose d'extraordinaire, vu le mal qu'on s'est donn pour convaincre Dumbledore de te laisser venir ! » Ajouta Fred de son éternel ton espiègle.

« En fait… Je n'avais pas la tête à voir qui que ce soit. Il se passe… quelque chose. Harry dit-il en soupirant, las de devoir inventer des excuses pour sa conduite à son meilleur ami. Depuis que Sirius est…mort… Et bien j'ai eu ces rêves. Ils sont si réels. J'ai l'impression de devenir fou. »

  Harry avait l'impression de trahir une promesse faite à lui-même en révélant ne serait-ce que ce fragment de vérité. Il ne pouvait bien sûr raconter ses visions à ses amis, déjà persuadé qu'elles étaient une invasion de la vie privée de Snape. Il fallait rapidement trouver une parade au mensonge tout en protégeant la vérité de Ron et ses frères.

« Des rêves ? Comment ça ? Des cauchemars tu veux dire ? Mais ce n'est pas Vous-savez-qui… » S'enquit Ron avec inquiétude.

« Non ! Pas ce genre de rêves. Enfin, d'après ce que j'ai vu, non. Dans ces rêves, je vois Sirius. Il me dit que je dois venir, mais je ne sais pas où. Et il dit que je dois venir avec lui. »

« Lui ? Qui ça ? » Demandèrent les jumeaux en même temps.

« Aucune idée, c'est ce que je voudrais découvrir. Mais Sirius dit qu'il ne peut pas m'en dire plus, que je sais de qui il parle. Seulement, ça pourrait être n'importe qui. Et puis…vous devez penser que je suis stupide de croire que ces rêves sont autre chose que des rêves… »

  Les garçons échangèrent des regards ennuyés, et tentèrent de sourire pour le rassurer, mais le mal était fait. Il était évident pour Harry que son histoire ne tenait pas debout. Mais il ne pouvait pas fournir de preuves, ni les convaincre que ces rêves étaient plus que de simples images vagues de sens, alors que lui-même n'était pas certain de leur signification.

« Harry… Je ne crois pas que tu es fou… Mais Sirius est mort… Comment pourrait-il apparaître dans tes rêves pour te demander quelque chose ? Encore, si tu l'avais vu en fantôme, je comprendrais, mais… »

« Je sais que ça paraît insensé, Ron. Mais j'ai vécu tant de choses qui m'auraient parut inimaginables avant de savoir que j'étais un sorcier ! Les visions existent, non ? »

« Je suppose… »

« Même si Trelawney n'est pas un bon exemple pour prouver que la Divination est autre chose que de la théorie, ça doit quand même exister. »

  Cette fois, Harry était sûr que la prochaine couverture de Witch Weekly aurait en gros titre « Harry Potter interné à St Mungo pour déviance mentale ». Lui-même avait du mal à croire qu'il venait de prononcer de telles paroles. Il n'avait jamais cru en ce type de magie, et était bien le premier à s'en moquer. Il se sentait complètement stupide, et avait horreur de ça.

« Bien, Harry… Si tu penses que c'est possible, il vaut mieux attendre la rentrée pour en parler à Dumbledore, non ? Ca serait risqué d'envoyer un hibou pour lui demander ce qu'il en pense. On devrait demander à Hermione ce qu'elle en pense, quand elle viendra. » Dit finalement Ron, sur un ton songeur.

   Le cœur d'Harry fit un bond dans sa poitrine à la réalisation que Ron avait assez de confiance en lui pour apporter son soutient alors que la dernière fois qu'Harry avait été persuadé de la véracité d'une vision, il les avait tous conduit à un piège tendu par Voldemort lui-même.

« Merci Ron. Quand Hermione doit-elle arriver ? »

« Juste avant ta fête d'anniversaire bien sûr, Harry ! » s'exclama Ron avec un sourire jusqu'aux oreilles.

« Une fête… ? »

   La tête qu'il faisait à ce moment devait être drôle à voir, car les trois frères éclatèrent de rire, et Harry ne tarda pas à en faire de même. Il avait du mal à se souvenir à quand remontait la dernière fois qu'il avait ri franchement et sans penser à rien d'autre.


   // La pièce était sombre, mais Harry se sentait bien. La douleur avait presque disparu, malgré les hématomes qui couvraient son corps de haut en bas. Le sang était sec sur sa bouche, il pouvait toujours sentir son goût métallique sur sa langue. Il passa une main dans ses cheveux sales. Un bain serait le bienvenu, mais en avait-il le droit ? Il n'avait pas gagné à ce jeu avec son père. Elle. Elle lui donnerait un bain. Il fallait la trouver. Dans sa chambre, peut-être ? L'enfant se mit péniblement sur ses faibles jambes, s'appuyant d'une main sur le mur humide du cachot pour se relever. Finalement, la douleur était toujours présente. Si seulement sa baguette était près de lui, si seulement il savait se servir correctement de sa magie. Il aurait pu faire venir sa baguette par un accio, où qu'elle se trouve.

  La porte était restée entrouverte. Père était parti, le laissant seul parce qu'il ne l'avait satisfait. Si il réussissait rien qu'une fois à lui faire plaisir, serait-ce suffisant ? Il poussa la porte de ses deux petites mains blessées, et dû froncer les sourcils pour ne pas être aveuglé par la forte lumière du couloir. Les flammes des lanternes marquaient de grandes ombres sur le sol crasseux. Harry se fraya un chemin jusqu'à la large grille qui menait vers les escaliers. Juste quelques marches, et il serait dans le manoir. Vite, se pressa-t-il. Avant qu'il ne revienne. Monter les escaliers était une tâche plus difficile qu'il ne l'aurait cru. Ses genoux tremblaient, les muscles de ses cuisses semblaient prêts à craquer sous sa peau, ses pieds étaient ensanglantés. Il était frigorifié, sa peau presque violette, ses doigts engourdis. Enfin, il parvint à la dernière marche et se retrouva dans la grande salle d'entrée, décorée comme celles de tous les manoirs de prestigieuses familles. Il tenta tant bien que mal de courir jusqu'au couloir de l'aile gauche, pour rejoindre le petit salon où elle se trouvait. Mère, murmura-t-il, les larmes aux yeux.

   Il ne prit pas la peine de frapper, prononçant le mot de passe à voix basse, et pénétrant dans la petite pièce sans se poser de question. Une femme qu'il connaissait était assise sur le même fauteuil, le regard perdu. La tête tournée vers la lucarne, elle ne bougeait pas du tout, immobile comme une statue.

« Mère… » il sentit ses lèvres prononcer.

  Enfin, elle sembla se réveiller d'un long sommeil, et tourna vers lui des yeux noirs et magnifiques, comme le reste de sa personne. Elle esquissa un faible sourire et avança une main tremblotante vers lui.

« Mon chéri, tu es là. » dit-elle comme s'il revenait d'une promenade.

  Harry se jeta dans ses bras, et lorsque les bras doux et chaud de sa mère se refermèrent sur son corps frêle et tuméfié, il put se laisser aller à sangloter silencieusement contre sa poitrine. Elle n'avait pas remarqué les brûlures et les hématomes couvrant son corps. Sa mère ne remarquait jamais rien. Ses yeux restaient dans le vague, quoiqu'elle regarde. Elle attendait que son fils vienne la voir sans jamais bouger de ce fauteuil, à part pour prendre un bain ou manger les repas préparés par les elfes de maison. Il resta un long moment dans ses bras réconfortants et confortables, laissant toute sa détresse s'échapper par ses larmes. Grâce à ce peu de tendresse qui lui était accordée, il oublia presque ses maux, la douleur qui pénétrait jusque son âme et lui donnait envie de vomir. Il  releva la tête lentement, ses yeux le piquaient, mais il les garda aussi ouverts que possible pour admirer le visage ensorcelant de cette femme. Elle n'était pas jeune, mais elle ressemblait à une petite fille, encore remplie d'innocence, la longue chevelure d'ébène ruisselant sur ses épaules. La peau aussi blanche que de la porcelaine, les lèvres roses et presque trop fines, elle avait l'air sortie d'une peinture du manoir. Harry sentait son cœur se serrer à la vue de cette personne, sans savoir pourquoi. Il la connaissait, pourtant, il la voyait pour la première fois. Une étrange sensation de bien être se répandait en lui. C'était l'amour que vouait Severus à cette femme, sa chère mère. Et Harry était Severus, à ce moment. Une des élégantes mains se posa sur sa joue, effaçant les traces de larmes qui souillaient son visage.

« Mon amour, je vais te faire couler un bain. On m'a apporté une nouvelle potion pour le bain, elle sent très bon, et elle adoucit la peau. Veux-tu avoir une jolie peau comme ta maman, mon ange ? »

  Ses mots n'avaient pas de sens pour Harry. Pourquoi cette femme s'inquiétait-elle pour sa peau, sans voir qu'il était bless ? Mais un bain était tout ce dont il rêvait pour le moment. Il descendit de son giron, et attendit quelques secondes debout, fiévreux et tremblant qu'elle se lève et traîne ses longues robes avec elle jusqu'une ancienne armoire aux portes de verre. Harry avança prudemment derrière elle, et elle prit sa main pour le conduire vers une porte qui s'ouvrit sur une grande salle d'eau. Tout était couvert d'un métal doré, luisant de propreté. L'endroit était plutôt sombre, comme le reste du manoir, mais sentait bon le savon et les herbes.

« Viens mon chéri. Dit elle en posant une main chaude sur son épaule, prenant garde de ne pas le brusquer. Monte dans le bain, et je vais ajouter quelques herbes et la potion. »

  Une fois assis dans cette étrange baignoire dont les pieds étaient mobiles, Harry sentit celle-ci remuer légèrement avant que l'eau délicieusement chaude ne la remplisse jusqu'à ras bord.  La mère de Severus sourit et commença à le frotter doucement avec une éponge particulièrement douce. Elle versa une potion verte dans l'eau et sur l'éponge avant de lui laver les cheveux, massant minutieusement le cuir chevelu. Harry ne s'était jamais senti aussi bien. Ainsi c'est ça une mère, pensa-t-il presque tristement. Il aurait voulu que ce moment dure une éternité, ne finisse jamais. Même s'il savait, au fond de lui, que ce n'était pas bien. Ce n'était pas sa mère. Il ne vivait pas ici. Mais le corps dans lequel il se trouvait n'obéissait pas à ses pensées, juste à celles de Severus. Il se laissa bercer par les caresses de ces mains massant son corps, et la voix de cette femme qui chantait doucement comme pour le calmer.

  Tout à coup, la porte de la salle de bain s'ouvrit en émettant un bruit sourd. Un homme tout de noir vêtu se tenait dans son encadrement. Harry aurait voulu crier, mais il ne pouvait rien faire. Sa voix était coincée quelque part dans sa gorge, ses mains agrippaient furieusement les bords de la baignoire, tandis que les robes de sa mère lui cachaient une partie de la vue. Il pouvait voir les bottes de l'homme, boueuses et pointues. Il se rappelait le bruit de ces bottes sur le sol des cachots, la douleur que leur coup pouvait infliger.

« Qu'est-ce que tu fais, femme ? » demanda-t-il d'un ton qui masquait à peine sa colère.

  Elle ne se retourna pas tout de suite. Plusieurs secondes s'écoulèrent avant qu'elle ne se redresse, dans toute sa grâce, et qu'elle se mette à sourire de façon angélique.

« Je donne un bain à mon fils. Vous savez que le petit aime être propre, n'est-ce pas, époux ? »

  Il ne répondit rien sur le moment, peut-être à cause de la surprise, ou de la façon dont elle avait prononcé les mots, si calmement. Puis il émit une sorte de grognement, et fit claquer un talon sur le sol.

« Dépêchez-vous, je dois l'emmener chez les Malfoys. Le fils aîné a exigé sa présence au dîner de ce soir. Je compte sur votre présence également, ma chère. »

  Sans attendre de réponse, il vit volte face et Harry ne sut qu'il était parti que par le bruit de bottes qui résonna pendant plusieurs minutes dans son crâne.

« Je vais te préparer une splendide robe pour ce repas chez les Malfoys. Une robe noire, qui mettra ta peau en valeur, mon joli ange. »

  Elle le sécha dans une douce serviette éponge, lui caressa le visage et les cheveux encore ruisselants, puis partit dans le salon et s'assit à nouveau sur son fauteuil. Elle tourna son aristocrate visage vers la fenêtre et se perdit une fois de plus dans sa contemplation. Harry resta à la regarder, serrant le drap de bain très fort contre lui. Il ne trouva pas de larmes pour pleurer.//


  Harry passa le reste de la nuit à se remémorer ce rêve. Après cette vision de la mère de Snape, il n'avait pas vu Sirius. Il s'était simplement réveillé, les yeux encore humides, et avait mis quelques secondes à se rappeler où il se trouvait. La respiration régulière de Ron à ses côtés le ramena à la réalité. Il tourna la tête sur le côté pour essayer de distinguer les traits de son ami roux qui partageait son lit. Ron dormait la bouche rentrouverte, émettant de faibles ronflements. Si seulement il pouvait dormir aussi consciencieusement !

  Harry se remit à penser au rêve, aux sensations qu'il avait ressenties cette nuit. Comment deux personnes aussi différentes pouvaient-elles être mariées ? Les parents de Snape s'étaient-ils aimés ? Avaient-ils toujours été ainsi ? Harry ne pouvait s'empêcher de plaindre et d'envier son professeur à la fois. Il connaissait la chaleur d'une mère grâce à Molly Weasley qui l'avait pour ainsi dire adopté comme son propre fils, mais c'était bien différent avec la façon dont elle l'avait choyé. C'était étrange à quel point il avait semblé la connaître dans son rêve, alors qu'à présent il ne gardait d'elle que l'image de cette nuit.

  Les visions se faisaient de plus en plus précises, surtout au niveau des sensations. Il aurait pu décrire chaque matière qu'il avait touchée, les plus infimes détails, jusqu'à l'odeur des cheveux de la mère de Snape. Il ne connaissait pas leurs noms. Bien sûr qu'il ne les connaissaient pas ! Il semblait que le jeune Severus n'ait guère pensé à ces personnes comme à son père et sa mère, mais plutôt comme à une personne cruelle et effrayante et une autre douce et tendre. Deux parfaits opposés. Harry ne se souvenait pas du visage de l'homme, peut-être parce que le jeune Severus ne voulait pas s'en rappeler.

« Je veux en savoir plus » se surprit-il à murmurer, les yeux déjà à moitié fermés.

  // Lorsqu'il se rendormit, Harry plongea dans un nouveau rêve, mais il s'agissait plus de vagues images et de sons que d'une réelle vision. Il s'y sentait parfaitement bien, en sécurité. Puis il se retrouva dans une prairie qui s'étendait à perte de vue, le ciel était blanc, les couleurs irréalistes. Et il était là, assis sur une pierre, les cheveux au vent, les yeux pétillant de malice. Sirius ! Mais il semblait beaucoup plus jeune, peut-être comme il l'aurait été si il n'avait pas passé treize longues années à Azkaban… Il tourna le visage vers Harry, souriant de parfaites dents blanches, puis écarta les bras pour accueillir Harry.

« Harry. » dit-il, comme il le faisait toujours.

  Harry ne perdit pas de temps à répondre, courant de toutes ses forces pour le rejoindre. Mais la silhouette de Sirius s'effaçait déjà, et devenait de plus en plus floue. Harry courrait aussi rapidement qu'il le pouvait. Mais il était déjà trop tard.//


A suivre


Voilà, c'est la fin du premier chapitre ! J'en ai bav ! C'est difficile d'écrire du point de vue de ce sale gosse ! Enfin, le prochain chapitre sera du point de vue de Severus, youpi ! J'espère le poster la semaine prochaine, si j'ai le temps d'écrire ce week end. Hum… j'espère que des gens vont lire ça quand même, histoire d'avoir une motivation pour continuer. Alors si vous avez pas trop détesté, postez une pitite review !