Disclaimer : le monde d'Harry Potter appartient à JK Rowling. Je ne fais que jouer avec et n'en tire aucun profit.

Résumé : Hermione et Remus ont été cruellement frappés par le destin. Persuadés qu'ils ne tomberont plus jamais amoureux, ils décident de faire ensemble un mariage de raison. Hermione fait des recherches sur la lycanthropie. Elle est peut-être à l'orée de grandes découvertes…

Notes : ma première fic het ! (tu es devenue folle, Sioban ? ben non, pas plus que d'habitude…)


Chapitre 1

Hermione poussa la porte des Trois Balais, soulagée qu'il fasse si chaud à l'intérieur. Elle salua madame Rosmerta et ôta son écharpe, secouant les quelques flocons de neige qui y restaient accrochés. Elle vit que Harry était déjà là. Se forçant à sourire, elle s'assit face à lui.

Harry quitta son air rêveur et se pencha au-dessus de la table pour lui prendre la main et l'étreindre chaleureusement.

« Tu vas bien, Hermione ? »

Elle hocha la tête, sachant que Harry ne la croirait pas, de toute manière. A son habitude, il la scrutait, comme s'il espérait lire sur son nez retroussé ou ses cheveux ébouriffés si elle allait mieux, si elle reprenait le dessus. Elle commanda une bière-au-beurre pour lui tenir compagnie et en avala une gorgée.

« Alors, comment vont tes recherches ? demanda Harry. Quoi de neuf et d'excitant au pays des potions ? »

Hermione considéra un instant le jeune Auror, rayonnant de vie et de confiance dans sa robe pourpre, puis dit brusquement :

« Je vais épouser Remus. »

Harry s'étrangla avec sa boisson et se mit à tousser. Hermione lui fit les gros yeux.

« Tu ne veux pas que je te tape dans le dos comme à un gamin, si ? »

Harry, écarlate, réussit à articuler :

« Remus Lupin ? »

« On connaît combien d'autres Remus ? »

Harry sourit devant l'impression de déjà vu. Puis il reprit son air sérieux, et même un peu inquiet.

« Pourquoi diable ne m'as-tu rien dit plus tôt ? Depuis quand êtes-vous ensemble ? »

« On n'est pas ensemble. Ce n'est pas la romance du siècle. En fait, s'il faut appeler les choses par leur nom, c'est un mariage de raison. »

Harry ouvrit la bouche, la referma en entrechoquant ses dents, se passa une main dans les cheveux et dit finalement :

« Je suis l'idiot de Poudlard, tu te rappelles ? Explique-moi ça avec des mots simples. »

Hermione reprit une gorgée de bière en pensant qu'elle aurait dû choisir du whisky-pur-feu. Elle plaça posément ses mains sur ses genoux, pour que Harry ne les saisisse pas et s'aperçoive qu'elles étaient glacées.

« Mon fiancé est mort. Sa femme est morte. Je travaille à améliorer la potion Tue-loup. Il est le cobaye idéal. Je n'ai plus envie d'être seule. Il a envie d'avoir des enfants. Nous avons posé l'équation et nous l'avons résolue. La date est fixée au 20 février. Tu veux bien être mon témoin ? »

Harry ne dit rien, comme paralysé par un sort Stupefix. Les deux jeunes gens se regardèrent un moment, et les souvenirs affluaient en masse, même s'ils n'étaient pas les bienvenus. La guerre contre Voldemort, les batailles incessantes, l'épuisement et les deuils. Harry Potter avait bien mérité son surnom de l'Elu : il avait vaincu Voldemort, définitivement, à moins que le psychopathe ne trouve un moyen de reconstituer son corps à partir des cendres dispersées dans tout le pays. Toutefois, malgré l'euphorie de la victoire, il avait fallu accepter les pertes qui endeuillaient le camp des vainqueurs.

Nymphadora Tonks était morte, de la main de Narcissa Malefoy. Harry s'était fait un devoir d'arrêter lui-même la meurtrière, mais cela n'avait pas apaisé le chagrin de Remus, son mari depuis moins d'un an. Sa santé, déjà chancelante – être un lycanthrope espion, infiltré chez les partisans de Voldemort, n'était pas de tout repos -, semblait se dégrader chaque jour un peu plus, ce qui préoccupait beaucoup Harry.

De même, il s'inquiétait beaucoup pour Hermione. La disparition de Ron l'avait profondément affectée. Il était tombé lors de la dernière bataille, et on ne savait même pas qui en était responsable. Hermione s'était lancée à corps perdu dans le travail. Curieusement, elle avait choisi de se spécialiser dans les potions (un pied de nez au professeur Snape, qui n'avait cessé de la rabaisser durant sa scolarité ? Peut-être bien.) et elle suivait une formation très austère à Londres. Depuis quelques mois, elle avait pour ambition déclarée d'améliorer la potion Tue-loup. La formule actuelle avait de nombreux effets secondaires, douloureux et invalidants. Hermione voulait faire mieux. Et elle passait beaucoup de temps en compagnie de Remus, depuis quelques temps.

« Avant qu'on parle de date et de témoin, dit Harry, j'aimerai comprendre. Je vous adore, tous les deux, et je serais ravi que vous puissiez vous consoler l'un l'autre… »

« Stop ! intervint Hermione, sur la défensive. Je te l'ai dit, c'est un mariage de convenances. Ne mets pas de romantisme là où il n'y en a pas. »

« Tu ne l'aimes pas ? »

« Je l'aime bien. »

« Hermione, tu es trop jeune pour faire un mariage arrangé. Un jour, tu retomberas amoureuse… »

« Non. »

Harry vit la souffrance dans ses yeux, et elle était si intense qu'il se tut. Hermione ajouta:

« Les choses sont parfaitement claires entre nous. Il n'oubliera jamais Tonks. Il n'aimera jamais personne d'autre. Les loups-garous ne donnent leur cœur qu'une fois. Mais la vie continue, n'est-ce pas ? Nous avons des intérêts convergents, nous nous entendons bien, et il me respecte, je crois. »

« Et ça vous a suffi pour arrêter une date. C'est rapide. »

« Il vaut mieux ne pas prolonger les fiançailles. »

Harry soupira. Il aurait applaudi à une histoire d'amour entre ses deux amis, mais face à tant de cynisme, il se sentait désemparé.

« Je serai ton témoin. »

« Merci. »

Hermione respira. Au moins, elle ne perdrait pas l'amitié de Harry.

HPHPHPHP

Remus se promenait lentement d'une pièce à l'autre, regardant les meubles avec un air las. Il découvrait sa nouvelle demeure sans enthousiasme comme sans déplaisir. Hermione l'avait choisie, achetée et aménagée dans la foulée. Elle s'était montrée d'une efficacité redoutable, et tous deux se trouvaient à présent nantis d'un petit nid douillet, parfait pour des amoureux.

Sauf qu'ils n'étaient rien de ce genre.

Remus regarda sa nouvelle alliance. Et repensa à Nymphadora. « C'est si dur de te remplacer. J'espère que tu me pardonnes. » Tonks comprendrait, il en était sûr, mais il avait quand même mauvaise conscience.

Au moins la situation était claire avec Hermione. Cela semblait convenir à la jeune femme qui, elle aussi, avait beaucoup souffert. Mais cela suffirait-il à rendre la vie commune supportable ? De toute manière, ils ne se verraient guère, Hermione restait enfermée des heures dans son laboratoire.

Un frémissement courut sur son visage creusé. Il savait qu'il avait eu de la chance de trouver Hermione, prête à accepter ses conditions, et pétrie des qualités qu'il aimait : l'intelligence, la sagesse, la discrétion, le courage. Il la connaissait en outre depuis longtemps. Alors qu'elle n'avait que treize ans, il lui avait dit que jamais il n'avait rencontré de sorcière de son âge aussi intelligente.

Il était loin de se douter, alors, qu'elle deviendrait sa femme.

Malgré lui, ses pensées revenaient à Nymphadora. Elle détestait son prénom, ce qui montrait clairement qu'elle ne s'acceptait pas telle qu'elle était. Elle avait pourtant une merveilleuse nature, chaleureuse, rieuse, spontanée. Terriblement maladroite, ce qui le faisait rire. Ils avaient eu huit mois de bonheur, malgré la guerre. Il l'avait aimée avec toute l'ardeur de son caractère un peu froid en apparence.

C'était fini. Inutile de se torturer davantage.

Harry lui avait dit, très sérieux dans son costume de témoin : « Si vous aviez un fils, ne seriez-vous pas heureux ? Et vous n'aimeriez pas la femme qui vous le donnerait ? »

Cher Harry, qui vivait dans un conte de fées, depuis qu'il avait trouvé l'amour dans les bras de la personne la plus improbable qui soit.

Remus donnerait à Hermione toute l'affection qu'il lui était possible. Elle devrait s'en contenter.

Hermione entra avec une pile de livres qu'elle posa sur le guéridon.

« Que dis-tu de la maison ? »

« Elle est parfaite. »

« C'est aussi mon avis. Je n'ai pas fait trop d'efforts sur la décoration, ce n'est pas important. »

« Je suis d'accord. »

Hermione parcourait les lieux d'un regard critique. Remus la contemplait. Elle était habillée strictement, avec un tailleur bleu marine, et elle nouait ses cheveux en chignon pour qu'ils ne la gênent pas quand elle se penchait sur ses chaudrons. Elle était aussi différente de Tonks que le jour et la nuit. Mais il avait confiance en elle, lui qui ne donnait guère sa confiance…

Ils dînèrent légèrement. Hermione parla de ses recherches. Il parla de ses espoirs de trouver un emploi. L'ostracisme pesant sur les loups-garous avait disparu avec Dolorès Ombrage. Bon débarras.

Puis vint l'heure de se coucher.

Jamais ils n'avaient dormi ensemble. Devant la porte de la chambre, Remus dit doucement :

« Je peux dormir sur le canapé, si tu veux. »

« Non. Il faudra bien en venir là, un jour ou l'autre. Reculer l'échéance ne sert à rien. »

Elle entra avec décision et fila tout de suite dans la salle de bains. Elle en sortit au bout de quelques minutes, en chemise de nuit.

« A ton tour. »

Et elle alla s'allonger à la droite du lit. Quand Remus la rejoignit, elle éteignit la lumière. Ils restèrent allongés dans la pénombre, sans se toucher.

Hermione dit finalement :

« Pour l'étape suivante, cela viendra naturellement, je pense. Nous avons tout le temps. »

Remus approuva. Mais il ne put s'empêcher de songer qu'il aurait aimé qu'elle soit moins froidement intellectuelle.

HPHPHPHP

Hermione n'avait jamais vécu avec Ron, et n'avait aucune expérience de la vie à deux. Elle appréhendait un peu cette cohabitation quotidienne et les compromis qui en découleraient. Cependant elle devait reconnaître qu'il y avait peu de désagréments à vivre avec Remus. Il s'acquittait volontiers de sa part de tâches domestiques (pas d'elfes de maison chez Hermione !), il avait des habitudes de calme et d'ordre qui convenaient pleinement à sa jeune épouse. Elle-même avait une vie moins casanière, elle changeait souvent ses horaires en fonction de l'avancement de ses recherches, mais elle prévenait toujours Remus par hibou.

Ils ne s'étaient encore jamais disputé. Pour Hermione, qui auparavant se querellait sans cesse avec Ron, cette relation tranquille était une nouveauté qui ne manquait pas de charme.

A l'approche de la pleine lune, Hermione tint prête une dose de la potion Tue-loup, avec les dernières améliorations qu'elle y avait apportées. L'épreuve serait moins pénible pour Remus, cette fois. Toutefois, sa santé précaire laissait présager un moment difficile.

En rentrant à la maison, Hermione remarqua que Remus était préoccupé. Il faisait des efforts visibles pour lui faire la conversation, mais son regard demeurait distant et assombri. Hermione scruta son visage, d'ordinaire souriant, qui se creusait d'un pli soucieux sur le front. Elle songeait : « Qu'a-t-il donc ? Est-ce la perspective de la pleine lune ? s'il pouvait se confier à moi… »

Mais Remus ne dit rien, et Hermione, par discrétion, ne tenta pas de forcer le mur derrière lequel souffrait son mari. Ce mari qui lui était cher, pourtant.

La nuit venue, alors qu'ils reposaient l'un près de l'autre sans se toucher, comme à leur habitude, Hermione dit brusquement :

« Tout ira bien. Tu souffriras moins que les autres fois, je te le promets. »

Après un silence, Remus répondit :

« Pendant trois jours, je vais être… difficile à supporter. C'est la première fois que tu me verras ainsi : un vrai déchet, incapable de bouger, sinon pour me tordre de douleur. Je crains que ce soit impressionnant pour toi. »

« Tu oublies que j'ai assisté une fois à ta transformation, dans la Forêt Interdite. Qu'est-ce qui pourrait être plus impressionnant que ça ? »

Dans le noir, Remus lui prit la main et la serra dans la sienne.

HPHPHPHP

Remus faisait peine à voir. Son visage était cireux, ses lèvres tremblaient de fièvre et ses yeux étaient injectés de sang. Il frissonnait malgré les trois couvertures que Hermione avait posées sur lui.

Celle-ci, assise à son chevet, se mordillait nerveusement la lèvre inférieure. Son esprit méticuleux enregistrait tous les symptômes et, presque à son insu, imaginait déjà les modifications à effectuer sur la potion Tue-loup. Mais cela ne l'empêchait pas de s'inquiéter profondément pour Remus.

« Comment te sens-tu ? »

« Ne t'inquiète pas, ça va », articula-t-il avec difficulté.

« Inutile de mentir. »

« Je ne mens pas. Normalement, je suis déjà évanoui à cause de la douleur, à cette heure-ci. »

Hermione se sentit envahie par la compassion. La lycanthropie était une terrible malédiction. Remus ne pouvait mener une vie normale. Il avait essayé, pourtant. Il avait eu un emploi de professeur à Poudlard, une année durant, avant de devoir démissionner. Il s'était marié, et sa femme avait été assassinée. Toutes ses tentatives pour être comme les autres s'étaient soldées par un échec.

« Merci de ce que tu fais pour moi, Hermione. »

« Je voudrais faire plus. Beaucoup plus. »

Remus finit par s'endormir. Il avait l'air à l'article de la mort, et cependant il avait juré qu'il ne souffrait pas. Il acceptait son sort avec un courage extraordinaire. En le plaçant dans la maison Griffondor, le choixpeau n'aurait pu faire un choix plus légitime.

Comment faisait Nymphadora pour supporter cette épreuve mensuelle? Cela devait lui arracher le cœur de voir souffrir l'homme qu'elle aimait. Hermione se représentait son tourment, son impuissance, son sentiment de révolte...

La jeune femme se leva brusquement et rejeta ses cheveux en arrière. Il ne fallait pas penser à Tonks. La situation était parfaitement claire: il était certes de son devoir de veiller sur Remus, mais elle devait garder sa rigueur scientifique. Remus était aussi un moyen d'améliorer le sort de tous les loups-garous; un sujet d'expérimentation. Elle ne devait pas trop s'impliquer émotionnellement. Sinon, elle risquerait de mourir de chagrin, comme lorsqu'elle avait perdu Ron.

Hermione fit quelques pas dans la chambre. Malgré elle, son regard revenait sans cesse à la silhouette endormie.

(à suivre)