Disclaimer : HP et son univers appartiennent à JKR.

Pairing : Emmeline Vance/Regulus Black, cliché n°6: Le Policier et la Victime/le Témoin qu'il doit protéger.

UA sans magie.

Grand merci à Erylis, Maelys, Cha Darcy, Atchoum 16 & analaura pour leurs encouragements malgré mon absence ! La suite arrive, j'espère qu'elle vous plaira !


Leur confinement allait durer deux semaines, avait annoncé Maugrey.

-Café ? offrit Regulus, cafetière en main.

En automate, Emmeline acquiesça. C'était leur premier tête- à - tête depuis les événements de la veille, et elle hésitait sur le comportement à adopter face à Regulus.

-Je vous mets un sucre ?

Elle se força à répondre avec la courtoisie à toute épreuve qu'il affichait :

-Non, merci.

Il revint à la charge :

-Un nuage de lait, peut-être ?

Il était clair que Regulus, lui, n'était pas en proie aux mêmes tourments. Il la traitait en hôte attentif, songea-t-elle avec morosité, la reléguant à la place d'invitée de marque…dans son propre appartement.

Elle ne reconnaissait pas le Regulus qu'elle avait percé à jour à Hangleton. Le garçon habitué à jouer les seconds rôles, écrasé par une mère dominatrice et le souvenir d'un frère trop brillant, aspirant à rester dans l'ombre, avait fait place à un inconnu dont la tranquille assurance, fût-elle de façade, la désarmait.

Quel rôle avait-elle joué dans la transformation qui s'était opérée en lui? Elle se revoyait conseillant à Regulus de quitter l'Angleterre et par là même, de se soustraire à l'emprise de celui qu'on appelait Voldemort. Dans le meilleur des cas, elle avait imaginé Regulus s'évanouissant dans la nature, disparaissant sans laisser de traces derrière lui, pour refaire sa vie sous une nouvelle identité. Il en aurait été capable, elle n'en doutait pas.

Mais il s'était livré à elle, après avoir défié Voldemort. Cela ne collait pas avec l'image qu'elle gardait de lui…cela n'avait aucun sens. Au moment où elle triomphait, pensant l'avoir démasqué, il la surprenait à nouveau.

Pourquoi avoir pris ce risque ? Qu'attendait-il d'elle ? Les questions se bousculaient sur ses lèvres, mais elle ne les posa pas.

Pour la première fois de sa vie, Emmeline redoutait d'entendre la réponse.


L'interdiction de sortir, associée à l'inconvénient d'occuper un studio, l'empêchait d'ignorer la présence de Regulus. (Comme si elle avait pu l'ignorer !)

C'était bien simple : elle ne pouvait pas faire un pas sans se cogner à lui. Littéralement, alors qu'il sortait de la salle de bains.

Elle n'eut pas à lui dire de se couvrir contrairement au cliché qui exigeait qu'il fût torse nu et ceint d'une seule serviette nouée précairement autour de ses hanches, il avait déjà enfilé jean et tee-shirt (très bien, nota Emmeline, s'empressant d'étouffer la pointe de frustration qui la parcourait, elle n'aurait pas à lui rappeler les règles les plus basiques de la vie en communauté.)

Ce fut une broutille, trois fois rien, vraiment, qui mit le feu aux poudres. Quelque chose dans la manière dont ses mèches noires tombaient en désordre sur son front, le simple contact qu'il y eut entre eux lorsqu'il passa près d'elle avant de s'engouffrer dans la cuisine…

Elle ne savait plus si elle avait chaud ou froid. Elle prit son pouls, comme on le lui avait appris. Il battait à tout rompre.

Emmeline n'avait pas l'âme d'une détective pour rien. Le lien de cause (Regulus) à effet (pouls qui faisait du 100 à la minute) était évident.

Ensuite, allez expliquer à Maugrey la nature des motifs qui rendait délicate sa mission auprès de Regulus Black.

Impossible, n'est-ce pas ? Elle n'avait pas le choix. Coûte que coûte, elle protégerait Regulus Black jusqu'à ce qu'il ait livré son témoignage.

Dire qu'on lui avait recommandé de surveiller sa tension…

Elle avait toujours su que ce métier la tuerait.


Le premier jour se passa donc en silence. Le lendemain, Emmeline trouva Regulus déjà levé, qui l'attendait à la cuisine.

-Bien dormi ? dit-il.

-Bien, et vous ? répondit-elle aussi naturellement que possible.

-Bien, merci.

Curieuse, elle le regarda en penchant un peu la tête de côté. Il semblait…nerveux, dans l'expectative. Soudain, il leva les yeux et reprit ses manières nonchalantes :

-Permettez ? Vous avez quelque chose, là…derrière l'oreille.

Avant qu'elle eût pu réagir, il tendit la main, effleura ses cheveux. A peine eut-elle le temps d'enregistrer comme un air de déjà vu, qu'une fleur d'un rouge vif apparaissait dans sa main…comme par magie :

-Pour vous.

Emmeline prit la fleur. Incongrûment, l'image de Fabian, avec ses roses coupées à la hâte, lui vint à l'esprit. Et elle songeait qu'alors, elle n'en avait éprouvé aucune reconnaissance, mais, offert par Regulus, ce simple géranium l'émouvait. Et c'était ô combien ridicule d'être chamboulée par cette petite fleur, lorsqu'on y réfléchissait un peu, d'autant plus qu'un géranium n'avait rien de particulièrement romantique, mais Emmeline, avec une lucidité qui l'effraya, reconnut en elle-même qu'elle avait déjà passé le cap de la réflexion quand Regulus était en cause.

Elle fronça les sourcils :

-Mais c'est un géranium ! s'écria-t-elle.

-J'ai fait avec ce que j'avais sous la main, s'excusa Regulus. Je vous rappelle que je n'ai pas le droit de sortir de l'immeuble.

Elle le vit vexé, sur la défensive, l'air inquiet d'un petit garçon qui a fait un cadeau et craint, sous ses airs désinvoltes, de le voir rejeté. Idiot, touchant idiot ! Croyait-il qu'elle boudait son présent ? S'il savait seulement…

-Il ne s'agit pas de cela ! Regulus, où vous êtes vous procuré ce géranium ?

-Je l'ai « emprunté » au balcon d'à côté. Les locataires ne sont guère portés sur la jardinerie. C'était ça ou des cactus…Qu'y a-t-il ? questionna-t-il devant la mine catastrophée d'Emmeline.

-Le balcon d'à côté ? Mais… vous avez fauché les géraniums de Madame Londubat ?

-Un seul, corrigea Regulus. Qui est cette Madame Londubat ?

-Ma très âgée et très acariâtre voisine.… Elle va me soupçonner, c'est certain…nos balcons sont adjacents.

-Que peut-elle contre vous ?

-C'est la présidente du syndic de l'immeuble, soupira Emmeline. Je sens que cette année, je ne vais pas couper au ravalement de façade …

-Oups ? fit Regulus. Désolé, ajouta-t-il.

-Sinon…commença Emmeline.

-Sinon ? reprit-il avec avidité.

Gagnée par la timidité, Emmeline précisa :

-Votre tour était…distrayant.

Il la regarda droit dans les yeux, comme pour mieux déchiffrer sur son visage les paroles qu'elle s'était retenue de prononcer. Ce qu'il y lut parut le satisfaire. Il fit une petite courbette ironique, une courbette de spectacle :

-Merci.

Ses yeux brillaient.


Cela revint plus tard à Emmeline : Sturgis Podmore était un amateur de cactus. Sturgis Podmore, qui habitait deux balcons au-dessus d'elle.

Les talents cachés d'acrobate de Regulus n'étaient pas faits pour la rassurer.


-Je m'ennuie, déclara tout de go Regulus quelques soirs plus tard.

-Une partie d'échecs ? proposa Emmeline sans conviction.

Regulus leva un sourcil :

-Pour que nous nous retrouvions à nouveau dans une impasse ? Merci bien. De plus, j'ai eu le loisir de lire toute votre collection de romans policiers- ou presque-, et je ne réponds plus de moi si je dois à nouveau méditer sur la quantité de strychnine ingérée par la victime de sorte à ce que les symptômes n'apparaissent que quelques heures après son ingestion, ou étudier le plan de la pièce hermétiquement close dans laquelle un malheureux quidam a été assassiné, ce qui implique d'examiner dans ses moindres détails la disposition de la pièce, de l'angle du fauteuil par rapport à la cheminée à l'espacement compris entre les deux fenêtres.

-Vous exagérez, protesta Emmeline.

Regulus ne tint pas compte de l'interruption :

-C'est pourquoi vous m'excuserez si, dans l'espoir de chasser de mon âme le spleen qui s'emparait de mon être, j'ai récupéré sur la terrasse de votre voisine du dessous…ce magazine !

Emmeline reconnut la couverture d'une revue féminine, dont les gros titres concernaient principalement les tendances mode de la saison- « on craque pour la nouvelle collection de Tissard & Brodette ! »- , les régimes miracles- « comment se régaler de dragées Bertie Crochue sans culpabiliser ! »-, et les « people »- « Exclusif : Stuby Boardman, ex-chanteur vedette des Croque Mitaines, raconte sa descente aux enfers, une interview de Rita Skeeter !. »

-Et, poursuivit Regulus, ils ont un questionnaire très amusant ! Vous voulez répondre ?

-De quoi s'agit-il ?

-D'un test de personnalité.

-Très peu pour moi, merci !

-S'il vous plaît…

Emmeline céda :

-Ouvrez le feu.

-Si vous étiez un animal : le blaireau, l'aigle, le serpent ou le lion ?

-Si vous étiez un arbre : le saule, le hêtre, le chêne, ou le cerisier ?

-Si vous étiez une couleur : bleu, vert, rouge, ou jaune ?

-Si vous étiez une créature magique : sirène, gnome, centaure, ou géant ?

Les questions fusaient, Emmeline se prenant au jeu. Elle trouvait le blaireau sympathique, le serpent étant un animal un peu trop sournois à son goût, et le lion, trop poseur. Non, elle s'imaginait mal en sirène, mais les centaures avaient dans la mythologie grecque, une réputation de sagesse qui lui plaisait.

-Si vous étiez une pierre précieuse : diamant, émeraude, rubis, ou saphir ?

-Aucune ! répliqua Emmeline. Je ne suis pas très bijoux.

-Allons, insista Regulus. Toutes les femmes aiment les bijoux, depuis ma cousine Narcissa à ma petite nièce Nymphadora. Oserez-vous me dire qu'en passant devant la vitrine d'un bijoutier, vous ne vous êtes jamais arrêtée, interpellée par l'éclat tentateur de leurs pierres ?

Emmeline l'observa, saisie d'un soupçon.

-Donnez-moi le magazine, Regulus.

Il le cacha derrière lui :

-Vous voulez tricher ? C'est mal.

-A quel jeu jouez-vous ? Il n'y a jamais eu de questionnaire, n'est-ce pas ?

-N'ai-je pas le droit de m'informer…pour mon édification personnelle ?

Il se pencha vers elle, sa voix prenant des inflexions séductrices :

-Je n'ai pas toujours volé pour le compte de Voldemort…J'ai, à l'abri, ma collection privée de joyaux inestimables qui ont changé de main…Parlez, qu'est-ce qui vous ferait plaisir ?

-Regulus ! tenta de le rappeler à l'ordre Emmeline.

-Saphirs étoilés, émeraudes trapiches, rubis balais ? énuméra Regulus. Il suffirait d'un mot de vous. Que craignez vous ?

Emmeline tremblait, de rage, d'énervement, elle n'aurait su le dire.

-Je connais des diamantaires à Anvers, qui vous tailleraient ces petits cailloux-là de sorte que même leurs propriétaires d'origine ne les reconnaitraient plus.

-La plaisanterie a assez duré ! Bonne nuit, Black.

Confuse et en colère, elle alla s'enfermer dans sa chambre, inconsciente d'avoir passé haut la main le test auquel Regulus l'avait soumise.


-Qui tu es ? questionna une voix enfantine.

Surpris alors qu'il prenait le frais sur le balcon, Regulus se tourna en direction de la voix. Sur le balcon mitoyen (le balcon de la discorde, d'où avaient disparu les pots de géranium depuis quelques jours), un petit garçon le regardait avec curiosité.

Sans mot dire, Regulus se redressa, tendit la main derrière l'oreille du garçonnet, et en retira une pièce flambant neuve. C'était un tour tout simple, mais l'enfant était bon public : Regulus, dont l'ego avait été malmené ces derniers temps, se rengorgea alors que la bouche du petit Neville s'ouvrit en un « ah » silencieux.

-Comment tu as fait ça ?

Regulus se fendit d'un sourire énigmatique. Avec une lenteur exagérée, il examina les alentours, puis se pencha vers Neville :

- Ne le répète à personne, c'est un secret.

L'enfant hocha la tête avec une gravité solennelle.

-Je suis un sorcier.


Dissimulée derrière l'embrasure de la porte-fenêtre, Emmeline suivait les aventures du jeune Regulus, collégien, à l'école de sorcellerie de Poudlard. En fait d'école de magie, Poudlard était le nom de la pension écossaise ultra-select dans laquelle il avait fait ses études.

-La première année, nous apprenions les bases, n'est-ce pas. Transformer des tasses de thé en de souris, par exemple, expliquait Regulus avec autant de naturel que s'il avait évoqué un devoir de mathématiques.

-Si je prends une tasse de thé à Gran, tu pourras me montrer ? s'exclama un Neville très excité.

Prudemment, Regulus botta en touche :

-Une autre fois, peut-être…tu comprends, je ne suis plus sûr de me souvenir de la bonne formule…

Ou plutôt, pensa Emmeline, amusée, il n'était pas sûr de pouvoir se procurer une souris dans un immeuble jouissant de tout le confort ultramoderne, complètement désinfecté, décafardisé, et surtout, dératisé..

-Ce serait dommage de me tromper et d'obtenir un vilain crapaud à la place d'une jolie souris.

-J'aimerais bien voir un crapaud, aussi, enchaîna Neville.

Emmeline sortit de sa cachette :

-Moi aussi, j'aimerais bien, Regulus.

Ce dernier garda un silence éloquent : Traîtresse.

Emmeline prit pitié de lui :

-Mais, et tu le sais Neville, la magie n'existe pas.

-Je n'ai jamais dit ça ! N'est-ce pas, Neville ?

-C'est vrai ! renchérit le garçon.

Emmeline prétendit ne pas voir le clin d'œil complice qu'ils échangèrent avant de se quitter . C'était un secret…


-Vous n'auriez pas dû lui farcir la tête de ces sornettes, sermonna-t-elle. Et prétendre que vous étiez sorcier, franchement ?

Agacé, Regulus lui répondit avec humeur :

-Laissez-moi deviner…quand, enfant, vous alliez au cirque et que le magicien faisait son tour sous les yeux émerveillés du public…c'était vous, la petite fille qui plissait le front et cherchait le truc ?

Emmeline se troubla. Calmé, Regulus ajouta doucement :

-Je n'abuse pas de la crédulité de Neville. Il n'est pas stupide, vous savez. Tout le monde a besoin de faire semblant… de se raccrocher à une illusion, pour mieux oublier la réalité. Au fond de lui, il sait bien que les sorciers n'existent pas. Il choisit juste d'y croire, une petite seconde. Qu'y-a-t-il de mal à ça ?

-Vous n'avez jamais songé à devenir magicien ? Sur la scène, pour de vrai ? Je vous observais, avec Neville. Vous étiez doué, admit Emmeline, sincère.

-J'étais tout gosse quand ça m'a pris. J'avais huit ans quand j'ai vu ce spectacle. Avec le recul, je me demande si ce « Professeur Dumbledore »- c'était le nom qu'il se donnait- ne tenait pas davantage du clown que du magicien. Il portait des robes fuchsia, des lunettes en demi-lune, sa barbe blanche le faisait ressembler à Merlin l'Enchanteur…et il faisait apparaître et disparaître de son chapeau en forme de cône les objets les plus hétéroclites : des jumelles, un oiseau dont les plumes étaient peintes en or et qu'il prétendait être un phœnix…Je suis ressorti en voulant faire comme lui. Au grand désespoir de mes parents, à l'âge où certains collectionnaient des posters de moto, je lisais les exploits des grands maîtres- Houdini surtout.

-Celui qu'on surnommait « le roi de l'évasion ? »

Regulus acquiesça avec enthousiasme :

-Menottes, camisole de force, chaînes, boîte remplie d'eau et fermée à clé : aucune prison ne lui résistait. Il défiait la mort à chaque représentation…


Saluant le public qui applaudissait à tout rompre Regulus se volatilisa dans un nuage de fumée.

Après ce cauchemar, Emmeline ne parvint pas à se rendormir.


-Etes-vous heureuse ? lui demanda-t-il à brûle-pourpoint.

-Je ne comprends pas. Dans quel sens ? temporisa Emmeline.

-Etes-vous devenue la personne que vous vouliez être, enfant ? Cette brillante détective faisant jaillir la vérité, envers et contre tous ?

-C'est pour cette raison que je suis entrée dans la police. J'y suis utile…même si je ne mène pas toujours l'enquête sur des affaires criminelles palpitantes.

-Je ne vous ai pas demandé si vous étiez utile. Je vous ai demandé si vous étiez heureuse.

Devant le silence d'Emmeline, Regulus poursuivit :

-C'est pourtant plus simple qu'on ne le croit, débuter une nouvelle vie. Un jour, une étrangère que vous ne connaissez que de quelques semaines vous lance que vous êtes trop gentil pour mener la vie que vous vous pensez contraint de mener…

-Regulus, je suis désolée, dit Emmeline, gorge nouée. Je me sens coupable…Si je n'avais rien dit, Voldemort…

-Voldemort aurait fini par me tuer, car il aurait fini par deviner la même chose que vous…Que je n'étais pas heureux là où je me trouvais.

-Ce n'est pas à cause de moi que…?

Elle n'acheva pas sa phrase.

-Non, dit-il. Mais si vous voulez vous racheter un peu…sachant que je déballe tout ce que je sais demain au juge…que ce sera la journée de tous les dangers…peut-être auriez-vous la charité de me donner un baiser ?

Emmeline n'hésita pas. S'il ne lui fallait que ça pour se sentir la conscience en paix (il était important d'être en paix avec soi-même), alors ce n'était pas cher payé.

Elle lui donna un baiser rapide, sur les lèvres. Rapide, car quelque chose lui soufflait qu'il pouvait être dangereux de trop s'attarder.

-Bonne nuit, dit-elle.

Il perdit son expression béate :

-Emmeline, l'implora-t-il. Avec les risques que je prends ?

Elle battit en retraite vers la sûreté de sa chambre.

-C'est peut-être le chant du cygne !

Elle éclata de rire :

-Bonne nuit, Regulus !


L'entrevue avec le juge avait duré plus de six heures. Dans la voiture qui les amenait vers la nouvelle cachette de Regulus, Emmeline tenta vaillamment de masquer sa tristesse :

-Je suis sûre que vos nouveaux gardes du corps vont prendre soin de vous jusqu'au procès. J'aurais aimé pouvoir être utile, mais ils sont plus expérimentés que moi dans le domaine de la protection des témoins.

Regulus prit sa main, la pressa. Il parla à voix basse, avec une urgence qui réduisit au silence :

-Nous avons peu de temps…Emmeline, il n'y aura pas de procès. Je ne témoignerai pas.

-Comment ?

-Si la police suit mes indications et agit vite, elle pourra marquer des points contre Voldemort…mais elle ne parviendra pas à détruire son organisation. Cela prendra des années…et je ne vais pas attendre en Angleterre, à sa portée, que l'envie lui prenne de se venger. Emmeline, ce soir, je fausse compagnie à mes gardiens et je pars définitivement.

-Je ne peux pas vous laisser faire ça ! Votre témoignage est crucial, protesta faiblement Emmeline.

-Vous allez me dénoncer ? Vous pensez qu'on peut me mettre sous clé ?

-Le roi de l'évasion, murmrura Emmeline. Ainsi, vous ne doutez pas de pouvoir vous échapper ?

-Emmeline, n'avez-vous pas compris ? Lorsqu'il était assis sur le banc du tribunal, c'est moi qui ai soufflé, dans le creux de l'oreille de mon frère, le secret qui lui a permis de s'évader d'Azkaban, dit-il sans arrogance.

-Pourquoi avoir aidé la police, si ce n'était pas pour détruire Voldemort ? Pourquoi ne vous êtes vous pas enfui tout de suite ?

-Je ne vous taquinerai pas avec votre phrase favorite « vous aimeriez bien le savoir »… car vous le savez déjà.

Elle se trouva incapable de prétendre le contraire.

-Je ne peux pas tout quitter. Je ne peux pas, souffla-t-elle.

Regulus émit un soupir de frustration :

-Ecoutez, je ne suis qu'un garçon ordinaire, d'accord ? J'ai beau m'échiner à cultiver le mystère, vous m'avez percé à jour depuis belle lurette. J'avais espéré…j'avais espéré que malgré tout, je vous intéressais quand même un tout petit peu. J'avais tort.

-Je ne vous trahirais pas, mumura Emmeline. Mais je ne peux pas vous accompagner.

Le trajet se poursuivit en silence.


Regulus consulta sa montre. Son avion décollait dans dix minutes, c'était maintenant ou jamais qu'il lui fallait embarquer. C'était fini, elle ne viendrait plus.

-Regulus, attendez !

Le cœur battant, il se retourna.

-Ce que vous ne savez pas, c'est qu'aujourd'hui j'ai découvert que le meilleur moment d'un puzzle…c'est quand les pièces sont toutes assemblées.


Chère Marlene,

Je regrette de ne pas t'avoir contactée plus tôt. L'un des inconvénients d'être en cavale, fuyant et la police, et les sbires de Voldemort…

Nous allons très bien, tous les deux. Pour l'instant, nous n'avons pas de projets bien définis. Il souhaite retrouver son frère et l'aider à prouver son innocence, vaste tâche ! Je vais devoir déployer tous mes talents de détective pour remonter la piste de Sirius Black, mais Regulus dit qu'il a foi en moi.

Nous vivons assez confortablement. Regulus a emporté avec lui sa « collection » de pierres précieuses- en ce moment, nous « mangeons » un diamant appartenant à sa cousine Bellatrix. J'ai fait taire mes scrupules quand Regulus m'a appris que c'est sa cousine, rêvant de devenir le bras droit de Voldemort, qui a vanté les « talents » de Regulus auprès de ce criminel.

Emmeline rangea la missive dans le gros livre russe qu'elle avait emporté, histoire de se donner bonne conscience et de « bronzer intelligent ». Elle se dirigea vers la mer, couleur turquoise aujourd'hui. Le sable fin était chaud sous ses pieds.

L'eau était délicieuse. Elle ferma les yeux, savourant ce moment…Une main se posa sur son épaule.

Je ne te cache pas que l'inquiétude n'est jamais loin…Une petite voix me souffle qu'il y a quelque chose de sûrement criminel, à être aussi heureuse, et que tôt ou tard, nous en paierons le prix…

Alors que les lèvres de Regulus se posaient sur les siennes, Emmeline acheva mentalement sa lettre :

Mais le châtiment attendra pour l'instant.


Notes :

-Je profite de l'absence de mes collègues au bureau pour poster…sachant que ce sera beaucoup moins facile la semaine prochaine !

-L'inspiration ne frappant jamais là où on l'attend, c'est dans le train qu'a germé l'idée des prochains OS. Si vous ne vous êtes pas lassés des UA sans magie, voilà ce qui vous attend: UA façon Régence (inutile de préciser que ce n'était pas du tout les OS que j'avais prévus…) Prochain qui devrait arriver : « le scandale de la saison », Cliché n°25 : Se sauver pour échapper à un mariage indésirable, avec des personnages encore moins exploités que ceux déjà utilisés, je vous laisse la surprise…