A/N : les personnages de cette histoire sont la propriété de Stephenie Meyer.

Attention, le contenu de cette fiction est destiné à un public adulte averti.

Indomptable esclave.

Chapitre premier : Le naufrage.

BPOV

Ce matin à mon réveil, j'étais encore Isabella Marie Swan, marquise de Courville. Après demain soir, au moment de m'endormir, je serais devenue Isabella Marie Newton, duchesse de Cresson, nouvellement mariée à Mike Newton, duc de Cresson d'Alembert, lieutenant dans l'armée du roi et conseiller militaire de celui-ci.

Je n'avais jamais vu cet homme de ma vie. Ma famille avait établi une alliance avec la sienne le jour de ma naissance, et je lui étais promise depuis que j'étais sortie du ventre de ma mère et qu'on avait constaté que j'étais du sexe faible, celui qui n'avait pas le droit de prendre de décisions. J'avais dû me faire à l'idée très vite que ma condition de femme me rendait totalement vulnérable face à mon destin. Aussi, même si c'était la mort dans l'âme que j'allais monter sur cette caravelle qui me mènerait à son domaine en Corse, je devais me plier au bon vouloir de mes parents. Ils devaient certainement savoir ce qu'ils faisaient quand ils avaient décidé de cette union.

Il n'était pas encore l'heure de quitter le château, et j'attendais mes dames de compagnie pour un léger goûter dans mon boudoir. Elles avaient passé la nuit dans une des chambres d'invités, car elles devaient me servir de demoiselles d'honneur durant la cérémonie qui me priverait à tout jamais de ma liberté. Esme Platt, ma gouvernante, avait apporté des brioches, des pains au chocolat et du thé au jasmin qui embaumait la petite pièce d'un parfum délicieux.

J'entendis un bruit de pas et de voix enjouées se rapprocher dans le corridor, et quelques secondes plus tard Alice Brandon, comtesse de Marillac, et Rosalie Hale, duchesse d'Essanges, firent irruption dans le petit salon. C'était peut-être la dernière occasion que j'avais de profiter de la présence rassurante de mes amies en tant que jeune fille insouciante. À peine dix-neuf ans, et déjà mes jours heureux étaient tous derrière moi.

« Je t'en supplie, Bella, arrête de faire cette tête d'enterrement, » essaya de me dérider Alice en m'apercevant.

« Dans deux jours je vais devoir partager ma couche avec un parfait inconnu, Alice, » me justifiai-je.

« Il y en a qui donneraient cher pour être à ta place, tu sais, Bella, » renchérit Rosalie.

Rosalie était une splendide blonde aux courbes pulpeuses qui m'avait déjà raconté qu'elle n'attendrait pas d'être mariée pour goûter aux plaisirs de la chair. J'avais du mal, pour l'heure, à comprendre son message ambigu.

« Mais, ma très chère Rosalie, n'est-ce pas toi qui m'as dit l'autre jour que tu accepterais très mal qu'on te mette en cage? » Demandai-je en toute innocence.

« Je parlais de la position de ton futur époux dans la société, Bella. Tu auras le monde à tes pieds grâce à lui. Réalises-tu qu'il est dans l'entourage immédiat du roi? » S'enquit-elle, plus excitée que moi par la perspective de rencontrer Louis XIV et toute sa cour.

Je n'avais, pour ma part, rien à cirer d'aller faire mon salut à ce despote qui trompait la pauvre Marie-Thérèse d'Autriche avec tout ce qui portait jupon à Versailles.

« Rosalie, » dis-je calmement, « mon futur mari demeure sur une île perdue au milieu de la Méditerranée. Je doute fort d'avoir de nombreuses occasions de sympathiser avec les maîtresses du roi entre deux représentations de Molière. »

Alice se mit de la partie. Petite et espiègle, elle n'aimait pas faire tapisserie.

« Ton futur époux ne se retire que rarement sur ses terres, trop occupé qu'il est à servir le roi… »

« Le duc de Cresson continuera sans doute de mener la même existence après m'avoir épousée, Alice, » concédai-je, « mais je suis convaincue qu'il me laissera derrière lui et que je mourrai d'ennui avant que de mourir de vieillesse. »

« Oh là là! Ma pauvre fille, va! » Se désola Rosalie en prenant une chocolatine.

« Voyons les choses comme elles sont, voulez-vous? » Tentai-je d'expliquer. « Je n'ai que dix-neuf ans et je vais commencer à vivre en recluse à partir de vendredi. Je ne vous verrai plus et mon seul réconfort sera la bibliothèque du château d'Alembert, que l'on m'a assurée bien garnie. »

Les livres étaient depuis toujours ma grande passion, au désespoir de mes parents qui m'auraient voulue moins intellectuelle. Ils souhaitaient que je joue parfaitement le clavecin, que je sache broder et cuisiner, même si nous avions plein de domestiques à notre service. J'avais donc appris à cuisiner avec Esme, qui occupait également la fonction de cuisinière en chef du château. J'avais aussi appris à monter à cheval avec Jacob Black, mon palefrenier et meilleur ami.

« Le seigneur Newton te fera sûrement une flopée de marmots, Bella, » reprit Alice pour me remonter le moral. « De quoi te tenir affairée pour les vingt-cinq prochaines années. »

Mais bien entendu sa remarque eut l'effet contraire et me déprima encore davantage. Je n'avais aucune envie de me faire engrosser à répétition juste pour éviter la neurasthénie. Sans compter que je sortais à peine de l'enfance moi-même…

« Vous êtes bien gentilles de vouloir m'égayer, Alice et Rosalie, mais je crois que rien ne parviendra à me faire voir quoi que ce soit de positif dans cette union, » soupirai-je.

Je regardai mes demoiselles de compagnie manger goulûment les restes de la collation, mais je n'avais pas le cœur à me joindre à elles. Je commençais à être de plus en plus appréhensive à propos de ma nuit de noces.

« Rosalie, » demandai-je au bout de quelques minutes de silence, « est-ce que j'ai mal saisi l'allusion, ou bien as-tu déjà couché avec un homme? »

Mon amie faillit s'étouffer avec le morceau de brioche qu'elle n'avait pas terminé de mastiquer. Elle se reprit et me lança un regard comme pour me mettre dans la confidence d'un secret d'état.

« Oui, Bella, j'ai en effet eu le privilège de coucher avec quelques uns d'entre eux, jusqu'à présent, » murmura-t-elle avec un sourire entendu.

« Rosalie, j'ai besoin de savoir comment ça se passe la première fois…et les suivantes, » dis-je d'une voix chancelante.

Voulais-je vraiment connaître les détails de ce qui se passait entre un homme et une femme, une fois la porte de leur chambre fermée sur leur intimité? Était-ce convenable pour une pucelle de demander des explications d'ordre technique sur la chose? Ma mère m'avait seulement dit que je devrais obéir à mon époux en toute occasion. Qu'est-ce que ça voulait dire, au juste? Que je devrais me soumettre à son bon vouloir sans protester? Et si le duc de Cresson n'avait pas de manières au lit et qu'il me traitait sans aucun respect, juste pour soulager ses pulsions?

« La première fois ne fut pas des plus mémorables, Bella, » répondit Rosalie. « Ou, plutôt, elle fut mémorable de désagrément. Mais rassure-toi, ce ne sera peut-être pas du tout comme ça pour toi. On m'a affirmé, par la suite, que c'était parce que j'étais tombée sur un mauvais amant. »

Bien sûr, j'aurais dû savoir qu'il en allait des hommes comme il en allait du vin; certains s'avéraient de bons crus alors que d'autres n'étaient que de la piquette.

« Le duc de Cresson d'Alembert a la réputation d'être un chaud lapin, » fit remarquer Alice, l'air triomphale. « Tu ne risques donc pas de t'emmerder avec lui… »

J'ignorais ce qu'Alice voulait dire. J'étais tellement ingénue à propos des choses de l'amour, que je me sentis rougir d'embarras. Et je réalisai, alors, que je serais incapable de profiter de cette nuit de noces, si tant était qu'il y eut là quelque chose de profitable pour moi. Tout à coup, je me mis à penser à mon ami Jacob, le seul homme qui, s'il y avait une justice sur cette terre, méritait de me connaître plus intimement. Peut-être qu'il accepterait de me déflorer pour m'épargner la honte de saigner dans les draps d'un lieutenant de sa majesté. Après tout, si Mike Newton s'adonnait aux plaisirs de la chair depuis déjà longtemps, étant âgé de vingt-sept ans, il n'aurait que faire d'une vierge effarouchée dans son lit. Je pris la résolution de lui payer une visite avant qu'il ne soit trop absorbé par les préparatifs du voyage en Corse, voyage auquel il allait prendre part lui aussi, à titre de laquais personnel.

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Jacob Black était mon palefrenier depuis plusieurs années, et mon meilleur ami depuis toujours. Il avait deux ans de plus que moi, mais il paraissait plus âgé à cause de sa carrure imposante et musclée. Il devait mesurer dans les deux mètres, et possédait une magnifique tignasse noire. Ses yeux étaient noirs aussi, et pétillaient de malice en toute circonstance. Il avait un sourire accroché en permanence à son visage aux traits virils. J'étais heureuse seulement en sa présence, et j'allais devoir faire une croix sur celle-ci lorsqu'il prendrait le chemin du retour après la noce. Décidément, tout contribuait à ma mélancolie en cette journée fatidique…

Je trouvai Jacob à l'écurie, en train de nourrir les chevaux une dernière fois avant notre départ. Il se retourna vers moi, et mon cœur se pinça à l'idée que jamais plus je ne pourrais passer mes jours avec lui, et sentir cette complicité qui nous unissait. Nos balades dans la campagne Camarguaise allaient me manquer terriblement. Jacob m'avait appris tellement de choses, lors de nos randonnées quotidiennes, qu'à cet instant précis il me sembla tout à fait naturel qu'il m'apprenne l'amour aussi.

« Prête pour le grand jour, Bella? » Me demanda-t-il tout sourire.

Comment pouvait-il avoir l'air si joyeux alors que j'allais disparaître de sa vie dans deux jours?

« Oh, Jacob, si tu savais! » Et n'en pouvant tout simplement plus, je m'effondrai en larmes sur le sol jonché de foin.

Jacob fut à mes côtés dans la seconde suivante, m'entourant de ses bras et ôtant une mèche de cheveux rebelle de mon visage en pleurs. Je m'agrippai à lui de toute la force de mes membres. J'étais incapable de prononcer une parole d'explication.

« Qu'y a-t-il, ma petite tourterelle triste? » S'enquit-il doucement, en me gardant serrée tout contre lui.

Peut-être que je n'aurais pas besoin de parler pour exprimer ma requête. Peut-être que j'arriverais à me faire comprendre juste avec des gestes…Je commençai par enfouir mon visage dans le cou de Jacob, et inspirai profondément pour imprégner ma mémoire de son odeur musquée. Dieu qu'il sentait bon! Pourquoi n'avais-je pas songé à quémander ses caresses plus tôt? Où donc avais-je eu la tête pendant toutes ces années à côtoyer un pareil représentant de la gent masculine?

Dans tes livres, Bella. Tu avais la tête dans tes livres au lieu de te préoccuper de ce mâle auquel tu devras faire tes adieux dans quarante-huit heures…

Je ne savais pas comment séduire, je ne savais pas qu'est-ce qu'un homme attendait d'une femme. Et j'étais la dernière des idiotes d'avoir attendu l'avant veille de mon mariage pour me laisser aller de la sorte. Mais heureusement pour moi, Jacob saisit tout de suite mes intentions secrètes.

« Bella, trésor, tu es sûre de vouloir aller dans cette direction-là avec moi? » M'interrogea-t-il avec le plus grand sérieux.

« Oui, Jacob. Je veux que ce soit toi le premier à me conquérir, » confirmai-je entre deux sanglots.

« Il faut que tu arrêtes de pleurer alors, sans quoi je vais penser que je te fais mal, et je ne veux pas te faire mal, Bella, au contraire, » continua mon palefrenier avec une voix plus rauque tout à coup.

Il prit alors mon visage dans ses mains et l'attira vers sa bouche sensuelle, afin de le couvrir de baisers et de lécher mes larmes par la même occasion. Je me sentis ramollir et devenir plus chaude à l'endroit où les lèvres de Jacob s'attardaient. Elles finirent par rencontrer ma bouche et se fusionnèrent à celle-ci avant que je ne sente la langue de Jacob essayer de s'introduire à l'intérieur pour approfondir son baiser. Avant ce moment, j'avais été parfaitement dans l'ignorance qu'une telle forme de baiser pouvait être possible. Quoi d'autre devais-je donc ignorer, alors? J'écartai mes lèvres pour lui céder le passage et fus agréablement surprise par la sensation de la langue de Jacob qui taquinait gentiment la mienne. Je fus également surprise par la sensation que quelque chose de fluide essayait de se frayer un chemin à l'extérieur de mes parties intimes. Est-ce que mon jupon de coton allait résister à ce flot qui coulait de moi et qui n'avait rien à voir avec mes écoulements périodiques? Jacob commença à m'embrasser avec plus d'ardeur, une main supportant ma nuque et l'autre essayant de dégrafer mon corsage. Toujours en me tenant fermement, il m'allongea dans la paille et brisa notre étreinte pour m'observer plus attentivement.

« Bella, il est encore temps de changer d'idée, si tu crois qu'il ne s'agit que d'un moment de faiblesse de ta part, » dit-il fiévreusement.

« Ne dis pas d'idioties, Jacob, » murmurai-je à bout de souffle. « Prends-moi, je t'en supplie… »

Mais un doute s'immisça en moi. Et si Jacob ne voulait tout simplement pas de moi? Et si je n'étais pas digne d'être désirée?

« Bella, tu es la plus exquise jeune femme que je connaisse, et je ne voudrais pas abuser de ton innocence, tu comprends? » M'expliqua-t-il en respirant plus fort.

« Je ne veux plus être innocente, Jake, je veux savoir comment c'est de faire l'amour avec quelqu'un qui compte pour moi, est-ce que toi tu comprends ça? » Demandai-je en retour.

Il reprit son baiser encore plus passionnément, sa langue valsant avec la mienne tandis qu'il passait ses deux mains dans mes cheveux. Puis, je sentis ses mains descendre sur ma nuque, dans mon dos, et jusqu'au creux de mes reins. Il avait réussi à défaire mon corsage, et ma poitrine était à présent dénudée. Sa bouche abandonna mes lèvres pour aller s'attarder sur mes seins. Je cambrai le dos sous cette nouvelle caresse qui avait envoyé une onde de volupté jusque dans mon entrejambe. J'avais jusqu'alors été amenée à penser que les nichons ne servaient qu'à la tétée des bébés. Je me rendais maintenant compte que j'avais tout faux. Mon corps me fit l'effet d'un volcan endormi qui venait de se réveiller et qui allait entrer en éruption dans les prochaines minutes. Ma poitrine était brûlante sous la bouche de Jacob, et pourtant j'avais l'impression que des sensations encore plus puissantes et plus grisantes m'attendaient au détour. Jacob arrêta de mordiller mes mamelons et entreprit de masser mes seins pendant que je voyais sa tête glisser vers le bas le long de mon estomac. Mon cœur n'avait jamais battu aussi vite, et je m'effrayai que quelque chose fût en train de défaillir en moi. Comment pouvait-on survivre à pareil débordement des sens? Mon bassin se mit à bouger sous les ondes d'extase provoquées par les mains expérimentées de Jacob sur ma poitrine. Je gémis faiblement à plusieurs reprises.

« La peste soit de ces robes de chasteté! » S'impatienta-t-il lorsqu'il n'arriva pas à me débarrasser de mes atours aussi vite qu'il ne l'aurait souhaité.

Je me relevai sur mes genoux pour retirer le haut dégrafé de ma robe, et je fis descendre mes jupes jusqu'au sol. Jacob put ainsi m'observer à loisir dans toute ma nudité.

« Tu es belle de partout, juste comme je l'imaginais, » me dit-il au bout d'un moment à se régaler de ma vue en silence. « Non, ce n'est pas vrai, Bella. En fait tu es beaucoup, beaucoup plus belle que je ne l'imaginais… »

Et ce disant, il me remit en position allongée et reprit ses caresses là où il les avait laissées en plan. Sa tête s'aventura plus bas sur mon ventre pour le couvrir de baisers, et quelque chose s'alluma au plus profond de mes entrailles. Je tortillai mes jambes en sentant que l'origine de mon émoi se trouvait précisément à l'intérieur de mon sexe humide. Mais Jacob s'était placé entre mes jambes et m'empêchait de les refermer. Il promena ses lèvres sur mon pubis, puis plus bas encore, et atteignit l'endroit précis où je sentais que l'excitation qui s'était emparée de moi était à son zénith. J'avais tout à coup un besoin urgent d'être stimulée exactement là. Mais je ne savais pas pourquoi. Qu'y avait-il de caché entre mes jambes qui me donnât de pareilles vagues de plaisir?

« Bella, foutu bordel, tu es toute gonflée de désir. Veux-tu que je te soulage avec ma bouche? » Demanda mon compagnon.

Je n'avais pas la moindre idée de ce qu'il voulait dire, mais si c'était pour me soulager…

« Seigneur Dieu, Jacob, je ne sais pas ce que j'ai, mais je n'en peux plus. Fais quelque chose au plus vite! » Criai-je presque.

Je sentis la langue de Jacob faire des spirales autour de mon point sensible, ni trop lentement, ni trop fort, ni trop vite, ce qui exacerba encore plus le plaisir qui montait comme une vague et qui allait me renverser et peut-être même me faire perdre connaissance. Foutre d'enfer, assurément ce que Jacob était en train de pratiquer sur moi devait être interdit par l'Église ou par la loi…Soudain, je sentis une succion sur mon bouton nerveux et je me contractai vivement pendant qu'une explosion fulgurante de jouissance envahissait mon sexe tout entier. Je poussai un cri d'extase avant que mes fesses qui s'étaient soulevées sous l'attaque de volupté ne retombent sur la paille. J'avais perdu toute notion de lieu et de temps dans mon transport, et seulement un immense bien-être demeurait à présent.

« Bella, chérie, est-ce que ça va? » Interrogea Jacob, un peu inquiet.

« Oui, Jacob. Je suis juste…exténuée, » dis-je en essayant de retrouver un rythme cardiaque normal.

« Alors peut-être qu'il vaudrait mieux ne pas pousser plus loin nos ébats pour cette fois-ci, » répondit-il tranquillement.

Je n'étais pas certaine de comprendre. Mon visage devait être aussi facile à lire que mes pensées, car Jacob précisa « Bella, si je te prends tout de suite je risque de te faire mal. »

« Mais alors, tu veux dire que je suis toujours vierge? » Questionnai-je, incrédule.

« Aussi vierge que le jour de ta naissance, oui, » confirma-t-il.

« Et ce qui vient juste de m'arriver, c'était quoi? » demandai-je encore, confuse.

« Bella, mon cœur, il y a plusieurs façons d'amener une femme au plaisir, de lui donner un orgasme…,» tenta-t-il de m'expliquer.

« Un quoi? » Le coupai-je, renversée par ma propre ignorance.

« Un orgasme. Oh, Bella, ta mère et ta gouvernante ne t'ont donc rien enseigné à propos du sexe? » S'enquit-il, l'air désolé.

« Si une femme est gardée dans l'ignorance de ces choses-là, elle ne pourra pas savoir sur quel genre d'amant elle tombe, et donc ne pourra pas s'en plaindre, voilà ce que ma mère m'a enseigné, Jacob, » répondis-je sur la défensive.

« Mes parents m'ont enseigné que Dieu a créé l'homme et la femme égaux en regard de la jouissance corporelle, » répliqua-t-il avec son sourire à faire fondre la neige au sommet du Mont Blanc.

Et cela me rappela que si je venais d'avoir le premier orgasme de ma vie, Jacob, lui, était demeuré sur la terre ferme pendant qu'il me le procurait. Je ne trouvais pas ça juste du tout.

« J'avoue que je suis un peu frustré que tu sois venue si tard me demander cette faveur, Bella. Les choses de l'amour exigent du temps et du temps, comme tu le sais, nous n'en avons plus, hélas…, » remarqua-t-il amèrement.

Les larmes recommencèrent à couler de plus bel sur mon visage. À ma tristesse d'abandonner la Camargue, les Saintes-Maries-de-la-Mer et Jacob Black, s'ajoutaient maintenant la culpabilité et les regrets de ne pas avoir réalisé plus tôt qu'il aurait dû devenir mon amant bien avant cette journée de fin d'été. Je ramassai mes jupes et mon corsage, me rhabillai en vitesse, et laissai mon meilleur ami terminer son travail de palefrenier.

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Le reste de la journée avant le départ passa à la vitesse de l'éclair. J'avais fait mes adieux à mes parents, qui ne pouvaient s'absenter du domaine, et j'avais pris le chemin du port dans un petit convoi qui comprenait un carrosse pour accommoder mes dames de compagnie, ma gouvernante, ainsi que moi-même, et une charrette pour transporter nos nombreux bagages. Jacob conduisait la diligence et ses aides, Paul et Samuel, étaient en charge de la cargaison. Ils devaient ramener le convoi dans nos terres une fois que nous serions montés et installés à bord. À présent, nous étions sur le pont du vaisseau frété pour le voyage en mer. C'était une embarcation de moyenne capacité, sans grand confort, mais convenable pour un court trajet. On nous avait prédit un séjour de trente-six heures sur l'eau avant d'atteindre Ajaccio, si les vents étaient favorables. Je m'appuyai à la rambarde pour admirer la Méditerranée devant moi. Je ne pourrais même plus profiter de sa splendeur une fois dans mon nouveau domaine, le château d'Alembert étant situé au centre de l'île et isolé de toute civilisation. L'envie de pleurer m'envahit de nouveau, mais je me retins car mes amies étaient à mes côtés et je ne voulais pas leur imposer mon chagrin. Elles étaient bien assez charitables et gracieuses de m'accompagner sans que je les importune avec mes états d'âme.

« Dis-moi, Bella, où étais-tu donc passée ce midi? Nous t'avons cherchée partout Rosalie et moi, » fit Alice, le regard dévoré par la curiosité.

Devais-je leur avouer ce que j'avais voulu accomplir? Perdre ma virginité par les bons soins d'un subalterne? Sûrement qu'elles me tomberaient dessus à bras raccourcis. Pour Rosalie, tous ceux qui ne faisaient pas partie de la noblesse étaient des parasites avec qui il fallait frayer le moins possible. Avec de pareils préjugés, je me demandais qui s'était chargé de la déflorer. Probablement un vieux baron libidineux et sans scrupules…

« J'étais à l'écurie avec Jacob, » répondis-je simplement et nonchalamment.

« Je n'ai jamais compris ce que tu pouvais trouver à ce rustre, Bella, » remarqua Rosalie sur un ton hautain.

Heureusement que Jacob n'était pas dans les environs pour entendre son commentaire. Sotte Rosalie parfois… Si elle avait fait appel à ses services la première fois, j'étais convaincue qu'elle n'en garderait pas un souvenir si désagréable. Le moment que j'avais passé avec lui plus tôt me revint à l'esprit et fit battre mon cœur plus vite.

« Et moi je ne comprends pas que tu laisses n'importe qui profiter de tes attributs, Rosalie. N'as-tu donc aucun respect pour ces présents dont le Seigneur t'a gratifié au jour de ta naissance? » Demandai-je, piquée au vif.

« Je suis toute prête à offrir mes attributs aux plus hauts gradés de la cour, Bella. Même au roi, s'il m'arrivait un jour de croiser son chemin, » répliqua-t-elle, provocante.

« Tu es complètement folle, ma parole, Rosalie! Tu préfères passer du temps dans les bras d'un marquis exécrable au lit que dans ceux d'un laquais qui t'enverrait au septième ciel? » M'emportai-je.

« Mais, Bella, » se joignit Alice, « que sais-tu de ces choses-là? Je croyais que tu étais une novice en amour, et encore… »

« J'en connais assez pour me désoler du comportement de Rosalie, voilà! » Conclus-je en m'éloignant pour échapper à un interrogatoire en règle.

Je retournai m'étendre dans nos quartiers, une petite pièce en dessous du pont que nous partagions avec ma gouvernante. Elle était justement là elle aussi, allongée sur une couchette, l'air malade.

« Oh, nounou! Tu n'as pas l'air d'aller toi non plus, » me désolai-je.

« Ne t'en fais pas pour moi, Bella, c'est juste le mal de mer. Ça finira par passer, » répondit-elle faiblement.

« Dis-moi, Esme, pourquoi as-tu accepté de me suivre dans ma nouvelle vie? » Demandai-je. « Je suis une adulte à présent, je n'ai plus besoin de tes conseils… »

« Je crois au contraire que tu auras besoin de moi plus que jamais, ma petite, » répliqua-t-elle sur un ton entendu.

À quoi faisait-elle donc allusion? Je me sentais comme une chandelle que l'on venait à peine d'allumer et dont la flamme se faisait tout de suite étouffer. Il n'y avait rien pour moi au bout de ce périple. Pas d'amour puisque j'épousais le duc de Cresson seulement pour ne pas défier mes parents, pas de distraction autre que la lecture, et pas d'amis puisque Rosalie, Alice et Jacob retourneraient à leur monde tout de suite après la noce. Il n'y avait qu'une immense demeure au milieu de nulle part. Les sanglots que j'avais gardés au fond de ma gorge remontèrent à la surface et je me laissai envahir par mon chagrin.

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Je fus réveillée au milieu de la nuit par des bruits violents qui provenaient de l'extérieur de notre cabine. L'espace restreint tanguait de gauche à droite et de droite à gauche dans un crissement terrible. Les autres ne semblaient s'être rendues compte de rien. La panique s'empara de moi. Bon Dieu! Et si nous étions prises dans une tempête? J'aurais mille fois préféré rester endormie pendant que la mort venait me chercher…Mais j'étais totalement lucide à présent, et je songeai à Jacob qui dormait avec l'équipage. Il fallait que j'aille le trouver, ne serait-ce que pour mourir dans ses bras. Je me levai péniblement, et juste comme j'arrivais à me mettre debout, une des parois de la cabine céda et une vague d'eau salée s'engouffra à l'intérieur. Je poussai un cri de terreur avant d'avaler la tasse et de sombrer dans les limbes.

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Finalement, cela aurait sans doute été une mort trop romanesque pour moi. Et je ne méritais pas de mourir comme un personnage de roman d'aventures. Je n'étais qu'une pauvre petite marquise privée de choisir sa destinée. Mes paupières étaient closes, mais je distinguais la clarté au travers. Le soleil, sans aucun doute. Et je ne flottais pas sur l'eau, j'étais allongée quelque part. Je grattai le sol avec mes doigts, et sentis un sable rugueux les égratigner. Une voix me parvint, lointaine. Puis j'entendis plus clairement « Mademoiselle, je vous en supplie, réveillez-vous! » J'ouvris les yeux pour obéir, et je vis un homme penché sur moi, dans l'expectative. Il m'aida à me redresser à moitié, me soutenant par les épaules.

« Où suis-je? » Demandai-je d'une voix enrouée.

« Votre embarcation a dû faire naufrage, mademoiselle, » dit l'homme comme pour s'excuser.

C'était un grand type blond d'une beauté frappante mais au regard intimidant. Je me sentis rougir subitement.

« Vous reprenez des couleurs, on dirait. C'est bon signe, » dit-il encore.

« Vous n'avez pas répondu à ma question, » remarquai-je en tentant de soutenir son regard.

« Vous vous êtes échouée sur le domaine des Volturi, mademoiselle, » finit-il par me répondre.

Je jetai un coup d'œil autour de moi, mais tout ce que je pouvais voir, c'était la plage à perte de vue, surplombée par de hautes falaises rocheuses. Je me sentis désorientée et confuse.

« Vous dites que j'ai survécu à un naufrage? Monsieur… » Ajoutai-je.

« Jasper Whitlock pour vous servir, mademoiselle. Oui mademoiselle, vous et quatre autres personnes avez été recueillies sur cette plage aujourd'hui, » répondit-il à la hâte.

L'homme qui se prénommait Jasper regarda autour de lui comme pour s'assurer que personne ne l'observait. Cela me parut étrange.

« Et votre nom à vous, mademoiselle ? » Interrogea-t-il, me dévisageant plus intensément.

Décidément, ce type me mettait mal à l'aise avec ce regard là. On aurait dit un regard d'oiseau prédateur…

« Isabella, » dis-je laconiquement.

Cet étranger n'avait pas besoin de connaître mes titres de noblesse. En outre, sans mes effets personnels et mes bagages, je n'avais aucun moyen de prouver mon identité. Mon instinct me dictait d'en divulguer le moins possible à mon sujet à cet inconnu.

« Isabella, » répéta l'homme mystérieux. « Un très joli prénom pour une très jolie jeune femme… »

Il passa sa main sur mon visage et je sentis un frisson d'appréhension me parcourir. Ce gaillard ne m'inspirait rien de bienveillant, malgré son discours de sauveteur.

« Je dois avouer que les autres naufragés ont été plus loquaces que vous, mademoiselle Swan, marquise de Courville, » continua-t-il en appuyant sur mon nom de famille et sur mon titre.

Mon cœur manqua un battement. Quelque chose de sinistre m'attendait au détour, j'en étais presque certaine. Je demandai, soudainement inspirée « Quel jour sommes-nous, monsieur Whitlock? »

« Samedi le quinze de septembre, mademoiselle de Courville, » répondit-il courtoisement.

Trop courtoisement, Bella. Ce type est une vipère, prends garde à toi…

« Je devais me marier hier, monsieur. Croyez-vous qu'il sera possible d'alerter mon fiancé de ma mauvaise fortune? » M'enquis-je.

Qu'avait donc dû penser le duc de Cresson d'Alembert en ne me voyant pas arriver à Ajaccio tel que prévu?

« Ne vous en faites pas trop avec cela, mademoiselle Swan. Nos gens se chargeront d'envoyer une missive à votre futur époux, » dit-il pour me rassurer.

Mais son visage ne reflétait aucun réconfort. Son visage reflétait la concupiscence, foutue merde. Mon sang se glaça dans mes veines.

« Qui sont les autres rescapés? » Demandai-je encore.

Que je n'aie pas songé à m'informer plus tôt de ce détail était déroutant. Avais-je donc perdu mes capacités intellectuelles avec mes bagages?

« Des gens de votre entourage, sans aucun doute, » répliqua-t-il. « Un certain Jacob Black, une petite comtesse aux cheveux noirs, une grande duchesse blonde comme les blés, et une dame plus âgée qui se dit votre gouvernante… »

« Est-ce que je peux les voir? » m'informai-je en me levant.

J'étais très faible, et Jasper Whitlock dut me retenir pour que je tienne debout. Soudain, sans prévenir, il prit mes bras et les ramena derrière mon dos, après quoi il emprisonna mes poignets dans deux anneaux d'acier. Je poussai un cri de surprise.

« Mais, par la fin, qu'est-ce qui vous prend? »

« J'ai été forcé de mettre des fers aux pieds de Jacob Black parce qu'il voulait s'enfuir. Vais-je devoir faire de même avec toi? » Demanda-t-il froidement, toute trace de politesse évaporée de son discours.

Je restai bouche bée. Même si j'avais voulu m'enfuir, il ne me restait plus aucune force pour concrétiser cette ambition.

« Je n'ai pas l'énergie qu'il faudrait pour vous résister, monsieur Whitlock, » répondis-je en un souffle. « Je suis votre prisonnière. »

L'homme ne dit plus rien et me poussa dans le dos pour me forcer à avancer. Seul le bruit des vagues venant mourir sur la grève accompagna ma marche vers un destin dont j'ignorais dorénavant l'issue.

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