Titre : DESTINS CROISES

Auteur : lexi

Disclamer : Veronica Mars appartient à Rob Thomas, UPN, etc… pas à moi. Seule cette histoire et les nouveaux personnages le sont.

Pairing : Veronica & Logan, of course !

Résumé : En fin de saison 3, Veronica demande à Logan de sortir de sa vie définitivement. Il la prend au mot et décide de quitter la ville. Dix ans plus tard, que sont-ils devenus ?

Dans mon histoire, Logan est parti juste après sa dispute avec Veronica, il n'a jamais su qui était responsable pour la vidéo et n'a jamais cassé la figure à Gory. Pour les autres changements, Lamb est toujours en vie (juste pour le fun !), Mac s'est remise avec Bronson et Keith avec Alicia Fennell.

Les flashbacks et les pensées sont en italique (ou en caractères normaux dans les passages en italique).


Chapitre 1

New York, 2018

Logan Echolls jeta son stylo sur le bureau d'un geste frustré et s'adossa à son siège avec un soupir. Il posa la tête contre le dossier et ferma les yeux, espérant vaguement que ça suffirait à dissiper son début de migraine. Il était tellement fatigué que les lettres du document qu'il était en train de lire dansaient devant ses yeux. Depuis le temps, il était habitué aux semaines de cinquante heures, mais celle-ci avait été particulièrement éprouvante. Et la rencontre de l'après-midi n'avait rien arrangé.

S'il y avait une personne qu'il ne s'était pas attendu pas à rencontrer au détour d'une rue, c'était bien lui. Richard Casablancas Jr, quitter Neptune, paradis des riches et temple du surf, pour New York et sa neige de janvier ? On devait avoir basculé dans la quatrième dimension… Passé les premières secondes de stupeur, son ancien ami l'avait invité à prendre un verre, invitation qu'il avait accepté après avoir jeté un bref coup d'œil à sa montre. Il pouvait se permettre une pause d'une bonne heure – vu le rythme infernal de sa semaine, ce n'était certainement pas son patron qui lui reprocherait de souffler un peu.

Dick l'avait traîné dans un de ces bars qui fleurissaient au cœur de Manhattan et ils s'étaient calés autour d'une table, Logan commandant un sandwich en plus de leurs deux bières. Il ne manquerait plus que ça, qu'il débarque au tribunal avec l'estomac vide et un taux d'alcoolémie en pleine ascension… Le juge allait adorer.

- Alors, Dick, qu'est-ce qui t'amène à New York ? Moi qui pensais que jamais personne n'arriverait à te faire quitter la côte ouest…
- Ma copine est venue voir ses parents et je l'accompagne, l'avait renseigné Dick. Chiant à mort, mais j'ai récupéré en douce des invitations pour la première du dernier film de Sarah Jessica Parker. Et j'ai envie de tester les petites new-yorkaises, il parait qu'elles sont pas farouches…

Logan avait secoué la tête d'un air amusé. Trente ans et toujours aussi délicat ! Il n'y avait que Dick pour voir dans une présentation officielle à sa belle-famille une occasion de tromper sa copine. 'Copine'… N'était-on pas sensé abandonner ce genre de qualificatif à la fin du lycée, d'ailleurs ? Il avait détaillé son ami pendant que celui-ci parlait de sa vie à L.A., ses dernières conquêtes en date, sa dernière beuverie en date… Les cheveux blonds toujours aussi décolorés par le soleil, la peau toujours aussi bronzée, toujours aussi inconséquent. Le même Dick, avec dix ans de plus.

Alors que son ami l'entraînait sur le chemin des souvenirs, une impression d'irréalité l'avait frappé de plein fouet. Ça devait faire quatre ou cinq ans qu'ils ne s'étaient pas vus, mais il avait l'impression de l'avoir quitté hier. Même attitude, mêmes centres d'intérêt, même discours. Oui, le même Dick. Mais Logan avait du mal à reprendre le fil de la conversation, à s'intéresser à ces péripéties Dick-esques, même s'il devait admettre que ce genre de conversations surréalistes lui manquait parfois – comment passer en l'espace deux phrases d'une discussion sur la circulation new-yorkaise à une discussion sur le bien fondé de la dernière augmentation mammaire d'Alyssa Milano resterait à jamais un mystère pour lui – tout comme le fait d'oublier ses dossiers l'espace d'une pause déjeuner lui faisait un bien fou.

Mais à la seconde où il s'était fait cette remarque, toutes ses préoccupations lui étaient revenues à l'esprit. Il avait regardé sa montre à nouveau, étonné de voir qu'il était déjà presque l'heure de rejoindre le tribunal. Il avait interrompu Dick avec un sourire d'excuse.

- Désolé, Dick, mais j'ai une audience dans moins d'une demi-heure, je ne vais pas pouvoir rester…

Son ami l'avait regardé quelques instants d'un air perplexe.

- Ne le prends pas mal, mais je crois que je ne me ferais jamais à l'idée de te voir déguisé en avocat…

Logan avait eu un geste impatient.

- Je suis substitut du Procureur, Dick, pas avocat, avait-il corrigé machinalement.

Son ami avait haussé les épaules.

- Ouais, c'est pareil, tu es devenu un gratte-papier.

Logan avait ouvert la bouche pour répondre, avant de réaliser que se lancer dans une explication complexe sur la différence entre le Ministère public et les avocats de la défense dans le système judiciaire américain ne servirait à rien. Tout ceci dépassait de loin la compréhension de Dick. Il avait secoué la tête et souri.

- Oui, et bien le gratte-papier doit retourner bosser, avait-il fini par dire. Tu es à New York jusqu'à quand ?
- Je repars dans deux jours… à moins que je rencontre Kim Cattrall et que j'arrive à la persuader de passer quelques jours en ma compagnie, avait lâché Dick d'un air rêveur. J'ai toujours pensé que cette fille était une vraie chaudasse… Je sens que je vais adorer cette première !
- Je crois me souvenir que Sarah Jessica Parker et elle étaient brouillées, l'avait renseigné Logan, presque désolé de lui casser son fantasme. Alors je doute qu'elle soit là.

Dick avait affiché une moue déçue.

- Pas grave, Sarah Jessica est bonne, elle aussi…
- Elle est mariée.
- C'est sensé être un problème ? s'était étonné Dick.

Un flash de Kendall, nue sous un peignoir négligemment fermé, avait brièvement traversé l'esprit de Logan. Il avait fait une grimace, s'abstenant de tout commentaire.

- Si jamais tu veux qu'on se voie un soir avant que tu repartes, appelle-moi, ok ? avait-il dit en se levant de table. Tu as mon numéro.

Il avait laissé un billet de vingt dollars sur la table pour payer la note et quitté le bar. Il était retourné au tribunal et avait plaidé comme il l'avait fait des dizaines de fois ces cinq dernières années, avant de rentrer au bureau et de se plonger dans le dossier suivant. Un autre jour, une autre affaire… Sauf qu'il n'arrivait pas à se concentrer. Il était fatigué et sa rencontre avec Dick avait réveillé des souvenirs qu'il n'aimait pas remuer. Neptune, son père, Veron…

Il se leva brusquement de son fauteuil et se dirigea vers la fenêtre de son bureau, observant pensivement le ballet des gens dans la rue en contrebas, rentrant chez eux d'un pas pressé. Il lui arrivait parfois de se demander ce qu'elle devenait, ce qu'elle faisait de sa vie – était-elle mariée ? Avait-elle des enfants ? – mais il s'arrangeait toujours pour arrêter d'y penser très vite. Il y avait toujours quelque chose de suffisamment urgent requérant son attention immédiate pour l'empêcher d'y penser.

- Monsieur Echolls ?

La voix le tira de ses pensées et il se retourna pour découvrir sa secrétaire debout sur le pas de la porte.

- Oui, Joan ? demanda-t-il calmement.
- Je voulais savoir si vous aviez besoin de quelque chose avant que je m'en aille.

Il secoua la tête.

- Non, merci, je vais m'en aller aussi. Passez une bonne soirée.

Alors qu'elle quittait la pièce, son regard se posa sur la pile de dossiers posée sur son bureau et il soupira. Il adorait son job, malgré les heures supplémentaires, la difficulté des affaires, la pression… Un autre soir, il serait probablement resté encore une bonne heure, histoire de s'avancer un peu, mais aujourd'hui, il n'était pas d'humeur. Après avoir empoché son téléphone, il récupéra sa veste, glissa son ordinateur portable dans sa sacoche et emboîta le pas à sa secrétaire, un dossier sous le bras.


Neptune, 2018

Veronica jeta son stylo sur le bureau d'un geste frustré et s'adossa à son siège avec un soupir. Elle posa la tête contre le dossier et ferma les yeux, espérant vaguement que ça suffirait à dissiper son début de migraine. Bon sang, elle s'était absentée seulement quelques semaines, comment les dossiers avaient-ils pu s'accumuler à ce point ? Léo était venu aider son père pourtant… Ne jamais tomber malade, c'était ça le secret. Keith passa la tête à la porte et sourit.

- Déjà fatiguée ? plaisanta-t-il. Tu es là depuis seulement deux heures, tu devrais avoir honte de toi…

Veronica secoua la tête d'un air amusé.

- C'est ça, marre-toi ! En attendant, je me demande comment on en est arrivé là…, dit-elle avec un soupir. Tu as démarché tous les paumés de Neptune, histoire d'ensevelir ma vie sociale sous les dossiers ? Parce qu'autant te le dire tout de suite, si on continue à ce rythme, c'est bien parti pour réussir…

Mais en même temps, si elle avait une vie sociale, ça se saurait, hein ? Elle avait lâché son dernier petit ami en date il y a six semaines – non, le problème ne vient pas de toi, mais de moi, je ne suis pas prête pour vivre quelque chose de sérieux – et depuis, sa vie sentimentale était l'équivalent du désert du Sahara… C'était donc si difficile de rencontrer LE type qui lui donnerait envie de ralentir la cadence ? Pourtant, elle en rencontrait des hommes bien, mais il n'y avait rien à faire, il fallait toujours qu'elle finisse par s'en aller… ou par leur faire comprendre qu'elle préférait qu'ils s'en aillent. Difficile de se débarrasser de certaines habitudes…

- Veronica… Veronica ?

Elle se redressa, brusquement tirée de ses pensées.

- Excuse-moi, j'avais la tête ailleurs…
- C'est ce que je constate, dit Keith, redevenu sérieux. Je ne veux pas que tu te fatigues, chérie, tu as entendu ce qu'a dit le médecin…

Veronica réprima un geste agacé. Il y a quelques semaines, elle s'était écroulée au beau milieu du dîner de Thanksgiving et le médecin avait diagnostiqué un surmenage. Rien d'étonnant à ça, depuis qu'elle avait démissionné du Bureau et était revenue travailler avec son père à Mars Investigations, elle enchaînait les semaines de cinquante heures… Ils avaient du travail à ne plus savoir quoi en faire, la réputation de sérieux et d'efficacité de Mars Investigations ayant depuis quelques années largement dépassé les frontières de Neptune. Veronica pensait sincèrement qu'un troisième enquêteur ne serait pas de trop, mais pour le moment, elle refusait de l'envisager. Elle tenait trop à leur petit business père/fille pour accepter qu'un étranger vienne y mettre son nez.

Mais elle savait que ça ne durerait pas. Elle commençait à fatiguer. Keith l'avait obligée à prendre quelques semaines de repos, la menaçant de l'embaucher, cette fameuse troisième personne, si elle ne se montrait pas raisonnable. Alicia et Wallace l'avaient appuyé, et même Mac s'était mise de la partie, la traîtresse. De toute façon, elle avait dû capituler, même la personne la plus obstinée du monde ne pouvait tenir le coup quand son corps la lâchait. Et encore, le sien avait pu se remettre avec quelques semaines de repos. Celui de Keith, en revanche…

Le cœur de son père avait commencé à avoir des ratés il y a trois ans et ils avaient dû rayer de la liste de leurs activités la traque de évadés/libérés sur parole/criminels en fuite. Trop éprouvant pour Keith et Veronica ne se sentait pas de se lancer dans ce genre d'aventure en solitaire. De toute façon, ils gagnaient suffisamment bien leur vie sans ça. Divorces, fraudes, tromperies en tout genre, rien ne valait les classiques. Mais parfois, elle se disait que ce serait bien de dégoter une affaire qui sortait de l'ordinaire, histoire de casser un peu cette routine dans laquelle ils commençaient à s'enfermer. Et en parlant de nouvelles affaires…

Elle entendit le tintement de la porte et regarda un couple d'une quarantaine d'années pénétrer dans leur cabinet. Inconnus au bataillon – nouveaux clients, donc. Keith se tourna vers elle.

- J'ai rendez-vous avec Cliff pour une sombre histoire de libéré sur parole… Tu peux te charger de ça ou bien je leur dis de revenir plus tard ?
- Non, ça va, je m'en occupe, je me disais justement que j'avais envie d'un peu de changement…
- Bien.

Keith salua les nouveaux venus en récupérant sa veste et partit. Veronica se leva pour les accueillir.

- Bonjour, je suis Veronica Mars, en quoi puis-je vous aider ?
- Ben Kingsley, se présenta l'homme en lui serrant la main. Et voici ma femme, Helen.

Veronica retourna s'installer derrière son bureau pendant que le couple s'asseyait en face d'elle.

- Tout d'abord – et pardonnez-moi si vous me trouvez un peu rude – mais j'aimerais vous poser une question, demanda Monsieur Kingsley.
- Je vous en prie.
- J'ai entendu dire que vous aviez fait partie du FBI, mais que vous en étiez partie. Puis-je me permettre de vous demander pourquoi ?

Veronica soupira. Elle devrait inscrire la réponse à cette question sur sa carte de visite. Tous les clients à qui elle avait à faire la lui posaient à un moment donné. Comme si le fait de ne plus faire partie du FBI était une preuve d'incompétence notoire…

- J'ai démissionné, expliqua-t-elle patiemment. J'aime agir comme je l'entends, même si ce n'est pas toujours de la façon la plus… conventionnelle. Disons que j'ai découvert que suivre les ordres et les règlements au pied de la lettre, ce n'était pas pour moi…, ajouta-t-elle avec un haussement d'épaules.

L'homme acquiesça.

- Nous avons longuement hésité à venir vous voir, vous, plutôt que la police… Et je ne suis toujours pas sûr que nous ayons choisi la meilleure option.
- Tout dépend dans quelle mesure vous voulez voir votre affaire résolue rapidement, dit Veronica avec un petit sourire. Le bureau du shérif n'est pas toujours des plus… efficace.
- C'est ce que nous avons entendu dire. Et c'est ce qui nous a décidé, en fait.

Veronica attrapa un stylo et un bloc-notes.

- Si vous me disiez ce qui vous amène ? demanda-t-elle.

Le couple échangea un regard. La femme fouilla dans son sac à main et en tira un rectangle cartonné qu'elle posa sur le bureau. La photographie d'une adolescente – 16/17 ans, estima Veronica – blonde aux yeux bleus.

- Voici notre fille, Krista, expliqua la femme. Elle vient d'avoir 17 ans et elle a disparu il y a cinq jours. Nous voulons que vous la retrouviez.

Veronica fronça les sourcils.

- Pardonnez-moi, mais pourquoi avoir attendu cinq jours avant de signaler sa disparition ?
- Au début, nous pensions qu'elle reviendrait. Nous nous sommes disputés, elle et moi, le week-end dernier, et nous pensions qu'elle était en colère, qu'elle voulait… vous savez, prendre ses distances. Mais nous n'avons eu aucune nouvelle, ni aucun coup de téléphone et nous avons commencé à nous inquiéter. Alors, j'ai appelé ses amis, fait le tour des endroits où elle pourrait être et personne ne l'a vue cette semaine…
- Vous pensez qu'elle est partie à cause de cette dispute ?

Madame Kingsley acquiesça.

- A propos de quoi vous êtes-vous disputés ? demanda Veronica.

Ce fut le mari qui répondit cette fois.

- Je ne suis pas le père de Krista, je l'ai adoptée quand elle n'avait que quelques mois. Nous avions décidé que nous le lui dirions quand elle serait plus âgée, quand elle serait plus à même de comprendre, mais vous savez ce que c'est…
- Pas vraiment, non, reconnut Veronica.
- Nous avions peur de sa réaction, avoua Helen Kingsley. Plus le temps passait et plus ça devenait difficile… Et puis, il y a trois mois environ, elle cherchait de vieilles photos et elle est tombée par hasard sur son extrait de naissance…
- … sur lequel elle est inscrite 'née de père inconnu', compléta son mari. Alors bien évidemment, elle a commencé à poser des questions et nous avons dû lui dire la vérité. Et comme on s'y attendait, elle l'a très mal pris.

Madame Kingsley soupira.

- Je lui ai expliqué que son père nous avait laissé avant sa naissance, qu'il ne se sentait pas prêt à assumer un enfant et qu'il était décédé depuis, mais elle posait toujours plus de questions, elle voulait en savoir toujours plus, et j'ai peur… j'ai peur de ne pas avoir très bien géré la situation. Parler de tout ça m'est difficile, même après tout ce temps, admit-elle avec un sourire d'excuse.
- Elle a dit que si sa mère ne pouvait pas lui parler plus de ses origines, alors elle essayerait de trouver quelqu'un qui le pourrait, reprit son mari. Krista a toujours été une jeune fille sérieuse, mais ces dernières semaines, ses professeurs se sont mis à se plaindre de son comportement, de la baisse de ses résultats… Elle a même commencé à sécher les cours.
- Votre fille est élève à Neptune High ? demanda Veronica.
- Oui, confirma Helen Kingsley. Elle est en dernière année.

Le silence retomba dans la pièce alors que Veronica, perdue dans ses pensées, réfléchissait déjà à ce qu'elle allait faire à partir des renseignements qu'elle avait à sa disposition. Ben Kingsley reprit la parole.

- Qu'en pensez-vous ? Vous allez nous aider ? demanda-t-il.

Il prit un air presque suppliant.

- Je sais que pour vous ça ne doit être qu'une banale fugue, mais nous sommes vraiment inquiets. Nous pourrions essayer de la retrouver nous-mêmes, mais nous ne savons même pas par où commencer… Utilisez les moyens que vous voulez, le prix n'est pas un problème.

Veronica s'en serait douté. Les vêtements que portaient Helen Kingsley devaient à eux seuls représenter la totalité de son salaire mensuel, qui était déjà plutôt confortable. Elle sourit.

- Je prends votre affaire, ne vous en faîtes pas, les rassura-t-elle. J'aurais juste besoin de quelques renseignements supplémentaires – son numéro de téléphone portable et de carte de crédit, entre autres choses. Est-ce que votre fille a un ordinateur personnel ?
- Oui.
- J'aurais besoin que vous me laissiez y jeter un coup d'œil et que vous me donniez son adresse e-mail et son mot de passe.

L'homme secoua la tête.

- Nous connaissons son adresse e-mail, mais pas son mot de passe.

Mac, Mac, Mac… J'en connais une qui va faire des heures sup', cette semaine…

- Ce n'est pas grave, je me débrouillerai… Je voudrais aussi la liste de ses amis et… Votre fille a-t-elle un petit ami ? demanda Veronica.

Helen Kingsley fit la moue.

- En… quelque sorte, dit-elle. Il s'appelle Billy Morgan, il est étudiant en informatique à Hearst. Elle passait beaucoup de temps avec lui jusqu'à ces dernières semaines, mais j'ai cru comprendre qu'ils étaient plus ou moins séparés, je ne sais pas exactement pourquoi… Toujours est-il que je les ai entendu se disputer plusieurs fois, continua-t-elle, et je sais qu'ils parlaient de cette histoire de père biologique.
- Bien, je creuserai de ce coté là aussi.

Après avoir récupéré leurs coordonnés et convenu de passer chez eux dans la soirée pour récupérer l'ordinateur portable de Krista, Veronica les reconduisit vers la sortie. Au moment de partir, Madame Kingsley sembla hésiter.

- Vous savez, finit-elle par dire, Billy est un gentil garçon. Je ne pense pas qu'il puisse être pour quelque chose dans la disparition de notre fille. Il a la tête sur les épaules.
- Vous savez quand votre fille et lui se sont vus pour la dernière fois ?
- L'après-midi du jour où Krista a disparu. Notre voisine nous a dit qu'elle avait vu sa voiture garée devant chez nous.
- Donc il doit être le dernier à l'avoir vu avant qu'elle disparaisse…, réfléchit Veronica. Quel est le nom de votre voisine ? Il se pourrait que j'ai à lui parler pour lui demander plus de précisions…

Helen Kingsley fit la grimace.

- Est-ce vraiment utile ? demanda-t-elle. Elle est tellement désagréable… Elle ne peut s'empêcher de donner son avis tout, en particulier quand on ne le lui demande pas ! Les tenues de Krista, son petit ami que nous devrions avoir honte d'accueillir chez nous car il ne fait pas 'partie de notre monde', notre gazon pas suffisamment entretenu, le gâteau pour la réunion de quartier pas assez cuit… Si elle apprend la fugue de notre fille, vous pouvez être sûre que tout le quartier va en faire des gorges chaudes…

Veronica lui sourit.

- Je vous promets de ne m'adresser à elle que si c'est vraiment nécessaire…, assura-t-elle.

Benjamin Kingsley jeta un regard à sa femme et soupira.

- Caruthers, dit-il. Madison Caruthers.

Ce fut au tour de Veronica de faire la grimace. Madison Caruthers, autrement dit Madison Sinclair. Fabuleux. La garce en titre de Neptune, encore plus imbuvable – oui, c'était possible – depuis ses épousailles avec le fils de l'un des plus riches entrepreneurs de la région. Ça lui apprendrait à souhaiter un peu de changement… En tout cas, Helen Kingsley pouvait être rassurée, s'il y avait une personne à qui Veronica ne parlerait qu'en cas d'extrême nécessité – genre fin du monde – c'était bien Madison Caruthers.


Neptune, 2007

Logan bataillait avec ses boutons de manchettes. Voilà pourquoi il ne portait jamais de chemise – les boutons de manchette. Mais lui et Veronica sortaient ce soir, alors il faisait un effort niveau tenue vestimentaire… Il y a encore quelques semaines, lorsqu'il avait rompu avec elle, il avait vraiment pensé que, cette fois, c'était définitif. Mais elle était revenue et ils avaient repris leur relation doucement, progressant pas à pas. Un dîner en tête-à-tête leur avait semblé être un moyen comme un autre de sortir de leur routine. Il entendit la porte de la suite s'ouvrir et tourna la tête pour regarder Veronica approcher. Il fronça les sourcils en voyant sa tenue.

- Un jean ? Quelle audace ! fit-il remarquer avec un sourire amusé. J'espère que le maître d'hôtel suit les tendances…
- Est-ce que tu as couché avec Madison quand on a rompu cet hiver ? demanda-t-elle sans autre forme de procès.

Ce fut comme si une tonne de briques lui tombait sur la tête… Ok, ce n'était pas du tout comme ça qu'il avait imaginé le début de la soirée. Il envisagea l'espace d'une seconde de lui mentir, mais c'était Veronica. Si elle lui posait la question, c'était qu'elle connaissait déjà la réponse. Il baissa la tête d'un air coupable.

Veronica sentit la nausée lui remonter à la gorge… Il avait osé. Avec tout ce que Madison lui avait fait, en sachant à quel point elle la haïssait, il avait osé. Quand est-ce qu'il apprendrait à réfléchir avant d'agir ? Il lui avait menti. Et le résultat final était qu'elle souffrait. Encore. A cause de lui.

- Je t'avais demandé franchement ! s'exclama-t-elle.
- Et j'ai menti, avoua Logan. Franchement ? Tu n'avais pas à connaître ce genre de détails. Je savais que tu aurais du mal à avaler le truc avec Madison.
- De quel truc est-ce que tu parles ? Le truc genre 'elle m'a droguée' ou le truc où je me traînais jusqu'à ma voiture le lendemain matin en me demandant où était passée ma virginité et qu'elle avait marqué 'salope' sur mon pare-brise ? C'est ça que tu pensais que j'aurai du mal à avaler ?

Elle secoua la tête, comme si elle n'en croyait pas ses oreilles.

- Ça me rend vraiment malade… Si j'avais pu manger quoi que ce soit aujourd'hui, je crois que je vomirais sur ton plancher.
- On était séparé à ce moment là.
- Tu sais ce que je pense d'elle ! explosa Veronica. Il n'y aurait pas pu y avoir un moment pendant que vous le faisiez où tu aurais pu penser à quel point je déteste le fait de te savoir avec elle ?
- Ce n'était pas comme ça.
- Non ? Tu veux une autre version ? railla-t-elle, portant la main à sa tempe. Parce que j'ai un million de scènes écoeurantes qui tournent dans ma tête là, tout de suite.
- Je n'essayais pas de te blesser, dit-il en faisant un pas dans sa direction.

Elle recula, comme si sa proximité lui était soudain insupportable.

- Oh, vraiment ? Imagine si tu avais essayé !

Elle se dirigea vers la porte, Logan sur les talons.

- Qu'est-ce que tu veux que je fasse ?

Elle se retourna pour lui faire face.

- Qu'est-ce que je peux faire ? continua-t-il calmement, comprenant qu'il était en train de la perdre.
- Faire que ce ne soit pas vrai ? dit-elle d'une toute petite voix. Sortir ça de ma tête et faire en sorte que je n'y pense plus jamais ?

Elle secoua la tête en signe de dénégation.

- Parce qu'à moins que tu puisses faire ça, c'est quelque chose que je ne pourrais jamais oublier.

Elle quitta la suite comme si elle avait le diable à ses trousses et il comprit que, cette fois, il n'y aurait plus de nouvelle chance pour eux.


New York, 2018

Logan observait le petit homme rondouillard faire nerveusement les cent pas dans la salle d'interrogatoire et soupira. Si ça ne tenait qu'à lui, il arrêterait de se planquer derrière cette vitre sans teint et irait punaiser ce pauvre type contre le mur en lui expliquant de façon très détaillée ce qu'il allait lui faire s'il ne crachait pas le morceau… Il voyait d'ici les gros titres – "Logan Echolls, substitut du Procureur le plus prometteur de l'État de New York, rétablit les châtiments corporels en salle d'interrogatoire".

Parce que, oui, il était Procureur, garant de l'Ordre et de la Justice. Il regarda son reflet dans la vitre et sentit monter en lui un fou rire nerveux en pensant à ses années lycée. Il en connaissait quelques uns qui pleureraient de rire s'ils le voyaient en ce moment. Logan Echolls, aimant à problème et roi des embrouilles, obligé de dorloter un comptable véreux dans l'espoir de le voir se retourner contre son patron dans le respect le plus scrupuleux de la légalité… Le destin avait un curieux sens de l'humour.

C'était dans ces moments-là qu'il se disait que les lois étaient en fin de compte le fléau de la société. Ou alors qu'il s'était trompé de carrière… Il aurait dû devenir flic, histoire d'avoir au moins la satisfaction de pouvoir bousculer un peu les suspects. Ou alors Président des Etats-Unis – votez pour moi et je vous promets de rétablir cette bonne vieille loi du talion, vous savez, œil pour œil, dent pour dent… Et au lieu de ça, il poireautait derrière une putain de vitre en évitant de penser à la pile de dossiers qui s'entassait sur son bureau. Tout ceci n'était qu'une perte de temps.

Sans compter que regarder cette boule de nerfs faire les cent pas commençait à sérieusement lui taper sur le système. La porte de la salle s'ouvrit et le capitaine à la tête de la section criminelle de la police de New York entra, l'inspecteur chargé de l'interrogatoire sur les talons.

- Tout ceci n'est qu'une perte de temps, lâcha-t-il avec exaspération.

Logan eut un sourire sarcastique.

- Vous lisez dans mes pensées, Capitaine. Monsieur Randall désire autre chose pour se sentir plus à l'aise parmi nous ? railla-t-il. Un verre de champagne ? Un menu gastronomique peut-être ?

L'inspecteur Vaughan dissimula un sourire.

- Juste un avocat, dit-il avec un haussement d'épaules. De toute façon, il est tellement nerveux qu'on pourrait lui apporter du caviar qu'il n'arriverait pas à l'avaler.

Il hésita quelques secondes avant de reprendre.

- Il ne parlera pas.
- Mettez-lui encore un peu la pression, il finira peut-être par craquer, tenta le Capitaine Crawford. Ce type n'a rien d'une petite frappe, c'est juste un bureaucrate…
- Un bureaucrate qui sait ce qu'il fait et qui a demandé un avocat, fit remarquer Logan. Faites-le appeler, dans l'hypothèse où il viendrait à parler, je ne veux pas que son témoignage soit déclaré irrecevable parce qu'on n'aurait pas respecté les droits de ce glorieux personnage…
- A la seconde où son avocat sera là, on ne tirera plus rien de lui, lâcha l'inspecteur Vaughan, découragé. On sait tous qui lui signe ses chèques…
- C'est votre boulot, de lui délier la langue, moi, je m'occupe seulement de la paperasse ! explosa le substitut, exaspéré. Et vous êtes en train de me faire perdre mon temps !

Les deux hommes le regardèrent en silence quelques instants, surpris par son éclat. Logan se passa une main lasse sur la nuque.

- Désolé, j'ai eu une semaine difficile…, lâcha-t-il en guise d'excuse.

Leurs regards revinrent se poser sur le comptable de l'autre coté de la vitre.

- Retournez l'interroger, ordonna finalement Crawford à son inspecteur. Moi, je m'occupe de l'avocat.

Il quitta la pièce et l'inspecteur Vaughan se tourna vers Logan.

- Tu as dormi combien d'heures, cette nuit ? Tu as l'air encore plus crevé qu'hier…
- Mon petit Kyle, tu caches sacrément bien ton coté mère poule, tu sais ça ? lâcha Logan, sarcastique.
- Je suis très sérieux.
- Sans blague… Tu veux un délai approximatif ou une chronologie détaillée des évènements de la soirée ?
- La version courte, j'ai un interrogatoire sur le feu.
- Dîner chez Trish à 20 heures, retour à la maison à 23, coucher à minuit pile.
- Tu as prétexté des dossiers à revoir pour t'éclipser tôt, devina Kyle.
- Ouaip.
- Mais tu n'as pas pu échapper à LA conversation sur vos 'projets d'avenir', continua-t-il en mimant les guillemets.
- Nope.

Kyle soupira.

- J'ai dit version courte, pas monosyllabes. Ça t'ennuierait d'être un peu plus explicite ?
- Non, lui assura Logan. Mais je n'ai pas d'interrogatoire sur le feu, MOI…

Son ami sourit.

- Juste une petite amie qui meurt d'envie de te passer la corde au cou, fit-il remarquer avec malice. Voilà pourquoi je préfère les relations courtes.

Logan secoua la tête d'un air désabusé.

- Un jour, il faudra que tu m'expliques comment tu peux qualifier une baise d'une nuit de 'relation', même courte…
- Parce que pendant quelques heures, nous sommes très très… liés ?

Logan sourit et tapota sa montre.

- Tic tac, l'heure tourne et l'avocat est en route, fit-il remarquer.
- Tu rêves si tu penses que tu vas t'en tirer comme ça, le prévint Kyle.

Il se dirigea vers la porte.

- J'ai réussi à persuader Gabriel que sa femme survivrait à une soirée sans lui, donc on a rendez-vous à 20 heures au Mama Lodge. Ce soir, tu passes sur le grill, vieux !
- Occupe-toi de notre 'client' d'abord. Hors de question que je te parle si tu n'arrives pas à lui délier la langue. Ma réputation serait bien trop mise à mal ! plaisanta Logan.
- Me voilà regonflé à bloc…

Logan regarda son ami repasser en salle d'interrogatoire et s'asseoir en face de leur homme. Il soupira à nouveau, sachant que même Kyle aurait du mal à en tirer quelque chose. Paul Randall était bien trop terrifié pour ça.

Logan connaissait ce genre de type, il en avait croisé des dizaines ces cinq dernières années – petits scribouillards gérant de gros paquets d'argent sale, sachant très exactement ce à quoi ils étaient mêlés, mais se donnant bonne conscience car ils ne faisaient pas directement le sale boulot. Paul Randall en était le parfait cliché, avec ses petites lunettes rondes et son costume bien coupé. Villa dans un quartier huppé, école privée pour les enfants, femme inscrite au Country Club… Logan était né riche et ne s'en était jamais caché, mais même si son père était un connard fini, il pouvait dépenser ses millions avec la conscience tranquille – plus ou moins. Ce type promenait sa dégaine de bourgeois dans une Mercedes flambant neuve payée avec l'argent du plus gros réseau de prostitution de la côte est.

Et il était terrifié, donc il ne parlerait pas. Parce qu'entre passer quinze ans à l'ombre ou se prendre une balle dans la tête, le choix était vite fait… Viktor Vassili n'était pas vraiment réputé pour sa délicatesse. Pourri jusqu'à la moelle – trafic de came, proxénétisme, paris clandestins, il menait de main de maître son petit business, avec une discrétion remarquable. Et bien entendu, c'était à Logan qu'on avait refilé le dossier. Tu parles d'un cadeau empoisonné… Plus de huit mois qu'ils bossaient tous sur cette enquête et ils ne faisaient rien d'autre que tourner en rond.

Ça leur avait pris un moment pour réunir suffisamment d'éléments pour pouvoir convoquer au poste le comptable attitré de Vassili. Avec ce type, ils tenaient enfin une chance d'avancer un peu, d'obtenir des renseignements neufs qui viendraient grossir un dossier à charge déjà bien épais. Sauf que Paul Randall était terrifié, qu'il ne parlerait pas, et que du coup, la frustration de Logan menaçait d'atteindre des sommets aussi élevés que l'Empire State Building. Il se concentra sur la conversation qui se déroulait de l'autre coté de la vitre.

- Toujours rien à dire ? demandait calmement Kyle. Aucune envie subite de soulager votre conscience ?
- Où est mon avocat ? répéta Paul Randall pour la dixième fois. Je vous ai demandé un avocat.
- Et j'ai entendu, je ne suis pas sourd. Il est en chemin.

Le silence retomba sur la pièce. Kyle soupira.

- Écoutez, je sais que vous avez peur, mais dès que votre avocat sera là, vous savez comment les choses vont se passer. Vous ne pourrez plus rien dire, dit l'inspecteur avec un sourire désabusé. C'est Vassili qui lui verse son salaire et il fera en sorte que vous ne mettiez pas son patron dans l'embarras. Même si ça veut dire vous laisser condamner à sa place…
- Si je parle, je suis mort, affirma le comptable avant de laisser échapper un rire nerveux. Bon sang, rien que le fait d'être dans cette pièce risque de faire de moi un homme mort, que je parle ou non ! Vous n'auriez jamais dû m'arrêter…
- Vous aidez au blanchiment d'argent d'un réseau de crime organisé, vous allez en prendre pour dix ans, minimum, le détrompa Kyle. A moins que vous ne nous donniez de quoi faire pencher la balancer en votre faveur… Nous pouvons vous protéger. Le substitut du Procureur s'est déjà entendu avec le FBI pour vous faire entrer dans le programme de protection des témoins.

Pour être précis, les négociations étaient encore en cours, mais ça, il se garderait bien de le lui dire. Mais loin de se laisser convaincre, l'autre secoua la tête.

- Ça ne suffira pas. On peut courir toujours plus loin, toujours plus vite, il finit toujours par vous retrouver… Et s'il ne s'en prend pas à moi, il s'en prendra à ma famille. Essayez de comprendre, supplia-t-il.
- Le FBI fait disparaître une bonne dizaine de personnes chaque année, il sait ce qu'il fait, lui assura Kyle. Vous ne craindrez plus rien.
- Allez dire ça à Linski, répliqua sèchement Randall.

De l'autre coté de la vitre, Logan fronça les sourcils. Linski ? Il était sûr de n'avoir jamais entendu prononcer ce nom là et pourtant, il connaissait le dossier par cœur… Il s'empressa de noter le nom en prenant mentalement note de tuer le prochain agent fédéral qui franchirait la porte de son bureau. Coopération entre les services, mon œil…

- Qui est Linski ? demanda Kyle de son coté.

Le comptable se leva brusquement de sa chaise.

- Ça suffit, dit-il. Je ne dirais plus rien tant que mon avocat ne sera pas là.

Logan lâcha un soupir et tapa discrètement sur la vitre, demandant à Kyle de le rejoindre. Ce dernier ouvrit la porte de la salle d'interrogatoire juste à temps pour voir l'avocat tant attendu arriver. Logan sortit dans le couloir, laissant Paul Randall seul avec son conseil.

- Alors, on fait quoi, maintenant ? demanda Kyle.
- Je retourne au bureau, on n'en tirera plus rien, lui dit Logan. Je vais voir ce que je peux trouver sur ce Linski.

Kyle fronça les sourcils.

- Tu veux que je m'en occupe ? Les renseignements, ce n'est pas trop ta partie…
- Il a mentionné ce type quand tu as abordé la question du programme de protection des témoins, lui fit remarquer Logan. Mon petit doigt me dit que ce n'est pas dans les fichiers de la police que tu vas découvrir qui c'est… Et dire que je négocie avec les fédéraux pour faire disparaître Randall depuis deux mois et qu'ils n'ont jamais parlé ce type, alors qu'il est visiblement connecté à Vassili d'une façon ou d'une autre…
- Peut-être que ce n'est pas le cas…
- Et bien, au pire, ce sera une fausse piste de plus, je ne suis plus à ça près.
- Je doute qu'ils te donnent ce type sur un plateau…
- Oh, ne t'en fais pas pour ça… Je commence à en avoir marre de ces querelles de clocher, lâcha Logan avec exaspération. Et que je garde mes informations pour moi, et que je ne te les donne que si tu me parles des tiennes… J'ai l'impression de jouer les arbitres dans une cour de récréation, ça commence à m'énerver.

Il haussa les épaules.

- Je vais piquer ma gueulante, ça devrait faire son effet. Après tout, ce ne sera que la centième fois ce mois-ci…
- Donc, j'annule le resto de ce soir.
- Non, ça me fera du bien de décompresser un peu. On se retrouve à 20 heures, comme prévu. Tiens-moi juste au courant pour Randall s'il change d'avis…
- Tu peux toujours rêver.

Kyle regarda Logan s'en aller, parlant déjà au téléphone avec son agent de liaison au FBI, et secoua la tête. Certains jours – comme aujourd'hui – il se réjouissait de n'être qu'un flic… Il n'aurait jamais été capable de jongler avec ses dossiers comme le faisait Logan sans se choper un ulcère. Mais ça ne le surprenait pas. Déjà à la fac, son ami faisait preuve d'une capacité de concentration impressionnante… Et puis, passer une après-midi entière à s'engueuler au téléphone avec des bureaucrates souffrant d'un sérieux complexe de supériorité ? Oui, il bénissait définitivement le ciel de n'être qu'un simple flic…


Neptune, 2018

- Il n'y a rien.
- Tu es sûre ? demanda Veronica. Aucun numéro de téléphone, ni message suspect ?

Mac secoua la tête d'un air navré.

- Non, juste le contenu normal d'un ordinateur appartenant à une adolescente normale, confirma-t-elle en rendant à Veronica l'appareil. Mails aux copines, photos d'Orlando Bloom torse nu, musique et vidéos. Idem pour l'historique des sites visités, rien que les classiques.
- Génial…

Veronica soupira. Si ça avait été aussi facile, ça aurait été trop beau… Elle était passée la veille récupérer l'ordinateur de Krista chez ses parents et Mac l'avait rejointe entre midi et deux pour lui filer un coup de main – craquer son mot de passe et vérifier la liste de ses connexions Internet, notamment. Elle y serait parvenue toute seule, mais ça lui aurait pris beaucoup plus de temps et elle savait que, dans les cas de fugues, les pistes avaient tendance à refroidir très vite.

C'était devenu une sorte de rituel. Environ deux fois par semaine, Mac la rejoignait au bureau et elles bavardaient pendant que son amie faisait ses tours de magie informatiques. Veronica avait proposé de la payer pour ça, mais Mac avait refusé – elle créait des sites Internet en free-lance et gagnait suffisamment bien sa vie pour ne pas avoir besoin de revenus supplémentaires. Elles étaient juste tombées d'accord sur le fait que ce serait Veronica qui paierait le déjeuner. Elle tendit à Mac un emballage en carton d'où s'échappait une appétissante odeur de cuisine chinoise et son amie entama son repas avec enthousiasme. Veronica sourit.

- Si tu continues à manger comme ça, tu vas exploser !
- J'ai décidé que pendant les cinq prochains mois, je ne priverai de rien ! Je vais bientôt ressembler à une montgolfière de toute façon, dit-elle en montrant d'un geste vague son ventre qui commençait à s'arrondir. Autant me faire plaisir !
- Je n'aurais jamais cru que tu arriverais à piquer à Wallace son titre de glouton de l'année !
- Wallace n'est pas enceinte.
- Encore heureux… Vu l'état de nerfs dans lequel il était quand Abby attendait leur fille, j'imagine sans peine ce que ça aurait été si c'était lui qui l'avait portée pendant neuf mois !

Mac se mordit les lèvres.

- Bronson a déjà appris par cœur le manuel du parfait papa, avoua-t-elle avec un rire nerveux. Et je n'en suis qu'à mon quatrième mois de grossesse ! J'imagine ce que ça va être quand le bébé sera là…

Veronica sourit, ne pouvant s'empêcher de la jalouser un peu. Elle ne désirait pas particulièrement avoir des enfants – du moins, elle en voulait, mais pas tout de suite, son rôle de marraine lui convenait parfaitement – mais elle devait admettre qu'elle les enviait un peu, Wallace, Mac, et même son père, avec leurs maris, femmes et enfants. Ça lui pesait parfois de rentrer chez elle et de n'y retrouver que le silence et la solitude.

Étrangement, c'est dans ces moments là que Veronica se mettait à penser à Logan. Était-il marié ? Avait-il des enfants ? Après leur désastreuse entrevue à New York il y a dix ans, elle avait mis un point d'honneur à ne pas chercher à savoir ce qu'il devenait. C'était elle qui lui avait demandé de sortir de sa vie, après tout, et il avait été très clair sur le fait qu'il ne voulait plus la voir. Alors qu'il aurait été dans son tempérament de suivre son parcours à la trace, elle avait délibérément choisi de laisser le dossier Logan Echolls soigneusement clôt. Parce que Logan, c'était une vieille blessure qui ne s'était jamais complètement refermée, des pensées qui commençaient un peu trop souvent par un 'et si… ?'.

Il lui avait fallu du temps et pas mal d'aide pour comprendre qu'elle était souvent l'artisan de ses propres déceptions. A trop demander aux autres, à refuser de les laisser entrer complètement dans savie, ils finissaient forcément par la décevoir ou par s'en aller. Logan en avait été le parfait exemple. Même s'il était en partie responsable de l'échec de leur couple, elle avait enfin admis que son attitude y avait été pour beaucoup. Et cette réalisation avait été particulièrement pénible… et douloureuse. C'était peut-être pour ça qu'elle sortait toujours avec des hommes qui étaient aussi différents de lui que possible… Peur de s'attacher autant ? Peur de souffrir autant ? Et pendant ce temps, ses amis faisaient leurs vies et elle restait seule…

Mac la regardait d'un air inquiet, ne sachant que trop bien ce à quoi elle pensait. Ils avaient tous eu peur lorsque Veronica était tombée malade quelques semaines plus tôt. Elle travaillait beaucoup, voire trop, et en un sens, cet avertissement avait été le bienvenu, il l'avait obligé à lever le pied. Mais même si physiquement, elle allait bien, Mac continuait à se faire du souci. Elle savait que l'annonce de sa grossesse avait été un choc pour Veronica, la renvoyant plus durement encore à son célibat. Ce n'était pas par faute de rencontrer du monde, pourtant. Veronica était jolie, intelligente et drôle, mais dès que les choses devenaient un peu trop sérieuses, ses petits amis finissaient par l'agacer – trop collants ou pas assez quelque chose – et elle prenait ses distances.

Mac se demandait si Veronica réalisait qu'à chaque fois qu'elle lui parlait de l'homme de ses rêves, sa description correspondait en tout point à un certain jeune homme dont le nom était tabou depuis dix ans… Wallace et elle n'avaient jamais été les meilleurs amis de Logan, loin de là. Wallace n'avait jamais complètement réussi à avaler le passage à tabac de Piz en première année de fac, quant à Mac, il l'avait toujours mise assez mal à l'aise – trop sarcastique, trop snob à sa façon, avec des fréquentations quelque peu douteuses – mais s'il y avait une chose qu'ils lui reconnaissaient tous les deux, c'était que le jeune homme était amoureux fou de Veronica. Ils avaient même envisagé d'essayer de le retrouver à une époque, essayer de renouer le contact dans l'espoir de faire réagir leur amie, mais ils avaient vite laissé tomber l'idée. A quoi bon ? C'était loin, tout ça…

- Veronica ? demanda Mac entre deux bouchées. Tout va bien ?

Son amie acquiesça.

- Ça va. Je réfléchissais à la suite des évènements, mentit-elle.

Mac fit la moue, pas dupe, mais ne releva pas.

- Qu'est-ce que tu as l'intention de faire ? se contenta-t-elle de demander.
- Et bien, j'ai passé la matinée à interroger les amies de Krista et j'ai fait chou blanc. Idem avec son téléphone portable, elle ne l'a pas utilisé depuis une semaine. Je suppose qu'elle en a acheté un prépayé. Cette gamine a l'air plutôt maligne…

Mac leva les yeux au ciel.

- Fuguer parce qu'on découvre que son père n'est pas son père, tu trouves ça malin ? Je dois être sacrément stupide pour être restée chez moi alors que mes DEUX parents ne sont pas mes parents…

Veronica sourit.

- Elle a retiré dix mille dollars avec sa carte bleue à Neptune le 4 janvier, reprit-elle. Elle sait que, quand on part seule à l'aventure, on ne part pas les mains vides. Mais depuis, aucun mouvement bancaire.
- Donc, la piste s'arrête là ?
- J'essayerai l'aéroport et la gare routière plus tard, elle a forcément utilisé l'un ou l'autre – je préfère ne pas envisager l'alternative de l'auto-stop pour le moment. Mais d'abord, le petit ami, c'est le prochain arrêt sur ma liste. D'après la mère de Krista, ils se sont disputés au sujet de son père biologique, il doit forcément être au courant de quelque chose.

Elle pianota sur son propre ordinateur le temps de trouver l'adresse.

- Sheila Morgan, 44 ans, divorcée, 5633 Parklane Street. Deux enfants – Billy, né en 1999, et Kathryn, née en 2003. Il y a neuf chances sur dix pour que Billy soit sur le campus, mais c'est à mi-chemin de Hearst, je vais commencer par là, on ne sait jamais.

A cet instant, la porte de Mars Investigations s'ouvrit et une fillette en salopette rouge fit irruption dans la pièce.

- Veronica !

La jeune détective l'attrapa au vol alors qu'elle se jetait dans ses bras en souriant.

- Hayley ! Tu m'as manqué, ma puce !

Keith entra à son tour, hors d'haleine, et salua Mac. Veronica l'accueillit d'un air faussement réprobateur.

- Vous avez encore fait la course dans les escaliers ? dit-elle en secouant la tête. Papa… Tu sais que ce n'est pas raisonnable avec ton cœur…
- Je suis assez grand pour prendre soin de moi, Veronica, c'est moi, le père, tu te souviens ?

Sa fille se pencha et récupéra la pile de message posée sur son bureau. Elle les tendit à Keith qui commença à les examiner.

- Le premier est urgent, fit-elle remarquer.

Keith fronça les sourcils d'un air contrarié.

- C'est toujours urgent quand ça vient de nos amis de la haute société…

Il soupira.

- Bien, je m'occuperai de ça quand j'aurai déposé Hayley à l'école.
- Je peux le faire, si tu veux, dit Veronica. Je dois sortir et c'est sur mon chemin.
- Je ne sais pas si…
- Oh, oui, papa, s'il te plaît, s'il te plaît, s'il te plaît ! scanda Hayley. Veronica a une décapotable, ELLE !

Le regard de Keith se posa sur la fillette et Veronica sut que c'était dans la poche. Il n'avait jamais rien pu refuser à ses filles, alors comment le pourrait-il lorsqu'elles se liguaient toutes les deux contre lui ? Elle échangea avec Mac un regard amusé. Avec son teint couleur caramel et ses yeux verts, Hayley était la petite princesse de la famille. Lorsqu'Alicia était tombée enceinte quelques semaines seulement après avoir épousé Keith, ça avait été une surprise pour tout le monde, surtout pour l'intéressée qui n'aurait jamais imaginé avoir un autre enfant passé quarante ans.

Mais ça avait été une bonne surprise, en fin de compte. Hayley était le trait d'union entre tous les membres des familles Mars et Fennell, ce qui la rendait encore plus précieuse à leurs yeux. Vive, drôle et intelligente, Veronica l'adorait et essayait de passer le plus de temps possible en sa compagnie. Elle qui avait toujours apprécié son statut de fille unique avait savouré la moindre minute passée au sein de cette fratrie que Darnell, Hayley, Wallace et elle étaient devenus après le mariage de leur parents.

- Bien, dit finalement Keith. Mais dans ce cas, il faut vous partiez tout de suite ou vous allez être en retard.

Avec un hochement de tête, Veronica glissa son ordinateur dans son sac et se tourna vers Mac.

- Je te dépose ?
- Non, je vais marcher. J'en profite tant que je peux encore voir mes pieds ! plaisanta-t-elle en se levant.
- Si tu veux finir le chinois, papa, ne te gène pas, dit Veronica. Je risque d'en avoir pour un moment.

Keith se pencha vers les différentes boites en carton posées sur le bureau – une en particulier – et prit soudain un air très intéressé. Veronica la lui subtilisa sous le nez.

- Pas celle-là, c'est beaucoup trop gras, le réprimanda-t-elle.

Son père soupira d'un air de martyr.

- Au secours, je suis un père brimé.
- C'est parce qu'on t'aime, dit Veronica avec malice.
- C'est parce qu'on t'aime beeaauucoup, renchérit Hayley en lui tendant les bras.

Keith se baissa et laissa sa fille lui planter un bisou sur la joue, avant qu'elle ne glisse sa main dans celle de Veronica et que les deux ne s'en aillent. Mac eut un sourire amusé.

- Vous réalisez qu'elles vous mènent par le bout du nez, pas vrai ? lui fit-elle remarquer.
- Ouste ! la chassa Keith avec un sourire moqueur.

Mac récupéra son sac et emboîta le pas aux deux sœurs. Quelques minutes plus tard, après avoir déposé Hayley à l'école, Veronica prenait la direction des quartiers sud de la ville. Elle tourna quelques minutes avant de trouver Parklane Street et finit par se garer devant une jolie maison, petite, mais bien entretenue. Lorsqu'elle frappa à la porte, elle fut accueillie par une femme dans la quarantaine qu'elle supposa être Sheila Morgan.

- Madame Morgan ? demanda-t-elle. Sheila Morgan ?

La femme acquiesça.

- Bonjour, je suis Veronica Mars, la salua la jeune détective en montrant sa plaque. J'ai été engagé par Monsieur et Madame Kingsley pour enquêter sur la disparition de leur fille.
- Krista a disparu ? s'étonna Madame Morgan.

Veronica fronça les sourcils.

- Votre fils ne vous en a pas parlé ?

La femme se rembrunit.

- Je n'ai pas beaucoup vu mon fils ces derniers temps, lui apprit-elle. Il passe la majorité de son temps sur le campus ou bien à traîner je ne sais où…
- Je ne sais où… ? dit Veronica, l'incitant à lui en dire plus.

Madame Morgan hésita.

- J'ai l'impression qu'il s'est mis à fréquenter des gens pas très recommandables…, finit-elle par dire. Je l'ai vu rentrer plusieurs fois avec des bleus. Depuis quelques semaines, il ne revient à la maison que très rarement et, quand il daigne se montrer, il ne me parle pas beaucoup. J'ai dû rencontrer Krista deux ou trois fois, c'est tout.
- J'en déduis qu'il n'est pas chez vous aujourd'hui…
- Non. Je vous l'ai dit, vous devriez essayer sur le campus.
- Entendu, dit Veronica. Merci et excusez-moi de vous avoir dérangée.

En regagnant sa voiture, la jeune détective songea à Helen Kingsley qui se réjouissait que sa fille ait trouvé un garçon ayant 'la tête sur les épaules'. Elle eut un sourire désabusé. Comme il était facile de se tromper sur les gens… Maintenant, il ne lui restait plus qu'à dégotter Billy Morgan, couvert de bleus ou non.


Neptune, 2007

Lorsque Logan entendit sa voix dans l'entrée, il se prépara mentalement à l'affrontement. Après Parker, Veronica… Décidément, ce n'était vraiment pas son jour. Vu de quelle façon elle l'avait viré de Mars Investigations la veille, il ne se faisait pas trop d'illusions sur son état d'esprit… Et comme il s'y attendait, elle entra dans sa chambre comme un ouragan.

- Il a du mal à respirer à cause de ses côtes, annonça-t-elle d'une voix rageuse. Il a cinq points de suture à l'arcade sourcilière !
- Seulement cinq ? railla Logan.
- Tu es cinglé.

Et à cet instant, elle le pensait vraiment. Pour qui se prenait-il pour jouer les justiciers de cette façon ? Ils ne sortaient plus ensemble. Il avait été le premier à tourner la page avec Parker, comment osait-il porter un jugement sur Piz alors qu'il était le moins irréprochable des deux ? Se filmer en train de coucher avec sa copine à son insu, c'était un truc que lui ferait, pas Piz.

Elle fit taire la petite voix dans sa tête qui lui disait que c'était faux, que son arrogance et son mépris n'étaient que la façon qu'avait Logan de cacher ses émotions. Ses blessures. Elle avait tellement voulu croire qu'il avait changé… Et au lieu de ça, il l'avait trompée avec Madison. Peu importe qu'ils aient été séparés ou non, Logan Echolls était savait toujours comment la blesser comme personne… Ça n'arriverait pas avec Piz.

- Tu ne savais pas qu'il vous filmait ! explosa Logan.
- Parce qu'il ne l'a pas fait !
- Oh, je t'en prie, Veronica ! Qui d'autre aurait pu ou aurait voulu faire ça ?
- Voilà ce que je sais – ce n'était pas Piz et ce ne sont pas tes affaires !
- On n'essayait pas de rester amis ? objecta-t-il. En tant qu'ami, j'étais en colère pour ce qui t'arrivait. Quelqu'un est sensé payer pour ça, ce n'est pas une de nos règles ?

Qu'est-ce qui lui prenait de faire preuve d'une confiance aussi… aveugle envers Piz ? Veronica Mars ne faisait confiance à personne, Veronica Mars était rancunière, Veronica Mars rendait coup pour coup, Veronica Mars n'était certainement pas conciliante. Ils étaient fait du même bois, tous les deux, ils ne se laissaient pas marcher sur les pieds. Comment pouvait-elle…

- On a essayé d'être amis, ça n'a pas marché, trancha Veronica, un air déterminé sur le visage. C'est à cet instant précis, Logan, là, tout de suite, où c'est tout simplement terminé.

Elle inspira profondément.

- Tu ne fais plus partie de ma vie. Définitivement.

Il la regarda refermer les portes de la suite dans un brouillard, comme assommé. Elle n'avait pas dit ça, c'était impossible… Même elle ne pouvait se montrer aussi cruelle. Comment, après tout ce temps, ne pouvait-elle pas avoir compris à quel point il avait besoin d'elle ? Comment, après tout ce qui s'était passé entre eux, pouvait-elle le rayer de sa vie sans le moindre état d'âme ?

Il resta debout un long moment, avant de s'asseoir lentement sur son lit, la réalité le frappant comme un coup de poing. Il réalisa avec lucidité qu'ils avaient atteint aujourd'hui le point de non retour. Mais pour la première fois de sa vie, il n'avait pas envie de boire ou de déprimer. Il voulait que ça s'arrête, la peine, la culpabilité. Il voulait arrêter d'étouffer, apprendre à vivre sans que le passé ne pèse sur lui comme une chape de plomb. Et il ne pourrait pas le faire ici, avec Veronica Mars regardant constamment par-dessus son épaule.

Alors, il allait partir et laisser Neptune derrière lui une bonne fois pour toutes.

TBC...