Le jour après la fin du monde


Disclaimer: La saga Twilight appartient à Stephenie Meyer.


Me revoilà pour ma 4e fic. Vous y trouverez du surnaturel, des vampires et des loups ainsi que nos couples habituels.

J'attends vos premières impressions avec impatience.


(BPOV)

Mais quand cela cessera-t-il ! pestais-je mentalement depuis plusieurs minutes alors que j'accélérai encore mes foulées pour mettre de la distance avec mon ennemi. J'avais pourtant réussi à trouver une bonne planque cette fois puisqu'ils m'avaient laissée tranquille pendant un siècle…

J'avais dû quitter en quelques secondes ma cabane perdue au fond du grand nord canadien, flirtant avec les caribous et les grands aigles.

J'en avais assez de cette perpétuelle fuite...

Ma dernière rencontre avec l'un des leurs remontait à plus d'un siècle, alors que je m'étais réfugiée dans l'une des régions désertiques de Patagonie, à plus de 500km de toute habitation. J'avais senti la présence de ce traqueur arrivant de l'est alors que je rentrais d'une chasse. Je n'avais eu le temps que d'attraper mon long manteau à capuche noir, posé sur mon lit de fortune et m'étais mise à courir vers l'ouest à travers les collines. Je devais prendre suffisamment d'avancer pour tendre convenablement mon piège.

Çà avait fonctionné à chaque fois.

A chaque fois, cela se terminait par le bûcher dans lequel disparaissait celui qui m'avait traquée. Alors, j'étais plutôt confiante. Il me suffisait seulement de trouver le bon endroit.

Plusieurs kilomètres plus loin, je m'immobilisai, guettant le moindre indice qui m'alerterait sur un éventuel danger et commençai à tracer les cercles rituels. Puis, je m'étais camouflée, utilisant mes pouvoirs pour masquer mon odeur et activer mon bouclier. Le traqueur était apparu le lendemain à l'aube et s'était fait prendre à mon jeu : il s'était arrêté au beau milieu de mon pentagramme pour renifler le leurre que j'y avais déposé. J'avais alors déplacé mon champ de force, l'immobilisant telle une vulgaire mouche dans une toile d'araignée et m'étais approchée de lui. Et je l'avais tué.

Enfin… Tuer est un bien grand mot puisqu'il était déjà mort depuis des années. Mais je l'avais effacé de la surface de la planète.

Un vampire de moins.

J'avais espéré que le Trium Vira comprendrait qu'il ne m'aurait jamais auprès de lui, ne voyant jamais revenir les traqueurs qu'ils envoyaient à mes trousses. Mais il semblait tout aussi tétu que moi.

Jamais je n'irai là-bas.

Tout du moins, pas sans un pouvoir entier.

Après cet « incident », j'avais alors quitté les confins de l'Amérique du sud pour gagner les contrées glacées du nord, trouvant une cabane abandonnée dans les territoires du nord ouest canadien. En chemin, j'avais dû me faire des plus discrètes lorsque j'entrepris de traverser la région de l'actuelle frontière mexicaine. Aux abords du Texas, des clans de vampires avaient déclenché une guerre pour s'approprier la région et les humains qui la peuplaient, profitant, sans éveiller l'attention du Trium Vira, du tumulte de la guerre de Sécession qui prenait quantité de vies humaines.

J'observais de loin ces carnages, entre humains, entre vampires, et n'intervenais pas.

Depuis l'Italie, j'avais décidé de ne plus intervenir, dégoutée par le comportement des humains et leurs soifs de pouvoir et de richesse qui les faisaient pactiser avec les maîtres-vampires, qui, bien entendu, ne les utilisaient qu'en « en-cas »…

A mes yeux, depuis l'Italie, la bêtise régnait sur la planète alors que les représentants de mon peuple mourraient les uns après les autres pour défendre la liberté des humains face aux vampires.

Ce temps où je vivais encore avec Charlie, voilà plus de 400 ans...

A cette époque, nous avions fuit l'Europe et avions gagné le « Nouveau Monde », l'arpentant du nord au sud pendant des décennies, demeurant ensemble. Rien que nous deux. Nous, les deux derniers nécromanciens. Enfin, surtout Charlie...

En quittant l'Italie, nous avions tout perdu. Nos cités. Nos derniers compagnons. Nos alliés.

Les nécromanciens avaient une capacité à « trouver » leurs alliés. Si nous croisions une personne digne de nous approcher, nous le ressentions au plus profond de nos entrailles. Ainsi, l'un comme l'autre pouvait compter sur une fidélité éternelle, le lien établi ne pouvant être renié car devenant « physique ». Tout du moins pour ceux de mon peuple. L'expression humaine « à la vie, à la mort » correspondait superbement à cette particularité nécromancienne. Si l'un de vos liens était blessé, vous ressentiez ses douleurs physiques comme morales. J'avais pu voir ces « manifestations » plusieurs fois sur les champs de bataille transalpins.

Lorsque vous naissiez nécromancien, vous étiez déjà reliés à vos parents. Ensuite venait le long apprentissage avec votre maître durant lequel, au fil des rencontres, vous créiez vous-même les liens avec d'autres, par un simple geste alors que le pouvoir éclatait en vous et « inscrivait » au plus profond de vos entrailles toutes les informations échangées durant le contact. Nous étions prêts à mourir les uns pour les autres, sans demander notre reste. Et de toute façon, nous n'avions pas le choix. Si l'un de vos alliés mourrait, toutes ses douleurs vous terrassaient instantanément, ce qui permettait alors à l'ennemi de vous abattre le plus facilement du monde puisque vous ne pouviez plus vous défendre.

Un lien ne pouvait être défait, sauf chez nos grands maîtres qui détenaient le pouvoir nécessaire. Sur les champs de bataille, ils déliaient leurs alliances afin de préserver les vies de leurs alliés, mais également les leurs.

Le plus souvent, les liens s'établissaient avec d'autres nécromanciens ou d'autres magiciens de différents peuples. Mais il arrivait parfois, selon votre rang dans la hiérarchie et dans le peuple, que des liens plus inhabituels s'établissent : avec des vampires, pourtant nos ennemis héréditaires (ce qui vous plaçait au rang de dissident si ce lien était connu d'autres nécromanciens), ou encore avec des enfants de la Lune, qui, une fois le lien établi, devenaient vos serviteurs. Souvent, au fil des décennies, ce serviteur devenait le conseiller stratégique, ce peuple étant, comme le nôtre, rompu aux combats. Ainsi, à la Cour, il n'était pas rare de croiser un enfant de la Lune, assis autour de la table des commandants, discutant tactiques et combats.

Charlie, lorsque nous étions en Europe parmi les nôtres, était lié à deux enfants de la Lune mais il avait brisé les liens lorsque nous avions fuit, ne voulant pas les mettre en danger. Ils étaient alors repartis vers les régions du nord de l'Europe, n'ayant plus à combattre auprès des nôtres.

Autre particularité nécromancienne : le pouvoir n'était jamais perdu. Lorsqu'un nécromancien mourrait sans avoir accompli le dernier rituel, son pouvoir se partageait entre ceux de son rang et les maitres. Mon maître était le dernier maître-nécromancien, devenant le dernier héritier de tous les pouvoirs de notre peuple, totalement décimé lors des dernières guerres lancées par le Trium Vira italien qui nous avait finalement vaincus…

Charlie avait fuit l'Italie en m'emmenant avec lui. Non par lâcheté, mais par espoir. J'étais son espoir de voir revenir un jour un être qui pourrait prendre le dessus sur les trois seigneurs et rétablir l'équilibre et la paix. Car je n'étais pas une nécromancienne comme les autres...

Je manipulais les pouvoirs des nécromanciens mais mon maître ne m'estimait pas encore assez forte pour accomplir le dernier rituel. Et il fallait dire qu'il avait raison. A l'époque, je ne canalisais pas aussi bien mon autre facette… Désormais, alors que je maîtrisais parfaitement les deux aspects qui composaient ma nature, Charlie n'était plus là…

Il y a un peu plus de 250 ans, le Trium Vira nous avait retrouvés… et avait envoyé un traqueur. Nous nous étions séparés dans le but de le détruire. Au bout de cinq jours, comme convenu, j'étais revenue à notre abri. Charlie n'y était pas. J'ai attendu deux semaines supplémentaires. Plus de traces du traqueur. Plus de traces de mon maître. Il avait fallu que je me rende à l'évidence même si mon instinct me criait le contraire : mon maître avait disparu. Et je m'étais alors retrouvée coincée seule ici, sans avoir pu recevoir les pouvoirs de mon peuple, désormais totalement perdus.

Je ne pourrais jamais remplir ma mission.

Alors, j'avais décidé de gagner le nord du continent. Une nuit, en traversant le Texas, ma route avait croisé celle d'un vampire, à la solde d'une chef de clan, Maria, qui levait une gigantesque armée de nouveau-nés pour prendre le contrôle de la région. Elle l'appelait « major Whitlock ». Alors que je les observais depuis de nombreuses heures, dissimulée par mon bouclier, il s'était approché. J'avais vu dans ce vampire une répulsion de plus en plus grandissante envers sa mission. Malgré la couleur de ses yeux, je sentais qu'il pouvait changer. Il ne lui fallait qu'un petit « coup de pouce ».

Mue par je ne sais quelle force, je fondis sur lui alors qu'il était seul et l'immobilisai dans mon bouclier. Je fis ce que je n'avais jamais osé faire depuis la disparition de Charlie : je déposai ma main nue sur sa joue.

A ce contact, son regard haineux se transforma.

A ce contact, je sus qu'il changerait et que mon destin se retrouvait désormais lié au sien.

Mais je ne pouvais accepter ce lien « contre-nature ». Au plus profond de moi, même si mon peuple avait disparu, je craignais toujours la déchéance qui m'aurait été réservée. Alors, je caressai sa joue doucement, profitant de ce toucher tiède et doux, plantant mes yeux dorés dans ses pupilles rubis et lui murmurai :

-Un jour, tu trouveras la force de renier cette vie. J'ai confiance en toi. On se retrouvera, frère.

Je regardai une dernière fois les traits parfaits de son visage qui hanterait désormais mes pensées jusqu'à la fin de mes jours, traçai le contour de sa mâchoire du bout des doigts et m'éloignai. Ce geste me donna l'impression que l'on m'arrachait le cœur, comme lors de la perte de mon maître, mais je continuai sans me retourner, retombant dans ma solitude séculaire.

Cette nuit-là, courant au beau milieu des grandes plaines texanes sans me retourner, j'avais enfin compris que l'espoir qu'avait placé Charlie en moi n'avait pas été uniquement la lubie désespérée du dernier seigneur d'une race si puissante. Il avait touché du doigt le renouveau. J'avais les prémices de ce pouvoir en moi, de ce contrôle. Mais malheureusement, tout s'arrêtait là.

Jamais je n'accomplirai ma mission.

Après cette révélation violente, j'errais de nouveau d'état en état, progressant vers le nord, laissant les saisons s'écouler sans y prendre part, en proie à un profond désespoir.

Seule éternellement.

N'ayant pu sauver mon peuple, je me pensais damnée…

J'avais traversé la frontière canadienne, toujours poursuivie par mon assaillant, mais comme pour le dernier traqueur, j'avais pris de l'avance. Je me retrouvais à l'attendre, au beau milieu d'une clairière perdue dans l'épais massif d'Olympic. J'y avais installé mon piège et attendais. Un bruit de course se fit rapidement entendre, mais quelque chose différait. Ce n'était pas le bruit d'une mais de deux courses…

Deux vampires surgirent dans la clairière. Un couple. Un homme plutôt grand, mince, blond, accompagnée d'une femme, plus petite, les cheveux virant sur une teinte caramel, un visage tendre en forme de coeur. J'aurais dû me réjouir de prendre au piège plusieurs vampires mais ce qui m'arracha un hoquet de stupeur fut le moment où je remarquai la couleur de leurs yeux : dorés ! Comme les miens lorsque je laissais ma nature vampirique reprendre le dessus…

Je ne pouvais pas les blesser !

A cet instant, tout alla rapidement. Ils étaient maintenant pris au piège de ma magie et la course du traqueur se faisait entendre dans le lointain. Il n'hésiterait pas à les tuer, profitant d'une cible si facile.

Je rompis mon bouclier et me précipitai vers eux, comptant sur les quelques secondes qui me séparaient de l'arrivée de mon réel ennemi. Je tendis les mains et les touchai pour les libérer.

-Vous ne craignez rien de moi. Partez ! chuchotai-je alors que je lâchai leurs mains.

-Qui es-tu ? demanda l'homme, inquiet mais non apeuré.

Mais je n'eus pas le temps de poursuivre la conversation, interrompu par une autre course. Je me tournai instantanément pour faire face à mon ennemi.

Le vampire qui était apparu m'avait fait froid dans le dos : grand, massif, les muscles camouflés par un grand manteau gris. Un garde royal ! Ils m'avaient envoyé un garde royal cette fois !

Le Trium Vira ne voulait plus jouer avec moi.

Je devais impérativement réactiver mon bouclier et je ne pouvais le faire alors que le couple était si proche de moi. Ils aurait été détruits par mon pouvoir.

-Éloignez-vous, je ne veux pas vous blesser. leur murmurai-je.

-Hé bien, Isabella ! Tu t'es alliée aux Cullen ! Je devrais donc les tuer également ! cria-t-il depuis l'autre côté de la clairière.

Il les connaissait et je les avais mis en danger

Je ne leur laissai pas le temps de répondre au vampire italien.

-Partez, et oubliez-moi ! Je protège votre retraite! les suppliai-je d'un murmure.

Je ne sais si ma supplication réussit à les émouvoir ou si la peur face à l'autre vampire agit, mais ils m'obéirent et partirent rapidement sous le couvert des arbres alors que je replaçai rapidement mon piège, l'étendant au maximum.

-Je les rattraperai plus tard. Je sais où vivent ces dégénérés. Pour le moment, je vais m'occuper de toi, Isabella. Tu vaux beaucoup plus aux yeux de mes maîtres ! intervint le traqueur en s'approchant.

Encore quelques pas et il pénétrera le cercle…Je reculai doucement, l'incitant à avancer pour réduire l'écart.

Comme les autres, il passa la ligne et je projetai mon bouclier sur lui. Mais un sourire carnassier traversa son visage à cet instant-là. Alors que je le pensais immobilisé, il releva la tête et planta son regard directement dans le mien.

-Mes maîtres en ont assez de t'attendre, Isabella ! Les autres ont échoué mais je ne rentrerai pas vaincu, foi de Félix ! ricana-t-il tout en faisant un pas sur le côté.

Il avait brisé mon bouclier ! Comment avait-il pu réussir cela ?

Je sentis un frisson violent parcourir mon dos, alors que la peur s'insinuait en moi à une vitesse fulgurante. Il ne me restait qu'une solution : un combat au corps à corps. Je n'en avais pas eu l'occasion depuis des siècles. Je pestai contre mon pouvoir trop limité, m'obligeant à laisser le monstre en moi refaire surface. Mais de cette manière, nous étions à égalité. J'avais même un léger avantage. Mais je n'avais pas prévu qu'il sortirait de sa tunique un bijou, retenu à son cou par un cordon en cuir sombre...une amulette...l'amulette de ma mère !

Ainsi, il avait pu briser mon bouclier grâce à elle.

Interloquée, je ne vis pas son poing arriver et fus projetée de plusieurs dizaines de mètres vers l'arrière. Avant que je n'aie eu le temps de me relever, il avait fondu sur moi. S'en suivit un ballet des plus brutaux. J'encaissai une multitude de coups mais lui en donnais également. Je savais déjà que j'allais souffrir une fois que le venin ne circulerait plus en aussi grande quantité dans mes veines. Félix me sauta dessus. Dans l'énergie du désespoir, je me débattis et réussis à me libérer. Quantités d'émotions se bousculaient en moi. Instinctivement, et parce que je ne connaissais que cela depuis ma naissance, je me mis à réciter mécaniquement les incantations que mon maitre m'avait apprise. Sombrant dans une semi-conscience, laissant mon corps être son propre maître, je ne repris mes esprits que quelques secondes plus tard, alors que le traqueur était à terre, sa tête à un mètre de son corps. Je tendis la main vers son torse pour lui arracher le bijou et l'enroulai autour de mon gant. J'allumai le brasier et regardai quelques secondes les flammes dans lesquelles Félix disparaissait à tout jamais. J'étais épuisée, complètement vidée de toute force.

Il fallait que je chasse pour récupérer.

Je voulus traverser la clairière mais je perçus la présence d'un vampire dans mon dos. Ou plutôt de plusieurs vampires. Je me retournai pour leur faire face. Le couple était là, rejoint par un autre couple. Mon cœur s'emballa quelque peu, ma vue se voila et je mis un genou à terre, épuisée, mais ne les lâchant pas du regard, les yeux sur lers silhouettes.

Le premier couple se détacha de la pénombre des arbres. L'homme avança doucement vers moi, les mains levées en signe de paix. Mon instinct me disait de leur faire confiance alors je laissai tomber mon bouclier, économisant ainsi mes forces, et le venin vampirique galopa de nouveau dans mes veines, commençant à soigner les dégats du combat.

-N'aie crainte. dit l'homme en s'approchant un peu plus de moi.

Je me relevai difficilement mais une fois debout, je tendis la main pour le stopper. Il obéit et se figea à quelques mètres de moi.

-Je suis Carlisle Cullen et voici mon épouse, Esmée.

J'inclinai la tête, silencieusement pour les saluer.

-Tu pourrais au moins te présenter ! grogna la vampire blonde qui avait rejoint le couple.

-Rosalie ! l'interrompit sèchement Carlisle.

-Non Carlisle, elle doit savoir qu'elle nous condamne tous ! cria-t-elle. Tu as tué l'un des Volturi. Ils vont venir réclamer vengeance désormais ! ajouta-t-elle sur le même ton en me fixant.

Son compagnon, un immense vampire brun, aussi massif que Félix, posa une main sur son bras mais elle ne se calmait pas.

-Rosalie ! çà suffit ! dit de nouveau durement Carlisle, ce qui fit taire la blonde qui recula de quelques pas.

Ainsi, il était le seigneur du clan.

Je m'inclinai devant Carlisle, remplissant mon devoir envers ce qu'il représentait, même s'il était l'un de nos ennemis héréditaires. Toute ma vie, j'avais obéi au protocole, cher à nos hauts dignitaires. Et je ne connaissais que cela depuis plus de 400 ans.

-Seigneur, je vous prie d'excuser mon comportement mais je ne pouvais le laisser vous tuer à ma place et par ma faute.

-Comment t'appelles-tu ? me dit-il plus doucement.

-Isabella. répondis-je, levant doucement les yeux vers lui.

-Tu te bats plutôt bien. me complimenta-t-il.

Il souriait. Esmée l'avait rejoint, souriante elle aussi.

Un bruit de course se fit entendre. Je réinstallai immédiatement mon bouclier, englobant Carlisle et Esmée dans ma protection, me plantant aux côtés des vampires.

-Que fais-tu ? demanda celui-ci.

-Je vous protège. murmurai-je tout en fixant la lisière ouest que trois vampires franchissaient.

-Tu n'en as pas besoin. Ils sont avec nous. indiqua Carlisle alors que les nouveaux arrivés avaient rejoint Rosalie et son compagnon.

Je les libérai de ma protection, reculant de quelques pas.

-Isabella. appela-t-il pour que je le regarde. Ces symboles sur ton armure…je ne pensais jamais les revoir un jour…murmura-t-il pour lui.

Malgré son rang et le mien, je plantai mon regard dans le sien, cherchant à me rassurer encore un peu plus sur la confiance que j'avais instantanément ressentie pour ce couple.

-Oui, seigneur. La dernière représentante. répondis-je en ôtant ma capuche, laissant voir pleinement mes pupilles dorées et ma peau porcelaine.

Tout comme eux.

Un mouvement se fit entendre, m'obligeant à détourner le regard vers la source.

Il était là ! Parmi les cinq autres vampires, il était là ! Son regard changea lorsque nos pupilles s'accrochèrent. Il m'avait reconnu !

-Frère, je t'ai retrouvé…murmurai-je, pour moi, levant légèrement la main vers lui avant de retenir mon geste.

Submergée par les fortes émotions qui traversaient mon corps, je ne pouvais me résoudre à détourner le regard. La solitude, la peur, la mélancolie, la frustration, la colère…tout ce qui était enfoui en moi au plus profond…tout ce que je m'étais attelée à « domestiquer » afin de continuer à avancer, tout cela resurgit d'un coup.

Là, au beau milieu de la clairière, les images de mon passé dansaient devant mes yeux.

Plongée dans mes ténèbres personnelles, je n'avais pas décelé l'agitation autour de moi. Des cris me ramenèrent au moment présent. Devant moi, mon « frère » et l'un de ses compagnons semblaient comme figés, des traits de douleur sur leurs visages. Que s'était-il passé ? Un vampire trainait-il dans les parages ?

A cette question muette, je compris ce qui n'allait pas. Prise dans mes sentiments, j'avais laissé tomber mon bouclier mental. J'avais baissé ma garde. Et à en croire leurs visages, ces vampires, avec leurs pouvoirs psychiques, avaient eu accès à mon esprit. Ou du moins à une part infime. Jamais ils ne pourraient pénétrer totalement mon psychisme sans que je les y autorise sciemment. Mais ils avaient tout de même pu effleurer mes pensées et mes sentiments. Et ils en souffraient. Je réinstallai instantanément mon bouclier de protection, les délivrant de leurs tourments par la même occasion.

-Que leur as-tu fait ? hurla Rosalie, furieuse en se plantant devant moi

Mais elle s'approcha trop près et heurta mon bouclier, ce qui la fit reculer de quelques mètres.

-Je…je…je suis…désolée…major Whitlock...seigneur...je ne voulais pas…je…bégayai-je en reculant sans lâcher du regard le clan.

Quand j'eus mis une dizaine de mètres entre nous, je me détournai rapidement et me mis à courir pour fuir la clairière. Derrière moi, les discussions étaient vives.

Jamais je ne m'étais excusée auprès de vampires. Jamais je n'avais fui sans une optique de combat dans un futur très proche.

Jamais.

Une voix résonna cependant dans la clairière.

-Isabella, reste.

Sans jamais l'avoir entendu s'adresser directement à moi, j'avais « reconnu » son timbre si parfait qui immobilisa mes jambes. Je me retournai lentement pour lui faire face, lui au centre de la clairière avec les siens, moi seule à un mètre du couvert de la forêt. Sans bouger, il répéta sa phrase. Des larmes réapparurent dans mes yeux secs depuis si longtemps.

-Je…je ne peux pas…je suis désolée…soufflai-je, consciente qu'il m'entendrait.

-Isabella, reste, s'il te plait. répéta-t-il encore et encore, avec son léger accent du sud.

-Non…je…je suis votre ennemie... Je…suis maudite…bredouillai-je.

Le retrouver m'avait bouleversée. Les côtoyer quelques minutes m'avait prouvé, une fois de plus, que je ne pouvais prétendre à vivre en communauté. J'étais tout simplement vouée à vivre éternellement dans la solitude la plus extrême, ayant perdu toute habitude du contact après la disparition de Charlie. Et ce, malgré le don de mon peuple à lier des liens éternels, comme je l'avais fait avec mon « frère » il y a plus d'un siècle.

Tout était perdu. Tout était ma faute.

-Oubliez-moi, c'est mieux pour vous…lâchai-je.

Oui, ils devaient m'oublier. Mais aucun pouvoir ne pouvait effacer mon passage de leurs souvenirs. Et je savais que les Italiens utiliseraient cela pour les tuer.

Je devrais les défendre.

-Ne craignez pas le Trium Vira, je suis leur cible. Je ne leur laisserai pas vous faire du mal. dis-je un peu plus fort, tout en reculant.

Sans les lâcher des yeux, je replaçai ma capuche, refermai mon long manteau, réajustai mon bouclier et disparus dans la forêt, ne murmurant qu'un simple « adieu frère », ma voix étranglée par les larmes.