Grégory Lestrade tournait en rond dans son bureau depuis plus d'une demie-heure. Il savait qu'il devait le faire... mais il n'en avait absolument pas envie. Et le sms qu'il reçut sur son portable personnel ne l'encouragea en rien.

Quand allez-vous vous décider à venir me demander de l'aide ?

SH.

Grégory plissa les yeux en pensant très fort à un « jamais ! » assez puéril. C'était lui, l'inspecteur, il était en mesure de résoudre une affaire par ses propres moyens, tout de même !

Il retourna à son bureau, ouvrit le dossier et l'examina pour la troisième fois de la journée. Il avait dû laisser passer quelque chose, un indice important qui les ferait avancer...

Toutes les victimes étaient des jeunes femmes, entre 20 et 26 ans, aux cheveux blonds. Elles avaient toutes été retrouvées dans des endroits peu fréquentés et même si le mode opératoire changeait de l'une à l'autre, on penchait pour la thèse du tueur en série, principalement à cause du pétale de fleur -de rose jaune, pour être pointilleux- à chaque fois glissé derrière leur oreille droite. Une sorte de signature propre à ce criminel-là, sans doute.

Pas de lettres de menaces envoyées aux victimes avant le meurtre, pas de vol de bijoux ou de sac à main, pas de signe de viol... rien qui puisse indiquer un mobile, à par le fait que c'étaient des femmes blondes -un tueur misogyne ? Il ne voyait que ça.

« Bon sang, soupira Grégory, Londres devient fou... »

La porte de son bureau s'ouvrit en grand sur le sergent Donovan, l'air affolé.

« Inspecteur... un nouveau cadavre vient d'être découvert. Encore une femme blonde dans la vingtaine.

_ J'arrive sergent. »

Lestrade et Donovan montèrent dans la voiture de service, Lestrade côté passager car il avait des coups de fil à passer.

Tandis que Sally conduisait habilement jusqu'à la scène du crime, Grégory fouilla dans ses textos. Il afficha celui que Sherlock lui avait envoyé, appuya sur la touche supprimer et vit s'afficher l'habituel demande de confirmation. Il hésita. Il en avait marre de recevoir des textos du détective alors qu'il changeait de numéro tous les mois autant effacer celui-là et ce concentrer sur l'affaire en cours. Mais d'un autre côté, il fallait qu'il garde un œil sur Sherlock Holmes, et son aide pouvait s'avérer précieuse...

La dernière fois qu'il avait perdu la trace du consultant, quand ce dernier avait déménagé, il avait dû lui laisser un message sur son site web pour faire appel à lui ! Hors de question qu'il recommence, il ne voulait pas que toute la toile sache que Scotland Yard ramait sans son détective consultant.

Avec une injure, il annula la suppression du message et rangea son téléphone dans la poche intérieure de sa veste.

« Encore le taré ? Demanda le sergent Donovan.

Lestrade fit un effort de mémoire : taré = Sherlock Holmes.

_ Oui, c'est ça encore lui. Il me demande... quand je compte requérir son aide.

_ Vous savez bien que je ne l'aime pas et le voir sur une scène de crime encore moins.

_ Je le sais, sergent, soupira Grégory.

Personne n'aime le voir. Du moins, personne de Scotland Yard, ajouta-t-il pour lui-même.

_ Mais... Avec celui-ci, on a déjà quatre cadavres sur les bras et aucun début de piste. Il faudrait peut-être envisager de l'appeler avant que la panique ne s'empare de Londres. Jusqu'à présent, on a réussit à tenir la presse en laisse mais pour combien de temps encore ?

_ Alors vous pensez que l'on devrait... ?

_ Pas seulement moi. Toute l'équipe le pense. Mais...

_ Mais la mauvaise foi l'emporte toujours, surtout quand il est question de Sherlock Holmes.

Lestrade vit le sergent Donovan froncer le nez mais sans le contredire.

_ Très bien. Allons voir ce cadavre et si on ne trouve rien cette fois encore... je lui envoie un message.

_ Ça marche. »

Sally appuya sur l'accélérateur il ne fallait plus perdre de temps.

Au même moment, dans un autre coin de Londres, au 221B Baker Street.

Sherlock était assit sur son fauteuil, habillé de pied en cape, et regardait un show télévisé que même Madame Hudson aurait zappé depuis belle lurette.

John sortit de la cuisine avec une canette de bière pour s'installer à son ordinateur. Il l'ouvrit et en attendant qu'il daigne s'allumer, décida de faire un peu la conversation.

« L'inspecteur Lestrade n'a toujours pas appelé ?

_ Ça ne tardera pas.

_ Je vois.

Le silence reprit ses droits, seulement animé par les bruits de la télévision. John but une gorgée de sa bière avant de continuer.

_ Tu devrais arrêter ça. On ne t'a jamais dit que la télé abrutissait ? Surtout ce genre d'émissions.

_ Hum. »

Son colocataire ne semblait pas très loquace, aujourd'hui. John haussa les épaules et alla sur son blog il avait apparemment des commentaires qu'il n'avait pas encore lu. Notamment plusieurs de theimprobableone -il en était désormais certain : ce type le détestait- et un de Sherlock. À tous les coups encore une raillerie sur sa version de leurs enquêtes ou alors des plaintes. John le parcouru tout de même -peu d'espoir que ce soit un compliment, mais on pouvait s'attendre à tout. Il se tourna vers son colocataire, toujours scotché au petit écran.

« Sherlock, si tu veux que j'aille acheter du lait, tu peux me le dire ou alors coller un post-it sur le frigidaire mais me laisser un commentaire pour ça ?

_ Tu es plus souvent sur ton blog que devant le frigidaire. Et tu n'écoutes pas quand je te parle.

_ Dixit celui qui ne voit même pas quand je quitte l'appartement.

_ Je n'ai pas que ça à faire ! »

John préféra s'abstenir de surenchérir il n'avait pas envie de se disputer avec son ami maintenant, d'autant plus que ce dernier était déjà sur les nerfs : deux semaines sans aucune affaire et Lestrade qui se faisait prier pour lui demander un coup de main. Le médecin sourit.

« Un peu de patience, Sherlock, Lestrade va appeler. Il appelle toujours. »

Sur les bord de la Tamise londonienne, derrière les bandes de sécurité de la police.

Grégory s'approcha du corps, recouvert par une des bâches noires de l'équipe de la morgue. Le médecin légiste Anderson était déjà sur place et donnait ses directives pour qu'on puisse bientôt enlever le cadavre.

« Vous pensez que c'est le même tueur ? Lui demanda Lestrade en arrivant à son niveau.

_ Ça ne fait aucun doute.

Anderson lui tendit un petit sachet de pièces à convictions dans lequel on pouvait voir un pétale jaune, sans doute de rose.

_ Ce qui nous fait quatre meurtres.

_ Vous n'avez rien trouvé d'inhabituel ? Des indices sur l'assassin ?

_ Aucun, pour le moment.

_ Je vois.

Lestrade soupira.

_ Montrez-moi le corps. »

Anderson fit un signe de main et presque aussitôt, deux autres légistes retirèrent la bâche avec précautions.

La morte avait le regard livide, le teint blafard voir presque verdâtre à certains endroits. De l'eau s'échappait encore de sa bouche entrouverte aux lèvres violacée, ses cheveux blonds collaient à ses joues, à ses épaules et aux galets. Son visage avait conservé les traits ronds de l'enfance et sa robe bleue et beige renforçait l'idée de l'adolescente.

« Quel âge avait-elle ?

Anderson regarda son calepin.

_ D'après les papiers retrouvés sur elle... 21ans.

Grégory ferma les yeux. Bon sang, elle aurait presque pu être sa fille...

_ Très bien. Laissez tout ça ici.

_ Pourquoi ça ? Glapit Anderson. Il faut que je l'examine, qu'on ramène les preuves au laboratoire et qu...

_ Vous pourrez le faire, le coupa Lestrade, las des couinements du médecin légiste, mais avant je dois passer un coup de fil. »

Le BlackBerry de Sherlock sonna. Ce dernier bondit aussitôt sur ses pieds, lança à John sa veste et décrocha.

« Où ça ?

_ Sur les bords de la Tamise. Je viens de vous envoyer l'adresse exacte par texto.

_ La quatrième victime donc.

_ Oui.

_ Vous auriez dû m'appeler avant. On arrive. »

Et il raccrocha. John leva les yeux au ciel en pensant qu'à chaque fois que ce pauvre Lestrade faisait appel à Sherlock, il devait finir par déprimer avec des remarques comme ça.

« John, dépêche toi ! »cria Sherlock depuis le rez-de-chaussée.

Le médecin ferma juste son ordinateur sans prendre le temps de l'éteindre. S'il l'avait fait, son ami serait partit sans lui et il se serait retrouvé comme un idiot à ne pas savoir quoi faire dans un appartement vide. Même si le meurtre était quelque chose d'affreux, il préférait enquêter avec son colocataire plutôt que de tourner en rond comme un lion en cage.

Quand il arriva en bas, Sherlock mettait déjà les pieds dans un taxi et il lui emboîta le pas.

Il vérifia en fouillant dans les poches de sa veste qu'il avait bien son téléphone portable et un peu d'argent, au cas où il devrait rentrer par ses propres moyens. C'était le cas donc il pouvait se détendre ou plutôt, se concentrer sur l'affaire.

La seule chose que disaient les médias, c'était que l'on avait retrouvé les corps de trois (et maintenant quatre) jeunes femmes blondes, tuées de manières différentes, dans des endroits différents. Officiellement, la police « tentait encore d'établir un lien entre les victimes, pour savoir si les meurtres pouvaient être reliés entre eux. » mais grâce à Sherlock, John avait connaissance des pétales de fleur et la thèse du tueur en série était plus qu'évidente, même pour lui.

C'était pourtant un cas bien étrange pour le détective. Il savait qu'il s'agissait d'un serial killer mais jamais il n'en avait vu changer aussi radicalement de méthode à chaque meurtre. Seul fait récurent, ce pétale jaune, et si le meurtrier s'en était passé, jamais Scotland Yard n'aurait pensé à un seul tueur. Cherchait-il par là à se faire remarquer ? À attirer l'attention ? Sans doute mais l'attention de qui ?

Sherlock avait pensé à Moriarty mais ce dernier était beaucoup trop créatif pour tenter de l'intéresser avec une banale série de meurtres. Il s'agissait donc de quelqu'un de normal -enfin, aussi normal que peut l'être un meurtrier multirécidiviste- et à en juger par la nature de ses victimes, il tuait pour son propre compte donc la thèse d'un tueur à gages était à écarter.

Il aurait mis sa main au feu que Lestrade penchait pour un tueur misogyne (hypothèse plus que logique) mais il sentait qu'il y avait autre chose, que cette affaire était plus profonde qu'elle n'y paraissait, et, en toute honnêteté, il en était fortement excité. Le frisson de la découverte, de la recherche de la vérité ne l'avait plus parcouru depuis le « grand jeu » de Moriarty, comme ce dernier se plaisait à l'appeler, et voilà qu'il le ressentait à nouveau, plus euphorisant que la plus hallucinogène des drogues. Ses quatre patchs de nicotines collés à son bras gauche faisaient pâle figure à côté de ça.

Il ne fit même pas attention à ce que John fit, à ce que John dit durant le trajet en taxi. Il aurait pu sauter par la vitre que ça lui aurait été égal. Quoique... non, ça, peut-être pas.

À peine le véhicule se fut-il arrêté que Sherlock en bondit, se dirigeant d'un pas faussement calme vers la scène du crime et laissant à John le soin de payer le chauffeur.

Il rejoignit son ami alors que ce dernier échangeait les pics habituels avec le sergent Donovan. Il prit la conversation en cours de route.

« _ Je dis seulement que la police ici, c'est nous ! S'emporta le sergent.

_ Si vous étiez plus compétents, répliqua Sherlock aussi chaleureusement qu'à l'accoutumée, peut-être que cela dispenserait votre supérieur d'avoir recourt à mes services.

Sally haussa les sourcils et s'apprêtait à lui envoyer une réplique cinglante lorsque l'inspecteur Lestrade arriva et lui posa la main sur l'épaule pour la calmer.

_ Sergent Donovan, souvenez-vous de ce que vous m'avez dit dans la voiture, hum ? Maintenant laissez les passer tous les deux. »

Sally dut obéir, non sans envoyer un dernier « taré. » que Sherlock feignit de ne pas avoir entendu.

Le lieutenant Lestrade les guida jusqu'au corps de la victime, escorté par une bonne partie de l'équipe légiste. Quand Anderson aperçut le détective, Grégory crut qu'il allait faire une crise d'hystérie. Apparemment, il n'avait pas comprit quand il lui avait dit qu'il devait « passer un coup de fil »...

« Non mais... non mais je rêve ? Qu'est-ce qu'il vient faire ici lui ?

_ Anderson, calmez-vous...

_ Sûrement pas, j'exige une explication !

Sherlock lui passa devant sans un regard.

_ Je suis venu faire votre travail, Anderson, alors taisez-vous et laissez faire les professionnels.

_ Si vous croyez que vous allez vous en tirer comme ça, sachez que je... !

_ Laissez-lui cinq minutes, ordonna Grégory sur un ton ferme. Après vous ferez comme bon vous semble.

Anderson renifla et John ne put s'empêcher de penser qu'il ressemblait encore plus à un animal étrange en faisant ça. Peut-être à un vautour. Après tout, il était médecin légiste.

_ J'y compte bien. » conclut Anderson en retournant voir les échantillons prélevés.

Et Lestrade et John purent observer le détective en action. Il commença par faire le tour du corps une fois, puis sortit sa petite loupe de sa poche et effectua un second tour en s'agenouillant toutes les trois secondes pour inspecter des endroits qui semblaient tout aussi vides d'intérêt pour les deux observateurs que l'étaient les galets du bord de la Tamise. Sherlock se releva et s'avança vers eux.

« Elle avait aussi un pétale derrière l'oreille droite, n'est-ce pas ?

Lestrade fit une grimace d'incompréhension.

_ Comment diable savez-vous...

_ Oh, je vous en prie... soupira Sherlock avec un mouvement de tête exaspéré.

L'inspecteur dû capituler, inutile d'essayer de lui cacher quoi que ce soit, il avait sans doute piraté les fichiers de la police ou il ne savait quoi encore.

_ Oui. Elle en avait bien un. On l'a déjà ramassé.

_ Je pourrais le voir ? Demanda-t-il en tendant sa main gantée.

Lestrade chercha son médecin légiste du regard et lui fit signe d'approcher.

_ Anderson, le pétale.

_ Si jamais vous détériorez les pièces à convictions, je m'occupe personnellement de votre cas, menaça Anderson en tendant le sachet transparent.

_ On lui dira. »

Sherlock attrapa le sachet et examina le pétale au travers. Les bords ondoyants laissaient effectivement penser à une rose, la couleur uniforme sur toute la longueur attestait de son authenticité. Pourtant il y avait quelque chose d'étrange...

Il leva le pétale pour l'observer à contre jour, sous le regard suspicieux d'Anderson, et sourit.

« Eurêka.

_ Quoi ? S'enquit Lestrade. Vous avez trouvé quelque chose ?

_ Avez-vous des photographies des autres pétales ?

_ Euh, oui.

_ Bien. Passez-les moi.

_ A-Attendez, calma l'inspecteur, laissant à Anderson une ouverture pour récupérer son sachet à convictions. D'abord, dites-moi ce que vous avez comprit sur la victime.

Sherlock foudroya à tour de rôle le médecin légiste et son chef de service qui le ralentissaient dans ses investigations. Il s'exécuta tout de même.

_ Pour ce qui est de son identité, je pense que vous la connaissez déjà.

_ C'est exact.

_ Elle est morte par noyade, ça ne fait aucun doute.

Anderson ricana.

_ Quelle déduction incroyable comment y êtes-vous arrivé ?

_ Lestrade, si vous voulez que je continue, soit vous mettez une muselière à votre chien, soit il va faire un tour mais par pitié, faîtes qu'il se taise !

_ Eh oh, s'enflamma Anderson, premièrement je ne suis pas son chien et deuxièmement, si vous avez quelque chose à me dire, dites-le moi en face ! »

John en avait marre, à chaque fois c'était la même chose. Sherlock expliquait, Anderson raillait, Sherlock lançait un pic, Anderson répliquait et tout ça se finissait en crêpage de chignon. Mais l'heure n'était pas à l'amusement, il l'avait comprit au même titre que Lestrade. Avec une synchronisation parfaite, les deux hommes attrapèrent leur collègue respectif et les éloignèrent l'un de l'autre afin de faire redescendre la pression.

« Nous sommes sur une scène de crime, leur rappela Grégory, alors tachez de vous tenir.

_ Vas-y Sherlock, l'encouragea John.

_ Bien. Comme je le disais, elle est morte par noyade. Cependant, elle n'a pas été noyée ici. On peut voir des marques rouges au niveau de ses poignets et de son cou donc elle a dû se débattre pendant qu'on lui maintenait la tête sous l'eau. Hors, bien que mouillé, le devant du corps est propre; pas de sable, de vase ou de petits morceau de verres polis. On en retrouve néanmoins dans ses cheveux et sur son dos à causes des vagues qui ont dû baigner le cadavre. Je ne pense pas que le tueur soit allé la noyer au milieu de la Tamise pour la ramener sur la rive par la suite, il est donc plus logique de croire qu'elle a été noyée ailleurs, puis déposée ici. L'analyse de l'eau retrouvée dans ses poumons devrait confirmer mon hypothèse.

_ Je ne vois pas en quoi ça nous avance, intervint le médecin, elle n'a pas été tuée ici, et alors?

Lestrade réfléchit à voix haute.

_ Si on l'a transportée, c'est dans un véhicule, de préférence quelque chose de discret et d'assez grand pour contenir un corps. Une fourgonnette peut-être?

_ A quelle heure le corps a-t-il été trouvé?

_ Aux alentours de quatre heures du matin, par deux policiers municipaux qui faisaient leur ronde. Quand on a eu la confirmation que c'était notre tueur, on nous a appelé.

_ Et l'heure de la mort?

_ D'après moi, intervint Anderson, la mort remonte à trois heures du matin. Peut-être trois heures et demie.

_ John, tu confirmes?

John soupira, s'agenouilla et examina le corps à son tour. Sherlock acceptait de collaborer avec Anderson mais on pouvait toujours rêver pour qu'il se fie à ses résultats.

_ Je confirme. Trois heures-trois heures et demie.

_ Donc le tueur a eu une fenêtre d'une heure grand maximum pour la tuer, conduire jusqu'ici, la déposer et repartir avant la ronde du matin. Soit il ne sait pas gérer son temps, soit il est très téméraire.

_ Voire les deux. »

Le détective joignit ses mains et fit quelques pas. Il ne fallait pas s'avancer en disant que le meurtrier habitait dans un périmètre d'une heure autour du lieu du crime; il avait pu noyer sa victime dans n'importe quelle piscine, baignoire ou même bassine d'eau et la répartition des autres crimes montrait bien qu'il sévissait dans tout Londres, sans suivre de schéma évident. Impossible donc de prévoir sa prochaine frappe mais tout n'était pas encore perdu. Il avait une connaissance qui tenait un petit bar, juste en haut de la rue, il pourrait toujours lui demander s'il avait vu quelque chose de suspect ou alors regarder les caméras urbaines. Certaines avaient sans doute filmé le véhicule et, avec un peu de chance, le tueur.

« Sherlock. Sherlock, tu m'écoute ?

L'interpelé se tourna vers son ami.

_ Qu'y-a-t-il, John ?

_ Je te demandais si tu connaissais la personne qui te fait des signes, là-bas, répéta John avec un mouvement du menton.

Sherlock regarda dans la direction que lui indiquait son ami et trouva la personne en question: il s'agissait d'un SDF, emmitouflé dans un nombre incertain d'habit en tout genre et qui avait un grand sac de course bleu plein à ras-bord.

_ Oui, je la connais. Et toi aussi John, l'informa-t-il en se dirigeant à grands pas vers elle.

_ Pardon ? »

Sans avoir plus d'explications, John suivit son ami qui quitta la scène du crime pour aller discuter avec le SDF.

« Vous travaillez sur le meurtre ? Demanda le SDF -qui se révéla être une femme- quand Sherlock arriva à sa hauteur.

_ Ça se pourrait. Des infos ?

_ De la monnaie ?

Avec un petit sourire, Sherlock sortit un billet de sa poche et le lui tendit. John se souvenait maintenant : il s'agissait de la même femme à qui le détective avait demandé des données lors d'une des affaires du « Grand jeu » de Moriarty. Que faisait-elle ici ?

_ Vous en avez de la chance, dit-elle à Sherlock en rangeant son billet dans une de ses vestes, je dors par là en ce moment et, j'vais pas vous raconter ma vie mais faut bien que je sois loin d'ici avant la ronde des poulets sinon ils m'embarquent alors je me lève tôt.

_ Qu'avez-vous vu ce matin ?

_ Un 4x4 noir. Vous savez, un de ces nouveaux pick-up citadins. Le type s'est garé pas loin et a amené un truc par ici. Un truc assez grand.

_ Et l'homme ?

_ 'Pas vraiment vu, il faisait sombre. Il doit faire votre taille, et il portait un imper.

_ Des signes particuliers ?

La femme réfléchit.

_ J'ai rien vu comme ça.

_ D'accord. Merci beaucoup. »

La SDF attrapa son sac et partit, tandis que Sherlock et John retournaient auprès de l'équipe policière. Le détective en profita pour reprendre le pétale de rose des mains d'Anderson et le regarder encore une fois à contre jour.

« Je viens d'apprendre de source sûre que le meurtrier conduisait un pick-up noir de modèle récent. Apparemment, il s'est garé, a déposé le corps et est repartit.

_ Bien, je vais faire examiner les caméras de surveillance des alentours pour essayer de voir d'où il est venu.

_ Hum. » Répondit vaguement Sherlock, trop occupé à contempler son pétale.

John le remarqua et le bouscula un peu pour qu'il explique ce qu'il avait trouvé. Il avait apprit avec le temps que s'il ne faisait pas ça, son ami avait tendance à faire cavalier seul et il se retrouvait complètement largué en moins de 10 secondes.

Le sergent Donovan se joignit au petit groupe en apportant les photos des autres pétales que le détective avait exigé. Elle les lui tendit avec une animosité flagrante.

Sherlock les fixa intensément une par une et un sourire en coin se dessina sur son visage. Pour une raison étrange, John aimait bien quand il avait cette expression.

« Alors Sherlock ? Demanda enfin John. Ces pétales te semblent intéressants ?

_ Bien plus que ça. Ils sont la clé de cette affaire je me demande comment vous avez pu louper ça, ajouta-t-il à l'attention des enquêteurs.

Lestrade fronça le nez.

_ Comment ça, la « clé » ?

_ Vous n'avez pas vu ? Non, bien sur que non, vous êtes passés à côté, comme toujours.

Il colla les photographies sous le nez de Lestrade.

_ Là, juste là !

_ Mais... mais où, quoi ? S'énerva l'inspecteur en repoussant les clichés.

Sherlock roula des yeux. Les êtres humains et leurs ridicules petits cerveaux..., devait-il penser.

_ Regardez bien sur la nervure du pétale, juste à l'endroit où il était rattaché au reste de la fleur.

Donovan, Anderson et Lestrade prirent chacun une photo pour l'examiner à leur tour. John, quant à lui, se pencha sur le pétale que son ami tenait toujours.

_ Qu'est-ce que... commença Grégory en regardant les autres photos. Ce sont des tâches ?

_ Je dirais plutôt des piqures faites avec... une aiguille, vraisemblablement. Elles sont plus visibles sur ce pétale-ci à cause de la résolution des photos.

_ On dirait les différentes faces d'un dé.

_ Pour une fois vous ne dites pas que des âneries, Anderson. Je pense en effet que ce sont des chiffres et, à en croire par les dates des photos, nous avons donc dans un ordre décroissant cinq, quatre, trois et deux.

John eut un doute.

_ Sherlock... ce que je vais dire va peut-être te sembler étrange mais on dirait un peu...

_ Je crois que tu as pensé à la même chose que moi. Tu deviens vraiment bon, John, ajouta-t-il, étonné.

Le médecin sourit et s'humidifia les lèvres. Un tic qu'il avait du mal à perdre et qui causait souvent des malentendus. Lestrade soupira.

_ D'accord, vous êtes proches au point d'être sur la même longueur d'onde, c'est mignon. Maintenant l'un de vous deux pourrait m'expliquer ? Parce que j'ai beau avoir comprit qu'il s'agissait de chiffres, je n'en suis pas plus avancé.

John passa outre son insinuation de toutes façons, il devait être jaloux. Sherlock reprit ses explications.

_ Ces pétales marqués de chiffres me rappellent les bips du jeu de bombes de Moriarty.

_ Votre histoire des cinq pépins de pomme d'un ordre religieux ?

_ Cinq pépins d'orange, en fait, utilisés par certaines sociétés secrètes comme mise en garde.

_ Dans l'affaire du poseur de bombes, je voyais la mise en garde : résoudre l'affaire avant qu'une pauvre personne ne se fasse tuer. Mais là ?

_ Un pétale correspond à un pépin. Je crois que les meurtres ne sont qu'un moyen d'attirer l'attention sur les pétales.

Sally poussa une exclamation.

_ Vous voulez dire que ce type tue des jeunes filles au hasard, tout ça pour envoyer un message à quelqu'un ?

_ Oui. Et après les cinq meurtres, le message sera complet. »

Les trois policiers se lancèrent des regards inquiets.

Dans une rue de Londres, non-loin de là, une jeune femme sortait de chez elle. Elle s'appelait Mary Davies, avait 25 ans et travaillait depuis plus de trois en tant qu'infirmière à l'hôpital St Thomas.

Aujourd'hui encore, elle partait à son travail assez tard, ne commençant qu'à une heure de l'après-midi. Elle voulait passer chez son amie Nathalie avant, afin de lui rendre la robe qu'elle lui avait emprunté pour la soirée du samedi dernier.

Mary entreprit de marcher jusqu'à l'arrêt de bus. Elle pestiféra contre le vent d'hiver, sortit un élastique de son sac et fit un chignon de ses cheveux blonds.

Il faudrait aussi qu'elle pense à s'acheter de quoi manger le midi. Elle voulait manger un plat asiatique, cela faisait longtemps qu'elle n'en avait pas prit, vu que le Chinois en bas de sa rue avait fermé ses portes.

Mary salua un de ses voisins et continua son chemin, ce disant que ce serait une bonne journée.

Lestrade fut le premier à parler. Il avait peur de comprendre. En même temps, c'était peu probable, mais Sherlock pouvait se tromper...

« Sherlock... vous savez que nous n'avons eu que quatre meurtres ?

Le détective se tourna vers lui comme s'il était demeuré.

_ Bien sûr que je le sais. Je ne suis pas stupide, je sais compter. La bonne question à poser est la suivante Lestrade : Comment empêcher un crime dont on ne connait ni le lieu, ni l'heure ? »

God save the Queen, pensa l'inspecteur Grégory Lestrade.


Voila, chapitre 1 publié. Il vous plait?

Petit bonus, juste pour rire:

"Lestrade soupira.

_ Montrez-moi le corps.

[...]

_ Non, pas le votre, Anderson !» "

En espérant vous revoir bientôt pour le chapitre 2 !

See you soon.

Arcade.