Freedom and not Peace

Auteur : Lightning on the wave.

Anciennes traductrices : Paradise of readers.

Etat de la fic : anglais 86 /86 ; français 1 / 86.

Etat de la traduction : Chap 1 à 9, 11, 13 et 20 traduits.

Chapitre traduit par : Flemmardise et corrigé par : Draconixia.

Les liens des traductrices et de l'auteur sont sur le profil. Il y aura un chapitre toutes les deux semaines, le samedi. Sur ce, nous vous souhaitons bonne lecture !

Libre, mais sans répit

Chapitre Un : Lux Aeterna

« Ce jour est un moment sacré, » chuchota James. « C'est le jour où la Lumière règne. »

Les mains d'Harry tremblèrent lorsqu'il serra le petit bateau en papier. Il essaya de les contrôler. Il se rappela qu'il avait choisi lui-même de venir là, et que cette cérémonie n'était pas bien différente de tous les nombreux rituels de Sang-Pur que pratiquaient les Mages Noirs, qu'on lui avait appris lorsqu'il était petit.

Mais c'était un mensonge, et Harry savait de mieux en mieux reconnaître les mensonges qu'il se faisait à lui-même. Ceci était différent. Les rituels des sang-purs n'avaient jamais été quelque chose à laquelle il avait lui-même participé dans sa vie quotidienne, avec sa famille. Ils avaient été des entraînements qu'il avait dû subir afin d'éventuellement pouvoir convaincre des personnes de s'allier à son frère. Ceci était un rituel de Lumière, que ses propres grands-parents ainsi que son père avaient célébré par le passé.

James ressemblait presque à un enfant, avec son pantalon retroussé jusqu'aux chevilles, lorsqu'il pénétra dans les eaux troubles de la Mer du Nord, tremblant lorsque les vagues caressèrent sa peau. Harry pensa que l'eau brillait tel un diamant. Même l'écume qui s'échouait sur l'échancrure de sable ambré de la plage du Northumberland semblait anguleuse et tranchante, comme si elle était faite de verre brisé.

« Nous accueillons en ce matin du solstice d'été, » continua James, sa voix douce et solennelle, « le soleil qui brille dans toute sa splendeur, libérant avec lui la magie. » Il déposa doucement son propre bateau à la surface de l'eau.

La première vague venue sembla être prête à le couler. C'était un objet si simple, pensa Harry. La barque en elle-même était faite de parchemins pliés, son mât d'une brindille que James avait arrachée d'un if de Lux Aeterna, et sa voile d'un morceau de tissu coloré dont James avait dit qu'il provenait d'un de ses pulls d'enfance. James n'avait même pas agité sa baguette ou formulé une incantation pour le protéger.

Mais, de manière inexplicable, la vague sembla craindre le bateau et le contourna plutôt que de s'écraser dessus. La vague suivante le porta dans son élan, l'élevant avec elle. Harry retint sa respiration. Il ne pouvait pas sentir la poussée de magie à laquelle il s'était attendue, pas même les forces étranges qui ne semblaient provenir de nulle part, qu'il associait avec de la magie sans baguette. Mais il y avait quelque chose de spécial, un éclat doré qui entourait le bateau. Cet éclat brillait de plus en plus, jusqu'à ce que le bateau soit aussi étincelant que le Soleil. James émit un rire tremblant. Harry lança un regard furtif à son père. Il souriait.

« Nous mettons nos navires à l'eau, » murmura-t-il, « pour accueillir le soleil et pour le saluer, tout comme le soleil sort de la mer à notre rencontre les matins de solstice d'été. »

En jetant un regard à son jumeau, Harry s'aperçut que Connor faisait des yeux immenses. A l'évidence, Connor ne savait pas non plus quoi penser. Harry lui sourit, puis s'avança dans l'eau et relâcha son propre bateau.

La lumière du soleil l'enveloppa, puis l'impulsa en avant, loin de la côte, poursuivant le chemin qu'avait tracé le bateau de James. Harry le regarda flotter et naviguer. Cette fois, il put sentir la magie ; une chaleur enivrante pénétra au plus profond de lui et s'y installa, lui donnant envie de ronronner comme un chat.

Le bateau de Connor suivit le sien, son mât vacillant tel un hochement de tête lorsqu'il rejoignit les deux autres bateaux. Harry les observa jusqu'à ce qu'une grande vague les emmène hors de vue. Il s'était à peine rendu compte que son père l'avait rejoint pour lui prendre la main, jusqu'au moment où il sentit une légère pression, le pressant de revenir sur le rivage.

Harry avança, hébété. Il pouvait sentir les rayons du soleil le traverser, insistants, explorant paresseusement ses entrailles. Il n'avait jamais été conscient d'à quel point le monde était lumineux. Lorsqu'il tourna la tête, plusieurs grains de sable brillèrent, comme s'ils avaient été polis. Les oiseaux qui traversaient le ciel au-dessus de leur tête étaient trop éblouissants pour qu'il puisse les regarder. Harry expira et tendit une main.

Il aurait juré qu'une grande langue tiède avait léché sa main, avant de disparaître.

James semblait légèrement mal à l'aise lorsqu'ils atteignirent le rivage, mais hocha la tête vivement lorsqu'Harry le regarda. « Le soleil te souhaite la bienvenue, voilà tout. » dit-il. « Les Potter ont effectué ce rituel depuis des centaines d'années. L'été, le soleil et la lumière ont aujourd'hui l'occasion de te reconnaître. »

« Ça chatouille ! » se plaignit brusquement Connor, et Harry vit que, pour une fois, ses yeux n'étaient hantés ni par la mort de Sirius ni par la capture et la torture qu'il avait subies de la main de Voldemort. Il était en train d'empoigner son pull, riant et gigotant, comme si des insectes l'avaient mordu. « Je n'ai jamais senti le soleil me chatouiller auparavant ! »

« Tu n'étais jamais venu ici, » dit James, dont le froncement de sourcils pensif disparut, « en ce jour, à cette heure. » Il empoigna Connor et ébouriffa ses cheveux. « L'aurore, un jour de solstice d'été, est aussi spéciale qu'un coucher de soleil. N'es-tu pas content que je t'aie tiré hors du lit ? »

« Pas si c'est juste pour avoir des chatouilles ! » Connor s'échappa de l'emprise de son père, et rit à nouveau. « Je ne savais pas que venir ici rendrait les choses éblouissantes au point que je ne puisse plus les voir, ni qu'on me chatouillerait ! »

Harry soupira doucement de soulagement. Il avait fait ce qu'il pouvait pour guérir son frère, pour dissiper son traumatisme, pour lui faire voir qu'il y avait encore de la vie, même après tout ce qu'il avait dû endurer, mais il n'avait jamais réussi à obtenir un résultat aussi convaincant. Harry pensa que le vent et la lumière y participaient au moins autant que la présence de leur père.

Il regarda à nouveau autour de lui. Le paysage était rempli d'oiseaux, de fleurs, mais pas âme qui vive. La plage se courbait à la rencontre de la mer telle une main tendue. La mer l'accueillait, les vagues s'écrasant à une bonne distance du sable. Le bruit était constant, doux, rassurant, aussi régulier qu'un battement de cœur. Harry fut réconforté de penser que jusqu'à sa mort, la mer continuerait toujours à balayer le rivage d'un mouvement répétitif et perpétuel.

« Harry ? »

Harry leva la tête, clignant des yeux. Connor avait déjà couru jusqu'au Portoloin qui devait les ramener à Lux Aeterna, mais James marchait toujours à ses côtés, observant minutieusement son visage.

« As-tu aimé le rituel ? » demanda-t-il.

Harry sourit. « Bien sûr que oui. C'était merveilleux d'aller à la rencontre de la magie Blanche, d'une manière que je n'avais encore jamais expérimentée. Je ne savais pas que cette sorte de danse survivait parmi les générations de Mages Blancs. Je suis content de voir que oui. »

« Tu semblais tellement... » James tâtonna à la recherche du bon mot. Harry attendit patiemment. Ils étaient tous deux encore débutants dans leur relation. Cela ne ferait aucun bien de presser son père. James apprenait petit à petit à lui faire confiance. « Tellement absorbé, » dit finalement son père.

« Je pensais à Connor, » dit Harry. « Il est beaucoup plus heureux comparé au moment où nous avons quitté l'école. »

James s'arrêta, remuant d'un pied à l'autre. Harry s'arrêta également, fixant son visage. Il fut quelque peu surpris lorsqu'il se rendit compte qu'il n'avait plus vraiment à lever la tête. Bien sûr, c'était en partie parce qu'il n'avait pas été en compagnie de James pendant des mois, mais également à cause de la poussée de croissance, qu'il était, selon James, en train d'avoir.

« Tu sais, » dit finalement James, chaque mot soigneusement choisi, « que tu peux aussi penser à toi ? Que tu peux me parler de tout ce qui te perturbe ? Je t'aiderai à prendre soin de Connor, Harry. Je sais que tu ne peux pas complètement t'en empêcher. Mais je veux que tu me laisses la chance de prendre soin de toi, aussi. » Il fixa un point distant. Harry se demanda si c'était Connor qu'il voyait. Il l'espérait. Il y avait peu de chances que des Mangemorts les attaquent à cet endroit, mais ils étaient tout de même hors des barrières de Lux Aeterna, et des accidents pouvaient arriver. « Surtout que Snape ne peut pas te rendre visite. »

Harry soupira et passa une main dans ses cheveux. « Je savais que ça allait se produire. » Les barrières de Lux Aeterna acceptaient Draco, qui n'avait pas pratiqué assez de Magie Noire pour qu'elles le rejettent, mais le mélange de la marque des Ténèbres de Snape, de sa magie, et de la haine de James envers lui, avait convaincu la Maison-pilier des Potter de rejeter le Maître des Potions. Harry avait promis de le rencontrer à un moment ou à un autre pendant l'été, avant qu'il ne retourne à Poudlard, mais il était maintenant trop occupé à essayer de se réintégrer dans sa propre famille. Et Connor continuait à faire au moins un cauchemar par nuit. Harry ne pensait pas qu'il pouvait partir de Lux Aeterna.

« Tu ne sembles pas fâché, » s'aventura James. Leurs yeux se croisèrent à nouveau. Harry en était satisfait. C'était plus facile de persuader les gens qu'il allait vraiment bien lorsqu'ils le regardaient dans les yeux.

« Parce que je ne le suis vraiment pas. » annonça Harry avec un haussement d'épaules. « Comme je te l'ai dit, je savais que cela arriverait. »

James resta silencieux. Il se contenta simplement de regarder Harry, et Harry le laissa le regarder. Son père le comprenait mieux après leurs longs échanges de regards en silence.

« Vas-tu laisser Hedwige rentrer à la maison en volant ? » demanda James, lorsqu'il eut apparemment fini de le regarder.

Harry sursauta, puis rougit. En vérité, avec le rituel puis l'inquiétude qu'il avait ressentie pour Connor, il en avait presque oublié qu'il avait amené sa chouette avec lui, et la raison pour laquelle il l'avait fait. « Oui, » murmura-t-il avant de se précipiter vers sa chouette des neiges, qui était occupée à se lisser les plumes, posée sur une pierre, et regardant les oiseaux marins d'un air supérieur.

Elle se redressa lorsqu'Harry sortit un rouleau de parchemin de sa poche, pour le lui attacher soigneusement à la patte. Il passa quelques instants à caresser ses plumes, fixant ses yeux dorés. Contrairement aux regards qu'il partageait avec son père, son frère, et parfois, lui semblait-il, tout le reste du monde, ce regard-là n'était pas compliqué.

« Hedwige, » chuchota-t-il. « Au Manoir des Malfoy, ma chérie, pour Lucius Malfoy. C'est son présent de solstice d'été. »

Hedwige hulula, montrant qu'elle avait bien compris, et grimpa sur le bras qu'Harry lui avait tendu. Harry grimaça à cause des pointes de ses griffes, mais se tourna et l'impulsa dans les airs, de la manière dont il devait le faire, s'il voulait respecter les pas de la danse de la trêve.

Une lumière éblouissante se répandit autour d'Hedwige lorsque ses ailes s'adaptèrent au vent, ses plumes brillant comme l'écume. Harry la regarda s'envoler vers le Wiltshire, au sud, d'une allure décidée et rapide. Elle fut hors de vue en quelques secondes.

Harry soupira, espérant que ce halo de lumière était de bon augure. Il avait choisi son présent de trêve soigneusement. C'était le seul présent de la danse qu'il allait initier, étant donné que Lucius était celui qui avait commencé à le courtiser. Il avait choisi d'envoyer une liste de ses ambitions et espoirs les plus chers à son cœur, et ce qu'il percevait comme étant ses devoirs.

Il voulait que Lucius distingue ce qu'il ferait de ce qu'il ne ferait pas.

Draco réagirait sans doute vivement lorsqu'il l'apprendrait. Snape grommèlerait sans doute qu'il avait été stupide. Même Narcissa Malfoy serait susceptible de lever un sourcil. Harry avait pleinement conscience qu'elle aimait son mari, mais qu'elle ne lui faisait pas entièrement confiance.

Harry espérait que Lucius lui enverrait une liste similaire.

Ce n'est pas bien de se méfier des gens si l'on ne peut pas prouver sans aucun doute qu'on ne peut pas leur accorder notre confiance, pensa-t-il tout en accompagnant son père vers le Portoloin. Si j'avais fait cela, alors j'aurais rejeté Draco pour la simple et bonne raison qu'il est un Malfoy, et Hawthorn ainsi qu' Adalrico juste parce qu'ils ont été des Mangemorts, et je n'aurais pas eu la chance de pouvoir me réconcilier avec mon père et mon frère. C'est mieux de poser des questions, si on le peut, et de voir ce qu'ils nous répondent.


Harry hésita, une main posée sur la poignée de la porte. Après tout, James ne lui avait pas interdit d'entrer dans cette pièce. Il lui avait juste dit que ça serait une mauvaise idée.

Connor était paisiblement endormi, ses cauchemars absorbés par une Potion de Sommeil sans rêves, et James, s'il n'était pas dans un état de sommeil profond, était au moins somnolant, tandis que Remus se remettait encore de la pleine lune. Et Harry en avait marre de rêver de forêts sombres, de cette voix froide et aiguë qui murmurait tout le temps des choses à propos du soleil. Et puis au moins, sa cicatrice ne saignait pas, lorsqu'il était éveillé.

En plus de tout cela, il avait exploré tout le reste de Lux Aeterna et avait trouvé des objets fascinants – des miroirs qui ne renvoyaient uniquement l'image des sorciers au sang pur, des fenêtres dont la vue donnait sur des mondes différents, des pièces si bien proportionnées que la lumière qui les traversait semblait former des cathédrales dont les murs étaient faits d'air et de lumière. Rien ne lui avait fait de mal. Harry ne voyait pas pourquoi cette pièce-là serait différente.

Il cligna des yeux lorsqu'une bouffée de chaleur l'envahit, mais la porte céda à la pression lorsqu'il la poussa, et rien ne surgit devant lui lorsqu'il franchit le pas de la porte.

Une vague de magie l'empêcha d'avancer. Harry n'avait jamais ressenti une telle chose auparavant. Il observa la structure qui s'étendait devant lui, et comprit pourquoi. Aucun sorcier, ni Mage Blanc ni Mage Noir, n'avait fait cette chose. Elle avait vu le jour... d'une autre manière.

Le Labyrinthe était scintillant, fait de multiples tunnels qui se croisaient et se recroisaient, et Harry eut énormément de mal à distinguer le début ou la fin de chaque chemin, de la même manière qu'il trouvait difficile de différencier la manche gauche de la droite d'un pull roulé en boule. La lumière lui rendait la tâche encore plus difficile, vacillant autour des haies et des tournants tel un feu chatoyant. Harry ne pouvait pas distinguer les couleurs. Le Labyrinthe était-il blanc, ou argenté, ou doré, ou quelque chose d'autre ? Peut-être était-elle d'une couleur bleue pâle, comme celle d'une aigue-marine. Harry ne pouvait pas apercevoir la fin du Labyrinthe, mais il pouvait sentir qu'il remplissait tout l'espace de l'énorme pièce.

C'était dans cette architecture que son père était entré pour faire face à ses erreurs passées, pour apprendre ce dont il avait besoin de faire vis-à-vis de sa famille et de ses amis.

Harry sentait la chaleur frôler son visage, et il en comprit vite la raison. C'était une Lumière aussi honnête et tranchante qu'une lame. Touchez-là, et elle vous couperait, mais elle brûlerait également toute trace d'impuretés, et ôterait la chair meurtrie et ensanglantée, ne laissant place qu'à la pureté.

Harry n'y entra pas. Il n'était pas idiot à ce point. Mais il marcha avec prudence le long des barrières brûlantes, et observa le Labyrinthe.

Quelques instants plus tard, alors que la chaleur et la lumière devenaient plus insistantes, il se rendit compte que le Labyrinthe l'observait en retour.

Harry cligna des yeux et souleva son menton. Jusque-là, rien de ce qu'il avait eu l'occasion de rencontrer à Lux Aeterna ne l'avait attaqué à cause de la magie noire qu'il avait employée par le passé ; le sang des Potter qui coulait dans ses veines l'avait protégé. Il commençait à prendre conscience que ceci allait peut-être être une exception. Il avait imaginé le Labyrinthe, mais ce qu'il voyait était bien au-delà de ce que pouvait inventer son imagination. Rien que le fait d'être dans la même pièce que le Labyrinthe le faisait se sentir prêt à s'enflammer tel un phénix.

Un trille tinta au-dessus de lui, et Harry sentit l'attention du Labyrinthe se concentrer sur une autre cible, puis se relâcher. Après tout, l'oiseau qui venait d'entrer dans la pièce était une créature de la Lumière. Fumseck, le phénix de Dumbledore qui pour une quelconque raison avait abandonné le Directeur pour venir avec Harry, s'installa sur son épaule et frotta sa tête contre la joue d'Harry.

Harry bailla. Le sommeil n'avait pas eu l'air attrayant quelques instants auparavant, mais il l'était désormais. Il lança un regard suspicieux vers Fumseck. Les yeux sombres de Fumseck cillèrent et il entama une chanson qui évoquait le bruissement chaud des couvertures et la sensation agréable de la somnolence.

Harry bailla à nouveau. « Je ne veux pas aller me coucher, » marmonna-t-il, mais il était conscient qu'il se comportait comme un enfant.

Fumseck chantonna, et les yeux d'Harry se fermèrent presque. Il secoua doucement la tête. « Je vais sûrement réveiller Connor si je reviens maintenant... »

Le Labyrinthe tendit brusquement son essence vers lui.

Harry s'immobilisa. Il sentait son cœur battre alors qu'il chassait le sommeil dans lequel Fumseck avait essayé de le plonger. Harry sentit la lumière se mouvoir autour de lui, perçante, vacillante, ressemblant presque à une flamme. Fumseck resta silencieux mais respectueux sous cette lumière. Harry fut soudainement en train de se remémorer chaque moment où il avait utilisé de la magie noire ; chaque fois qu'il avait blessé quelqu'un, même par accident, et surtout la célébration de la Nuit de Walpurgis, lorsqu'il avait dansé follement parmi les mages noirs et était passé à travers le portail des ténèbres supposé le libérer complètement.

La Lumière le relâcha. Harry cligna des yeux et rehaussa ses lunettes. Le Labyrinthe continuait à l'observer, mais d'une manière indulgente, de la même manière que pourrait le faire une mère envers son enfant favori.

Harry grimaça, et souhaita ne pas avoir fait une telle comparaison.

Derrière lui, la porte s'ouvrit. Les barrières brûlantes présentes autour du Labyrinthe s'étendirent peu à peu, le poussant vers la porte. Harry poussa un soupir et s'y dirigea.

« Je vais revenir, tu sais, » dit-il au Labyrinthe.

Le bourdonnement à peine audible qu'il percevait dans sa tête retentit cette fois comme de l'amusement.

Harry haleta puis alla se coucher. Il détestait quand les gens – bon, cela concernait également les items magiques – le traitaient comme un enfant. Mais il se dit que s'il devait y avoir une exception, il pourrait bien s'agir d'un artefact extrêmement puissant dont l'origine ne se trouvait pas sur Terre.

Cette fois, il n'alla pas se coucher seul. Fumseck l'accompagna, ses plumes perdant de leur éclat lorsqu'Harry lui chuchota furieusement qu'il allait réveiller Connor, puis se percha sur son oreiller, puis chanta. Harry essaya de résister, mais ses yeux se fermèrent, et il se laissa aller vers un sommeil sans rêves, si on ne comptait pas l'image d'un Harry marchant le long d'une allée d'épines blanches et de roses en verre, essayant de trouver le chemin qui mènerait à la liberté pour le monde entier.

La chanson du phénix l'accompagna tout du long.


Les mains de James tremblèrent lorsqu'il déroula le parchemin. Il n'avait pas honte de l'admettre. Bien sûr, le fait qu'il soit seul dans son bureau de travail et que personne ne pouvait voir ses mains trembler y était pour quelque chose. C'était la réponse à la lettre qu'il avait écrite à Peter le lendemain du jour où il avait ramené les garçons à Lux Aeterna.

Peter ne lui avait pas envoyé de réponses pendant presque quatre semaines ; sachant que le lendemain serait le premier jour de juillet. James en avait été honteusement soulagé. Si son ami, qu'il avait trahi, voulait couper les ponts avec lui, alors cela serait plus simple.

Mais il ne l'avait pas voulu, comme pouvait en témoigner la lettre.

James inspira une grande bouffée d'air, baissa les yeux sur le parchemin, et lut.

Cher James,

Je ne sais même pas si je devrais t'appeler comme cela, puisque ces douze dernières années tu n'as certainement pas été un être cher à mon cœur.

James ferma les yeux pendant un instant. S'il écoutait les garçons qui s'amusaient avec leurs amis, par-delà la vitre de son bureau qui donnait vue sur la large pelouse de Lux Aeterna, alors il pourrait prétendre que la lettre de Peter n'était pas là, et que tous les mots qu'il méritait ne le frapperaient pas en pleine figure.

Tu les mérites, se rappela-t-il, d'une voix ferme qu'il pensait avoir acquise suite à son séjour dans le Labyrinthe. Puis il retourna son attention à la lettre.

Et pourtant ce n'est pas tout à fait vrai, puisqu'après tout, je suis allé à Azkaban pour ton bien, et celui de Sirius, et celui de Remus. Pendant douze ans, je suis resté là-bas pour vous. Je me disais que vous m'aimiez, que vous aviez juste été apeurés, que vous n'aviez pas voulu me trahir.

Mais c'est ce que vous avez fait. Et c'est blessant, James, même en sachant que si tu devais choisir entre moi et ta famille, alors ton choix se porterait naturellement sur ta propre famille. Mais pourtant tu as également préféré Sirius et Remus à moi, et ça faisait mal.

James eut du mal à respirer. Mais c'était mieux, il fallait que cela soit mieux, que la douleur qu'il avait ressentie lorsqu'il avait réalisé qu'il avait renié la vérité pendant de si nombreuses années.

Puis j'ai finalement décidé que je n'avais plus aucune raison de rester à Azkaban, plus aucune raison d'honorer un marché avec des personnes qui étaient à l'évidence de faux amis. Je me suis retiré de l'emprise de la toile du phénix en la déplaçant vers une proie plus intéressante, et elle est désormais concentrée sur Harry. Je me suis promis que je le protégerai et que je l'empêcherai de devenir un sacrifice, tel que je l'ai moi-même été.

Dumbledore avait tort, James. L'innocence n'est plus de l'innocence si elle va de pair avec l'ignorance. Au nom d'une seule raison, afin d'éviter que le monde sorcier ne soit violé par la guerre, Dumbledore a sacrifié des esprits et les a imprégnés d'une chose dont la seule connaissance est terrible. Au moins, il avait mon consentement lorsqu'il me l'a fait subir. Il n'a jamais eu celui d'Harry.

Et voici ce que je vais te demander, James, comme preuve que tu me dis bien la vérité. Sois un bon père pour Harry. Si j'entends qu'il a souffert sous ta protection, alors que tu aurais pu l'en empêcher, ou que tu en étais la cause, alors je te considérerai comme un ennemi, et ce jusqu'à ma mort. Je me glisserai dans le moindre trou que je trouverai dans tes défenses. Un rat peut causer énormément de problèmes avant d'être attrapé, James, et même un sorcier peut être sans défenses si un rat ramène assez de ses congénères avec lui. Je sais de quoi je parle.

Si tu peux m'assurer que tu seras un bon père pour Harry, contacte-moi à nouveau. Si tu ne m'envoies pas de réponse, je supposerais que tu es un ennemi.

Peter.

James reposa soigneusement le parchemin sur son bureau et s'adossa dans sa chaise, son regard tourné vers le plafond. Globalement, ça n'avait pas été si horrible, pensa-t-il, conscient de l'engourdissement qui avait pris place en lui. Il pouvait faire ce que Peter attendait de lui. Il lui enverrait une réponse. Il avait très certainement l'intention d'être un bon père pour Harry. Et, en un sens, cette menace avait un point positif. Elle représentait une épée de Damoclès, et il ne pourrait jamais être tenté de faillir à sa tâche.

Il ne s'était juste pas attendu à une telle lettre de la part de Peter. Il y avait eu de l'amertume, oui, mais également une force sauvage que James n'avait jamais vue, venant de sa part, lorsqu'ils étaient étudiants à Poudlard. Douze ans à Azkaban l'avaient transformé.

Ou alors elle était toujours là, et je n'y avais jamais fait attention.

Et maintenant, il avait des visions d'une armée de rats gris. Il savait que Peter avec une connexion spéciale avec les rats, qu'il pouvait les appeler à lui et leur parler. Il pouvait certainement en appeler suffisamment pour neutraliser une personne, et au ton de sa lettre, il n'hésiterait pas à le faire.

James se leva et se dirigea vers sa fenêtre, regardant la vaste pelouse.

Ron Weasley et Connor poussaient des cris de joies sur leur balai, pourchassant le Souaffle qui planait autour d'eux. James pouvait les entendre rire de là où il se tenait. Il n'avait vu aucun inconvénient à Métamorphoser la pelouse en un terrain de Quidditch, suite à leur requête. C'était de la magie simple, bien que puissante, et cela rendait Connor satisfait. Connor avait encore besoin de temps pour guérir, mais ses souhaits, contrairement à ses besoins, étaient faciles à réaliser.

Harry... représentait un problème différent.

James dut parcourir la pelouse des yeux plusieurs fois avant d'apercevoir son fils aîné. Harry était assis avec Draco Malfoy à l'ombre de quelques ifs. Ils discutaient, bien trop calmement pour que leur conversation soit perçue. James plissa les yeux. Ils n'avaient pas l'air de jouer à quelque chose.

Son regard fit un aller-retour entre le couple d'enfants en train de voler et celui qui était assis, et il secoua la tête.

Il supposa qu'il pouvait mettre les différences entre ces deux amitiés sur le compte des différences entre ses deux fils, ou entre les garçons avec lesquels ils étaient devenus amis, ou encore entre les Mages Blancs et les Mages Noirs, les Gryffondors et les Serpentards. Mais il n'arrivait toujours pas à savoir si tous ces paramètres étaient à l'origine d'un fossé aussi profond. Connor et Ron ressemblaient plus à Sirius et lui-même lorsqu'ils étaient plus jeunes — bruyants, forts, aussi agités que de jeunes lionceaux, certes plus intéressés à jouer au Quidditch que des mauvais tours, mais tout de même comparables.

Harry et Draco étaient si calmes que c'en devenait troublant. Ils jouaient au Quidditch ensembles, et s'entraînaient en faisant des duels, et ils exploraient Lux Aeterna et ses divers artefacts ensembles. (James avait dû les avertir de ne pas s'approcher de plusieurs objets, le portrait de son arrière-grand-père y compris, qui avait essayé de jeter un sort sur Draco lorsqu'il avait appris qu'il était un Malfoy.) Mais ils le faisaient avec une intensité incroyable, comme si chaque chose ne pouvait avoir lieu qu'une seule fois, et Draco lançait à James un regard venimeux à chaque fois qu'ils étaient interrompus, comme un enfant à qui on disait qu'il devait rentrer. Harry devenait instantanément plus réservé lorsqu'il remarquait que son père les observait, mais s'il ne le remarquait pas, il souriait et riait d'une manière que James n'avait jamais vue ou entendue lorsqu'Harry vivait avec eux à Godric's Hollow.

James ne pouvait pas comprendre pourquoi, et cela l'inquiétait, car il pensait que cela signifiait qu'il ne pouvait pas comprendre son fils.

La porte du bureau s'ouvrit, et James se tourna et sourit à Remus. « Tu te sens mieux ? » demanda-t-il.

Remus acquiesça et couvrit sa bouche d'une main afin de cacher un bâillement. « Je ne sais pas ce qu'il s'est passé. Du stress, je suppose, ou la Potion Tue-Loup, ou les deux. »

James hocha la tête. Remus n'avait pas pu être présent le matin du rituel de Solstice d'été à cause de la pleine lune, mais même après cela, il avait été plus fatigué que d'habitude, et avait passé de longues heures à dormir et à errer paisiblement, seul, à l'intérieur de Lux Aeterna. James ne savait pas—

Oh. Bien sûr que si, je sais.

James grimaça. « Remus, » dit-il calmement, « tu sais que tu peux me parler à propos de Sirius. »

Remus cligna des yeux.

« J'ai été négligent de ne pas t'en avoir déjà parlé, » dit James.

« Je ne voulais pas m'imposer, » dit Remus, se tournant pour admirer un portrait accroché au mur, bien que ses épaules tendues indiquaient clairement qu'il n'était absolument pas en train de l'admirer. « Je— tu as été si occupé avec tes garçons, James, et Merlin sait qu'ils ont besoin de toute l'attention que tu peux leur donner— »

« J'aurais quand même dû te parler, » dit James. « Je suis un idiot, Remus. » Il se déplaça prudemment pour se tenir aux côtés de son ami, et ne fut pas surpris que la femme du portrait, son arrière-grand-tante Mafalda, présente une forte ressemblance avec Sirius. Les familles de sang-pur s'étaient mariées entre elles de nombreuses fois par le passé, et il y avait eu une époque pendant laquelle les Blacks avaient été considérés comme étant des alliés prestigieux, sans l'insanité et la magie noire qui souillait les dernières générations. Mafalda scrutait Remus avec concentration, comme cherchant les bons mots pour lui remonter le moral. James ressentait la même chose qu'elle. « Il te manque, n'est-ce pas ? »

« Chaque fichu jour, » dit doucement Remus. « Il était— Je suis encore si énervé contre lui, pour ne pas nous avoir dit, l'imbécile, qu'il avait le Seigneur des Ténèbres dans sa tête, et c'est alors que je me hais d'être fâché contre lui, et après je me souviens des mauvais tours qu'il organisait et j'ai envie de rire, et puis je me souviens de la manière dont il est mort et j'ai envie de pleurer. » Il baissa la tête, sa respiration régulière et contrôlée. James reconnut ce comportement. Remus leur avait expliqué lorsqu'ils étaient encore enfants comment il calmait le loup en lui.

« Je sais, » murmura James. En vérité, il ne se sentait pas mieux, mais il avait simplement laissé son chagrin pour Sirius le submerger lorsqu'il était seul la nuit, sûr que Connor et Harry n'avaient pas besoin de lui à ces heures-là. Il hésita pendant un long moment puis se dit peu importe que j'aie l'air stupide !, et enlaça Remus. « Moi aussi, il me manque chaque fichu jour. Et la façon dont il est mort est horripilante. La prochaine fois que je le vois, je lui botterai les fesses. »

Remus eut un fou rire pendant un moment, puis il eut des sanglots dans la voix bien qu'il ne laissa pas les larmes couler. James le déplaça jusqu'à ce qu'ils soient assis en face de la fenêtre, et se positionna de sorte qu'il soit entre Remus et la porte.

« Maintenant, » dit-il, « dis-moi. Juste, dis-moi. Tout ce dont tu veux me parler. »

Remus prit une grande bouffée d'air et commença à parler. James donna facilement à Remus toute son attention. Il pouvait compter sur Harry pour surveiller Connor, et sur Draco pour surveiller Harry.


« Non. » La voix d'Harry était infiniment patiente, pensa Draco, même si dans une telle situation, la personne vers qui était dirigée cette patience ne la méritait certainement pas. « Tu n'as pas agité ton poignet de la bonne manière. Comme ça. Protego ! »

Le sort du Bouclier apparut devant Harry. Draco recula d'un pas, mais cela le laissa tout de même très proche d'Harry. Le sort avait été instantané, réussi et très, très puissant. Les cheveux de Draco se dressèrent sur sa tête au violent souffle de magie, qui semblait bondir dans chaque coin de la vaste pièce constamment éclairée par des rayons de soleil traversant les immenses fenêtres, que James avait indiquée aux garçons pour leur entraînement.

Draco s'en fichait. Cette magie avait une odeur de roses, bien qu'elle lui ait donné des maux de tête à une certaine époque. Il adorait regarder Harry mettre en pratique sa magie, même quand il devait utiliser sa baguette pour qu'on puisse l'imiter.

Il souhaitait juste qu'Harry ne dût pas donner des cours à son frère.

Connor Potter se tenait de l'autre côté de la pièce, observant Harry avec concentration. Il tendit le bras au bout duquel il tenait sa baguette et dit, sans beaucoup de conviction, « Protego. »

Le geste du poignet était encore faux, constata Draco avec désespoir, et le sort du Bouclier ne put se matérialiser. Connor prit un air sinistre. « Je n'y arriverai jamais, » déclara-t-il.

« Bien sûr que si. » Harry sourit à son frère, ce qui rendit Draco malade. Harry était loin d'être l'idiot aveugle qu'il avait été au sujet de Connor l'année précédente, mais il était encore trop attaché à son imbécile de frère, pensa Draco. Il aurait plutôt dû payer plus d'attention à ceux à qui il était réellement attachés, comme Draco, et devrait certainement pas insister calmement pour entraîner son frère lorsque Draco était présent, juste parce que cela faisait partie de ses habitudes quotidiennes.

« Tu le penses vraiment ? » Connor leva la tête, cherchant dans les yeux d'Harry une quelconque réassurance. Draco se renfrogna et croisa les bras. Connor avait cessé d'avoir la protection de Sirius, alors il avait demandé celle d'Harry. Et Harry la lui donnait, encore et encore — il donnait toujours plus de lui-même au mur desséché qu'était Connor Potter. Draco devait lutter pour conserver son masque calme lorsqu'il y pensait.

« Bien sûr que oui. » dit Harry, sa voix basse et apaisante. « Un puissant sorcier n'est rien sans volonté, Connor. Il peut s'entraîner et s'entraîner, et ne pas faire apparaître la moindre petite étincelle au bout de sa baguette s'il ne le veut pas vraiment. Ou il peut jeter les sorts les plus envoûtants, et aucun d'entre eux ne sera ce qu'il voulait, parce qu'il ne sait pas ce qu'il veut vraiment. Tu échoues à présent à cause de ton manque de volonté, mais tu n'y es pas contraint. Tu connais les enjeux. Tu sais qu'on doit faire ça. »

Connor frissonna, puis leva la tête et acquiesça. Draco cligna des yeux. Ce n'était pas la première fois qu'Harry disait quelque chose de ce genre, mais c'était la première fois que ses mots avaient eu un résultat aussi rapide et convaincant.

« Je me souviens de la Cabane Hurlante, » murmura Connor.

C'était une chose parmi d'autres qui rendait Draco furieux. Harry lui avait raconté ce qu'il s'était passé dans la Cabane, mais c'était différent que d'y avoir été présent. Cela était évident à chaque fois que les jumeaux s'échangeaient des regards. Ils partageaient une de ces expériences marquantes et uniques que Draco n'avait pas vécues. Connor avait accès à une partie d'Harry auquel il n'avait pas accès.

Harry tourna brusquement son regard vers lui. « Tout va bien, Draco ? »

Draco cligna des yeux, réalisant qu'il avait presque laissé sa propre magie s'échapper hors de contrôle, et secoua la tête. « Oui. »

Harry l'étudia un bref moment de plus, puis hocha la tête et se tourna vers Connor. « Comme ça, » dit-il, sa voix claire et assurée. « Protego ! »

Connor lui fit écho, sa voix aussi volontaire, et cette fois réalisa le bon mouvement de poignet.

Un fin bouclier l'encercla. Harry rit à haute voix. « Excellent, Connor ! Tu devras travailler pour qu'il soit plus puissant, mais tu as la volonté, maintenant, et tu sais ce que tu as besoin de faire. Je pense que même ce bouclier supportera quelques sorts. » Il fit prudemment un geste de sa baguette. Draco savait qu'Harry devait retenir sa puissance, comme attaché à des chaînes, dans ce genre de situations. Il était tellement plus habitué à utiliser de la magie brute, déchaînée et sans baguette. « Petrificus Totalus ! »

Le sort s'élança vers Connor et rebondit contre le bouclier. Le sourire de Connor s'élargit, et il se lança dans une gigue frénétique. Harry rit à nouveau.

« Maintenant que tu peux le faire, on travaillera sur la manière de faire un bouclier plus puissant, » promit-il à son frère, « et d'autres sortilèges défensifs. »

Connor lui sourit. « Demain ? » demanda-t-il, tapotant son ventre. « Je meurs de faim. »

Harry acquiesça. « Je te laisse partir— pour aujourd'hui, » dit-il, dans un ton faussement menaçant, et Connor rit à son tour. « C'est presque l'heure du dîner, de toute façon. Mais on travaillera demain, et tous les jours jusqu'à ce que tu puisses faire ce sort parfaitement. »

Connor acquiesça. « Je sais, » dit-il, et il partit à travers la porte.

Harry se tourna vers Draco au moment où Connor disparut. « Il s'améliore vraiment de jour en jour, » dit-il.

Draco leva son menton. « Tu ne peux pas savoir si j'allais dire quelque chose à ce propos. »

« Si, » signala Harry, « je peux. »

Draco soupira. « Bien, Harry. Mais je veux savoir— quand est-ce que tu lui diras que tu te retiens devant lui ? »

Les yeux d'Harry se détournèrent des siens. Draco attrapa son menton et tourna son visage vers lui, de la façon dont il l'avait fait dans l'infirmerie lorsqu'Harry avait essayé de renier le fait que Draco l'aimait.

« C'est ce que tu fais, » dit doucement Draco. S'il abattait bien ses cartes, il pourrait certainement gagner et libérer Harry de sa responsabilité d'enseigner à son frère. Sûrement que James Potter pouvait s'en occuper. Il devrait. Connor était son fils. « Tu es trop puissant pour ce genre de jeux. Tu le sais. Tu peux lui montrer comment lancer des sortilèges, mais tu ne fais pas un bon adversaire pour un duel. Tu pourrais le détruire n'importe quand, et bloquer n'importe lequel de ses sorts, et de toute manière tu ne veux pas le blesser. Il ne progressera que jusqu'à un certain point, et alors il commencera à se dire qu'il est beaucoup mieux préparé qu'il ne l'est vraiment. Cherche quelqu'un d'autre pour l'entraîner. Ton père, peut-être, ou Professeur Lupin. Ils ont une quantité de pouvoir plus proche de la sienne que toi. »

« J'ai dit que je lui donnerai des cours, » murmura Harry. « Je l'ai dit, même à Poudlard, et la situation n'était pas brillante, là-bas. J'ai besoin de me rattraper. Et il y a un tas de choses que je peux lui enseigner qui ne repose pas sur la magie. Les rituels de sang-pur, l'Histoire, l'étiquette, l'autorité... »

« Harry. » Draco décida qu'il pouvait tout aussi bien donner à Harry le message que ses parents lui avaient communiqué avant qu'il quitte le Manoir pour se rendre à Lux Aeterna dans son intégrité. Il n'avait pas voulu le faire, pensant que les mots étaient trop rudes pour Harry et son actuelle vision du monde, mais Harry avait besoin de les entendre. « Tu peux lui enseigner ces choses, oui, mais il n'en a pas autant besoin que sa magie. Si Voldemort revient et que Connor est celui qui doit le vaincre, soit. » Draco ne put chasser le scepticisme de sa voix. Il ne pensait vraiment pas que le Seigneur des Ténèbres tomberait de la main de Connor, prophétie ambiguë ou pas. Harry était tellement meilleur que son frère, en tous points de vue, que c'était une idée impossible à concevoir. « Mais cela ne signifie pas qu'il va être un leader. Tu l'es. Tu dois l'être. Tu sais qu'il y a des sorciers qui gardent un œil sur toi pour ton pouvoir, et ils chercheront bientôt des signes de tes vraies intentions. C'est ce que ma mère faisait en tant que Starborn, s'assurant qu'il y a des sorciers prudemment favorables à la possibilité d'un troisième parti, qui est ni celui de Voldemort ni celui de Dumbledore. Elle ne peut faire cela que parce que tu es— et bien, toi. Et tôt ou tard, tu devras devenir le leader de ce troisième parti. Mes parents accepteront de te suivre si tu deviens ce leader, tu sais. »

C'était ce dernier point qui avait le plus impressionné Draco. Il ne savait pas quel présent de solstice d'été Harry avait envoyé à son père, mais il savait que Lucius avait été stupéfait et secoué pendant un jour après l'avoir reçu, et dès lors sérieusement pensif. Et sa mère, sa mère qui n'avait jamais incliné la tête devant Voldemort, qui n'avait jamais eu son bras souillé par la Marque des Ténèbres, avait souri lorsque Draco s'était enquis auprès d'elle à propos d'Harry, puis avait dit, « Il ne deviendra pas un Seigneur, chéri. Il sera quelque chose de bien meilleur. Et il aura ma loyauté jusqu'au jour où il montrera qu'il ne peut plus devenir cette personne. Je ne m'attends pas à ce que ce jour arrive. »

« Je ne veux pas donner des ordres à qui que ce soit. »

Draco cligna des yeux, et s'arracha à ses rêves concernant le futur pour se rendre compte qu'Harry était désormais en train de le regarder, ses bras croisés, ses yeux sévères et son visage fermé.

« Je ne veux contraindre personne, » dit Harry. « Et je ne veux pas non plus donner des ordres. Si je peux leur demander de faire des choses, soit. Mais je ne les commanderai pas, Draco. Je ne le ferai pas. »

« Tu ne vas pas devenir un Seigneur, » essaya Draco.

« Je m'en fiche. » Harry s'éloigna de lui, et Draco fut presque instantanément irrité, comme il l'était toujours lorsqu'Harry était si éloigné de lui. Il essaya de se calmer, de ne pas laisser son visage montrer son irritation. « Ils s'attendraient quand même à ce que je leur dise quoi faire, n'est-ce pas ? »

A contrecœur, Draco acquiesça. Sa mère le lui avait bien expliqué. Elle avait fait ce qu'elle avait fait jusqu'alors pour construire un monde plus sûr pour son fils et pour remplir la dette qu'elle devait envers Harry, mais tôt ou tard, elle en viendrait au point où seule la puissance d'Harry, secondée par sa sagesse, la guiderait sans encombre. Elle chercherait alors son avis, et quel que soit le nom qu'Harry donnait à ce qu'il lui disait, conseils ou commandements ou quoi que ce soit d'autre, elle obéirait toujours.

« Je ne veux pas, » dit Harry. « J'ai été un esclave. Je ne souhaiterai jamais ce destin à qui que ce soit. »

« Si ce sont leur choix, ce ne sont pas des esclaves, » dit Draco. « Merlin, ce que tu es frustrant. »

Harry secoua la tête. « Je préfère faire des marchés et des dettes et des sacrifices, Draco. Je les comprends. Pourvu que je sois d'une quelconque utilité à ta famille, pourvu que je puisse leur donner quelque chose en retour d'une quelconque aide qu'ils m'auront donné, je m'en contenterai. Mais ne me demande pas de devenir une sorte de— » Il agita ses mains, cherchant à l'évidence le bon mot. « Général, » cracha-t-il finalement, avant de marcher à grands pas vers la porte.

« Harry, » murmura Draco.

Harry l'entendit, et s'arrêta, bien qu'il ne le regardât pas.

« Il y aura des fois où les marchés seront très globaux, ou alors tu ne pourras pas joindre quelqu'un afin de lui demander son avis, » dit Draco. « Tu as étudié la guerre. Tu le sais. Vas-tu réellement refuser d'être un leader parce que tu pourrais émotionnellement blesser quelqu'un, ou les faire brièvement se sentir comme un esclave ? »

Harry regarda en arrière. « Je t'ai parlé du vates. »

Draco acquiesça, perplexe.

« Je ne vois pas comment je pourrais être le genre de leader que tes parents veulent que je sois et vates, » dit Harry. « Pas lorsque l'un repose sur le commandement, parfois sans même devoir y penser, alors que le second repose sur ma connaissance si profonde de moi-même que je serais instantanément conscient du moment où je donnerais un ordre et martelé par le dégoût pour l'avoir fait. Les créatures magiques ont suffisamment été blessées par leurs liens, Draco. Je ne peux pas me permettre de m'habituer à créer des liens d'obligation sur d'autres sorciers. Je me reposerai sur les rituels de sang-pur, que quelqu'un n'utilisera pas à moins qu'il soit entièrement conscient de ce que cela implique, et sur les marchés. Si je ne peux pas retourner un service pour un service, une aide pour une aide, d'égal à égal, alors je ne conclurai pas le marché. »

Draco fit une pause. Ce qu'il avait à dire sonnait stupide et naïf, mais il avait besoin de le dire.

« Je pense que tu peux être les deux, Harry, » dit-il. « S'il y a bien une personne qui peut le faire, c'est toi. »

Harry cligna des yeux, à l'évidence surpris, puis lui fit un large sourire désabusé. « Ça fait du bien de voir que tu as autant de confiance en moi, Draco, mais je pense que je devrai probablement choisir, et je choisis d'être un vates. Je laisserai aux sorciers leur libre-arbitre, bien qu'ils n'aient pas autant de toiles à enlever. Seulement les toiles qui les rendent si aveugles et têtus, » ajouta-t-il à mi-voix.

« Mais et si quelqu'un choisit de t'obéir ? » demanda Draco. « Refuserais-tu vraiment sa décision, forçant ta propre volonté à écraser celle de cette personne ? »

Il haït la manière dont cette question fit disparaître le sourire d'Harry, mais ils avaient besoin de prendre cela en considération. Du moins, Harry avait besoin de prendre cela en considération. Draco le regarda lutter inconfortablement. Il souhaita pouvoir enlacer Harry et dire qu'il comprenait, mais il ne le pouvait pas. Il savait quelle était sa place, où il se tiendrait toujours.

Harry était celui qui devait faire un choix.

« Je ne sais pas, » dit enfin Harry d'une voix morose. « Je suppose que non. »

Draco savait quand il devait se retirer. L'odeur de rose dans la pièce était presque suffocante, la magie d'Harry réagissant à sa colère. Il sourit. Ce n'était pas difficile, maintenant que le morveux était parti. « Eh bien, tu n'as pas besoin de choisir à cet instant précis. Veux-tu rentrer et explorer ce passage secret dans le grenier ? »

Harry se ragaillardit immédiatement. « Oui ! » Il ouvrit la porte qui menait hors de la pièce et jeta un coup d'œil aux alentours plusieurs fois. « Mais on doit être prudents, » murmura-t-il. « Papa m'a dit qu'il y avait une raison pour qu'une protection soit présente sur cette porte. »

Draco cilla. Il ne se souvenait pas d'une quelconque barrière. « Quelle protection ? »

Harry avala sa salive. « Je, euh, l'ai un peu détruite parce qu'elle ne voulait pas nous laisser entrer, » admit-il. « Mais je suis sûr qu'il n'y a rien qui nous fera du mal. »

« Bien sûr que non, » dit Draco, se rappelant d'être sur ses gardes, juste au cas où.

Harry sourit sauvagement et fila hors de la pièce, se dirigeant vers le grenier— doucement.

Tout est si dur, se plaignit Draco à lui-même, alors qu'il suivait Harry à travers la lumière de Lux Aeterna. Je souhaite que cela ne soit pas si dur. Mais au moins je suis là, et je peux m'assurer qu'il ne dépasse pas ses limites, ou qu'il n'ignore pas d'importantes décisions, ou qu'il n'en fasse pas des stupides. Et cela suffit.

Et si ce n'est pas assez, je ferai en sorte que cela suffise.


Traduit : Mars 2009

Publié : 12 / 11 / 2011