Description : UA, SasuNaru. Konoha est une mégalopole du monde moderne. Vie de jour habituelle, vie de nuit régie par différents gangs. Ceux-ci évitent de s'entretuer afin d'échapper à la police qui, sans relâche, tente de faire tomber les couvertures de leurs membres. Mais voilà qu'un jour, Naruto et Sasuke, de deux gangs différents, apprennent tous deux les activités illicites de l'autre.

Disclaimer : Naruto appartient à Masashi Kishimoto. Je ne tire aucun profit pécuniaire de cette fanfiction.

Mot de l'auteur : Bonjour à tous ! Je vous présente aujourd'hui Le venin, une fanfiction de sept chapitres inspirée de Roméo et Juliette – mais il ne s'agit que d'une inspiration, pas vraiment d'une réécriture – et du monde des yakuzas.

Je pense que certains d'entre vous me connaissent pour mes deux three-shots et mes chapitres longs – de soixante à cent trente pages. J'espère que vous ne serez pas trop déçus par la taille de ceux de cette histoire. C'est une vraie volonté de ma part. Car des échéances de presque un an ont découragé, à mon avis, certains lecteurs et j'ai trouvé cela très dommage. De cette façon, vous aurez plus souvent de mes nouvelles et les textes beaucoup plus rapidement.

Quant au récit, je vous prie de m'excuser des quelques incohérences qui pourraient s'y trouver. C'est la première fois que je me frotte au vocabulaire des armes et aux explosifs – et même au monde mafieux. J'ai un regard très novice et très naïf sur la chose. J'espère néanmoins que vous apprécierez cette histoire.

Je vous souhaite une excellente lecture et n'hésitez pas à commenter.

Amicalement,

Désespérine


LE VENIN

Chapitre 1


« Sasuke ! »

Le nom se répercuta dans la nuit et le long des ruines du vieux Temple du Nord. Sasuke s'arrêta. Il avait atteint la périphérie de la ville. Mis à part les colonnes de pierre et les arcs à moitié défaits, il n'y avait rien alentour. Que des champs à perte de vue qui semblaient une mer noire d'encre sans la lumière de la lune, absente du ciel ce soir-là.

Le bruit d'une respiration hachée et des pas résonnant sur les pavés l'obligèrent à se retourner. Naruto cessa sa course à trois mètres de lui et ses épaules se secouèrent comme il tentait de reprendre son souffle. Ses mèches blondes avaient un éclat flavescent à la lumière des lampadaires et ses grands yeux bleus brillaient d'incompréhension, d'un reste d'espoir et d'angoisse.

Sasuke retint une grimace. Il s'obligea à garder un visage impassible. Lentement, sa main droite se porta à l'arrière de son pantalon. Coincée dans sa ceinture, son arme était bien là. Il s'en saisit et, avec dextérité, la pointa sur Naruto. Celui-ci eut un sursaut en avisant la pointe du pistolet. Ses yeux s'écarquillèrent et son corps entier se figea de stupeur.

Puis, lentement, son regard glissa du canon au visage de Sasuke. Ses traits se délestèrent de la surprise pour endosser une triste résignation. Il imita le geste de son vis-à-vis, empoigna sa propre arme. Ses doigts se crispèrent autour, ses yeux se voilèrent à peine de regret. Avec une lenteur exaspérante, son bras se leva.

Et il le mit en joue.


LE CHŒUR. – Deux familles, égales en noblesses,

Dans la belle Vérone, où nous plaçons notre scène,

Sont entraînées par d'anciennes rancunes à des rixes nouvelles

Où le sang des citoyens souille les mains des citoyens. (Prologue)


Huit mois plus tôt

En fronçant les sourcils, Iruka Umino s'empara du journal qui traînait là et le débarrassa de la poussière qui le recouvrait d'un large revers de la main. Les Presses de Konoha affichait en une les photos des dirigeants du gang des Tigres qu'Escalus venait de démanteler.

« Le troisième, ce mois-ci, murmura-t-il. »

Sa mâchoire se crispa d'inquiétude et il ouvrit fébrilement le journal pour parcourir ses pages. Partout, il n'était question que des exploits d'Escalus. On parlait ici de l'exécution publique de deux anciens tueurs à gages, on parlait là des pistes que la police suivait pour détruire la couverture des membres du célèbre gang des Aigles, de longues colonnes retraçaient la vie de quelque puissant qui était parvenu à se jouer de tous et que nul n'aurait soupçonné tenir les rênes d'un regroupement de malfrats la nuit venue. De gigantesques portraits montraient des visages obscurs, décidés, presque effrayants. Il était dit que la méfiance était de mise, qu'il ne fallait se fier à personne, que tout soupçon devait être rapporté. Un voisin pouvait être un revendeur de drogues, un collègue pouvait être le maître d'une suspicieuse maison close. De grands titres assenaient sans cesse qu'il s'agissait du plus grand fléau que la ville eût connu. Et partout, on ne lisait que des incitations – à la délation.

Iruka rejeta brutalement le quotidien, comme s'il s'était brûlé les doigts sur son papier. Il serra les poings. La situation des gangs de Konoha n'avait jamais été aussi mauvaise.

Konoha était la resplendissante capitale du pays du Feu. Il n'y avait pas plus grande ville dans le monde connu. On y trouvait une densité de population incroyable, de nombreuses opportunités de réussite. Ses immenses buildings brillaient à l'éclat du soleil, sa forêt était luxuriante, la richesse de son sol, populaire. On saluait son architecture, son art, son savoir-faire. Les plus grands événements y avaient lieu, les plus grands intellectuels se réunissaient dans ses réputés bibliothèques et centres de recherche, les plus grandes célébrités venaient y profiter de festivals et salons en tout genre. On s'y réunissait pour parler économie, politique, environnement, paix. Rien qui ne fût pas respectable.

Mais Konoha avait un vice : sa vie, le jour, n'avait, certes, rien de bien extravagant. Elle se métamorphosait cependant la nuit venue et le péché envahissait ses rues. On ne comptait plus le nombre de marchés noirs : prostitution, commerces illicites d'armes, de corps, d'enfants, meurtres, complots, alcool et drogue. Il suffisait de s'aventurer dans les bons quartiers et de s'adresser aux personnes adéquates pour trouver ce que l'on souhaitait.

C'étaient les différents gangs qui se partageaient la ville qui avaient la mainmise sur ce genre d'activités. Mais les rivalités, la jalousie, la corruption, les alliances et les trahisons ainsi que les guerres de territoires avaient durant des décennies plongé la population dans un bain de sang.

Excédé par cette image qui ne le servait pas, par les mises en garde d'instances internationales et par les complaintes du peuple, le gouvernement avait décidé, des années plus tôt, d'en finir et était arrivé avec la solution suprême : un groupe d'élite armé spécialisé dans l'espionnage et la défense. Il avait été baptisé Escalus et son objectif était l'annihilation de tous les gangs de la ville. Jadis, les membres de ceux-ci se montraient au grand jour ; il avait depuis fallu se montrer discret, se constituer une couverture suffisante pour ne pas être repéré : il fallait être instituteur, comme Iruka l'était, ou bien un étudiant désargenté qui avait tendance à beaucoup sortir pour échapper à la vigilance des troupes qui surveillaient la cité.

Les gangs de la ville avaient également conclu un pacte : nul ne devait chercher à nuire aux autres sous peine de créer une guerre qui attirerait l'attention. Les différents membres, enfin, ne pouvaient plus communiquer entre eux que sur des réseaux sécurisés et n'agir que s'ils étaient masqués.

Cependant, rien de tout cela n'avait suffi et d'une centaine de gangs, le milieu était passé à une quinzaine, tout au plus, en quinze ans. Bien sûr, dès que l'un d'eux disparaissait, les autres se partageaient son trafic et l'affaire ne faisait que les enrichir. Mais les temps s'obscurcissaient et Iruka n'étais plus si sûr que le gang du Soleil, auquel il appartenait, fût capable de durer plus longtemps.

Ce jour-là, il avait terminé sa classe un peu plus tôt. C'était le dernier jour de cours avant les vacances d'été et il avait fait cette fleur aux enfants tout autant qu'aux parents. Il en avait bien sûr profité pour rouler hors de la ville et gagner un hangar en apparence désaffecté qui servait de stock d'armes au beau milieu du Désert du Sud. Un nouveau chargement venait d'arriver et il fallait désormais répartir le tout pour pouvoir le livrer aux différents clients qui faisaient appel à eux.

Iruka essuya du poignet la sueur qui perlait à son front. Il mourait de chaud sous la structure de métal et de tôle. Ses compagnons, autour de lui, s'affairaient autour de gros véhicules blindés. Il s'appuya contre la remorque de l'un d'eux, las sans bien comprendre pourquoi.

Il commençait à dodeliner de la tête lorsqu'un curieux bruit de moteur se fit entendre au loin. Aussitôt, plusieurs hommes portèrent la main à leur arme et se dirigèrent vers l'entrée du hangar pour tenter d'apercevoir le véhicule qui roulait à toute allure vers eux, entouré de la poussière qu'il soulevait sur le chemin. Puis l'un d'eux leva le bras et l'agita en criant :

« C'est rien, c'est le Quatuor Noir ! »

Plusieurs murmures de mécontentement fusèrent tandis que d'autres s'affaissaient contre les coffres renfermant les armes en soupirant de soulagement. Iruka eut un sourire amusé et leva les yeux au ciel. Il fallait toujours que le Quatuor Noir fît parler de lui.

La petite voiture décapotable noire, d'un autre temps et que les membres du groupe avaient longtemps réparée, surgit sous le hangar et effectua un dangereux dérapage qui obligea certains hommes à se reculer en rouspétant contre les quatre jeunes qui étaient à bord et, manifestement, s'amusaient bien de leur petit tour. Le sourire aux lèvres, ils les saluèrent avec force cris et gestes de la main. Kiba Inuzuka, futur vétérinaire, lunettes de soleil sur le nez, les cheveux bruns en bataille, était au volant. A côté de lui, Choji Akimichi, apparemment peu à l'aise face à la conduite sportive de son ami, ouvrait la portière avec une main tremblante ; et lorsqu'il se redressa, Iruka nota avec amusement qu'il avait encore pris de l'embonpoint. A l'arrière, Shikamaru Nara, un petit génie en informatique qui, à ses heures perdues, donnait quelques cours dans le domaine à des lycéens et des étudiants ou bien piratait quelque système pour le compte du gang, s'étirait en marmonnant il ne savait quels termes. Déjà débout et prêt à sauter hors de la voiture, Naruto Uzumaki, enfin, aux cheveux blonds resplendissants et aux joues marquées de trois cicatrices – dont nul ne savait l'origine mais qui avaient sans doute été une façon de marquer le nourrisson qui avait été déposé au pied d'un orphelinat d'infamie -, balayait de ses grands yeux bleus l'espace. Lorsqu'il le reconnut, son visage parut s'illuminer.

« Monsieur Umino ! »

Les autres garçons s'agitèrent à l'entente de son nom et tous s'empressèrent de le rejoindre en riant et en se tenant les épaules. Iruka retint un soupir et se contenta de secouer lentement la tête. Il croisa les bras et lorsqu'ils furent tout près de lui, les reprit :

« Vous n'avez vraiment que ça à faire de venir nous embêter alors qu'on vient de recevoir le plus gros chargement de l'année ? »

Les garçons s'arrêtèrent, surpris, et jetèrent un œil alentour pour aviser les visages sombres et accusateurs des hommes s'affairant. Ils revinrent à lui, sourcils haussés et yeux exorbités.

« Mais enfin, monsieur… tenta Naruto.

-Non, je ne veux rien savoir, le coupa Iruka.

-On voulait juste aider ! On a aucune mission, en ce moment… se plaignit Kiba.

-Oui, on ne pensait pas déranger, murmura Choji en se tordant les doigts. »

Iruka baissa la tête et retint un autre soupir. Il avait connu ces quatre jeunes, aujourd'hui âgés de vingt-deux ans, quand ils en avaient huit. Il avait été leur instituteur durant une année complète et les avait toujours couvés d'une façon particulière. Kiba, Shikamaru et Choji venaient tout trois de familles depuis toujours impliquées à différents niveaux dans le gang du Soleil. Il savait donc pertinemment qu'un jour ou l'autre, il les côtoierait ainsi. Naruto, quant à lui, vivait à l'orphelinat de la ville. On ne savait rien de ses parents : son père était à ce jour inconnu mais on avait été capable de déterminer qui était sa mère. Elle avait été retrouvée morte à quelques rues de l'orphelinat où l'enfant, les joues sanglantes et tout juste marquées, avait été abandonné.

Très vite, il s'était lié d'amitié avec les trois autres. Et puisqu'ils lui faisaient confiance, ils lui avaient tout révélé au sujet du gang du Soleil et des activités illicites auxquelles leurs parents et eux-mêmes se prêtaient. Dès lors, Naruto n'avait plus voulu qu'une chose : en être membre lui aussi. D'une part parce qu'il avait enfin l'impression, depuis qu'il avait rejoint le gang, d'avoir une famille. Tout le monde, en général, l'appréciait. Et il profitait plus encore de ses amis. A eux quatre, ils formaient une petite équipe de ce qu'on appelait « intimidateurs ». Ils ne tuaient pas. Ils n'étaient chargés que de rappeler leurs dettes à ceux qui devaient de l'argent au gang. D'autre part parce qu'il avait très vite arrêté ses études. Sorti du lycée, il était devenu serveur dans un petit café du centre et n'avait plus jamais quitté ce travail. Cela rapportait peu, même pour payer le misérable studio dans lequel il vivait. Mais son activité d'intimidateur lui permettait de gagner des sommes liquides assez importantes dont il utilisait une partie pour tout ce qui était nécessaire à sa survie et le reste pour sortir et s'amuser.

Naruto n'avait que ses amis et le gang du Soleil dans sa vie. Et bien qu'il fût sans doute dans le même cas, Iruka, à cet instant, trouvait cet état de fait d'une tristesse inouïe.

Les garçons, devant lui, s'étaient mis à s'agiter et à parler bruyamment entre eux. L'instituteur fouilla dans sa poche gauche et en sortit ce qui ressemblait à un bipeur amélioré. Il alluma l'appareil et sembla fouiller une page où diverses annonces étaient postées et apparaissaient en gros titres courts et synthétiques. Son visage s'illumina.

« Pas de mission, hm ? »

Les membres du Quatuor s'arrêtèrent et lui jetèrent un regard teinté d'incompréhension. Il leur désigna son bipeur.

« Regardez un peu les annonces, avant de décréter une chose pareille. »

Les jeunes hommes, un temps, restèrent interdits. Puis un tressaillement les prit et ils cherchèrent avec fébrilité leurs propres appareils. Lorsqu'ils eurent, comme lui, consulter les missions proposées par les dirigeants, ils s'entreregardèrent. Shikamaru hocha la tête et sélectionna l'annonce.

« On prend, dit-il en relevant les yeux vers Iruka.

-Merci, monsieur ! s'exclama Naruto en faisant mine de le prendre dans ses bras. »

L'instituteur le repoussa.

« Oui, oui, j'ai compris. Filez, bons à rien ! Ça doit être réglé ce soir.

-Yes ! s'écria Kiba en levant le poing. Enfin, ça va bouger ! Tous à vos armes, on est partis ! »

D'un même mouvement, sourire aux lèvres et joie dans les yeux, ils retournèrent à la voiture dans laquelle ils sautèrent sans même ouvrir les portières – excepté Choji qui, du fait de sa corpulence, ne pouvait pas se permettre ce genre de prouesses. Le véhicule démarra en trombe, ses pneus crissant un instant avant de le propulser en avant. En quelques secondes, ils disparurent du hangar. Leurs cris parvinrent à Iruka encore longtemps sous forme de brefs échos. Les mains sur les hanches, il observa quelque temps l'entrée du hangar, souriant et pourtant dépité.

Il jeta un dernier coup d'œil à son bipeur où il était indiqué que l'annonce était pourvue. C'était bien un travail pour des intimidateurs. Le patron d'une petite entreprise sur les docks leur devait une belle somme d'argent et ne les avait plus contactés depuis plusieurs semaines. Iruka éteignit l'appareil. Puis leva la tête lorsqu'on l'appela à l'autre bout du hangar.

« J'arrive ! cria-t-il. »

Le bipeur fut bien vite rangé dans sa poche et il se mit à courir, laissant derrière lui Les Presses de Konoha et ses sombres annonces.


Le réveil sagement posé sur la commode indiqua vingt heures et se mit à sonner. Sasuke, assis depuis plusieurs minutes sur son lit, les mains entrelacées et nerveusement serrées sur ses genoux, ne sursauta pas même à l'entente de son alarme et resta encore un temps dans cette position, le dos bien droit, légèrement penché en avant, les épaules à peine voûtées, ses yeux noirs fixés sur le mur qui lui faisait face. Il avait baissé les stores derrière lui et la lumière du soleil chaud de fin de journée ne passait que par rais dans sa chambre. Dos à la fenêtre, il observait sa silhouette ténébreuse qui se découpait sur le mur blanc. Puis il prit une brève inspiration, éteignit l'appareil, se leva et passa une main fatiguée dans ses cheveux sombres dont les mèches s'éparpillaient sur son front et ses tempes.

Vêtu d'un tee-shirt à manches courtes près du corps noir et d'un jean de même couleur, il semblait plus morose que jamais. Son visage s'obscurcit tandis qu'il se saisissait de son pistolet semi-automatique négligemment laissé sur son bureau. Armé d'un chiffon, il nettoya brièvement le canon avant de fouiller dans ses tiroirs pour en sortir plusieurs cartouches. D'un geste sûr, il en arma une, fit glisser la culasse avant de la relâcher. Dans un bruit sec, la première munition gagna la chambre. Il se retourna subitement et pointa son arme sur la tête de lit.

Il resta un long temps ainsi, concentré sur sa cible, la respiration lente et régulière, les muscles bandés et le bras droit, la main solidement refermée autour de l'objet. Puis un bruit attira son attention. Jetant un œil par-dessus son épaule gauche, il avisa le bipeur à moitié caché dans sa trousse d'étudiant. L'appareil se mit à clignoter. Sans le quitter des yeux, il abaissa son pistolet. Puis il se tourna à peine pour s'en saisir et s'appuya nonchalamment contre son bureau. Bientôt, le petit écran s'illumina et l'annonce apparut sous ses yeux.

C'était une adresse directe : un assassinat. Celui d'un certain Danzo Shimura, propriétaire d'une petite entreprise de construction de bateaux. Il devait se trouver ce soir encore dans son hangar : le numéro 8 sur les docks. Il cliqua sur le lien et la photo de l'homme apparut, accompagnée d'une brève fiche relatant sa vie et ses activités professionnelles.

Sasuke ne fut pas long à se décider. Il accepta l'annonce et, dès que son bipeur fut éteint, alla ouvrir l'armoire à côté du bureau pour en sortir une tenue appropriée à sa sortie. Caché sous plusieurs couvertures, il trouva son masque. De forme ovale, accompagné d'une solide mais fine sangle, son fond était blanc. Sur le milieu du front, un large kanji noir s'étalait pour former le mot « aigle ». Sur les tempes, deux animaux se faisaient face : un long serpent d'argent s'étalait sur la gauche, la tête étant à hauteur de l'œil et la queue allant jusqu'à la pointe du menton ; un aigle brun et or, serres en avant et ailes largement écartées, prenait place à droite. Enfin, en bas de l'oiseau, un petit 1 avait été tracé au marqueur.

Sasuke appartenait au gang des Aigles et à l'équipe Hebi dont le serpent était le symbole. Le numéro, quant à lui, indiquait qu'il en était le meilleur agent. Ses doigts se crispèrent autour du masque tandis qu'il se remémorait celui qui avait appartenu à son père, quelques années plus tôt. Puis il se reprit, saisit un large sac de sport dans lequel il plaça le tout et quitta la chambre.

Il avait un homme à tuer.


Kiba arrêta la voiture à une centaine de mètres du hangar numéro 8. En surplomb des docks, au bout d'un petit plateau désertique qui formait comme un terrain vague, les membres du Quatuor Noir pouvaient apercevoir, plus bas, les bâtiments qui s'étendaient le long du large fleuve qui traversait la ville de part en part. Ils marquaient l'extrémité de la capitale, juste avant la forêt qui l'enceignait au nord. Avachi sur le volant, Kiba observait le tout avec un air concentré qui lui était inhabituel. Choji fut le premier à le remarquer et l'interpella.

« Kiba ? Qu'est-ce qu'il y a ? »

Le jeune homme lui coula un rapide regard avant de se laisser aller contre son siège en soupirant.

« Rien… C'est juste que des fois, je me demande ce que ça ferait, si j'étais autre chose qu'intimidateur. »

Shikamaru haussa un sourcil et Naruto s'exclama aussitôt, en agrippant l'appui-tête de son ami d'enfance :

« Quoi ? Tu veux quitter le Quatuor ? »

Kiba grimaça et le repoussa en grognant.

« Mais non, abruti ! C'est juste que je me dis qu'avec notre potentiel, on pourrait faire bien plus que juste rappeler à des gens qu'ils nous doivent des thunes.

-C'est-à-dire ? »

Kiba se retourna sur son siège pour observer l'air attentif – et soucieux – de Shikamaru.

« Tu voudrais passer tueur à gages ? lui demanda ce dernier. »

Kiba haussa les épaules.

« Pourquoi pas ? »

De tous, ce fut le visage de Naruto qui se rembrunit le plus. Il fixa intensément Kiba – jusqu'à ce que celui-ci, sentant peser sur lui son regard, se tournât vers lui.

« Sérieusement ? demanda le jeune blond d'une voix difficilement maîtrisée. Tu serais prêt à tuer des gens ? »

Kiba fronça les sourcils.

« C'est pas ce que je voulais dire…

-Ah bon ? Parce que maintenant, les tueurs à gages, ça fait autre chose ? »

Kiba voulut ouvrir la bouche pour protester mais Naruto était déjà sorti de la voiture. Il chargea son arme et se retourna vers ses amis.

« C'est pas parce qu'on fait partie d'un gang qu'on doit forcément tuer des gens ! »

Il fit le tour de la voiture jusqu'à rejoindre le coffre qu'il ouvrit prestement. Il en sortit quatre cagoules. Sur le front de chacune se trouvait une petite plaque de métal sur laquelle était gravé un animal accompagné d'un soleil qui indiquait à quel gang ils appartenaient. Il rabattit brutalement le battant et s'appuya dessus.

« Tu fais ce que tu veux. Mais il est hors de question que je devienne un tueur. »

Puis il jeta à Kiba sa cagoule. Une tête de chien aux crocs proéminents s'y dessinait. Le jeune homme l'observa longuement avant de relever les yeux vers Naruto qui, rejoints par Shikamaru et Choji, distribuait les autres camouflages. Ils étaient, pour eux trois, respectivement représentés par un renard, un cerf et un glouton. Ils les enfilèrent promptement avant de vérifier leur armement. Kiba sortit de la boîte à gant de petites grenades incendiaires pas plus grandes qu'un cochonnet et les fit rouler entre ses doigts, l'air contrarié. Shikamaru, sentant l'atmosphère s'alourdir et avisant le jour qui déclinait, l'invita à sortir de la voiture d'un geste de la main.

« Allez, c'est bon. On en parlera plus tard, d'accord ? Chacun est libre de faire ce qu'il veut dans le gang. Mais pour l'instant, on forme une équipe et notre rôle, c'est d'aller réclamer à Shimura les vingt mille qu'il nous doit. Ok ? »

Naruto hocha sèchement la tête et Kiba se contenta d'enfiler sa propre cagoule et de faire glisser la culasse de son arme.

« Paré ! »


A cette heure-ci, peu de gens travaillaient encore. Danzo Shimura semblait être une exception et une dizaine d'ouvriers s'affairait encore dans le hangar. Sans doute un retard dans une commande, songea Shikamaru. D'un geste du menton, il indiqua la route à suivre à ses compagnons. Le Quatuor Noir sortit de l'ombre et gagna l'entrée du hangar.

Plongés dans leurs tâches, les travailleurs ne les virent pas immédiatement. Puis Kiba les héla et les quatre garçons exhibèrent leurs armes.

« Messieurs, dit Shikamaru sur un ton monocorde, nous avons à faire avec votre patron. Nous vous prions donc de quitter les lieux dans le plus grand calme. »

Un lourd silence s'abattit sur le hangar. Puis, lentement, les ouvriers lâchèrent leurs outils, cessèrent leurs activités et, timidement, tout en commentant les pistolets dont les jeunes étaient armés et leur insigne qui les désignaient comme membres du gang du Soleil, ils passèrent à côté d'eux, l'air intimité et laissant une distance plus que raisonnable entre eux. Les derniers sortirent en courant et en poussant de terribles cris. Shikamaru observa la montre qu'il portait au poignet.

« On a cinq minutes. C'est parti. »

Ils s'avancèrent. Au fond du hangar, construit sur une plateforme surélevée, le petit bureau de Danzo Shimura se dessinait. Il y avait fort à parier qu'il ne les avait pas vus arriver.


Danzo Shimura était à la tête d'une petite entreprise. Il contrôlait une cinquantaine d'ouvriers et peinait encore à se faire connaître dans son domaine. Néanmoins, il était homme ambitieux et n'avait pas hésité, lorsque ses finances avaient été au plus bas, à se lier plus ou moins d'amitié avec quelques puissants personnages aux activités plus que douteuses.

C'était ainsi qu'il était entré en contact avec le gang du Soleil. De dangereux êtres qui avaient eu l'air assez intéressé par ce qu'il était capable de faire – et par le fait qu'il pût passer en douce certaines de leurs marchandises. On lui avait prêté une importante somme d'argent. Danzo l'avait rapidement investie. Avait su la faire fructifier. Mais n'avait pas songé à la rendre immédiatement. Il fallait, avant cela, qu'il eût suffisamment mis de côté pour rebondir sans leur aide et peut-être faire pression sur eux quant aux avantages qu'il pouvait leur permettre.

Mais il avait oublié à quel point les gangs pouvaient être impatients. Intimidé, il avait fini par couper tout lien en se disant que cela lui donnerait plus de temps pour constituer une base solide et ainsi repousser son remboursement.

L'agitation de ses ouvriers, dont certains travaillaient sous ses fenêtres, l'avait obligé à lever les yeux du cahier où il tenait ses comptes. Intrigué par leur départ précipité, il s'était levé et s'était approché de sa baie vitrée. A l'autre bout du hangar, il avait aperçu les silhouettes de quatre hommes. Les cagoules et le symbole clair du Soleil l'avaient fait déglutir avec nervosité. Et il se retrouvait ainsi, figé de stupeur et de crainte, devant sa large fenêtre. Il n'y avait nul doute : le gang avait envoyé des intimidateurs pour l'obliger à rendre l'argent emprunté.

Un grognement lui échappa et il recula à peine, calculant le pourcentage de chances qu'il avait de s'échapper sans être vu. La porte qui menait à son bureau n'était pas du côté du fleuve. Mais bien de celui de ces hommes.

Il se dirigeait néanmoins vers elle lorsqu'un grincement attira son attention. Il s'arrêta, le cœur battant, et se tourna lentement vers le fond de son bureau où une large armoire trônait. La porte s'ouvrit lentement dans un terrible geignement. Puis une silhouette entièrement vêtue de noir apparut, portant un masque qu'il décrypta en bien peu de temps. Il sentit la sueur rouler sur sa peau et tenta de s'adjoindre au calme.

La personne, face à lui, dégagea la légère cape qu'elle portait vers l'arrière. Son bras, couvert par la combinaison qu'elle portait jusqu'aux extrémités des doigts, apparut, tendu vers lui. Et la main qui le terminait tenait une arme. Un magnifique pistolet semi-automatique dont l'éclat argenté le fit frémir de terreur.

Il revint au masque et, après une brève inspiration, demanda :

« Qu'est-ce que le gang des Aigles me veut ? Je ne traite pas avec eux. »

La silhouette n'eut aucune réaction, comme de marbre, et répondit après un temps, d'un ton que le masque déformait :

« Peu importe avec qui vous traitez. Vous avez déplu à quelqu'un. Et il se trouve que ce quelqu'un nous paie pour vous éliminer. »

Danzo tressauta violemment. Son regard revint au canon de l'arme pointée sur lui. Son cœur s'emballa, résonnant dans ses tempes, dans ses lèvres. Sa respiration s'accéléra. Il coula un rapide regard vers la baie vitrée, à sa droite, puis revint à la silhouette qui, pas à pas, s'approchait de lui. Il serra les dents, se recroquevilla à peine. Son pied gauche glissa légèrement sur le sol. Ses jambes fléchirent. Et, d'une incroyable poussée, qui surprit son assassin, il se jeta sur la baie.

Au dernier moment, ses bras se refermèrent sur son visage. Son épaule et son flanc droits cognèrent la vitre. Le verre se brisa et il bascula.


Le soudain bruit de verre brisé attira l'attention des quatre amis. Ils virent alors, droit devant eux, le corps de Danzo Shimura chuter de son bureau sur un tas de grosses toiles contre lequel il rebondit avant de se mettre à rouler jusqu'à terre. Les garçons, une fois leur surprise passée, se hâtèrent de le rejoindre. L'homme leva vers eux des yeux révulsés. Mais après une brève exclamation, il se redressa rapidement et se plaça derrière eux, agrippant les épaules de Naruto qui tenta de se dégager avec un air peu amène.

« Mais ! s'écria-t-il. Qu'est-ce qu'il a, ce type ? Il est pas bien ? »

Il échangea un regard étonné avec Choji et Kiba qui, les bras ballants, observaient l'homme d'affaires sans savoir que faire. Celui-ci désigna le bureau et n'eut pas besoin de s'expliquer. Shikamaru avait déjà repéré la silhouette altière qui les toisait depuis la baie vitrée détruite.

« Le gang des Aigles… murmura-t-il. »

Naruto cessa aussitôt de s'agiter pour se défaire de la prise de Danzo et releva les yeux vers l'homme. Il fronça les sourcils.

« Quoi ? On est sur la même mission ? »

Un malaise étrange saisit les quatre garçons devant ce constat. Il n'arrivait pratiquement jamais que deux gangs se rencontrassent en ayant une même cible – encore moins depuis que le projet Escalus avait été mis en place.

Dans un geste élégant, le membre du gang des Aigles rejeta sa cape en arrière. Puis il s'élança du bord de la fenêtre et sauta sur le tas en contrebas. Malgré l'appui peu fiable des toiles, il se rétablit avec une incroyable aisance et s'éleva à nouveau pour atterrir à genoux devant eux. Il se releva lentement et dévoila à tous son masque magnifiquement décoré. Shikamaru étouffa un juron et Naruto l'interrogea du regard.

« Hebi, expliqua-t-il. Une de leurs équipes de tueurs à gages. »

Naruto en resta bouche bée et leva un doigt en direction de l'homme.

« Attends… Ça veut dire qu'il est là pour tuer Shimura ? »

La bêtise de sa question irrita son équipe. Ses trois amis se tournèrent vers lui.

« C'est pas assez évident, crétin ? s'écria Kiba tandis que Shikamaru le toisait avec dépit. »

La bouche de Naruto se tordit en une brève grimace et il souffla :

« Quoi ? Il aurait pu être là pour la même chose que nous ! »

Shikamaru porta la main à sa tête, las de la naïveté de son compagnon. Puis il se tourna vers le tueur à gages qui se tenait immobile, attendant sans doute que leur attention revînt à lui. Shikamaru ne put empêcher sa main de se crisper autour de son arme. La situation le rendait nerveux. Il savait à quel point il pouvait être délicat de côtoyer le membre d'un autre gang que le sien. Un pacte reliait les dernières communautés existantes et devait leur permettre de survivre. Mais on ne pouvait vraiment dire ce qu'il en était en situation réelle. Aussi prit-il une profonde inspiration avant de s'adresser à son vis-à-vis.

« Salut à toi, ami. Nous sommes du gang du Soleil et nous n'avons pas l'intention de te combattre. »

Shikamaru fit fi des regards surpris ou outrés de ses compagnons et poursuivit :

« Cet homme est un de nos contrats. Il nous doit beaucoup d'argent et nous sommes là pour le lui réclamer. Laisse-nous faire notre mission et nous partirons. »

Le tueur resta de marbre. Seule sa cape, sous l'effet d'un courant d'air, s'agita mollement derrière lui. Puis une voix basse, que le masque déformait à peine, s'éleva :

« Salut à vous, amis. Je n'ai pas non plus l'intention de me battre contre vous. Malheureusement, cet homme est également mon contrat. Et je dois le tuer. Ce soir. »

Les quatre jeunes se raidirent à cette annonce. Shikamaru tâcha de garder contenance.

« Je comprends… dit-il. Mais si tu le tues maintenant, nous ne récupèrerons jamais notre argent. »

L'homme, face à lui, plia légèrement le bras droit. Sa main se porta à sa taille. Et derrière les pans de sa cape, Shikamaru reconnut l'éclat argenté d'une arme à feu. Il déglutit et ses yeux revinrent au masque blanc qu'il portait.

« Je n'ai que faire de votre mission, dit la voix caverneuse. Je dois tuer cet homme ce soir. Et rien ne m'en empêchera. »

Shikamaru ouvrit la bouche, chercha ses mots. Et avant qu'il eût pu dire quoi que ce fût, Naruto s'avança d'un pas, menaçant, et braqua son arme sur le tueur.

« Ça, c'est hors de question ! »

Kiba manqua s'étrangler de surprise tandis que Shikamaru s'agitait à côté de son ami.

« Qu'est-ce que tu fais, bordel ? demanda-t-il dans un murmure. »

Le regard de Naruto était fixé sur le membre du gang des Aigles. Il tenait son arme à deux mains, fermement, et la détermination qui brillait dans ses yeux bleus lui fit craindre le pire. Sans le regarder, Naruto lui dit :

« Prenez Shimura et cassez-vous. Je m'occupe de celui-là. »

Shikamaru sentit la sueur lui couler le long du dos. Sa mâchoire se crispa. Puis il marmonna entre ses dents :

« Arrête ça tout de suite ! On n'a pas le droit de causer des problèmes à d'autres gangs ! »

La prise de Naruto se resserra.

« Ce n'est pas nous qui lui en causons. C'est lui ! »

Shikamaru s'arrêta, stupéfait. Un bruissement attira son regard sur le tueur à gages. Celui-ci avait dégainé son propre pistolet et tenait à présent Naruto en joue.

« Ne joue pas à ça, dit-il de sa voix rauque. Vous n'êtes que des intimidateurs, je l'ai vite compris. Vous ne savez sans doute même pas tirer. »

Son ton était si condescendant que Naruto dut étouffer un cri de rage.

« Ça, c'est toi qui le dis ! »

Et il fit feu, visant l'épaule droite de son vis-à-vis. Celui-ci évita sa balle et riposta. Naruto s'abaissa au dernier moment et, se tournant vers ses camarades derrière lesquels se cachait toujours Danzo, il hurla :

« Courez ! »

Puis il bascula sur le côté, évitant un nouveau projectile, avant de se relever promptement, de répondre et de gagner un amoncellement de morceaux de tôle qui lui servit de protection. Il reprit son souffle puis se pencha sur le côté et tira sur la silhouette qui, à son instar, s'était réfugiée derrière un ensemble de coffres en métal.

Naruto serra les dents lorsqu'il le vit viser ses amis et Danzo qui traversaient le hangar en courant. Jurant, il sortit de sa cachette et courut vers celle de son ennemi tout en vidant sa cartouche sur lui. Il se rabattit derrière le tas de toiles, le temps de recharger son arme et de faire entrer la première munition dans la chambre. Puis il avisa la silhouette qui s'était dirigée vers une palette à roulettes sur laquelle on avait entassé plusieurs plaques de métal. Il s'abattit sur elle sans s'arrêter de courir et l'emporta dans son élan. Naruto comprit aussitôt et cria :

« Attention ! »

Ses amis ralentirent à peine pour jeter un œil derrière eux. Juché sur les plaques, le tueur à gages leur fonçait dessus. Naruto jura à nouveau et se mit à sa poursuite. Mais il était trop tard. Il suivit au ralenti la course de la palette. L'arrêt brusque de ses amis et la tenue tremblante de leurs armes. Le corps exposé de Danzo Shimura, bon dernier dans la fuite. L'arrivée du tueur. Son tir, précis.

Dans un bruit étouffé, la balle toucha l'homme d'affaires en plein milieu du front et son corps s'écroula sur lui-même. Horrifiés, Shikamaru, Choji et Kiba l'observèrent choir. Naruto leur hurla à nouveau de fuir. Et ouvrit le feu sur le tueur qui se réfugia derrière la coque d'un futur navire de plaisance. Naruto eut le temps de rejoindre ses amis et de prendre le bras de Kiba pour les obliger à aller se cacher plus loin. Mais ils se jetèrent tous à terre dès qu'une pluie de balles ricocha au-dessus d'eux. Naruto se retourna et ses yeux exorbités fouillèrent le hangar à la recherche d'une solution.

Près de lui, Kiba se mit à s'agiter, fouillant ses poches. La grenade incendiaire qu'il parvint à en extraire roula sur le sol et la main de Naruto s'abattit sur elle par réflexe. Il n'hésita qu'une seconde avant de l'activer, de viser, d'étirer le bras et, les dents serrées, de la lancer sur leur ennemi.

L'explosion enflammée qui s'en suivit projeta le corps du tueur à gages et quelques autres objets à plusieurs mètres tandis que le bateau, sous l'onde, se renversait dans un terriblement grincement. Naruto se protégea le visage des bras mais vit clairement l'homme retomber lourdement et rouler longuement sur le sol avant de s'arrêter, face contre terre, inerte.

Naruto ne perçut qu'à ce moment-là le léger sifflement qui résonnait à ses oreilles, la conversation effarée, comme étouffée, de ses compagnons. Ses yeux ne voyaient que la silhouette noire du tueur à gages. Il s'assit difficilement pour mieux l'observer. Et lorsqu'il le vit se redresser sommairement en s'appuyant sur ses bras, il s'agita lui-même.

« Vite, on se casse ! »

Le feu, autour d'eux, se propagea. Naruto aida Choji à se relever, héla Shikamaru et Kiba jusqu'à ce qu'ils les rejoignissent. Peu sûrs sur leurs jambes, les quatre compagnons sortirent du hangar en s'épaulant. Arrivé dehors, Naruto ne put s'empêcher de s'arrêter et de se retourner. Au milieu des flammes, la silhouette sombre du tueur s'était redressée et semblait le dévisager. Naruto lui rendit son regard, un sentiment fort de regret au fond de la poitrine.

« Naruto ! Qu'est-ce que tu fous ? Y'a les flics qui débarquent ! »

Naruto revint à ses amis qui l'enjoignaient à les suivre avec de larges gestes du bras. Rapidement, ils remontèrent la pente jusqu'à la voiture et démarrèrent en trombe.

A l'entrée des docks, les sirènes des voitures de police retentissaient.


Sasuke s'était relevé avec force difficultés. Le hangar, tout autour de lui, s'enflammait. Il entendait, au loin, les sirènes. La police serait bientôt là. Il devait fuir. Mais alors qu'il se retournait pour gagner le fond du hangar, ses yeux tombèrent sur des barils d'essence qu'il n'avait pas remarqués, alignés le long du mur, près de la première cachette de son ennemi – et que les flammes étaient près d'atteindre.

« Merde ! »

Repoussant sa cape qui le gênait dans ses mouvements, il rangea avec précipitation son arme et prit ses jambes à son cou. Il traversa avec une vélocité extrême le hangar. Repoussa les portes. S'élança sur le ponton qui se trouvait là. Derrière lui, une nouvelle explosion retentit, plus forte, plus importante. L'arrière du bâtiment vola en éclats et la force de l'onde le souleva de terre et le propulsa en avant. Il eut à peine le temps de se recroqueviller avant de tomber dans le fleuve.

Il s'enfonça dans les eaux noires en fermant les yeux et attendit d'avoir perdu de l'élan pour battre des jambes et remonter à la surface. Lorsqu'il immergea, il se débarrassa de son masque qui avait glissé vers le haut de son crâne, prit une grande goulée d'air et se tourna vers le hangar. De larges flammes finissaient de le dévorer. Au-delà de leur bruissement, des exclamations étouffées lui parvinrent. Soucieux de ne pas être repéré, il récupéra son masque et nagea à la va-vite vers la rive opposée, là où la forêt commençait.

Une fois sur la berge, il sortit avec précipitation du fleuve. Mais sa combinaison et sa cape gorgées d'eau s'étaient alourdies et il s'écroula sur l'herbe, sonné et épuisé. Il bascula sur le dos, prit le temps de récupérer son souffle, passa une main nerveuse sur son arme, qu'il avait précipitamment rangée sur son côté droit en fuyant. Puis se redressa, prêt à reprendre sa course à travers les bois. Une grimace se dessina sur ses lèvres lorsqu'il se releva. Ses côtes lui faisaient mal. Il devait avoir quelques égratignures et hématomes. Peut-être quelque chose de plus grave.

« Tout ça pour ça… murmura-t-il en serrant les dents de douleur. »

Il gagna malgré tout l'orée de la forêt et disparut dans la nuit tombante.


ROMEO. – Il se rit des plaies, celui qui n'a jamais reçu de blessures ! (Acte II, scène 2)


Désespérine