Tomas Plekanec, comme à son habitude, était arrivé au centre d'entraînement une demi-heure à l'avance. Il avait eu le temps d'enfiler tout son équipement et son uniforme d'entraînement et même de faire plusieurs allers-retours sur la patinoire avant que deux de ses coéquipiers, le gardien Carey Price et le défenseur Josh Gorges, ne viennent le rejoindre. Tomas freina au centre de la glace et attendit qu'ils le rejoignent, Carey patinant avec aisance malgré son équipement de gardien de but.
— Rappelle-moi ce qu'on fait ici ? demanda Josh en arrivant à côté de Tomas. Je pensais qu'il n'y avait pas d'entraînement cet après-midi.
— On nous a demandé d'apprendre à jouer au hockey à un club qui s'appelle « l'équipe de Quidditch de Gryffondor ». Ils ont gagné un concours dans leur école, d'après ce que j'ai compris. Ah, les voilà justement.
Les trois joueurs se tournèrent comme un seul homme vers le banc des joueurs, où sept jeunes sautaient sur la glace. Tomas haussa un sourcil en voyant le spectacle qui s'offrait à lui. La première des filles qui s'avançait vers lui – Angelina, d'après l'étiquette qui était collée sur son casque – avait mis son maillot à l'envers. La blonde, elle, avait enfilé ses épaulettes par-dessus son chandail. Olivier ne portait qu'un gant et un des roux – des jumeaux, visiblement – avait mis son casque dans le mauvais sens.
Retenant un rire, Tomas s'avança vers ce dernier et lui replaça son casque.
— Dans ce sens… George.
Ils passèrent les dix prochaines minutes au banc des joueurs à rhabiller les apprentis hockeyeurs, trouvant le gant perdu d'Olivier, rattachant les patins d'Alicia, trouvant une paire de shorts à Harry qui n'étaient pas trop larges pour lui et confisquant à Fred la poignée de poudre à gratter qu'il s'apprêtait à glisser dans le chandail de Katie. Enfin, ils furent tous prêts et purent retourner sur la glace, se plaçant en rang devant leurs trois instructeurs comme de sages élèves.
Peu habitué à se retrouver au centre de l'attention, sentant neuf regards peser sur lui en attendant qu'il parle, Tomas sourit pour se donner une contenance. Un fracas lui fit tourner la tête. Katie venait de tomber sur les fesses.
— Je – je ne sais pas ce qu'il s'est passé, bégaya-t-elle en se relevant, les joues rouges.
Josh alla l'aider à se remettre debout pendant que Tomas commençait ses explications.
— Tout d'abord, dans une équipe de hockey, il a trois attaquants.
Les trois filles levèrent la tête, semblant se reconnaître dans ce rôle. Tomas se tourna alors vers elles.
— Un centre et deux ailiers, continua-t-il. Leur objectif est bien sûr de marquer des buts.
Angelina regardait autour d'elle, semblant chercher quelque chose.
— Avec quoi ?
— Avec quoi quoi ? répondit Tomas, perplexe.
— Avec quoi on marque des buts ? Je ne vois pas de ballon.
— Oh, avec ça !
Tomas leur montra la rondelle de caoutchouc avec laquelle ils joueraient et les trois filles s'avancèrent vers lui avec moult exclamations de surprise, comme s'il tenait dans son gant le haricot magique de Jack. Il envoya un regard incrédule à Josh et Carey, qui le regardaient en se mordant la lèvre pour ne pas rire. Il ne put s'empêcher de sourire à son tour.
BOUM !
— Vraiment, je ne sais pas ce qu'il m'arrive, je n'arrive pas à me tenir debout, disait Katie, à nouveau les quatre fers en l'air.
Une fois que tout le monde fut replacé, Tomas hocha la tête vers Josh, lui indiquant de prendre la parole.
— Après les attaquants, il y a deux défenseurs.
Ce fut au tour des jumeaux roux de lever la tête.
— Eux doivent empêcher l'équipe adverse de marquer, en coupant les passes, en les gênant pour qu'ils ne puissent pas s'installer dans le territoire…
— Et en les frappant ? demanda Fred en levant son bâton, un sourire carnassier sur les lèvres.
— Euh… non, si vous les frappez, vous allez être punis.
— Sérieusement ? dit son frère. C'est nul comme jeu ! Si on ne peut frapper sur rien avec ces bâtons, où est l'intérêt ?
Josh bafouilla quelques secondes, pris au dépourvu. Carey éclata de rire devant la déconfiture de son coéquipier et Tomas sourit largement, se disant qu'au moins il n'aurait pas à s'occuper de problèmes de violence avec ses trois attaquantes.
BOUM !
— Je vais finir par avoir un bleu aux fesses si ça continue !
Cette fois-ci, Tomas aida la jeune fille à se relever pendant que Carey s'adressait à Olivier, celui qui était arrivé sur la glace en tenue de gardien de but.
— Le gardien de but sert, comme son nom l'indique, à garder les buts.
Ils le regardèrent, attendant la suite.
— Euh… ce but-là, finit Carey en pointant vers le bout de la patinoire de son bloqueur.
Tout le monde se tourna dans la direction indiquée par le gardien.
— C'est tout ? demanda Olivier, une pointe de déception dans la voix. Il y en a juste un ?
— Eh bien, oui, répondit Carey en riant. Tu en voulais trois ?
— En plus il est tout petit, ça doit être trop facile.
Le visage de Carey se vida de son sang avant de redevenir rouge comme une tomate.
— Trop facile, c'est ça ouais, maugréa-t-il. Oh et toi, arrête de rire !
Il envoya un coup de bâton dans les jambes de Josh qui s'écroula sur la glace, sans pour autant calmer son fou rire. Tomas sourit et secoua la tête devant les pitreries de ses coéquipiers. À nouveau, il entendit Katie tomber derrière lui, mais cette fois personne n'y prêta attention.
Quand tout le monde fut plus ou moins calmé et de couleur normale, Tomas se tourna vers les apprentis hockeyeurs.
— Et voilà les joueurs d'une équipe de hockey, dit-il. Des questions ?
Une main se leva au bout de la rangée d'élèves. Ils se tournèrent tous pour le regarder, ayant oublié la présence d'un septième jeune sur la glace.
— Et moi, je fais quoi ? demanda Harry.
— Euh…
Tomas échangea un regard confus avec Carey et Josh. À six joueurs, ils pouvaient faire une équipe. Mais à sept…
— Pour l'instant, tu ne sers à rien, finit par déclarer Tomas. Va t'asseoir là-bas.
Harry patina vers le banc des joueurs en bougonnant. Il n'avait pas l'habitude de ne servir à rien, ça le déstabilisait.
— Bon, alors j'imagine que la première chose à faire est d'apprendre à patiner avec facilité, reprit Tomas. Certains d'entre vous n'ont pas l'air à l'aise sur des patins.
Il jeta un regard à Katie en disant ces derniers mots, et la blonde rougit. Après quelques instants où personne ne bougea, Tomas agita les bras.
— Eh bien, patinez, qu'est-ce que vous attendez ?
Les sept se mirent à avancer dans le chaos le plus total. Même les enfants de cinq ans avec qui Tomas avait patiné la semaine précédente avaient l'air plus compétents que ça. « L'équipe de Quidditch de Gryffondor » ? D'abord, c'était où Gryffondor ? Et c'était quoi le Quidditch ? Visiblement, ça ne se jouait pas sur la glace !
Angelina et Alicia avaient avancé avec hésitation, ne faisant que quelques pas avant de tomber l'une par-dessus l'autre. Josh s'était penché pour les aider à se relever et elles s'étaient agrippées à lui, une à chaque bras, refusant de le lâcher. Au moins, le défenseur avait l'air comblé.
Fred et George, plus débrouillards, s'étaient rendus à la moitié de la patinoire. Puis, Fred – ou George, ils étaient de dos et Tomas ne pouvait plus voir leurs prénoms – avait accidentellement mis son bâton entre les pieds de son frère, le faisant tomber. Les deux brandissaient maintenant leurs bâtons comme des épées et se battaient comme ils pouvaient, neuf coups sur dix n'atteignant pas sa cible parce que le garçon perdait l'équilibre.
Quelqu'un tapota Tomas sur l'épaule.
— Regarde Olivier, lui chuchota Carey et pointant un des buts.
Le jeune homme avait mis son bâton entre ses jambes, comme s'il s'agissait d'un balai de sorcière, et faisait des allers-retours devant son filet, jetant des regards menaçants aux autres occupants de la glace.
— S'il tombe avec ça entre les jambes, coquille ou pas, il va avoir mal.
Tomas éclata de rire, espérant quand même que leurs assurances couvraient de tels accidents.
BOUM !
— Ah non mais c'est pas possible ! vociféra Katie à l'autre bout de la patinoire. Il doit y avoir quelque chose qui cloche avec mes patins !
— Il va falloir que je reste ici encore longtemps ? cria Harry depuis le banc des joueurs.
Tomas soupira et se passa une main sur le front. La journée allait être longue. Très longue…
