Celdwin – Chapitre 1 : La Compagnie du Vent Bleu

Les derniers hurlements de souffrance moururent dans la plaine. Tous les Orques étaient morts, tués par la Compagnie du Vent Bleu. Le chef des mercenaires releva son imposant masque à la crinière rouge sang laissant apparaître un visage aux traits anguleux, aux yeux bleus comme la glace et à la fine barbe noire charbon.

Celdwin essuya le sang de la lame de son épée elfique avec une touffe d'herbe. Aucuns de ses hommes n'étaient blessés mais la naine s'inquiétait pour eux lors d'un combat, et elle était désagréablement surprise de voir des orques à cet endroit. Ils étaient bien trop loin des montagnes où ils avaient leurs trous puants.

-Allez, tous en selle ! Cria la chef de groupe de sa voix grave et rocailleuse.

Lorsque tous les mercenaires furent installés, Celdwin d'un geste de bras donna l'ordre d'avancer. La vingtaine de chariots composant la caravane marchande se remis en mouvement, encadrée par les mercenaires à cheval qui en assuraient l'escorte. Les marchands étaient saufs, les marchandises intactes. Le travail était facile, à peine une escarmouche avec quelques brigands quelques jours auparavant et maintenant avec un groupe d'Orques. Lorsque la caravane arriverait à bon port, ils seraient tous grassement payés.

Le cheval bai de Celdwin fit un écart, sortant la naine de ses pensées mercantiles. Une naine sur un cheval… Elle avait beau mesurer 1m57, ce qui était très grand pour sa race, les gens étaient toujours surpris de la voir si haut perchée. La capitaine de la Compagnie, en tête de file se dit que sa vie était quand même étonnante. Elle était un vrai pieds-de-nez à l'ordre attendu, pas étonnant que son entourage le soit également.

La naine était le chef d'une grande compagnie de mercenaires. Ses hommes se répartissaient en petits groupes vadrouillant sur toute la carte de la Terre du Milieu au grès de leurs missions. Leur point de chute était la cave d'une auberge Rohirrime tenue par Hana et Gaile, des anciens de la Compagnie.

Tandis que une vingtaine de mercenaires, sous les ordres de Celdwin, protégeaient une caravane marchande qui devait traverser les Terres Sauvages, d'autres étaient en mission en Lindon, au Nord-Est de la Foret Noire ou au Sud vers le Harad.

Les mercenaires étaient en mission sur toute la Terre du Milieu. Tous le monde se regroupait pour le solstice d'été. La Compagnie du Vent Bleu était certes un rassemblement de guerriers louant leurs services contre de l'argent mais pas seulement. Ils étaient avant tout une famille.

La naine avait récupéré des gosses des rues, les avait élevés, leur avait à se battre, à manier les armes. C'était il y a environs 120 ans. Avec eux elle avait fait revivre la Compagnie du Vent Bleu. Depuis les gamins étaient morts, mais la naine continuait à récupérer les orphelins, les filles jetées à la rue ou les fugueurs qui rêvaient d'aventure.

Il y avait aussi bien des femmes que des hommes dans la Compagnie. Celdwin les récupérait tous et chacun pouvait partir quand il le souhaitait. Très peu le faisait et même lorsqu'ils posaient leur armes, les anciens mercenaires rejoignaient à chaque solstice d'été leur famille de cœur.

Cette réunion permettait de revoir tout le monde, de resserrer les liens, mais aussi de faire le bilan de l'année écoulée, surtout maintenant que les mercenaires étaient aussi nombreux. Les nouveaux étaient confrontés pour la première fois au sale caractère et à l'humour grinçant de la mercenaire naine. Ceux qui souhaitaient poser les armes prévenaient Celdwin et le reste de la Compagnie et ceux qui avaient déjà repris une vie de civil venaient dire bonjour à tous le monde.

La Compagnie était, comme sa fondatrice, étrange. Ça plaisait beaucoup à la naine.

Lorsque le crépuscule arriva, la Caravane s'arrêta. Un gamin d'une douzaine d'année vint voir Celdwin alors qu'elle descendait de sa monture. Il avait été mandaté par le chef de la caravane marchande pour faire passer un message.

-Messire Warg ! Messire Taloi désire manger avec vous, il voudrait vous parler de la fin du voyage.

La naine eu un sourire moqueur. Tous ses clients la prenait pour un nain. Ça ne la dérangeait pas et elle faisait tous pour ne pas les démentir, encourageant même leur croyance. Une femme, même du peuple de Durin, n'était pas prise au sérieux dans sa profession. Les marchands n'engageraient certainement pas une femme pour assurer leur protection et celle de leur marchandises. Ce machisme galopant l'avait écœuré à ses débuts mais elle s'était fait une raison...

Du coup, elle aplatissait sa poitrine au maximum, portait des vêtements amples et son armure. Avec sa barbe tressée et sa voix grave, le tour était joué. Ça faisait bien rire ses hommes.

Elle suivit le gamin qui l'observait à la dérobé avec des étoile dans les yeux. Celdwin nota mentalement de demander à Pad, le cadet du groupe de parler avec le gosse. Comme la majorité des marchands ceux de la caravane étaient trop heureux d'avoir la Compagnie du Vent Bleu comme escorte durant leur périple. Il y avait fort à parier que à force d'entendre des histoires, souvent exagérées, sur le Vent Bleu, le gamin en idéalise les membres et qu'il se soit mit dans le crâne de les rejoindre.

Le Warg. C'était son nom de mercenaire. Il était lié à son premier fait d'arme. Elle avait tué un warg lors de sa première mission officielle. Elle avait 20 ans. Taler lui avait bien fait payé la peur qu'il avait eu en la voyant se jeter avec juste un poignard à la main sur l'énorme créature. Lorsque son maître eu fini de lui crier dessus, il lui avait fait trancher la tête du monstrueux loup. Elle avait encore le crane de la bête au dessus de la porte de ses appartements. C'est également à cette occasion qu'elle avait décidé de cacher ses traits qui étaient encore trop juvéniles et expressifs. Sur un simple masque de métal poli, percé de deux trous pour les yeux, elle avait fixé une longue et épaisse crinière rouge faites de crins de chevaux, de laine tressée et de fourrure teinte.

L'effet était saisissant et permettait de reconnaître facilement la chef de la Compagnie.

La Compagnie du Vent Bleu avait été crée il y a fort longtemps par Taler, maître et père spirituel de Celdwin. L'homme bourru originaire de la cote avait pris sous son aile la gamine effrontée qui du haut de ses douze ans et 103 cm, rêvait d'aventures et de voyages.

La vieille femme qui s'occupait des orphelins l'avait laissée partir sans regret. Celdwin faisait parti des plus âgés du groupe et ils étaient trop nombreux. Elle n'était au final qu'une bouche à nourrir, et son départ permit à d'autres de manger.

Taler, à la tête d'une dizaine d'hommes avait entrepris de former la jeune naine à l'art de l'épée puis à toute les armes possibles et imaginables. Il l'avait formatée pour survivre au rude métier de mercenaire et à ces multiples contraintes. En 8 ans de dure labeur, Taler avait fait de Celdwin une guerrière, une machine à tuer. Puis les missions officielles avaient commencés. La fille du peuple de Durin était devenue le Warg suite à sa folle action pour protéger leur client.

Malheureusement, quelques mois après son baptême, la Compagnie avait été massacrée par des Orques soutenus par une horde de Gobelins. Les créatures en surnombre avaient fait un bain de sang.

Ce furent les Elfes de Rivendell qui trouvèrent et soignèrent Celdwin. Elle était agonisante et en plein délire. Les guérisseurs crurent plusieurs fois qu'elle allait rejoindre les halls de Mahal. Mais la naine, têtue comme ceux de son peuple s'était raccrochée à la vie. Sa longue convalescence la bloqua plus de dix années dans la Vallée cachée. Dix ans qu'elle mis à profit pour éduquer son esprit sous la tutelle des elfes comme elle avait éduqué son corps avec l'entraînement de Taler.

Elle partit sur les routes au printemps de l'an 2771. Elle rencontra le peuple des Dunedains du Nord et ses rôdeurs avec qui elle voyageât plusieurs décennies avant de recréer la Compagnie du Vent Bleu.

Plus d'un siècle après sa résurrection, la Compagnie avait acquit une grande renommée et était fort prisée pour de nombreuses missions, notamment pour la protection des convois marchands, quelque soit leur destination.

Le seul endroit que Celdwin évitait d'approcher était les citées naines, surtout depuis la destruction d'Erebor. Lorsque leur client devait passer par une citée du peuple de Durin, Celdwin quittait le convois une dizaine de lieues avant et laissait ses lieutenants prendre le relais. Lorsqu'elle était vraiment obligée d'y aller, ce qui était arrivée rarement dans sa longue vie, la naine devenait morose et agressive. Voir autant de nains heureux rassemblés au même endroits l'énervait profondément et la blessait tout autant. C'était une douleur irrationnelle de gosse meurtri mais à cause même de son irrationalité, Celdwin n'avait jamais réellement réussit à passé outre.

-Alors, dans combien de temps serons-nous au Rohan ?

La question du chef de la caravane fit sursauter Celdwin qui ne s'y attendait pas, complètement perdue dans ses pensées. Elle lui expliqua qu'ils étaient au Sud de l'ancien territoire de l'Arnor. Ils avaient dépassé les anciennes mines de la Moriaet qu'ils longeraient encore trois ou quatre jours les Monts Brumeux avant d'arriver aux portes de l'Isengard et de là au Rohan.