19
LA VERITE
Il y eut un long moment de silence, tandis que Megan, Ron, Ginny, Potter et Lockhart se tenaient immobiles à l'entrée du bureau, couverts de boue, de saleté et – dans le cas de Megan et Potter – de sang. Puis il y eut un grand cri.
- Ginny !
C'était Molly qui, jusqu'à présent, était restée assise devant la cheminée à pleurer toutes les larmes de son corps. Elle se leva d'un bond, suivie de près par Arthur, et tous deux se précipitèrent sur leur fille. Mais Megan et Potter tournèrent leur regard ailleurs. Le professeur Dumbledore se tenait près de la cheminée, le visage rayonnant, à côté du professeur McGonagall qui respirait profondément, les mains croisées sur sa poitrine. Fawkes fondit sur le professeur Dumbledore et vint se poser sur son épaule pendant que Molly se jetait sur Megan,Ron et Potter pour les serrer dans ses bras.
- Vous lui avez sauvé la vie ! Vous lui avez sauvé la vie ! Comment avez-vous fait ?
- C'est ce que nous aimerions tous savoir, dit le professeur McGonagall d'une voix faible.
Molly libéra Megan de son étreinte. Potter hésita un instant, puis s'approcha du bureau et y posa le Choixpeau magique, l'épée incrustée de rubis et ce qui restait du journal intime de Jedusor. Il raconta alors toute l'histoire. Suspendu à ses lèvres, tout le monde l'écouta parler pendant près d'un quart d'heure. Il révéla comment il avait entendu la voix désincarnée (sans préciser que Meganna l'avait elle aussi entendue), comment Hermione avait découvert qu'il s'agissait d'un Basilic qui se déplaçait dans les tuyaux, comment Megan, Ron et lui avaient suivi les araignées dans la forêt, comment Aragog avait fini par leur dire où était morte la dernière victime du Basilic, comment il avait deviné que cette victime devait être Mimi Geignarde et que l'entrée de la Chambre des Secrets se trouvait peut-être dans ses toilettes...
- Très bien, dit le professeur McGonagall lorsqu'il s'interrompit. Vous avez donc découvert l'entrée de la Chambre, en violant au passage à peu près tous les articles du règlement de l'école, mais comment diable avez-vous fait pour sortir de là vivants, Potter ?
Potter, la voix rauque d'avoir tant parlé, leur raconta alors l'arrivée de Fawkes, puis la façon dont le Choixpeau magique lui avait donné l'épée. Mais il hésita soudain dans la poursuite de son récit. Megan se demandait s'il dirait tout, s'il parlerait du journal et de Ginny, ou du fait qu'elle l'avait regardé lutter contre le Basilic sans intervenir pendant une bonne partie de l'affrontement.
Ginny se tenait debout à coté de Molly, la tête sur son épaule, et des larmes continuaient de couler sur ses joues. Potter semblait paniqué. Il leva les yeux vers Dumbledore et celui-ci esquissa un sourire. Les flammes qui dansaient dans la cheminée se reflétaient dans ses lunettes en demi-lune.
- Ce qui est le plus intéressant à mes yeux, dit-il d'une voix douce, c'est de savoir comment Lord Voldemort a réussi à envoûter Ginny alors que, d'après les informations qu'on m'a données, il se cache à l'heure actuelle dans les forêts d'Albanie.
Megan fronça les sourcils. Comment Dumbledore pouvait-il savoir qu'il s'agissait du Seigneur des Ténèbres et qu'il avait possédé Ginny ?
- Q... quoi ? bredouilla Arthur d'une voix blanche. Vous-Savez-Qui ? Envoûter... Ginny ? Mais Ginny n'est pas... Ginny n'a pas...
- Tout est arrivé à cause de ce journal intime, dit précipitamment Potter en montrant à Dumbledore le petit livre noir. Il appartenait à Jedusor quand il avait seize ans.
Dumbledore prit le journal des mains de Potter et contempla longuement ses pages humides et brûlées.
- Remarquable, murmura-t-il. C'était sans doute l'élève le plus brillant qu'on ait jamais vu à Poudlard.
Hermione n'aurait pas apprécié cette remarque. Dumbledore se tourna vers les Weasley qui semblaient abasourdis.
- Rares sont ceux qui savent que Lord Voldemort s'est autrefois appelé Tom Jedusor. J'ai été moi-même son professeur à Poudlard, il y a cinquante ans. Il a disparu après avoir quitté le collège... Il a voyagé loin, traversé de nombreux pays... Puis il s'est plongé si profondément dans la magie noire, il a tant fréquenté les pires sorciers, et s'est livré à des expériences si maléfiques que lorsqu'il est réapparu sous les traits de Lord Voldemort, il était devenu impossible de le reconnaître. Qui donc aurait songé à établir un lien entre Voldemort et ce garçon si intelligent, si séduisant qui avait été préfet-en-chef de Poudlard ?
- Mais Ginny, dit Molly, qu'est-ce que notre Ginny pouvait bien avoir à faire avec... lui ?
- C'est son journal, sanglota Ginny. Je... J'écrivais dedans et il me répondait...
- Ginny ! s'exclama Arthur, stupéfait. Je ne t'ai donc jamais rien appris ? Qu'est-ce que je t'ai toujours dit ? De ne jamais te fier à quelque chose capable d'agir et de penser tout seul si tu ne vois pas où se trouve son cerveau. Pourquoi ne nous as-tu pas montré ce journal, à moi ou à ta mère ? Un objet aussi bizarre ne pouvait être qu'inspiré par la magie noire !
- Je... je ne savais pas... sanglota Ginny. Je l'ai trouvé dans un des livres que m'a donnés Maman. Je croyais que quelqu'un l'avait oublié là...
- Miss Weasley devrait aller immédiatement à l'infirmerie, l'interrompit Dumbledore d'une voix ferme. Cette épreuve a été terrible pour elle. Il n'y aura aucune sanction. Des sorciers plus âgés et plus avisés qu'elle ont été aveuglés par Lord Voldemort.
Il s'avança vers la porte et l'ouvrit.
- Du repos, voilà ce qu'il lui faut, et peut-être une grande tasse de chocolat. Je trouve qu'il n'y a rien de tel pour remonter le moral, dit-il en adressant un clin d'œil à Ginny. Madame Pomfrey n'est pas encore couchée. Elle est en train d'administrer le philtre de Mandragore. Je crois que les victimes du Basilic vont bientôt se réveiller.
Pour la première fois de la soirée, Megan se sentit quelque peu soulagée.
- Alors, Hermione va bien ! s'exclama Ron.
- Il n'y aura pas de séquelles, assura Dumbledore.
Molly emmena Ginny, suivie de son mari qui paraissait toujours aussi ébranlé.
- Ma chère Minerva, dit Dumbledore d'un air songeur en s'adressant au professeur McGonagall, je crois que tout cela mérite un bon festin. Puis-je vous demander d'aller prévenir les cuisines ?
- D'accord, répondit vivement le professeur McGonagall en allant vers la porte. Je vous laisse vous occuper de Potter, de Weasley et de Buckley, n'est-ce pas ?
- Oui, oui, dit Dumbledore.
Lorsqu'elle fut sortie du bureau, Megan, Ron et Potter regardèrent Dumbledore d'un air incertain. Que voulait dire exactement le professeur McGonagall en parlant de « s'occuper » d'eux ? Ils n'allaient quand même pas être punis ?
- Il me semble vous avoir avertis tous les deux que je serais obligé de vous renvoyer si je vous surprenais à enfreindre le règlement de l'école une nouvelle fois ? dit Dumbledore à Ron et à Potter.
Ron ouvrit la bouche, horrifié.
- Ce qui prouve que les meilleurs d'entre nous peuvent être amenés à se contredire, poursuivit Dumbledore en souriant. Vous allez recevoir tous les trois une Récompense spéciale pour Services rendus à l'École et je crois bien que... voyons... oui, je vais donner deux cents points pour chacun à Gryffondor.
Le visage de Ron prit une teinte rosé vif et il referma la bouche.
- Mais j'ai l'impression que l'un d'entre nous reste bien silencieux sur le rôle qu'il a joué dans cette dangereuse aventure, ajouta Dumbledore. Pourquoi êtes-vous si modeste, Gilderoy ?
Megan écarquilla légèrement les yeux. Elle avait complètement oublié Lockhart. Tous trois se retournèrent et le virent debout dans un coin de la pièce, un vague sourire aux lèvres. Lorsque Dumbledore s'adressa à lui, il regarda par- dessus son épaule en croyant qu'il parlait à quelqu'un d'autre.
- Professeur Dumbledore, dit Ron, il y a eu un petit accident dans la Chambre des Secrets. Le professeur Lockhart...
- Je suis professeur ? s'étonna Lockhart. J'imagine que je devais être très mauvais, non ?
- Vous n'avez pas idée, lança Megan.
- Il a essayé de jeter un Sortilège d'Amnésie et la baguette s'est retournée contre lui, expliqua Ron.
- Pas de chance, dit Dumbledore en hochant la tête, vous vous êtes assis sur votre propre épée, Gilderoy !
- Une épée ? dit Lockhart d'une voix éteinte. Je n'ai pas d'épée. Mais ce garçon en a une, ajouta- t-il en montrant Potter. Il vous la prêtera sûrement.
- Pourriez-vous emmener le professeur Lockhart à l'infirmerie ? demanda Dumbledore à Ron et à Megan. J'ai encore quelques mots à dire à Harry... Et... Meganna, j'aimerais que tu reviennes me voir dans la soirée.
Lockhart sortit du bureau d'un pas lent. Megan et Ron le suivirent et Ronreferma la porte en jetant un regard intrigué à Dumbledore et à Potter.
- Qu'est-ce qui s'est passé dans la chambre, Megan ? demanda Ron tandis qu'ils avançaient lentement vers l'infirmerie. Tu es couverte de sang.
- Le Basilic m'a mordue, répondit la jeune fille d'une voix plate.
- Quoi ? sursauta Ron, horrifié.
- Fawkes m'a guérie, précisa-t-elle. Et Potter s'est servi du crochet pour détruire le journal et tuer Voldemort. Encore.
Malgré le récit de Potter et les quelques précisions de Megan, Ron semblait toujours un peu perdu.
- Alors… Tu-Sais-Qui n'a pas essayé de vous tuer ?
- Si… Enfin, il a lâché le Basilic. Et comme j'avais été mordue il pensait que j'allais mourir, et ensuite il a voulu jeter un sort à Potter mais c'est là qu'il a détruit le journal.
- Tu as failli mourir… Si tu étais restée avec moi…
- Potter serait mort et Ginny aussi, lui fit remarquer Megan. Ce qui est fait est fait, on ne va rien pouvoir changer.
Elle avait entendu les mots de Jedusor et jamais plus elle ne pourrait les oublier. Elle allait devoir vivre avec désormais.
Alors qu'ils approchaient de l'infirmerie et que Lockhart regardait autour de lui d'un air ébahi, une petite voix aigüe retentit.
- Miss Buckley !
Megan fit volte-face. Elle n'avait plus entendu cela depuis deux ans. Mais lorsqu'elle se retourna, il n'y avait pas que Dobby dans le couloir, mais aussi Lucius Malfoy.
Dobby était un elfe de maison, qui servait les Malfoy depuis toujours. Petit, avec un long nez fin en forme de crayon, des oreilles semblables à des ailes de chauve-souris, des yeux verts et ronds de la taille de balles de tennis et des doigts et des orteils très longs, il n'avait pas changé depuis le dernier jour où Megan l'avait vu, le jour où elle était partie faire sa rentrée à Poudlard. Il portait toujours sa vieille taie d'oreiller crasseuse dans laquelle il avait fait des trous pour les bras et les jambes, en signe de soumission à la famille de son maître : le seul moyen de libérer un elfe de maison était de lui offrir un vêtement. Il avait le corps enveloppé de bandages, ce qui signifiait qu'il avait dut recevoir une grosse correction.
Ron avait sursauté, et Lockhart semblait effrayé par la petite créature.
- Je vous retrouve plus tard, dit Megan à Ron et à Lockhart. Continuez sans moi.
- Tu es sûre ? s'enquit Ron qui n'osait pas regarder Lucius dans les yeux.
- Certaine.
Son ami attrapa Lockhart par la manche et le tira dans le couloir vers l'infirmerie.
- Qu'est-ce que vous faîtes là ? demanda Megan à Lucius et à son serviteur.
- Je suis là pour le travail, répondit sèchement Lucius, d'un air dédaigneux.
Son mépris était plus blessant que l'ignorance de Draco.
- Tu vas voir Dumbledore ? devina Megan. Je t'accompagne. Je dois le voir aussi. Il est dans le bureau de McGonagall.
Lucius tourna les talons sans un mot et marcha si vite vers le bureau que Megan et Dobby durent presque courir pour le suivre. L'elfe jetait à Megan des regards en coin, peu fier. La jeune fille n'avait jamais été bonne envers Dobby, mais elle était bien moins cruelle que les autres Malfoy, ce qui lui avait valu une forme d'affection de la part du serviteur.
Ils atteignirent le bureau. Lucius ouvrit violemment la porte, et Potter, qui se trouvait derrière, fut projeté contre le mur.
- Bonsoir, Lucius, dit Dumbledore d'un ton aimable.
Le père de Draco faillit renverser Potter en entrant dans la pièce. Dobby le suivait à petits pas précipités, accroupi à ses pieds, le visage ravagé de terreur. La fureur de son maître avait dut s'abattre sur lui en tout premier lieu.
- Alors ! lança Lucius en fixant sur Dumbledore un regard glacial. Vous êtes à nouveau là ! Le conseil d'administration vous a suspendu, mais vous estimez que vous avez le droit de revenir à Poudlard !
- Voyez-vous, Lucius, répondit Dumbledore avec un sourire serein, les onze autres membres du conseil d'administration m'ont écrit aujourd'hui. J'ai eu l'impression d'être pris dans une véritable tempête de hiboux. Ils avaient entendu dire que la fille d'Arthur Weasley était morte et ils voulaient que je revienne immédiatement. Ils semblaient croire qu'après tout, j'étais l'homme qu'il fallait pour occuper ce poste. Ils m'ont également raconté des histoires très étranges. Plusieurs d'entre eux affirment que vous avez menacé de jeter la malédiction sur leur famille s'ils refusaient d'approuver ma suspension.
Lucius devint plus pâle encore que d'habitude mais son regard continuait de lancer des éclairs de fureur.
- Et alors ? Vous avez réussi à mettre un terme à ces agressions ? ricana-t-il. Vous avez capturé le coupable ?
- En effet, dit Dumbledore avec un sourire.
- Eh bien ? Qui est-ce ?
- Le même que la dernière fois, Lucius. Mais cette fois, Lord Voldemort a agi par l'intermédiaire de quelqu'un d'autre. Au moyen de ce journal intime.
Il montra le petit livre noir percé d'un grand trou en observant attentivement la réaction de Lucius. Megan remarqua alors que Dobby avait un étrange comportement. Ses grands yeux fixés sur Potter, il ne cessait de pointer le doigt sur le journal, puis sur Lucius et se donnait ensuite de grands coups de poing sur la tête.
- Je vois... dit lentement Lucius à Dumbledore.
- C'était un plan judicieux, dit Dumbledore d'une voix égale sans quitter Lucius des yeux. Car si Harry et Meganna, ici présents – Lucius lança à Potter un bref regard perçant mais s'abstint de regarder Megan – et leur ami Ron n'avaient pas découvert ce journal intime, Ginny Weasley serait sans doute apparue comme la seule coupable. Personne n'aurait jamais pu prouver qu'elle avait agi contre sa propre volonté...
Lucius resta silencieux, le visage soudain figé comme un masque. Megan avait du mal à enregistrer l'information : Lucius était responsable de ce qui s'était passé à Poudlard cette année.
- Et imaginez, poursuivit Dumbledore, ce qui se serait produit dans ce cas... Les Weasley sont une de nos plus éminentes familles de sorciers. Imaginez les conséquences que cette affaire aurait pu avoir sur Arthur Weasley et son Acte de Protection des Moldus si on avait découvert que sa propre fille agressait et tuait des enfants de Moldus. Heureusement que ce journal a été trouvé à temps et que les souvenirs qu'il contenait ont été effacés. Qui sait ce qu'il serait advenu dans le cas contraire ?
Lucius se força à parler.
- Heureusement, en effet, dit-il avec raideur.
Derrière son dos, Dobby continuait de pointer le doigt sur le journal, puis sur Lucius avant de se donner à nouveau des coups de poing sur la tête. Potter sembla comprendre enfin. Il fit un signe de tête à Dobby et celui-ci recula dans un coin en se tordant les oreilles pour se punir de ce qu'il venait de faire.
- Vous ne savez pas comment Ginny est entrée en possession de ce journal intime, Mr Malfoy ? demanda Potter.
Lucius Malfoy se tourna vers lui.
- Pourquoi devrais-je savoir comment cette petite idiote s'y est prise pour dénicher ce journal ? dit-il.
- Parce que c'est toi qui le lui as donné, lança Megan, osant enfin défier son ancien père. Ça s'est passé chez Flourish and Botts. Tu as pris son vieux livre sur les métamorphoses et tu y as glissé le journal, c'est bien cela ?
Elle vit Lucius serrer les poings. Son cœur se serra tout autant et elle se força à se rappeler qu'elle avait déjà perdu son affection deux ans plus tôt et qu'elle ne faisait que ce qu'il fallait.
- Il faudrait le prouver, siffla Lucius.
- Oh, personne n'y arrivera, dit Dumbledore en adressant un sourire à Megan et à Potter. C'est impossible, maintenant que Jedusor a été effacé du journal. Mais d'un autre côté, Lucius, je vous conseille de ne plus distribuer les vieilles fournitures scolaires de Lord Voldemort. Car si certaines d'entre elles tombaient à nouveau entre des mains innocentes, je pense qu'Arthur Weasley ferait tout pour prouver qu'elles vous appartenaient...
Lucius resta un instant immobile et Megan vit nettement sa main se contracter, comme si l'envie le démangeait de sortir sa baguette magique. Mais finalement, il se tourna vers son elfe de maison.
- On s'en va, Dobby !
Il ouvrit brutalement la porte du bureau et fit sortir son elfe à coups de pied. Ils entendirent les cris de douleur de Dobby tandis que Lucius s'éloignait dans le couloir.
- Professeur Dumbledore, dit précipitamment Potter, est-ce que je peux aller rendre le journal intime à Mr Malfoy, s'il vous plaît ?
- Bien sûr, Harry. Mais dépêche-toi, n'oublie pas qu'il y a un festin qui t'attend.
Potter prit le petit livre noir et sortit en trombe du bureau. Megan se retourna alors vers Dumbledore.
- Je crois que nous devons parler, Meganna, lui dit posément le directeur.
- Oui, on doit parler, acquiesça la jeune fille, toujours plantée près de la porte.
- Tu as rencontré Jedusor en descendant dans la Chambre des Secrets. Je suppose que tu n'as pas dû comprendre tout ce qu'il t'a dit.
- Il me connaissait. Il connaissait mon nom, et il m'a demandé pourquoi j'étais à Gryffondor et non à Serpentard. Il avait posé des questions à Ginny sur moi, et il a dit qu'il était heureux que je sois à Poudlard cette année, heureux de me voir !
Elle avait le cœur qui battait la chamade. Elle avait une idée de tout ce que cela signifiait, mais elle repoussait cette idée insensée.
- Il est en effet exact que Voldemort te connaît, acquiesça Dumbledore. Et je me doute qu'il a dut être ravi en effet de se retrouver en ta présence.
- Mais pourquoi ? s'exclama Megan. Qu'est-ce qu'il sait ? Qu'est-ce qu'il est pour moi ?
Dans le couloir, il y eut une détonation assourdissante, mais Megan l'ignora, elle voulait des réponses, maintenant, plus de secrets !
- Voldemort connaissait très bien tes parents, Meganna, expliqua Dumbledore d'une voix lente.
Megan se rappela aussitôt la question que lui avait posé Jedusor : « Qu'est-il arrivé à tes parents ? ».
- Il m'a provoquée, comprit-elle. Il savait qu'ils étaient morts, même s'il est tombé avant leur mort. Il savait que je réagirais… Je n'ai pas contrôlé… Et il a vu…
- Ta puissance, acquiesça Dumbledore. Et il a été content de la voir, n'est-ce pas ?
- Il a dit que j'étais… « exactement telle qu'il le voulait ».
Megan avait les larmes aux yeux. Elle ne comprenait plus. Elle ne voulait plus accepter.
- Il doit en effet être satisfait…, songea Dumbledore.
- Expliquez-moi, ordonna Megan entre ses dents serrées.
Il y eut une nouvelle détonation dans le couloir. Une sorte de craquement sonore. Mais cette fois encore, Megan l'ignora.
- A l'époque où tes parents étaient Mangemorts, commença Dumbledore, ils étaient les plus fidèles à Voldemort. Tes parents étaient de puissants sorciers et ils étaient le bras droit de Voldemort.
Cette information, Megan la connaissait. Lorsqu'elle vivait chez les Malfoy, le souvenir de la solide loyauté des Buckley était présent.
- Et comme tu dois le savoir, Voldemort apprécie énormément la puissance et la loyauté. Quand ta mère est tombée enceinte, Voldemort s'est aussitôt dit que de deux sorciers tels que tes parents ne pouvait naître qu'un enfant extrêmement puissant. Et au lieu de vouloir supprimer une menace telle que celle que tu aurais pu représenter pour son pouvoir, il a voulu la tourner à son avantage. Il a alors fait un présent à tes parents qu'aucun Mangemort n'aurait jamais espéré : il a fait don d'un peu de ses pouvoirs au bébé à naître, et ce à une condition. Tu devrais être élevée comme une Mangemort dès ton plus jeune âge, et ta puissance serait mise à contribution aussi tôt que possible. Tu devais être élevée pour devenir –
- La fille de Voldemort, le coupa Megan, assommée par cette nouvelle.
- Son héritière, plutôt, corrigea Dumbledore. Tu as la puissance du Seigneur des Ténèbres. Il te voulait comme son second, un prolongement de lui-même, entièrement dédiée à son service. Il te voulait être une excroissance de lui-même. Ce qui explique tes pouvoirs, mais aussi que tu sois Fourchelang, tout comme lui.
- Il y a Voldemort en moi, déduisit Megan.
Elle ne se sentait pas sale, ou possédée, ou maudite. Elle se sentait au contraire plus puissante encore.
- On peut dire qu'il y a un peu de lui en toi. C'est pourquoi, lorsque la Chambre a été rouverte, j'ai pensé que c'était à travers toi qu'il était revenu. Mais tu n'es pas de son côté.
- Je l'étais ! s'exclama Megan. Il en était persuadé ! Quand il a libéré le Basilic, il ne l'a envoyé que sur Potter, pas sur moi ! Il voulait que je regarde Potter mourir puis que je l'aide à revenir ! Il pensait que j'allais l'aider !
- C'était ce à quoi tu étais destinée, acquiesça Dumbledore. Mais tu as choisis une autre voie.
- A cause de vous, gronda Megan.
Elle comprenait beaucoup de choses à présent. Elle jeta un coup d'œil dédaigneux au Choixpeau Magique posé sur le bureau.
- Vous ne m'avez pas laissée aller à Serpentard. Ni à Serdaigle. J'ai la puissance du Seigneur des Ténèbres en moi et j'ai été élevée dans cette direction ! J'aurais dû aller à Serpentard ! Mais vous avez demandé au Choixpeau de ne pas m'y envoyer !
Dumbledore hocha lentement la tête. Il semblait peiné qu'elle découvre ce secret.
- A vrai dire, tu avais ta place autant à Serdaigle qu'à Serpentard, admit-il. Tu es brillante, ingénieuse, déterminée, puissante, et tu travailles dur. Tu n'as pas vraiment les caractéristiques de Gryffondor.
- Je suis courageuse, lui fit remarquer Megan.
- Non. Non, Megan, les courageux sont capables d'évaluer les dangers d'une situation et de choisir de s'engager dans une voie malgré les risques, tandis que toi, tu n'évalues pas, tu fonces sans réfléchir. Tu es téméraire. Ce qui pourrait te tuer. Non, si je n'avais seulement pas voulu que tu ailles à Serpentard, tu serais arrivée à Serdaigle. Mais ce n'était pas suffisant, malheureusement. Récompenser ton intelligence et ton aptitude à travailler dur ne t'aurait pas éloignée de la voie qui avait été tracée pour toi par Voldemort ou les Malfoy. Tandis qu'à Gryffondor, je t'assurais la possibilité de te détacher des Malfoy et de la magie noire. Et je te mettais en présence de Harry Potter ou encore de la famille Weasley. Ceux qui pouvaient t'aider à choisir –
- La « bonne voie » ? demanda Megan d'un ton agressif. Parce que c'est à vous de choisir quelle est la bonne voie pour moi ? Vous avez brisé ma famille !
- Si tu étais restée auprès des Malfoy, Harry et Ginny seraient morts ce soir, et Voldemort serait revenu. Et d'autres encore auraient péri. J'ai pu faire de très mauvais choix dans ma vie, Meganna, mais celui de t'orienter à Gryffondor n'en fait pas partie.
Megan fixait le directeur avec colère. Toutes les pièces s'assemblaient désormais : pourquoi ses parents étaient morts, pourquoi elle avait atterri à Gryffondor, pourquoi Dumbledore lui avait donné ces leçons.
- C'est à moi de choisir, décréta-t-elle avant de quitter le bureau.
Elle descendit les escaliers sans vraiment savoir où elle allait. Mais alors qu'elle arrivait au premier étage, elle se retrouva nez-à-nez avec Lee Jordan, Kevan et les jumeaux Weasley. Pendant une fraction de seconde, tous restèrent immobiles. Avec ses cheveux, sa robe et son visage couvert de sang, de poussière et de boue, elle avait un air inquiétant, et la pâleur de son visage extrême ce soir-là n'arrangeait rien. Pourtant, les quatre garçons semblèrent soudain avoir reçu une décharge électrique et se jetèrent sur elle pour l'étreindre chacun leur tour. Megan en avait le tournis, elle ne comprenait pas ce qui leur prenait.
- On a appris que tu étais descendue dans la Chambre des Secrets avec Ron et Harry ! s'exclama Fred.
- Tu as affronté l'héritier de Serpentard et le monstre ! renchérit Lee.
- Tu as été mordue, ajouta Kevan en désignant son bras où il ne subsistait plus qu'une cicatrice légèrement boursouflée.
- On a eu peur, admit George.
- Mais tu as sauvé Ginny…, dit Fred d'un, ton plein de reconnaissance.
Megan observa ses quatre amis, la respiration saccadée. Elle n'aurait jamais pu se lier d'amitié avec eux si elle avait été à Serpentard. Avec Ron ou Hermione non plus. Dumbledore avait beau avoir orienté ces amitiés, elle ne les regrettait pas.
- On va dîner ? proposa-t-elle.
Ce fut le festin le plus incroyable auquel elle avait participé jusque-là : tout le monde était en pyjama et les réjouissances durèrent toute la nuit. Megan n'eut pas le temps de se morfondre sur son lien avec Voldemort ou sur les agissements de Dumbledore entre le retour de Hermione qui arriva dans la Grande Salle en criant « Vous l'avez vaincu ! Vous l'avez vaincu ! », celui de Hagrid vers trois heures et demie du matin qui vint leur donner à Ron, à Potter et à elle une tape dans le dos qui les fit plonger dans leur assiette, ou les six cents points qu'ils avaient fait gagner à Gryffondor, ce qui leur assurait, pour la deuxième année consécutive, la victoire dans la Coupe des Quatre Maisons, ou le professeur McGonagall se levant pour leur dire que tous les examens avaient été annulés en guise de cadeau de fin d'année, ou encore Dumbledore annonçant que le professeur Lockhart ne pourrait pas reprendre ses cours l'année suivante, pour cause d'amnésie à soigner. Cette dernière nouvelle fut également saluée par de nombreuses acclamations à la table des professeurs.
- Dommage, dit Ron en reprenant un beignet, je commençais à le trouver sympathique.
La fin du trimestre se déroula sous un soleil resplendissant. Poudlard avait retrouvé sa vie normale, avec toutefois quelques petits changements: le cours de Défense contre les Forces du Mal avaient été supprimé (« on a suffisamment fait de travaux pratiques », avait dit Ron à Hermione qui faisait grise mine) et Lucius avait été renvoyé du conseil d'administration. Draco ne se pavanait plus dans le château avec des allures de propriétaire. Il semblait au contraire sombre et amer, et Megan était trop occupée à profiter de la vie avec les Weasley et Hermione pour le remarquer. Ginny, elle, avait retrouvé toute sa joie de vivre.
Bientôt, il fut temps de reprendre le Poudlard Express qui devait ramener les élèves chez eux pour les vacances d'été. Megan, Ron, Hermione, Fred, George, Ginny et Potter occupaient un compartiment à eux tout seuls. Les distractions ne leur manquèrent pas pendant le voyage. Ils firent exploser les derniers pétards du Dr Flibuste et s'entraînèrent à se désarmer à coups de baguette magique, un exercice pour lequel Potter se montrait doué, mais pas autant que Megan qui maîtrisait ce sort depuis le début de l'année. Ils avaient presque atteint la gare de King's Cross lorsque Potter se rappela quelque chose.
- Ginny, dit-il, c'était quoi cette histoire de Percy que tu as surpris en train de faire quelque chose ? Il ne voulait surtout pas que tu en parles à qui que ce soit...
- Ah, oui, c'est vrai, répondit Ginny en riant. Eh bien... Percy a une petite amie.
- Quoi ? S'exclama Fred en laissant tomber une pile de livres sur la tête de George.
- C'est cette fille qui est préfète de Serdaigle, Pénélope Deauclaire, dit Ginny. C'est à elle qu'il passait son temps à écrire l'été dernier. Ils se donnaient des rendez-vous secrets dans l'école. Un jour, je les ai surpris en train de s'embrasser dans une classe vide. Il a été tellement bouleversé quand elle a été... agressée. Vous n'allez pas vous moquer de lui, hein ? ajouta-t-elle d'un ton inquiet.
- Jamais de la vie, assura Fred qui semblait aussi heureux que si on venait de lui annoncer que la date de son anniversaire avait été avancée.
- Certainement pas, dit George en ricanant.
Le Poudlard Express ralentit, puis s'arrêta. Potter prit un parchemin et une plume et se tourna vers Megan, Ron et Hermione.
- Ça s'appelle un numéro de téléphone, dit-il à Megan et à Ron en écrivant des chiffres sur trois morceaux de parchemin. L'été dernier, j'ai expliqué à Mr Weasley comment marche un téléphone, il saura s'en servir. Meganna...
- Je sais comment fonctionne un téléphone, dit-elle.
- Comment ? S'étonna Potter, persuadé qu'elle vivait dans un monde entièrement magique.
- Un jour je vous expliquerais peut-être.
- … D'accord. Appelez-moi chez les Dursley, d'accord ? Je ne supporterai pas de passer encore deux mois avec Dudley pour seule compagnie...
- Ta tante et ton oncle vont être fiers de toi quand ils sauront ce que tu as fait, non ? Dit Hermione tandis qu'ils descendaient du train et suivaient la foule des élèves en direction de la barrière magique.
- Fiers ? s'exclama Potter. Tu es folle ? Ils vont être furieux, au contraire: j'ai eu plein d'occasions de mourir et au lieu d'en profiter, je me suis débrouillé pour survivre...
Tous ensembles, ils franchirent alors la barrière magique qui s'ouvrait sur le monde des Moldus.
Megan revient à Poudlard dans l'Héritière des Ténèbres et le prisonnier d'Azkaban ! s/11404059/1/L-Héritière-des-Ténèbres-et-le-prisonnier-d-Azkaban
