" Ton familier, Natacha! Il faut que tu en aies un! "

Ah, c'était ça qu'il avait oublié! Rien de dramatique, il aurait pu aller prévenir Miiko!

Que je vous resitue le contexte : j'ai passé ma matinée à faire des tests et une prise de sang pour que Keroshane vérifie sa théorie sur ma possible réincarnation, entrainée par l'absorption du Manaa/énergie vitale de quelqu'un d'autre mort au même moment qui se serait réincarné aussi si je les lui avais pas pompé comme un moustique pompe le sang. Théorie qui s'est avérée probablement correcte puisque le taux de Manaa dans mon sang a presque triplé par rapport à la normale : 61% au lieu de 22% selon Keroshane. Suivi par Ezarel qui m'a fait une crise de schyzophrénie aiguë en m'engueulant, puis en décidant qu'il fallait que j'intègre sa garde à tout prix...Une dispute épique entre Ezarel et Keroshane, que je n'ai pas écouté parce que pas intéressante. Et en prime, c'est moi qui les ai mis d'accord. Et maintenant, notre soucis, c'était de trouver le familier qui me conviendrait.

Keroshane sortit de... Nulle part une feuille de papier où était inscrit quelque chose que je ne pus lire. Il m'expliqua ce qui allait se passer :

" Je vais te poser des questions, avec 3 réponses possibles. A la fin, selon tes réponses, tu pourras obtenir un familier qui te correspond! "

Je tirai la moue lorsqu'il m'informa de la façon de procéder. Des tests... On ne déterminait pas les personnalités et les goûts des gens en fonction de test! Et puis, si je dois m'occuper de ce familier, il faut bien que je vois à quoi il ressemble :

" Ca me parait assez bizarre... Enfin, je ne peux pas vraiment savoir si le familier me correspondra si je ne le vois pas avant. Ca serait comme mettre n'importe quoi dans un plat en priant pour que ce soit comestible... "

Ma réponse arracha un sourire à Ezarel, et une mine gênée à Keroshane, qui finit par me sourire, avant de me répondre, d'un ton rassurant :

" Tu peux aussi aller à la boutique de familier tenue par Purreru, pour y choisir celui qui te correspondrait selon toi! Il me doit depuis longtemps un service, il ne sera pas contre te céder un oeuf et un Incubateur pour le faire éclore, si tu lui dis que tu viens de ma part! " Finit-il par me dire, toujours la mine radieuse.
Un large sourire vint élargir mes propres lèvres, avant d'acquiescer d'un vif mouvement de tête, qui traduisait mon enthousiasme à cette idée.

" Bon, c'est pas que vous me dérangez, mais vous me dérangez. Et j'ai du travail moi, je ne passe pas mon temps à courir après Miiko ou à aller à la boutique de Purreru! Allez, du balais! Natacha, demain, 8 heures tapantes, n'oublie pas! " Me rappela Ezarel avant de nous mettre à la porte de son fief.

Une fois que la porte fut fermée dans notre dos, et que Keroshane et moi fûmes seuls, nous nous regardâmes dans le blanc des yeux... Avant de rire ensemble, sans trop savoir pourquoi. Pour ma part, je pense qu'à cet instant, c'était plus nerveux pour ça. Un besoin de décompresser, qui passait par le rire. Kero... Je suppose que c'était plus pour se payer la tête d'Ezarel, qui s'amusait à le malmener bien souvent, de ce que j'avais pu observer. Après tout, il m'avait déjà prouvée qu'il savait être bien rancunier! C'est dans cette ambiance plutôt légère que celui que je considérais désormais comme mon ami et moi, nous nous saluâmes, nos chemins se séparant ici. Je sortis de la grande salle des Portes, pour me retrouver à la place du marché, la même place que celle où j'avais rencontrée Nevra et Thorn. Je soupirai et chassais ses souvenirs de mon esprit, me mettant à chercher l'échope de Purreru dans tout ce bazar commerçant. Mais le bazar commerçant en question était si dense que je ne savais par où commencer... Et il semblait si grand que je n'avais pas la foi de tout explorer pour trouver cette boutique. Je finis donc par me dire qu'un guide serait pour moi une bonne solution! Je vis une jeune fille de dos, qui semblait avoir mon âge, toute de bleue vêtue. Bleue jusqu'aux cheveux! Je trottinais derrière elle pour la rattraper et l'appelai :

" Mademoiselle?

- Oui...? "

Elle se retourna vers moi, je la reconnus : c'était la fille aux écailles avec qui Thorn avait déjeuné le matin même. Elle avait un ravissant visage, de grands yeux améthystes, comme les miens, et sa tête ronde était encadrée par une longue chevelure turquoise qui lui arrivait à la moitié du dos. La demoiselle était également bien gâtée par la nature, si vous voyez ce que je veux dire... Je repris la parole :

" Désolée de te demander ça mais j'aimerai savoir si tu sais où se trouve la boutique de familiers d'un certain Purreru ! , Demandai-je, un peu gênée de la déranger pour une chose aussi idiote,

- Oh, mais tu es Natacha, la petite nouvelle! Thorn m'a parlé de toi! Ravie de te connaître, je suis Alajéa, de la garde Absynthe! , Me salua-t-elle, en me prenant les mains et en les secouant légèrement,

- Enchantée Alajéa! , Saluai-je à mon tour, avant de reprendre, Je suis désolée de devoir couper court, mais je dois aller voir Purreru, je ne veux pas trop perdre de temps...

- Hihi, tu m'as l'air d'être une fille impatiente! , En déduit Alajéa, ce qui me fit pouffer de rire,

- Un peu, c'est vrai, mais c'est surtout que je n'ai qu'un seul petit mois pour que Miiko accepte que je rejoigne la Garde d'Eel, alors je ne veux pas perdre de temps! " , Répondis-je, enthousiaste.

Alajéa et moi prîmes alors le chemin de la boutique de Purreru tout en continuant à bavasser joyeusement. J'appris qu'elle était une sirène, ce qui, je l'avoue, me surprit énormément. J'avais à l'époque beaucoup de mal à considérer l'existence de toutes les races qui faisaient la diversité et la beauté d'Eldarya : comme l'avait dit Ezarel, ce monde n'était pas le mien, je n'étais pas habituée à tous ses petits secrets! Nous avons discuté de nos goûts, de nos passés respectifs, je lui en appris sur mon monde, elle m'en apprit sur le sien. J'avais énormément de plaisir à partager cette conversation avec elle pendant que nous marchions, et d'ailleurs, Alajéa est toujours une des personnes avec qui j'aime le plus parler. Sa gentillesse et sa douceur faisaient d'elle une personne réellement agréable, même si quelque fois, j'avoue qu'il m'est arrivé de vouloir la secouer par les épaules comme un cocotier pour qu'elle s'en débarasse lorsque cela était nécessaire!

Nous continuâmes encore à papoter jusqu'à arriver à notre destination, la petite boutique de familier de Purreru! Enfin... "petite"... Le bâtiment était immense, il s'étendait bien sur 3 étages, au minimum (je n'avais pas la foi de compter, vous me pardonnerez donc cette vague indication...). Il devait y avoir un nombre incalculable de chose à vendre, là-dedans! Alajéa entra d'une démarche heureuse et sautillante dans la boutique, me faisait signe de lui emboiter le pas, ce que je fis avec plus de retenue qu'elle. Un individu était derrière le comptoir, penché sur un livre et notant diverses choses dedans à l'aide de sa... Patte. Car cet individu était un chat qui à première vue, se comportait comme un humain! Il écrivait comme un humain, il se déplaçait comme un humain... Il portait un gilet vert à à motifs dorés, ainsi que des guêtres des mêmes coloris aux pattes arrières, sur lesquelles il se tenait debout. Il avait plusieur petit bracelet décoratif à la patte avant droite et à la queue. Le tout contrastait réellement avec son pelage de siamois, le ravivant, et ne rendait ses yeux turquoises que plus visibles.

" Salut Purreru! , Salua joyeusement Alajéa comme si elle connaissait depuis toujours ce gros chat, avant de reprendre me tirant par le bras pour que je me rapproche d'elle, Tu as une nouvelle cliente! Elle s'appelle Natacha!

- Je connais encore mon nom, Alajéa! , la taquinai-je avant de saluer Purreru, Je m'appelle Natacha Kaznof, ravie de vous rencontrer!

- D-de même... , Me répondit-il, d'une voix timide, Q-que puis-je f-fais pour vous, N-Natacha?

- Je suis arrivée à Eel hier, et je n'ai pas de familier, j'aimerai en avoir un! Je viens de la part de Keroshane, il m'a dit que vous lui deviez un service...

- B-b-bien sûr... Vous a-avez des exigeances...? Qu-qu'il soit petit? A-affectueux...? " Me demanda Purreru, avant que je ne lève les yeux aux ciels, le temps de réfléchir.
Un familier, c'était un compagnon. Si j'avais un compagnon, je voudrais qu'il soit affectueux... Plutôt petit, et mignon, aussi! J'aimais les choses mignonnes, car après tout, malgré mon tempérament de grosse brute, j'avais toujours au fond de moi ce petit côté niais et mignonnet que nous avions tous...

" Petit, mignon, affectueux, et débrouillard... " Finis-je par déclarer, mon regard se replaçant dans celui de Purreru, qui ronronna, avant de sortir un manuel.
Il se lécha la patte avant pour avoir plus de facilités à tourner les pages de l'ouvrage, et me montra un premier familier. Beurk, c'était quoi ça? On aurait dit un chien croisé avec un lézard et un poisson! C'était pas beau du tout! Purreru m'expliqua qu'il s'agissait d'un Corko, et qu'il répondait à 3 de mes 4critères : débrouillard, mignon et affectueux. Mouais... Mignon, c'était subjectif, hein... Personnellement, je ne me verrai pas lui faire des papouilles du tout... Purreru sembla remarquer mon absence de coup de coeur pour cette espèce, et tourna de page, pour m'afficher le prochain familier : Le Becola. Qui ressemblait à Ronflex dans Pokemon. Et que je trouvais mignon, certes, mais là, c'était pareil : aucun coup de foudre. Familier suivant : le Crowmero. Bof... Le Cryslam? Eventuellement en Hiver, comme ça, j'aurai des pulls gratuits... Le Dalafa? C'était aussi fin qu'une brindille! Ca ressemblait à un moustique! Ca ne tiendrait pas le coup si je partais en mission avec! Jipinku? Il était rigolo à voir, c'est vrai, c'était marrant de l'imaginer marcher sur sa langue et tomber, mais là encore, je n'avais pas cette petite étincelle qui me ferait comprendre que c'était CE familier que je voulais... J'entendis Alajéa bailler et ronchonner sur la longueur de la procédure, tandis que Purreru se grattait l'oreille d'un air hésitant. J'étais visiblement une cliente difficile à satisfaire... Mieux valait être chiante une bonne fois pour toute que chiante à plusieurs reprises! Le Liclion? Il était mignon, et il avait l'air assez vif d'esprit, c'était vrai... Mais... Non. Pourquoi? Juste non, il n'y avait pas raison particulière : là aussi, ça ne me disait rien de particulier, ni un coup de foudre, ni du dégoût comme pour le Corko... Le Pimpel? Celui-là me plaisait bien! Il était drôlement mignon! Et il avait l'air rapide, en plus! Mon choix était donc fait... Jusqu'à ce que je tourne la page pour voir le suivant, juste par curiosité.
Oh. Mon. Dieu. On aurait dit un Harfang! Des plumes blanches aux extrêmités bleues, un petit bec mignon à croquer, de grands yeux expressifs comme jamais, et avec ces grandes pattes, il avait l'air fort pour sa petite taille! Je regardai le nom de cette espèce de familier... Un Plumobec? Parfait! Je relevais le nez vers Purreru, souriant de toutes mes dents, ce qui le fit rosir :

" J'aimerai un Plumobec! Ce serait possible? , Demandai-je en élargissant mon sourire (Qui sait? Ca aiderait peut-être la pillule à passer pour Purreru, qui devait gratuitement me céder un oeuf, et un incubateur...),

- O-oui, il m'en r-reste u-un. Je-je vais le chercher...V-vous avez d-de la chance, c-c'est le dernier... "

Je vis alors le petit chat sauter du haut tabouret qui lui permettait d'être à la hauteur du comptoir, pour se mettre à courir dans le magasin, et ouvrir des armoires de verre criblée de petits trous réguliers et minimes. Il m'en sortit un drôle d'objet, rond, de bois, je crois, avec une branche qui suspendait au dessus une pierre bleue. Je me retournai vers Alajéa, qui s'extasiait devant les oeufs exposés en vitrine. Je m'approchai d'elle, et me mit à sa hauteur :

" Tu n'as pas de familier non plus...? , Lui demandai-je avant de regarder les oeufs,

- Non, malheureusement, mais j'adorerai en avoir un! Mais je suis trop tête en l'air pour m'en occuper... Je lui ferai du mal sans le vouloir... , M'expliqua-t-elle, sa voix marquée par une once de tristesse qui ne m'échappa pas,

- Tu as déjà essayé de t'en occuper? , Lui demandai-je, curieuse, laissant Purreru farfouiller partout dans son magasin pour trouver l'oeuf,

- Oui, et ça aurait pu mal se finir... J'avais un petit Corko, je l'aimais beaucoup, mais j'oubliais de lui donner à manger, ou des fois, je ne le voyais pas, et je fermais la porte sur une de ses pattes, ou sa queue... C'est Miiko qui a décidé de me le retirer, elle ne supporte pas que l'on fasse du mal aux familiers... " Conclut Alajéa, à ma grande surprise.
J'avais beau savoir que les apparences étaient souvent trompeuses, je ne m'attendais vraiment pas à ce que Miiko soit un peu un genre de Brigitte Bardot à se battre pour les droits des animaux... Je ne savais pas trop quoi dire, assez mal à l'aise pour Alajéa, qui semblait avoir beaucoup d'affection à donner à un petit compagnon. Elle sourit néanmoins avant de reprendre la parole :

" Mais je ne me plains pas! Les autres gardiens me confient souvent leurs familiers pour que je puisse jouer avec eux! J'aime beaucoup ça! Et le fait qu'ils me fassent confiance là-dessus me fait plaisir! " Déclara-t-elle, avant de rire de façon un peu niaise. Ce genre de petits rires qui m'irritent les tympans...

Purreru revint vers nous, trottinant toujours avec dans ses mains, le fameux oeuf, et l'Incubateur. Il me confia avec délicatesse l'oeuf, que je me mis à regarder une fois qu'il fut entre mes doigts. Wow, pour un futur nouveau né, il avait déjà beaucoup d'allure! L'oeuf était immaculé, mais de fines rayures bleues et brillantes parraient ça et là la blancheur de la coquille. Je le posai contre mon oreille, c'était tout chaud... J'avais l'impression de tenir un petit coeur qui battait entre mes doigts, tout brûlant de vie, d'émotions, et qui ne demandait qu'à s'extirper de sa prison naturelle! Je remarquai que les deux personnes présentes autour de moi me regardèrent avec des yeux ronds, je rougis de gêne, et retirai l'oeuf de mon visage, avant de prendre l'Incubateur des pattes de Purreru. Je l'en remerciai et saluai Alajéa de loin, tandis que celle-ci retournait s'extasier près des petites boules de poils, de plumes et d'écailles.
Je me mis à marcher dans les rues d'Eel avec une grande méticulosité, faisant attention à cet oeuf comme s'il s'agissait de la prunelle de mes yeux. J'évitais soigneusement toutes les personnes que je croisais, qui semblait amusées de me voir agir ainsi. Qu'importait! Cette petite coquille ovale que j'avais entre les doigts représentait un petit être dont j'allais devoir m'occuper. Comme un bébé, mais en moins chiant, je suppose. Ou du moins, j'espérais.
Je finis par atteindre le bâtiment de la garde, et quelques minutes plus tard, j'entrai dans mon taudit. Je posai l'oeuf sur ma veste roulée en boule sur le sol, et sortit quelques secondes plus tard l'Incubateur de mon sac pour le poser par terre à côté de mon pseudo-oreiller et d'y déposer l'oeuf. Le mécanisme qui suivit me fascina. Comme si l'Incubateur avait détecter automatiquement la présence de l'oeuf, je vis une lumière bleue (du Manaa?) s'en échapper, pour éclairer la coquille et sembler lui donner un souffle de vie. Ca me faisait penser à ce que j'avais entendu dire sur les couveuses artificielles qu'employait les éleveurs. La seule différence était que moi, je n'élevèverai pas ce familier pour m'en nourrir. Ou du moins, j'espérais ne pas avoir à le faire... Je chassais bien vite cette idée de mon esprit en regardant autour de moi, et en constatant une fois de plus l'état de ma chambre. Cette pièce était consternante... J'avais beau vouloir la restaurer, je n'avais aucune compétence en maçonnerie/plomberie/autre, et surtout... Ben... La quantité de travail était colossale! Je n'y arriverai jamais seule, ou en tout cas, pas avant longtemps!

Je jetai un petit regard à l'Incubateur, puis vers la porte. Le temps que j'aille parler à Miiko de mon souhait de rénover cette maudite pièce, l'oeuf ne serait pas éclos! J'avais bien le temps de lui en parler sans rater la naissance de mon petit... Anonyme. Il allait falloir que je réfléchisse au nom de mon nouveau compagnon, quand même. Même si l'environnement dans lequel lui et moi allions vivre était quand même plus important que son nom, pour le moment. Je sortis donc de mon taudis et me mis en quête du grand Manitou de ces lieux, pour lui demander une chance décente. Pas la lune, hein, juste une chambre décente. C'était pas grand chose... Du moins j'espérais. Je passais la tête à l'intérieur de l'encadrement de la salle de réunion, là où je l'avais vu pour la première fois, et constatais qu'elle n'y étais pas. Mais une autre voix qui m'était familière m'interpella avant que je ne reparte comme j'étais arrivée :
" Si tu me cherches, je suis là, ma belle ~ ,Me lança Nevra, avant de sortir de derrière la porte (Ne me demandez pas ce qu'il y faisait...),

- Je vois bien que tu es là, je ne suis pas aveugle. , Lançai-je, un air légèrement amusé, avant de commencer à me retourner et de sentir mon bras être retenu par Nevra,

- Donc tu me cherchais? , Relança-t-il en m'affichant là un large sourire qui laissait apparaître ses canines aiguisées qui me firent une demi-seconde froid dans le dos,

- Désolée de briser tes espoirs, bourreau des coeurs, mais je cherchais Miiko. , Tranchais-je d'un air ironique avant de tenter une seconde fois de prendre la porte, retenue par Nevra ,

- Tu me sautes dans les bras en voulant m'embrasser puis tu m'évites? Aaah, les femmes~" , Lança Nevra, avant de commencer à me tirer à lui.

Mon sang ne fit qu'un tour : je tirai à moi mon bras avec une certaine force et violence qui laissa visiblement Nevra un peu surpris, avant de lui jeter un regard grave et accablant, reprenant d'une voix qui se voulait froide, mais qui trahissait parfaitement la boule de sanglots qui me montait à la gorge :

" Tu n'y es pas du tout. Tu ne sais rien du tout de moi, alors sois gentil, et range-moi ce numéro de joli coeur idiot. "

Je n'attendis pas qu'il me réponde pour tourner les talons et m'en aller, ravalant au plus profond de moi la boule de sanglots qui m'était venue. Comment avais-je pu confondre un sagouin pareil avec mon petit ami? Avec la personne que j'aimais le plus au monde avant ma mort?! Avec MON Nico! Aaah, ça n'était pas ma faute, ils se ressemblaient trait pour trait, mais leurs personnalités étaient si différentes! Je sentais mes poings se crisper et l'énervement monter en flèche dans ma petite caboche... Pourquoi? C'était une bonne question. Peut-être que c'était cet abruti qui me faisait sortir de mes gonds, peut-être que j'étais ladite abrutie qui me faisait sortir de mes gonds, peut-être juste que c'était mes règles. Sans m'en rendre compte, je me mis à taper instinctivement mon poing contre la paume de ma seconde main, chose que je faisais souvent lorsque j'étais nerveuse. Je finis par sursauter en arrêtant ce tic idiot, dont j'avais honte, et me pressais, trottinant doucement dans les couloirs d'Eel, mes yeux passant les alentours au peigne fin, à la recherche d'une quelconque queue touffue accompagnée d'une longue chevelure noire. Je finis par sortir du bâtiment de la Garde, mes yeux toujours légèrement embués de larmes, que j'essuyai d'un revers de main :
" Natacha? "
Je sursautai et me retournai vivement, pour me retrouver face à Valkyon, qui me regardait de son éternel air impassible, haussant un sourcil :
" Tout va bien?

- Oui, ça va. J'ai juste toujours du mal à me rendre compte de ce qui m'arrive...

- Je m'en doute. Il n'est pas évident d'accepter l'idée de ne jamais retrouver son chez-soi.

- Il n'est surtout pas évident d'accepter l'idée que l'on a passé l'arme à gauche... " Avouai-je, d'un faible ton, baissant malgré moi les yeux.

Valkyon soupira doucement, et m'afficha un air compatissant, bien que je doute qu'il comprenne ce que je traversais. Mais étonnament, en parler me fit un bien fou. Même si ce ne fut que quelques minuscules phrases. J'affichai alors un faible sourire à Valkyon, qui me fut rendu, avant de décider de changer de sujet :
" Dis-moi, tu ne saurais pas où je peux trouver Miiko? Car j'ai besoin de discuter avec elle du... Taudis qui me sert de chambre.
- Un taudis? N'exagères-tu pas un peu, Natacha?

- Je ne le pense pas. Les murs de ma chambre sont fissurés de partout, la vitre est brisée, le carrelage est compètement fissuré, et je ne te parle même pas de l'état de la salle de bain! Hier soir, j'ai passé la nuit à même le sol car je n'avais ni sommier, ni matelas, et j'ai dû déranger Thorn pour pouvoir me laver!, Finis-je par expliquer, clôturant ma plainte par un soupir exaspéré, tandis que Valkyon croisait ses bras sur son immense torse, renforçant l'impression de puissance qu'il me donnait déjà, avant qu'il ne prenne la parole :

" J'ai bien peur qu'elle ne soit pas si simple à convaincre. Miiko peut s'avérer entêtée sur certaines choses, les conditions de vies des jeunes recrues en font partie... Elle considère que ça "leur apprend à devenir plus forts physiquement et moralement", mais je ne suis pas de cette avis : une recrue fatiguée et à bout de nerfs à cause de mauvaises conditions de vie est une recrue inutile. Et nous ne pouvons pas nous permettre de laisser filer la moindre recrue. "

Quand je compris que Valkyon était du même avis que moi, et l'idée d'un potentiel allié dans cette quête pour convaincre Miiko était plus que bonne! Surtout qu'il ne s'agissait pas là de n'importe quel allié : Valkyon! LE Chef de l'Obsidienne!

" Je n'ai qu'un mois pour faire mes preuves et rester dans la Garde! C'est un mois durant lequel je dois être irréprochable, ou je serai mise à la porte, et je doute que je parvienne à trouver un gagne-pain en dehors de ces murs... Je ne peux pas laisser le manque de sommeil me gâcher ma période d'essai! Tu veux bien m'aider à la convaincre, s'il te plaît, Valkyon? " Quémandai-je, gentillement, priant de tout mon être pour qu'il accepte...
Et à ma grande joie, ce fut le cas! J'avais donc un premier allié, restait à convaincre les autres!

Alors que je sentais le vent commencer à tourner en ma faveur, je vis Ykhar accourrir vers moi et Valkyon, complètement paniquée, j'ouvris de grands yeux lorsqu'elle cria nos prénoms :
" Natacha! Valkyon! Miiko recquiert vos présences à la salle du Cristal! C'est urgent! "