Une Lueur dans l'Ombre
Disclaimer : Harry Potter, son univers et ses personnages appartiennent à JK Rowling, mais j'y ai apporté quelques éléments, aussi bien personnages que magie.
Avertissement : Que je crois devoir faire.
En dehors du fait que quelques thèmes sensibles seront abordés, je voudrais expliquer le nom du jumeau de Harry.
Le personnage a été après le nom : je m'explique : j'avais ce nom, et je voulais l'attribuer à un personnage et malheureusement pour mon temps, une telle histoire me trottait dans la tête depuis longtemps.
Le nom a été choisi pour ses sonorités et son étymologie : il signifie « Porteur de Lumière » et j'en aime les sonorités.
En aucun cas cela ne décrit l'orientation du personnage en terme de bien ou de mal, pas plus qu'une volonté de ma part de faire frissonner.
Le nom n'est pas une intrigue de l'histoire. Si je fais ce paragraphe explicatif, c'est pour prévenir d'éventuelles remarques, et je vais donc m'arrêter là. Un dernier conseil : si vous avez du mal, prononcez le à l'anglaise, c'est ma prononciation personnelle de toutes manières.
A présent, l'histoire va pouvoir commencer. Voici le premier tome d'Une Lueur dans l'Ombre.
Les Pièces Secrètes de Poudlard
La soirée d'Halloween jouissait toujours d'un succès non négligeable au Royaume-Uni. Des enfants déguisés, parfois accompagnés d'adultes, sortaient dans les rues à la recherche de bonbons à récolter et de sorts à lancer. Depuis la fenêtre de leur salon, James Potter observait la rue de Godric's Hollow, ordinairement calme, s'animer entre moldus et sorciers. La mâchoire crispée du jeune homme connaissait un frémissement convulsif et incontrôlé. Il s'échappa un instant des rues mornes pour se souvenir de ses souvenirs d'école, de la façon dont Halloween était toujours célébré à Poudlard. Hormis un festin particulièrement somptueux, Dumbledore prévoyait toujours une activité qui égayait la soirée. Lors de leur quatrième année, un groupe de squelettes musiciens avait connu un succès particulier. Mais à présent… En cette soirée d'Halloween, les Potter ne pouvaient aller festoyer nulle part. Ils étaient consignés chez eux, protégés par le sortilège Fidelitas et leur Gardien du Secret, car leurs fils étaient la proie de Lord Voldemort.
-James ? Tu viens m'aider ?
Lily était apparue dans l'encadrement de la porte, les jumeaux posés sur chacune de ses hanches. Il se retourna et comme toujours, son cœur fit un bond dans sa poitrine lorsqu'il la vit. Une crinière rousse enflammée, des traits doux et un regard d'émeraude… Elle était en quelque sorte toujours l'adolescente dont il était tombé amoureux, et qui avait fini par le lui rendre –une fois que sa tête eût désenflé, selon son épouse.
-James ? le rappela-t-elle.
Une ride soucieuse apparut sur son front. James détestait cette ride qui s'était creusée depuis que Dumbledore leur avait appris que Voldemort en avait après leurs enfants.
-Nous aurions pu inviter Sirius, Remus et Peter, soupira-t-il.
Sa femme s'approcha de lui, peinant à supporter le poids des deux bébés de quinze mois. Il la déchargea rapidement d'Harry, et le petit garçon se mit à émettre des gazouillis en tentant d'attraper ses lunettes. Il s'agissait de leur grand jeu, à son frère et à lui. En voyant Harry écarté de lui, Lucifer se blottit dans les bras de sa mer, tendant néanmoins sa petite menotte vers son jumeau, qui l'attrapa. James esquissa un sourire alors que le visage de Lily s'éclairait. Ils aimaient voir leurs fils unis de cette manière. Bien vite cependant, les commissures des lèvres de l'homme retombèrent, et Lily posa une main sur son bras.
-Remus est en mission, tu le sais, Sirius est de garde ce soir, et Peter est bien plus en sécurité dans sa cachette.
James se renfrogna. Oui, leurs amis avaient des activités alors que lui était consigné à l'enfermement depuis des mois, bien avant que le Fidelitas ait été jeté sur leur maison dans le but de renforcer leur protection.
-Si seulement j'avais ma cape, soupira-t-il.
Une lueur blessée dans les yeux de son épouse lui fit regretter ses mots.
-Pas ce soir, Lily, mais demain, ou la semaine prochaine. J'ai besoin de prendre l'air. Même Cornedrue…
-James, les cerfs…
-… ne sont pas fréquents à Godric's Hollow, je sais, marmonna-t-il.
Harry, sentant la tension de son père, commença à pleurnicher, et James lui accorda aussitôt son attention. Il le redressa et le souleva dans les airs.
-Ben alors mon grand ?
Le bébé poussa des cris de joie alors que l'homme le faisait tournoyer. Lucifer les regarda faire, ses grands yeux bruns focalisés sur leur toupie géante, et la tête penchée pleine d'incompréhension. D'une nature plus calme, il n'appréciait pas forcément d'être « brusqué » de la sorte. En revanche, à la grande satisfaction de James, les deux petits faisaient preuve d'un pareil enthousiasme en ce qui concernait les vols sur les balais – jouets que leur avait offert Sirius pour fêter leur première année dans ce monde. Lucifer leva sa petite menotte et tendit dans les airs la baguette de sa mère qu'il avait réussi à subtiliser. Il la pointa sur le lustre, qui fit des étincelles, avant que les adultes ne réalisent ce qui se passait.
-Oulà toi, attention, rit James en frottant son nez contre celui de son bout de chou. Tu sais, Lily, un jour, ils seront de vrais Maraudeurs.
-Je n'en doute pas une seconde, soupira sa femme. Mais si tu leur apprends à devenir des Animagi sans l'accord du ministère, je te promets que nous connaîtrons une dispute mémorable.
James lui offrit un sourire aussi innocent qu'insouciant. Il avait des années pour la faire changer d'avis, et des années pour s'assagir –selon Remus.
-Allez ! Va donc leur donner leur bain le temps que je prépare le repas. Même si nous ne pouvons pas sortir, rien ne nous empêche de faire de cette soirée d'Halloween un moment agréable !
Elle lui transféra leur deuxième fils, qui casa sa tête contre son aisselle en le regardant avec perplexité. James sourit. Malgré tout, il restait l'espoir.
Lily paressait dans le fauteuil, à moitié endormie. Les jumeaux avaient été mis au lit plusieurs heures auparavant, et ils avaient longuement discuté, évoqué des souvenirs de Poudlard, quand tout leur semblait encore simple, blottis l'un contre l'autre. Il était à présent temps pour eux de monter se coucher. James n'en avait pas envie. Un nœud désagréable lui tordait l'estomac, et à en juger par la respiration trop courte de sa femme, elle n'était pas tranquille non plus. Pourtant… Il savait que Lily était épuisée. L'embrassant doucement sur le front, il la réveilla d'une caresse sur la joue.
-Un lit serait plus confortable, ma douce Lily.
Elle lui sourit tendrement et l'enlaça avant de le suivre à l'étage. James passait dans la salle de bain lorsque des gémissements d'enfants résonnèrent. Aussitôt alerte, il se rua dans la chambre de leurs fils. Harry comme Lucifer avaient les yeux grands ouverts et gesticulaient. Il prit Lucifer dans ses bras pour le calmer et Lily, arrivée à la vitesse de l'éclair, serra Harry dans ses bras comme si sa vie en dépendait.
-Lily… commença James.
Le nœud d'angoisse se resserrait, presque insupportable. Il fit passer Lucifer dans ses bras.
-Je vais en bas, murmura-t-il.
L'angoisse dans les yeux verts de sa femme reflétait douloureusement la sienne. Un pas, dans le couloir. Deux, vers l'escalier. Quatre, avançant un peu plus. Et puis une marche. A la fenêtre se dressait une ombre. L'homme comprit immédiatement. Ses poumons prirent feu.
-LILY ! Lily, c'est lui ! Cours, je vais le retenir ! hurla-t-il.
Un rire glacé lui répondit, mais il se trouvait déjà en bas des marches. Voldemort avait ouvert la porte. James chercha sa baguette, laissée à l'étage. C'était impossible ! Dumbledore avait juré que le Fidelitas les avait mis à l'abri. Et Sirius… Pourquoi avait-il écouté Sirius ? A présent, le plus puissant Mage Noir de tous les temps se trouvait devant lui, et pointait sa baguette sur son torse. James savait qu'il allait mourir, et il était déterminé à se sacrifier pour que sa femme et ses fils aient le temps de fuir. Il fit la chose la plus insensée qui soit et que son tempérament de Gryffondor lui dictait : il bondit sur le Mage Noir, déterminé à le renverser sur le sol. Pris par surprise, Voldemort n'eut pas le loisir de lui lancer un sort, il se contenta de repousser violemment l'homme qui allait s'écraser violemment contre le mur puis le sol. Du sang s'écoulait de sa tempe.
Il quittait le Ministère, lorsqu'il avait appris. Une attaque de Mangemorts à Godric's Hollow, la présence de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, et une maison en ruine. Les mots avaient tournoyé dans sa tête et il s'était rué chez lui, avait enfourché sa moto volante et s'était précipité chez ses amis. La porte était défoncée, le plafond commençait à s'effondrer, et toute la demeure respirait la magie noire. Les jumeaux ! Sirius allait s'élancer sur l'escalier bancal lorsqu'il vit la jambe dépasser des décombres. Ses yeux s'agrandirent de stupeur et de douleur et il fit voler les morceaux, dégageant son meilleur ami.
-Merlin, James, non ! James ! James !
Il sentit faiblement sa poitrine remuer.
-James !
Les larmes coulèrent sur ses joues. Il ferma les yeux, infiniment soulagé. Son ami était salement amoché, ensanglanté, mais vivant…
-Lily !
Laissant retomber le bras de l'homme inconscient, il agit instinctivement et déboula dans la chambre que partageaient son filleul et son frère. Dans le même berceau, deux enfants se tenaient la main en pleurant, l'autre menotte posée sur les barreaux du lit. Et sur le sol…
-Lily !
Il saisit la jeune femme par les épaules dans l'espoir qu'elle soit simplement évanouie, comme James. Mais nulle blessure ne transparaissait, sa peau commençait déjà à tiédir et elle ne bougeait plus. Le cœur brisé, Sirius hurla, puis sans réfléchir, dévala de nouveau les escaliers et reprit sa moto volante. Il allait tuer ce rat !
Dumbledore arriva chez les Potter en même temps que les guérisseurs de Sainte Mangouste, prévenus par une des sorcières des tableaux d'anciens directeurs de Poudlard. Ils examinèrent aussitôt le jeune adulte entouré par les décombres, et le vieil homme, jugeant que James était en sécurité pour le moment, monta à l'étage avec appréhension. Il avait été prévenu par un jeune Auror du Ministère de l'incident. Sa gorge se noua lorsqu'il aperçut Lily Potter sur le sol, morte. Dans le lit, les deux bébés paraissaient sains et sauf… Mais Voldemort… Albus avisa tristement la cape et les cendres sur le sol. La prophétie s'était réalisée, malgré tous leurs efforts pour maintenir la famille en vie et en sécurité. Il regretta amèrement de ne pas avoir réussi à convaincre James de le choisir comme Gardien du Secret et non Sirius Black. A présent, l'espion qui sévissait dans l'ordre était découvert, au prix de la mort de ceux qui lui avaient tant fait confiance. Il s'approcha des enfants, jumeaux. L'un d'entre eux qu'il identifia aisément comme Lucifer Potter, aux cheveux roux qui retombaient sur sa nuque, dormait, agité, certes, et poussant des gémissements, conscient de l'aura de Magie Noire qui entourait les lieux. Harry Potter paraissait veiller sur lui, et leva ses yeux émeraude vers Dumbledore en se sentant dévisagé. Sur son front ensanglanté brillait une cicatrice en forme d'éclair, que l'homme se retint à grand peine d'effleurer. Des débris jonchaient le matelas, et avaient touché le jumeau endormi, sans que cela paraisse bien grave néanmoins, à peine quelques gouttes de sang sur sa grenouillère bleue. Harry se leva et s'agrippa aux barreaux, tentant d'attraper cette longue barbe blanche rigolote, puis avisa sa mère et babilla joyeusement, avant de commencer à protester et à hurler quand elle ne se réveilla pas. Ses cris sortirent son frère du sommeil, qui se joignit à lui. Deux guérisseurs déboulèrent dans la chambre.
-Ce sont leurs enfants ? Sont-ils blessés ?
-Lucifer a une légère coupure, répondit Dumbledore.
Les mots se bousculèrent. Il y avait tellement plus…
-Harry a pris un sortilège de mort en pleine figure, malheureusement, je crains qu'il n'y ait rien que nous pouvions faire.
-Mais… protesta le guérisseur le plus jeune.
Puis il avisa le tas sur le sol.
-Un bambin a vaincu Vous-Savez-Qui ? Comment est-ce possible ?
Bien des réponses tournaient dans l'esprit du directeur, qui secoua la tête tristement en regardant le corps de Lily Evans.
-Leur père est vivant, mais dans un sale état, ajouta le guérisseur. Il vaudrait mieux…
-J'ai bien des affaires à régler, l'interrompit Dumbledore.
Il devait à tout prix réunir l'Ordre, et il fallait informer le Ministère que Sirius Black avait révélé sa vraie nature. Le regret emplit Albus l'adolescent réparti à Gryffondor était plein de promesses, aurait pu quitter les idéaux de sa famille. L'éducation décidait-elle réellement du destin ?
-Je vous serais reconnaissant de veiller sur ces enfants jusqu'à ce que j'envoie Hagrid les chercher. Il les emmènera chez des membres de leur famille.
Sans attendre de réponse, il redescendit au plus vite et transplana jusqu'au Quartier Général, où se trouvaient les jeunes Arthur et Molly Weasley. Celle-ci portait son plus jeune enfant dans ses bras. Arthur se leva dès qu'il l'aperçut.
-Albus ! Ils disent que…
Le regard du directeur le stoppa net.
-Sirius nous a trahis. Informez-en le Ministère, s'il vous plaît.
Molly porta une main à sa bouche.
-Les enfants… ?
-… sont en vie. Voldemort a disparu cette nuit.
Arthur disparut dans la cheminée et la jeune femme s'assit, tremblotante. Dans ses bras, sa fille s'agita.
-Ils sont orphelins, Albus ? Nous pourrions, Arthur et moi…
Sept enfants, un salaire peu élevé, mais toujours aussi généreux, songea Dumbledore avec un respect grandissant. A regret, il fut obligé de refuser.
-Non Molly. Lucifer et Harry vont rester chez leur tante… Si James se réveille, nous aviserons.
-James est vivant ?! Merlin soit loué !
Dumbledore hocha la tête avec lassitude. Il avait besoin de réfléchir. Il prit congé de son ancienne étudiante et se servit du réseau de cheminée pour retourner à Poudlard, où il s'assit à son bureau et réfléchit longuement. Si, comme il le supposait, Lily Potter s'était sacrifiée, les enfants seraient en sécurité chez Pétunia Dursley, née Evans. Voldemort reviendrait.
La migraine vrilla les tempes de James qui eut un mal fou à ouvrir les yeux.
-Lily, marmonna-t-il.
Elle allait devoir s'occuper seule de Lucifer et Harry, aujourd'hui. Avec un peu de chance, Sirius, Remus et Peter pourraient passer et transmettre un message à l'Ordre de sa part. Il avait découvert une nouvelle information, la veille…
-Mr Potter ? s'enquit une voix féminine.
Ses paupières lui obéirent enfin et la luminosité blanche l'aveugla.
-Lily ? lança-t-il, inquiet.
-Vous vous trouvez à Sainte Mangouste, Mr Potter.
Il n'arrivait pas à se souvenir… Un combat contre des Mangemorts, alors qu'il était en mission ? Il était déjà revenu avec quelques écorchures, mais jamais aussi salement amoché. Le noir l'attirait de nouveau.
-James Potter, restez avec nous. Il faut que vous repreniez vos esprits. Vos enfants ont besoin de vous.
Les jumeaux ! Il fit un effort pour garder les yeux ouverts, et on lui fit avaler de force une potion à l'arrière goût de menthe. Ses forces lui revinrent peu à peu, mais sa mémoire lui faisait toujours défaut. Il ne parvenait pas à se souvenir de ce qui avait bien pu l'amener à l'hôpital des sorciers.
James commençait à perdre patience. Si une guérisseuse lui avait gentiment indiqué la date du jour –Deux Novembre-, elle avait refusé de lui donner la moindre explication, alors que son dernier souvenir revenait très précisément au quatre Octobre. Il avait offert des fleurs à Lily pour fêter le jour où ils avaient commencé à sortir ensemble, en septième année. Malgré tous ses efforts plus ou moins patients, rien d'ultérieur à cette date ne lui revenait, et ceux qui passaient dans la chambre isolée restaient muets face à ses interrogations. Juste au moment où le jeune homme allait se lever pour partir à la pêche aux informations par lui-même, la porte s'ouvrit sur le guérisseur en chef qui s'occupait de lui. Ses yeux clairs derrière ses lunettes étaient grave, et les traits de sa mâchoire carrée, crispée. Il s'assit sur le bord du lit.
-Vous êtes hors d'affaire, James, et vous pourrez sortir dès demain.
James plissa les yeux. Il n'était pas un expert, mais il lui semblait que d'ordinaire, si tout allait bien, les anciens malades retournaient chez eux directement.
-Nous vous avons tenu éloigné des nouvelles jusqu'à ce que ce soit le cas, ajouta gravement l'homme.
Il soupira et enleva ses lunettes.
-James, durant la nuit du trente-et-un au premier, Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom a pénétré chez vous et tenté de tuer un de vos enfants.
Le cœur de James manqua un battement.
-Où sont-ils ?
-Votre famille prend soin d'eux.
Cela ne fut pas pour le rassurer : ses parents étaient décédés quelques mois auparavant, et Lily n'avait plus que sa sœur avec laquelle ils entretenaient les pires rapports possibles. Impossible que les jumeaux soient près d'elle.
-Lily ?
Le guérisseur demeura impassible.
-Elle a été tuée. Je suis navré, James.
Les mots rebondirent sur lui sans prendre sens et résonnèrent impitoyablement. Lily, Lily, Lily, Lily…
-Je… Lily… Non…
Il s'effondra.
-Vous avez confié mes fils à Pétunia Dursley ? hurla James. Ce sont les pires individus de l'espèce humaine, et je pèse mes mots ! Ca n'a rien à voir avec le fait qu'ils soient moldus, mais je refuse qu'ils demeurent là-bas !
Il faisait les cent pas dans le bureau de Dumbledore, bouillonnant, en deuil et enragé. Le directeur demeurait impassible.
-Elle est la sœur de leur mère et je puis t'assurer qu'ils sont parfaitement en sécurité là-bas, James.
-Très bien, je la remercierais pour ces trois jours. Maintenant, je veux mes enfants !
-James…
-J'ai tout perdu, Dumbledore ! Ma femme est morte, mon meilleur ami depuis les premiers jour à Poudlard m'a trahi avant d'assassiner un autre de mes plus proche amis, et le dernier est en mission, risquant de mourir à tout instant !
-Assied-toi, répondit l'homme.
Malgré sa colère, James ne pouvait pas lui désobéir, et se laissa tomber sur une chaise de mauvaise grâce.
-James, ce qui a permis à Harry de survivre est de l'ancienne magie. Il a également protégé son frère, et ils seront plus en sécurité là-bas qu'avec toi.
-Non, répliqua-t-il aussitôt.
-Elever deux enfants seuls sera dur, Harry sera en danger et Lucifer dans l'ombre, la célébrité ne leur sera pas bonne.
Un instant, il envisagea la solution proposée et ses barrières cédèrent. Les larmes roulèrent en masse sur ses joues et il dut prendre de profondes inspirations.
-Albus… Je ne me souviens même pas de… du dernier jour que j'ai passé avec… avec Lily. Il est hors de question que j'abandonne mes deux enfants.
Il pensa à Harry, à son visage poupin entouré de courts cheveux qui se dressaient en pointes, à son sourire et son énergie, à ses yeux verts magnifiques qu'il tenait de Lily. Il se perdit un instant dans ses souvenirs. Harry avait vaincu Voldemort et débarrassé le monde sorcier de sa plus grande terreur. Il avait toujours eu cette fougue en lui, et James n'était pas étonné qu'il soit celui de la prophétie. La douleur de la perte s'effaça un instant pour faire place à la fierté paternelle.
-Harry… il pourra apprendre à se défendre, plus il en connaîtra, mieux ce sera. Je suis un Auror, je le protègerai.
L'image de Lucifer s'imposa à lui. Les traits plus fins, les cheveux aussi éclatants que ceux de sa mère, et ses yeux marron observant le monde avec ardeur et malice, il était plus calme, plus observateur aussi. Il ressemblait tant à Lily… Le souvenir de Pétunia Dursley le fit grimacer, et il pensa aux propos de Dumbledore. Son énergie serait consacrée à aider Harry, il serait probablement en danger, et comment vivrait-il d'être dans l'ombre de son frère ?
-Vous avez raison. Je ne peux pas les avoir tous deux près de moi.
Le gouffre dans son cœur se creusa un peu plus, mais il n'y fit pas attention.
-Je vais laisser Lucifer dans le monde moldu. Si ce que vous dites est vrai, il devrait être protégé.
Une lueur d'inquiétude s'alluma dans les yeux de Dumbledore.
-James…
-Non, Dumbledore, je ne laisserai pas mes deux enfants. Si Harry est le sauveur, il est plus en danger, et je me fais plus confiance qu'aux Dursley en ce qui concerne sa protection. Je ne délaisserais pas Lucifer, mais je ne peux pas me permettre d'erreurs.
James se leva.
-Allez-vous m'accompagner ?
-Je vais le faire, James, mais je ne…
-Ce sont mes enfants, le coupa-t-il.
Sa décision était irrévocable. Il se connaissait, et il avait confiance en lui-même. Il gérait la situation.
Pétunia et Vernon Dursley estimaient avoir fait preuve d'une extrême patience. Lorsqu'un géant, un vieil excentrique et une harpie ridée avaient fait irruption chez eux, deux gamins dans les bras, avant de leur expliquer que la sœur de Pétunia venait d'être tuée et que James était dans l'impossibilité de s'occuper de ses fils pour le moment, ils les avaient accueillis sous leur toit, certes de mauvaise grâce. Ils avaient dû ensuite gérer des jumeaux appartenant à une race qu'ils exécraient tout en coopérant avec la jalousie de leur petit garçon, âgé de presque deux ans. Aussi, lorsque le bon à rien épousé par Lily Evans avait débarqué à son tour en compagnie du « vieil excentrique au nom imprononçable », comme l'appelait Vernon, et s'était comporté avec une politesse très limitée, Pétunia et son mari avaient eu du mal à se comporter en personnes civilisées. James –un nom commun, le plus utilisé des britanniques-, avait pris Harry dans ses bras et l'avait longuement serré, effleurant sa cicatrice du bout des doigts et des lèvres sans prêter attention à ce qui l'entourait. Vernon semblait sur le point d'exploser, et Pétunia espérait qu'il n'en ferait bien. Elle ne connaissait que trop bien les sorciers, ceux qui se trouvaient devant-elle, particulièrement. Combien de fois n'avait-elle pas entendu Lily tempêter contre « cet imbécile et arrogant James Potter », durant l'été ? Et Dumbledore… Elle détaillait le sorcier qui lui avait fermé les portes de la Magie, en s'efforçant de ravaler une rancœur depuis longtemps disparue. En aucun cas elle ne souhaitait plus faire partie de cette communauté anormale. Dans sa chaise pour bébé, Dudley commença à s'agiter et à crier, et Pétunia posa une main sur sa menotte potelée. S'ils effrayaient son fils… James ne quittait pas Harry des yeux, et il avait dans le regard cette fierté qu'elle avait si souvent vue pour Lily chez ceux qui lui avaient donné le jour. Celle qu'elle s'efforçait de n'avoir que pour Dudley. Jamais d'autre enfant, ne jamais en délaisser un. James prit Harry, jeta un regard à Lucifer et s'en détourna comme s'il s'était brûlé. Au moment où il ouvrit la bouche, Pétunia sut ce qu'il allait leur demander. La réponse de son mari fut aussi véhémente qu'elle l'avait craint.
-Hors de question ! Vous et vos monstrueux enfants, fichez le camp de chez moi !
Dumbledore tendit le bras, baguette comprise, devant James pour l'empêcher de se jeter sur Vernon.
-James… avertit-il.
-Ecoutez-moi, Vernon, j'ai perdu leur mère, et je ne peux pas m'occuper des deux ! Lucifer sera bien mieux parmi vous !
La phrase fit frissonner Pétunia. Avait-on idée ? Elle aurait aimé que les sorciers choisissent des noms bien plus ordinaires pour leurs enfants, et surtout, bien plus neutres.
-Je crains qu'il n'ait en partie raison, soupira Dumbledore. Pétunia, s'il vous plaît, en la mémoire de votre sœur.
Elle aurait voulu répondre qu'elle se fichait bien de Lily, mais le regard bleu perçant qu'il lui jeta par-dessus ses lunettes en demi-lune la réduisit au silence. Elle dévisagea l'enfant qui observait tout le bazar autour de lui, et tendait la main vers son frère, qui lui répondit. James regardait ostensiblement ailleurs. Il ne voulait pas de l'enfant.
-Vernon… commença-t-elle.
Son teint violacé l'effraya, mais elle pourrait lui expliquer plus tard. Si cet individu rejetait son propre fils, qui savait ce qu'il était capable de faire ?
-Très bien, laissez nous votre môme. Et maintenant, DEHORS !
-J'espère que notre prochaine rencontre se fera plus poliment, se contenta de répondre Dumbledore avant de passer le pas de la porte.
Pétunia se pencha pour ramasser l'enfant qui se mit à gigoter et se demanda si elle avait bien fait. Derrière elle, Dudley hurlait.