Drago Malefoy se tenait devant la porte du manoir familiale, devant cette maison où il avait grandi, mais où définitivement, il ne se sentait plus véritablement chez lui. Il hésita longuement, se demandant s'il devait cogner ou tout simplement entrer comme il l'avait toujours fait par le passé.

Au bout d'un trop long moment d'indécision, il frappa enfin à l'aide du heurtoir en forme de gargouille qui ornait l'immense porte de chêne massif. Trois petits coups, si simple, peut-être trop discret? La seule chose dont il était persuadé à présent, c'était que ce geste incertain allait avoir des conséquences irréversibles sur sa vie et qu'il allait l'empêcher définitivement de faire marche arrière.

La porte s'ouvrit devant lui et une femme se jeta dans ses bras en une fraction de seconde. Elle le serrait presque à l'étouffer tout en laissant libre cours à ses larmes qui coulaient désormais en abondance le long de ses joues.

-Drago, mon fils! Tu es revenue, sanglota Narcissa Malefoy avec une voix débordante d'émotion.

-Oui maman…

Drago se sentit immédiatement submergé par une chaleur. Cette chaleur, il ne l'avait pas ressentie depuis très longtemps. Du plus loin qu'il se souvenait, jamais il n'avait eu l'audace avant aujourd'hui, d'appeler sa mère maman, mais le mot mère lui avait paru trop froid, trop impersonnel pour qualifier cette femme devenue si différente de celle qu'il avait quitté il y a quelques années déjà…

Cinq ans pour être exacte. Cinq longues années où Drago Malefoy avait voyagé à travers le monde afin de trouver la paix intérieure, mais aussi pour se trouver lui-même en quelque sorte. Par le passé, il avait toujours suivi la route pavée d'or que lui avait indiqué son père. Cette route, construite de luxe et d'intolérance, devait le conduire vers les hautes sphères du pouvoir. Son enfance lui avait toujours semblé être parfaite. Recevant de ses parent plus qu'il ne l'avait véritablement mérité et désirant toujours avoir plus que ce qu'on lui offrait.

À l'âge de seize ans, sa jalousie et son ambition l'avaient poussé à accepter une opportunité qui devait lui permettre de prouver sa valeur au sein de l'organisation du plus puissant mage noir que le monde n'ait jamais connu. Drago s'était laissé séduire par l'offre alléchante et avait accepté la mission, qui s'averrait au final, n'être qu'un piège, une sorte de machination déguisée qui n'avait pour seul but que de satisfaire la vengeance d'un homme encore plus orgueilleux et rancunier que son propre père.

C'est à ce moment là que toute sa vie tout entière avait entièrement basculé. Il était devenu l'esclave de ses mauvais choix, soumis aux quatre volontés d'un homme aux propos fanatiques et dangereux. Un faux sang pur qui en avait trompé plus d'un avec ses beaux discours.

Il aurait pu faire d'autres choix, des choix qui auraient nécessité un grand courage, mais à cette époque et peut-être encore un peu quelque fois de nos jours, Drago n'était qu'un lâche, un gamin trop gâté qui découvrait avec horreur que sa vie qu'il avait cru si parfaite, cachait de sombres secrets. Toute cette histoire, son histoire, elle semblait si loin et si près à la fois maintenant qu'il était de retour là où tout avait commencé!

Au bout d'une longue étreinte qui n'en finissait pas, Narcissa Malefoy se décida enfin à lâcher son fil et à le faire entrer dans la maison. Elle lui souriait chaleureusement, mettant dans ce simple geste tout l'amour qu'elle ressentait pour lui et qu'elle avait, durant si longtemps, eu du mal à lui démontrer clairement.

Cette femme qu'il avait aujourd'hui devant lui, était toujours sa mère, mais quelque chose en elle avait changé. Physiquement, elle était encore aussi belle et raffinée que dans ses souvenirs, mais l'expression froide et hautaine qui habitait son visage en permanence auparavant avait disparu. De petites rides d'inquiétude semblaient avoir marqué un peu son visage, offrant une vision plus humaine à la plastique parfaite qu'elle avait toujours exposée si fièrement par le passé.

-Où est père, lui demanda Drago au bout d'un long moment de silence et de contemplation mutuelle.

-Dans son bureau, mais je ne suis pas certaine que ce soit une bonne idée qu'il te voit comme ça, lui répondit Narcissa.

Drago avait parfaitement conscience de l'image qu'il projettait actuellement. Il venait à peine d'arriver d'un très long et épuisant voyage et il s'était un peu négligé depuis qu'il avait pris sa décision de revenir parmi les siens. Ses cheveux avaient besoin d'une bonne coupe, sa barbe poussait depuis plus d'un mois sans même qu'il n'ait pensé à la tailler pour qu'elle ait une forme cohérente et que dire de ses habits! Ils étaient couverts de poussière lui donnant l'apparence d'un vagabond. Se présenter comme ça devant son père n'était sans doute pas la meilleure façon de lui prouver qu'il n'était plus le garçon faible qu'il avait toujours été à ses yeux. Mais ce qu'il pourrait bien penser de lui désormais, il s'en fichait! Plus vite il l'aura vu et plus vite il se sentira soulagé du poids de cette attente.

Il accompagna silencieusement sa mère dans le vaste labyrinthe de couloir qu'il connaissait si bien et se retrouva devant la familière porte de bois sculptée derrière laquelle se cachait son père. Discrètement, il prit une grande inspiration, mais sa mère semblait encore hésiter, comme si elle lui cachait quelque chose, comme si finalement le vrai problème ce n'était pas que Lucius Malefoy voit Drago affublé de la sorte, mais plutôt que Drago voit son père tel qu'il est devenu…

-Écoute Drago, il a changé tu sais…

-Mère ouvrez cette porte, lui ordonna Drago d'un ton plus froid que celui qu'il avait prévu employer.

Elle s'exécuta et le spectacle qui se déroulait devant ses yeux était plus qu'affligeant. Lucius Malefoy était étendu à plat ventre sur une causeuse, le visage enfoncé dans un coussin recouvert de bave. Son bras pendait dans le vide et il semblait avoir échappé une bouteille de whisky qui avait roulée un peu plus loin sur le plancher probablement parce qu'il s'était endormi.

Madame Malefoy s'avança vers son mari et le secoua d'abord tout doucement, puis augmenta la vigueur de son geste en voyant qu'il ne se réveillait toujours pas.

-Lucius… Lucius réveille toi, ton fils est ici!

-Fils…Dra..go, Drago, dit plus clairement l'homme en relevant la tête, avec un filet de bave collé à sa joue.

Il le dévisagea un moment, comme s'il n'était pas encore certain que l'homme qui se tenait devant lui, fût réellement la chair de sa chair. Une fois que son esprit embrumé d'alcool parvint enfin à le reconnaître, il lui lança :

-Tu as l'air d'une vraie loque mon fils!

-Ce doit être parce que j'ai toujours rêvé de vous ressembler père, répondit Drago du tact-o-tact.

-Comment oses-tu me parler de la sorte. Tu n'es qu'un sale gamin, un lâche. Tu nous as abandonné, tu as abandonné ta mère alors qu'elle avait désespérément besoin de toi. Elle a tout sacrifié et tout risqué pour toi! Tu n'es qu'un ingrat, après tout ce qu'elle a fait pour toi, tu te décide enfin à revenir, mais tu te présente devant nous vêtu de la sorte et tu ose me critiquer et me juger moi, sous mon propre toit!

Les paroles de son père lui firent mal. Drago savait exactement quels reproches son père allait lui faire quand il le reverrait, mais malgré cela, malgré sa préparation mental, il avait quand même mal. Peut-être était-ce parce que dans tous les scénarios qu'il s'était imaginés dans sa tête, Lucius avait cet air dominant, fier et hautain qu'il avait toujours eu lors de leur affrontements passés et non cette apparence d'ivrogne si grotesque. Il n'était plus qu'une pâle caricature de lui-même.

Le fait de découvrir qu'il avait abandonné sa mère toute seule, depuis tout ce temps, avec un homme tel que lui, le fit souffrir intérieurement et lui fit presque regretter de l'avoir quittée, mais il avait eu besoin de partir. Égoïstement, il avait fait le choix de quitter les siens. Il avait décidé de le faire quelques mois seulement après la chute du seigneur des ténèbres, persuadé que c'était le seul bon choix qui s'offrait encore à lui après tout ce qui s'était passé, tout ce qu'il avait vu, tout ce qu'il avait fait.

Son voyage ne devait durer que quelques mois au début, juste le temps nécessaire pour que les choses reprennent un peu leur place, mais il s'est étiré jusqu'à duré cinq longues années qui lui ont parue pourtant bien trop courtes. Sa mère pensait même qu'elle ne le reverrait jamais. Il n'avait jamais cessé de lui écrire cependant, lui parlant de sa vie, des pays qu'il visitait et refusant toujours l'argent qu'elle voulait lui envoyer. Il vivait en nomade sur la route, dormait dans des auberges et travaillait pour subvenir à ses besoins. Il se baladait entre le monde sorcier et le monde moldu, découvrant avec fascination ces êtres qu'il avait tant appris à mépriser durant son enfance, découvrant de lui-même combien son éducation avait manqué d'ouverture et surtout de tolérance.

-Je vais vous laisser père. Nous parlerons demain quand vous aurez dégrisé, lui dit Drago d'un ton neutre.

-Dégrisé ou pas, sache que mon opinion à propos de toi restera toujours la même!

Un peu plus tard, Drago et sa mère s'était assis au salon en tenant chacun dans leurs mains, une tasse de thé bien chaude et réconfortante. À aucun moment elle n'avait essayé d'excuser le comportement de Lucius. La femme qu'il connaissait depuis toujours, se serait empressée de le faire, mais celle qui était devant lui aujourd'hui, semblait ne plus vouloir lui trouver d'excuses. Elle se contentait maintenant d'éviter de parler de lui et puis de toute façon, il n'y avait rien de plus à dire à son propos que ce qu'il avait montré de lui tout à l'heure.

Narcissa était intarissable et bombardait son fils de questions. Elle n'avait pas reçu de lettre de lui depuis plus de deux mois et ça l'avait beaucoup inquiété. Ce n'était pas la première fois que cela arrivait, mais cette fois-ci, elle avait ressenti que c'était différent…

-Il s'est passé quelque chose n'est-ce pas?

- Rien de bien important, lui répondit évasivement Drago.

-Tu sais mon fils, les mères ressentent ces choses là…

-C'est un peu compliqué et je ne me sens pas encore prêt à en parler.

Après plusieurs heures de discussion presque ininterrompue, Drago et sa mère prirent chacun la direction de leurs chambres respectives. Lucius Malefoy semblait ne pas avoir bougé de son bureau et Narcissa, de son côté, semblait assez habituée à dormir toute seule dans son très grand lit.

Drago hésita un peu. Devait-il dormir dans sa chambre ou dans l'une des nombreuses chambres d'invité que contenait la propriété? En poussant la porte de la pièce qui était autrefois la sienne, il réalisa que rien n'avait bougé depuis son départ. L'endroit était propre et bien rangé, signe que leur elfe de maison avait continué son entretient de façon régulière. Tous les objets qu'il avait laissés derrière lui, il y a cinq ans, étaient exactement au même endroit. À croire que personne n'y avait remis les pieds.

Sur les murs, il y avait toujours ses bannières à l'effigie de la maison Serpentard. Il s'approcha lentement de l'une d'elle, regardant de plus près ce logo qui l'avait rendu si fière à une certaine époque. Aujourd'hui, tout cela appartenait à un lointain passé rempli de vieux démons très tenaces qui le hantaient parfois la nuit.

Il se dirigea vers la salle de bain attenante. Il retira rapidement ses vêtements poussiéreux afin de prendre une bonne douche bien chaude. Il y resta même un temps qui lui parût presque indécent, mais il y avait bien longtemps que ça ne lui était pas arrivé. Après en être finalement sorti, il se regarda longuement dans le miroir. Son ancien miroir où il avait l'habitude de s'admirer quand il était plus jeune et qui lui renvoyait aujourd'hui une image de lui bien différente de celle qu'il avait toujours été si fière de montrer, même si durant ses dernières années de vie ici, il avait eu souvent bien du mal à s'y regarder longtemps.

Le lendemain matin, il se réveilla très tôt. Le soleil estival plombait sur son visage, l'extirpant lentement de ses rêves un peu tourmentés. Il se leva et se dirigea vers la fenêtre, admirant la vaste plaine où il avait tant volé durant son adolescence. Il décida sur un coup de tête de l'ouvrir et d'enfourcher son vieux balai de course pour vérifier s'il en était toujours autant capable.

Du haut des airs, vêtue uniquement du boxer dans lequel il avait dormi, Drago fendit l'air à une vitesse folle, se retenant pour ne pas crier sa joie et son excitation. Le bonheur monta en lui, effaçant momentanément de sa tête tous ses souvenirs douloureux que sa nuit au manoir avaient ravivés. Insouciant, téméraire et heureux, c'était ce qu'il ressentait et c'était ce qu'il avait toujours ressenti à chaque fois qu'il avait volé de cette façon.

Au bout d'un long moment qui lui parût presque une éternité, il décida de rentrer. Il ne résista pas à l'envie de reprendre une autre très longue douche dans sa salle de bain et il en profita en même temps pour se débarrasser de sa barbe et pour se couper un peu les cheveux à l'aide d'un sort. Il décida cependant de ne pas reprendre son ancien look un peu trop coiffé d'avant son départ, préférant maintenant avoir un style un peu plus décontracté et moderne.

Satisfait par l'image qu'il projetait, Drago vida ensuite le contenue de son sac à dos sur son lit. Il était bien plus garnit qu'il en avait l'air et cela était possible grâce à un sort d'extension indétectable qu'il avait lui-même jeté lorsqu'il se l'était procuré. Il avait donc pu voyager assez aisément avec beaucoup de choses sans que cela ne soit trop lourd ou encombrantà transporter.

Il regarda ses vêtements longuement avant de se décider. Il choisit d'enfiler un pantalon noir et une chemise d'un ton de gris avec une touche de bleu qui faisait parfaitement ressortir l'intensité de la couleur de ses yeux. Il ne possédait plus de veston et ceux que contenait encore son ancienne garde-robe ne lui allaient plus vraiment. De toute façon, il était certain que sa mère ne lui en tiendrait pas rigueur.

Il prit ensuite son temps avant de descendre, un peu nerveux de vivre son premier matin dans son ancienne/nouvelle vie. Il décida de faire un peu le tour des pièces avoisinantes à sa chambre, pour mieux s'imprégner de son passé et se prouver en quelque sorte à lui-même, qu'il n'était plus le même Drago que celui qui habitait les lieux jadis. Il constata que les pièces ne contenaient plus autant d'objets que dans ses souvenirs. En y regardant de plus près, il s'aperçut qu'il n'y avait plus que des meubles nues et vides. Les fenêtres n'avaient plus de rideaux, les lits plus de couettes et les murs plus un seul tableau.

Il continua ensuite à faire le tour de la propriété et il constata rapidement que les seules pièces qui semblaient encore posséder une âme ou un décor, étaient celles que ses parents utilisaient encore. Il se souvint combien sa mère était fière de redécorer régulièrement chacune des pièces de ce manoir. Voir ainsi sa maison devenir presque complètement dépersonnalisée, le laissait un peu perplexe.

Drago retrouva sa mère sur la terrasse. La femme était entrain de lire la gazette du sorcier en buvant son café matinal. En l'entendant approcher, elle leva les yeux vers lui, manquant de s'étouffer avec la gorger du breuvage brûlant qu'elle venait tout juste de prendre.

-Mon fils, tu es devenu un si bel homme. Et ces muscles! Ça parait que tu as travaillé physiquement ces dernières années. Tu dois avoir brisé bien des cœurs avec un physique pareil, le taquina sa mère tout en l'admirant.

-C'est parce que je vous ressemble beaucoup, la complimenta son fils en retour.

Un voile de tristesse passa rapidement dans les yeux de Drago, subtile, discret, mais assez présent pour que sa mère s'en soit aperçue. Elle le dévisagea un moment et il savait, sans qu'elle n'ait à dire quoi que ce soit, qu'elle avait compris que c'était plutôt lui qui avait eu le cœur brisé.

Spontanément, elle se leva et le serra dans ses bras. Décidément cette femme avait véritablement changée! Jamais elle ne se serait abaissée à une telle démonstration de compassion envers lui, mais maintenant, elle semblait plus en harmonie avec ce qu'elle ressentait et plus encline à laisser s'exprimer plus librement ses émotions.

-Ça va maman, c'est une vielle histoire, lui dit Drago pour la rassurer.

-Tu sais, les vieilles histoires font souffrir longtemps, je suis bien placé pour le savoir!

-Je sais…

Drago se dégagea doucement de son étreinte et prit place à la table. L'elfe de maison lui apporta un copieux petit déjeuner digne des meilleurs restaurants. Drago mangea avec appétit et sa mère l'observait du coin de l'œil, en affichant un sourire amusé. Elle se souvenait qu'à une certaine époque, son fils regardait toujours très longuement sa nourriture avant d'avaler la moindre bouchée, trouvant toujours une critique méchante à faire à leur elfe pour le forcer à s'auto punir. Le voir manger avec autant d'enthousiasme lui confirma qu'il avait bel et bien changé.

-Maman, pourquoi il n'y a plus de bibelots, de cadres ou même de couette sur les lits des chambres des invités, lui demanda Drago entre deux bouchées.

-Je…c'est…comment dire…

-Maman?

-J'ai tout vendu, par nécessité… Disons que nous n'avons plus autant d'argent qu'à l'époque. Ton père avait fait de mauvais placement et quand le seigneur des ténèbres est mort, le marché a changé et nous avons perdu beaucoup. Tout ce qui nous restait après cela, c'était le contenue de notre coffre à Gringotts.

-Mais ce coffre est plein, c'est largement suffisant pour vivre confortablement!

-Il l'était, mais peu de temps après ton départ, ton père a subi son procès et il a été condamné à verser une très grosse amende au ministère, pour se racheter en quelque sorte auprès des victimes de la guerre. Plus de la moitié de nos avoirs y sont passés. Il y a deux ou trois ans, j'ai commencé à vendre quelques objets que je trouvais inutiles ou superflus pour pouvoir garder notre train de vie. Les chambres d'invité ne nous servent plus de toute façon, alors à quoi bon les remplir de babioles que personne ne regarde et qui ne font que donner du travail supplémentaire à notre elfe.

-Mais tu as toujours aimé ces babioles, lui dit gentiment Drago.

-C'est vrai, mais aujourd'hui, ça n'a plus vraiment d'importance pour moi. Tu n'es pas le seul à avoir changé mon fils… Tu sais, la seule chose que j'ai refusé de toucher dans toute la maison et pour laquelle je me serais battue jusqu'au bout pour que ça n'arrive pas, c'est ta chambre. C'était en quelque sorte devenu mon musée privé, pour me rappeler que tu as un jour vécu ici auprès de moi...

-Hey, ne pleure pas. Tu aurais dû me le dire dans tes lettres que vous aviez des problèmes d'argent, je serais revenue plus tôt. Je t'aurais aidé. Tu le sais j'espère, lui dit Drago après l'avoir enlacée avec tendresse.

-Je ne voulais pas que tu reviennes à cause de moi. Beaucoup de choix que tu as fait, beaucoup de choses que tu as subi dans ton passé, toute cette souffrance inutile, tout cela a été causé par de mauvaises décisions que ton père et moi avions prises. Pour une fois, je voulais que tu vives ta propre vie en faisant tes propres choix, même si cela impliquait que tu ne reviennes jamais ici auprès de moi. Te savoir enfin libre me comble de bonheur et te voir ainsi, aujourd'hui devant moi, est la chose qui me rend le plus fière, lui expliqua la femme en se ressaisissant légèrement.

Drago savait que sa mère l'avait toujours protégé et encore une fois, ce fut une façon pour elle de le faire et pour cela il lui en était d'autant plus reconnaissant, même s'il aurait préférer savoir ce qu'elle vivait durant son absence.

Vers l'heure du lunch, Lucius Malefoy émergea enfin de son bureau. Drago l'aperçut enfin à la lumière du jour. Il avait une barbe de trois ou quatre jours, les yeux cernés et le teint verdâtre. Sa démarche autrefois si fière, était devenue traînante.

Lucius regarda son fils de la tête au pied avant de lui lancer sur un ton aux accents sarcastiques :

-Maintenant tu es digne de te présenter devant moi fils!

-J'aimerais en dire autant de vous père, lui répondit Drago d'un ton lourd de reproches.

-Pour moi, ce n'est pas pareil. Je suis le maître de cette maison. Je peux me promener nue si cela me chante. Ne crois pas que parce que tu es de retour ici, dans tes beaux habits, que je vais te laisser prendre ma place!

Lucius Malefoy saisit une bouteille de whisky qui était posé sur un petit meuble rempli de verres de toute sorte, mais dont il jugeait l'utilité superflue. Il but directement au goulot, comme le pire des ivrognes. Drago se précipita vers lui pour lui enlever la bouteille des main, mais l'homme le repoussa et sortit sa baguette de la poche de sa cape pour le menacer de façon très agressive.

-Père, il est midi, ce n'est pas une heure pour boire ce genre de breuvage!

-Je suis le maître ici, je fais ce que je veux! Si tu ne veux pas de problèmes avec moi, je te conseil de rester en dehors de mon chemin fils. Je vie très bien depuis cinq ans sans que tu ne sois là pour me faire la morale! Si ta mère ne tiendrait pas autant à t'avoir ici auprès d'elle, compte sur moi que tu serais banni de cette propriété pour de bon.

-Vous appelez cela bien vivre. Vous buvez trop, vous avez perdu presque toute la fortune de notre famille et vous restez là, à rien faire de toute la journée, laissant ma mère se débrouiller toute seule pour faire vivre cette maison! Vous êtes pathétique, vous l'avez toujours été, lui dit Drago d'un ton contrôlé malgré la colère grandissante qui l'habitait.

-Moi je suis pathétique, elle est bien bonne celle-là! C'est toi qui as fui, c'est toi qui es parti la queue entre les jambes après que le ministère soit venu inspecter cette maison et nous dépouiller de nos biens.

-Ils n'ont pris que les objets de magie noire et les biens qui ont appartenu aux Mangemorts.

-Ils ont pris mes biens! Je suis un Mangemort et toi aussi mon fils et tu le resteras toujours, même si tu essaies de le renier! C'est inscrit dans tes gênes, comme dans les miens. Tu n'aurais pas dû revenir. Il n'y a pas de vie pour toi ici, juste de la souffrance. Tu es pareil à moi, un pariât, un sale lâche et personne dans le monde des sorciers ne nous pardonnera jamais, jamais! Notre nom de famille est sale, notre fortune est détruite et cette maison n'est plus qu'une farce. Repart Drago, part le plus loin possible d'ici pendant que tu le peux encore…

Lucius Malefoy disparût en direction de son bureau avec sa bouteille de whisky en main. Drago resta un moment figé sur place, analysant mentalement tout ce que son père venait tout juste de lui dire. Derrière la haine et la froideur de ses paroles, Drago avait décelé une réelle inquiétude. Comme si lui aussi, essayait de le protéger en quelque sorte. Il voulait lui montrer le meilleur chemin à suivre, comme il l'avait toujours fait, mais cette fois, c'était un chemin différent, un qui avait pour but de l'empêcher de finir comme lui.

Malgré la colère, Drago parvint un peu à le comprendre. Il n'approuvait pas son comportement pour autant, mais il savait pourquoi il agissait ainsi. Il buvait pour oublier. Il buvait pour se punir. Il buvait parce qu'il était perdu et surtout, parce qu'il était trop lâche pour essayer de faire autre chose de sa vie. En réalité, il souffrait, mais il était trop orgueilleux pour l'admettre, alors il vivait dans son espèce de monde imaginaire et buvait afin d'y rester. Le passé, le présent, l'avenir, tout lui faisait mal et jamais il n'acceptera de se confronter lui-même et de s'avouer que tout ce qui lui était arrivé en fait, l'était par sa propre faute. Jamais il ne pourra faire l'effort nécessaire pour changer.

Drago était passé par là. Il avait souffert, il avait fui et il avait affronté celui qu'il avait été afin de pouvoir évoluer vers celui qu'il était devenu. Maintenant, il se sentait prêt à revenir, à refaire sa vie parmi tous ces gens qui l'avaient connu autrement, parmi tous ces gens qui vont le juger et le haïr pour ce qu'il avait fait, pour ce qu'il avait été. Tout le monde a droit à une seconde chance et il avait bien l'intention de saisir la sienne. Il avait parfaitement conscience que ça ne sera pas facile, mais il devait le faire et affronter une fois pour toute son ancienne vie, parce que ce n'est que de cette façon qu'il trouvera enfin la vraie paix intérieure!