Chapitre 26 : La haine
Date : Samedi 7 mai 1977 – POV Sirius
« Je ne sais pas pourquoi tout le monde regrette Robbins. Il était loin d'être bon comme poursuiveur, il ne méritait même pas d'être capitaine des Poufsouffles », déclarait Bertram Aubrey à un garçon de son année.
« Est-ce que tu préfères prendre ton petit-déjeuner d'abord ou est-ce que je te lance un maléfice tout de suite, Aubrey ? », intervint James, sur le ton de la conversation.
Sirius éclata de son rire similaire à un aboiement et James lui adressa un regard amusé, fier de sa réplique. Le commentateur de Quidditch qu'était Bertram Aubrey pinça les lèvres et tira son ami par la manche pour l'attirer dans la Grande Salle, loin des maraudeurs.
« Nous aussi, on t'aime, Aubrey ! », s'exclama Sirius, de sa voix puissante qui résonna dans le hall d'entrée.
« Il va se venger », prédit Peter, qui souriait tout de même.
« Ce type est une langue de vipère qui n'aime personne, il n'a vraiment pas besoin d'excuses pour être odieux », le contra James, en se passant la main dans les cheveux.
Les quatre garçons venaient de descendre de leur salle commune. En ce jour de Quidditch, James était absolument surexcité et Sirius avait décidé de se laisser gagner par l'enthousiasme de son meilleur ami. Ils n'étaient d'ailleurs pas les seuls concernés. La Grande Salle avait revêtu les couleurs des Poufsouffles d'un côté et des Serpentards de l'autre. Il était absolument inutile de se demander de quel côté étaient les maraudeurs.
« Bon courage, Heyman ! », lança James, en tapant sur l'épaule d'un élève de leur année.
Le dénommé Heyman venait tout juste de se lever de la table des Poufsouffles et remercia rapidement le jeune Potter. Sirius nota une certaine anxiété sur le visage du gardien des Poufsouffles. Il n'y avait rien d'étonnant à ça, personne n'aimait jouer contre les Serpentards.
« Les Poufsouffles vont perdre », pronostiqua le capitaine des Gryffondors, la mine sombre, en s'asseyant avec ses amis.
« Le match n'est même pas encore commencé. Laisse-leur au moins le temps de monter sur leurs balais avant de les déclarer perdants », commenta Remus.
Sirius haussa les épaules. Au fond, il s'en fichait pas mal, pourvu que Gryffondor gagne la coupe à la fin de l'année. Mais comme les autres maraudeurs, James l'avait plus ou moins forcé à porter les couleurs de Poufsouffle et le visage du jeune Black affichait désormais un splendide maquillage jaune et noir.
« 'as b'soin d'être devin », répliqua le jeune Potter, la bouche pleine de porridge.
« Cornedrue ? », l'interpella Sirius, en lui montrant trois jeunes filles qui arrivaient.
Le grand Black dut se retenir de rire en voyant James mâcher et avaler à toute vitesse la grande quantité de porridge qu'il avait dans la bouche, manquant de s'étouffer au passage. D'ailleurs, il se mit à tousser et Sirius lui donna plusieurs claques dans le dos pour l'aider à respirer.
« Evans ! Je crois que tu lui coupes le souffle ! », s'écria Sirius, en s'adressant à la préfète des Gryffondors.
Lily se tourna vers eux et fixa James avec un étrange regard. Elle avait visiblement voulu répliquer quelque chose de cinglant à nouveau, mais en voyant les yeux remplis de larmes de James, ne put sans doute s'y résoudre. Sirius ne put s'empêcher d'éclater de rire.
« Il a pas tort ! », confirma James, entre deux nouvelles toux. « Tu imagines ? Je pourrais très facilement mourir d'amour pour toi ! D'un instant à l'autre ! Tu ne veux pas m'accorder un dernier souhait ? Le souhait d'un mourant, Lily ! Sors avec moi et je pourrais partir en paix ! »
Sirius ne chercha pas à être discret et renifla devant la prestation théâtrale médiocre de son meilleur ami. Remus n'avait pas relevé la tête du journal et Peter était absolument hilare. Lily se mit à plisser les yeux, visiblement loin d'être convaincue. Derrière elle, Mary se mordait la lèvre pour s'empêcher de sourire et Marlene était absolument impassible.
« Tu te trompes d'adjectif, Potter. Tu n'es pas un mourant, tu es un abruti », répliqua la rousse, en donnant l'impression qu'elle s'adressait à une personne particulièrement lente d'esprit.
« L'un n'empêche pas l'autre », commenta Sirius sur un ton amusé, sans pouvoir s'en empêcher.
C'en fut trop pour Mary qui éclata de rire et s'attira les foudres de la préfète.
« Tu dis ça, mais on ne sait jamais ce qui peut arriver. Je pourrais mourir du jour au lendemain et là, je suis sûr que tu regretterais de ne pas m'avoir dit oui ! », lança James, qui était loin de se démotiver.
Lily pouffa d'un rire sarcastique, mais ce ne fut pas le plus étonnant. Marlene s'approcha de leur table et frappa brusquement le bois de son poing, faisant un peu reculer Cornedrue.
« Tu ne sais pas de quoi tu parles, James », asséna-t-elle, d'une voix étrangement froide.
« C'était juste une blague ! », intervint Sirius, prenant la défense de son ami face à la surprenante réaction de la grande blonde.
Quelques secondes plus tard, il suivait l'exemple de James et recula un peu lorsque Marlene tourna des yeux meurtriers vers lui.
« Il y a des choses avec lesquelles on ne devrait peut-être pas blaguer », déclara-t-elle gravement.
Semblant prendre conscience de la scène étrange qu'elle était en train de faire, la jeune fille retira lentement sa main de la table et se recula, avant de prendre la direction du hall d'entrée. Lily et Mary ne perdirent pas de temps et la suivirent à pas pressés.
« Qu'est-ce qui lui a pris, à Marlene ? », les interrogea Peter, en se détendant à vue d'œil.
« Y'a eu un mort ou quoi ? », demanda Sirius, qui n'en revenait toujours pas.
« T'as lu la Gazette aujourd'hui, Lunard ? », poursuivit James, en se tournant vers son ami.
Le jeune Lupin replongea dans le journal qu'il avait déjà commencé à parcourir et se mit à le feuilleter rapidement.
« Je ne vois rien », indiqua Remus, après quelques instants de recherche silencieuse.
« C'est peut-être juste le Quidditch qui l'inquiète ? », proposa Peter à ses amis, qui ne semblèrent pas convaincus mais qui lâchèrent l'affaire assez vite.
Les quatre maraudeurs s'efforcèrent d'oublier cette étrange interruption et de reprendre leurs conversations originelles. Au bout d'un bon quart d'heure, Sirius commença à s'ennuyer ferme. Tapotant machinalement des doigts sur la table, il réussit sagement à patienter jusqu'à ce que Peter et James eut terminé leurs bols de porridge.
« On passe à l'action ? », demanda-t-il, en souriant à ses amis d'un air de conspirateur.
« C'est parti ! », s'enthousiasma le plus petit des maraudeurs, grisé par l'excitation.
Ils se levèrent d'un même mouvement, attirant les regards de leurs voisins de table, mais n'échangèrent de mots avec personne. Il était bientôt l'heure du Quidditch et les élèves allaient commencer à rejoindre les tribunes.
« On monte jusqu'à la Tour d'astronomie, du coup ? », s'enquit Remus, à voix basse.
« Non. Finalement, c'est de la Tour Nord qu'on voit mieux l'entrée. On a étudié la question l'autre soir », l'informa James.
Les quatre garçons prirent position à l'une des fenêtres les plus hautes de la Tour et Sirius sortit de sa poche un sac absolument minuscule, de la taille d'un portefeuille. La main du jeune Black s'enfonça à l'intérieur, sans que cela étonne les autres garçons. Il en sortit plusieurs ballons jaunes et les posa sur le sol de pierre.
« T'as la Cape, Cornedrue ? », demanda Remus, tout en ouvrant une fenêtre. « Et la Carte ? »
« Bien sûr », affirma James, tout en sortant les deux éléments. « Je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises. »
La Carte du Maraudeur se dessina rapidement et James la déposa au sol, dans l'espace vide entre les deux fenêtres d'où les quatre garçons pouvaient la voir.
« À vos baguettes, les gars ! », s'exclama Sirius, qui avait fini de sortir tout un tas de petites balles.
Ils se mirent à sourire tous les quatre et Remus finit par soupirer.
« Je peux pas croire que je fasse ça », grommela-t-il, en levant les yeux au ciel.
« C'est toi qui a eu l'idée ! », lui rappela généreusement Sirius, en riant.
Lui et James avaient souhaité égayer cette journée de Quidditch, en faisant porter les couleurs de Poufsouffle à un maximum d'élèves. Ils avaient passé pas mal de temps à étudier les différentes possibilités et s'étaient concentrés sur les sortilèges de métamorphose. Mais la meilleure idée avait été celle de Lunard. Il s'était souvenu d'une substance qui s'était renversée sur les cheveux d'Althaïs Jugson en cours de potions. Lorsqu'elle avait débarqué à l'infirmerie avec Eden, Remus l'avait même aidé à s'en débarrasser.
« J'ai franchement eu du mal. Les sortilèges de récurage les plus courants ne fonctionnent pas et j'imagine que la plupart des élèves de Poudlard n'en connaissent pas d'autres ! Par contre, cette substance a l'inconvénient de sentir le poisson », les avait-il informé, avec un moue un peu dégoûtée.
Il n'en avait pas fallu plus pour donner des idées à James et Sirius. Avec l'aide de Peter qui s'était chargé de faire le guet, ils avaient du s'introduire dans la réserve de Slughorn et avaient réussi à retrouver la substance en question. Ils avaient finalement pu la colorer en un jaune vif et l'avaient réparti dans des dizaines et des dizaines de balles qui explosaient au moindre contact un peu brusque. Une chute depuis la Tour Nord sur la tête d'un élève situé en contrebas était donc prévue dans le plan.
« Dépêche-toi, c'est Rogue qui arrive ! », s'écria James, qui jetait un regard sur la Carte du Maraudeur.
Sirius dégaina sa baguette et se hâta de faire voler l'une des balles jaunes par la fenêtre. Il la fit précautionneusement léviter pour la faire descendre jusqu'en bas. Un sourire victorieux scellé sur ses lèvres, il agita sa baguette et la balle s'écrasa silencieusement sur les cheveux graisseux du Serpentard. Les quatre maraudeurs jetèrent un œil par la fenêtre et entendirent avec une certaine hilarité les injures que lançait le Serpentard. Lorsque Rogue commença à regarder autour de lui pour découvrir d'où provenait l'attaque, ils s'accroupirent brusquement pour ne pas être repérés et s'écroulèrent de rire.
« J'aurais donné des centaines de gallions pour voir sa tête ! », haleta James, qui pleurait de rire.
« Avec ses habits noirs, il ressemble à un bourdon maintenant. C'est magnifique ! », croassa Peter, essoufflé.
Quand le grand Black se releva pour regarder comment s'en sortait Rogue, il fut grandement déçu. Le Serpentard s'était déjà débarrassé de la substance jaune et avait déjà repris le chemin du terrain de Quidditch.
« Il connaît pas mal de sorts, mine de rien », fit remarquer Remus, avec toute l'objectivité dont il était capable.
« Vu l'état de ses cheveux, c'est quand même ironique qu'il connaisse autant de sorts de nettoyage », soupira Sirius, qui était agacé d'avoir raté une partie de la blague.
« Il est assez bête pour penser que les cheveux gras sont à la mode », ajouta James, en levant les yeux au ciel.
« Regardez ! Des premières années de Serpentard ! Eux, c'est sûr, ils connaissent pas le bon sort ! », s'exclama Peter, en attirant l'attention de ses amis.
Ils poursuivirent leur jeu pendant un moment et trouvèrent bien plus amusant de jeter leurs balles jaunes sur les plus jeunes élèves. Ceux-ci ne connaissaient absolument aucun sort de nettoyage et se contentaient de ressembler à des poussins détrempés et mécontents, à l'odeur de poisson. Même parmi les plus âgés, ils trouvèrent des cibles de choix. La plupart des étudiants de Poudlard n'avait jamais utilisé ce genre de sorts, mis à part dans le cadre du cours de potions où il fallait parfois nettoyer les chaudrons. Mais la formule basique ne suffisait absolument pas et cela réjouit grandement Sirius et ses amis.
« Arrêtez-vous, c'est McGo qui passe », les informa nonchalamment Remus, qui surveillait la Carte du Maraudeur.
« Oups ... », murmura Peter, en rapprochant sa baguette de sa poitrine et en affichant l'air de celui qui venait d'être pris la main dans le chaudron.
« Mais qu'est-ce que t'as fait, Queudver ?! Me dis pas que t'as jeté de la peinture sur McGonagall ? », s'écria Remus, d'une voix étouffée. « On avait dit : pas les professeurs ! »
« C'est toi qui avais dit 'pas les professeurs' ! », précisa Sirius, qui trouvait que c'était idiot de laisser passer de si belles cibles.
« On se planque, y'a Rusard qui arrive ! Transforme-toi, Queudver ! », les interpella James, prêt à leur balancer la cape dessus.
Sirius s'agita et réunit les balles qui traînaient encore au sol, pour les fourrer en quatrième vitesse dans le sac. De son côté, Remus avait fermé les fenêtres et James les attendait dans un coin de la Tour, tout en pliant la Carte du Maraudeur. Peter, quant à lui, s'était déjà transformé en rat et s'était glissé dans une interstice du mur. Ils étaient désormais trop grands pour tenir à quatre sous la cape de James et le fait que l'animagus de Peter soit un rat constituait une véritable bénédiction.
Quelques secondes plus tard, aucun des quatre Gryffondors n'était plus visible et Rusard fit son apparition, le visage déformé par une étrange grimace victorieuse. Il perdit évidemment son sourire – que Sirius n'aurait définitivement pas appelé un sourire – et parcourut la Tour de long en large, marmonnant des menaces plus ou moins fantaisistes.
« Ils pensent pouvoir m'échapper ... », murmura-t-il, en jetant des regards assassins aux murs qui l'entouraient. « Allez, Apollon ! Cherche ! Trouve-moi ces voyous ! »
Le vieux chat de Rusard se mit à renifler et releva la tête d'un côté, le regard fixé sur le coin de la pièce où se trouvaient les trois maraudeurs. Sirius se figea brusquement, en retenant sa respiration. Il savait qu'à côté de lui, James et Remus en faisaient autant. En resserrant les doigts sur le petit sac, il se rendit compte que les petites balles jaunes dégageaient une petite odeur de poisson et se demanda si c'était cela qui avait attiré l'attention du chat de Rusard. Celui-ci se rapprochait d'eux en se tassant un peu sur le sol, comme s'il était en train de guetter sa proie. Par chance, Rusard ne le regardait pas et continuait de marmonner, en observant un autre coin.
En veillant à être le plus lent possible, Sirius glissa sa main dans sa poche pour saisir sa baguette. Pouvait-il jeter un sort à Apollon ? Lequel ? Stupéfixion ? Sans qu'il ait eu le temps de prendre une décision, Sirius sentit la main bouillante de James lui attraper le bras pour le retenir. Tout se passa alors très vite. Apollon se mit à cracher comme une furie, prêt à leur sauter dessus, mais un petit cri de souris résonna à l'autre bout de la Tour. Peter, sous sa forme de rat, était sorti de sa cachette et courrait le long du mur, s'échappant par l'escalier de pierres. Apollon abandonna complètement les trois maraudeurs pour se lancer à la poursuite de Queudver. Le concierge crut sans doute que son chat avait trouvé une piste, car il se mit à courir à sa suite.
Sirius put enfin souffler et James le lâcha pour sortir la carte de sa poche. Il chercha Rusard, Apollon et Peter des yeux. Ce qu'il vit le rassura suffisamment pour qu'il retire la cape.
« Alors là, je vous le dis, on l'a échappé belle », murmura Remus, qui était tout blanc.
« Je comprends vraiment pas pourquoi Rusard a appelé son chat Apollon. Vous avez vu la tronche qu'il a ? Apollon est pourtant supposé être le dieu de la beauté, non ? », s'interrogea James, qui souriait d'un air satisfait.
« Faut croire que la beauté est un concept relatif, Cornedrue ! », répliqua Sirius, en riant. « Bon, il s'en sort comment, Queudver ? »
« Je pense qu'il s'est plutôt bien caché. Regardez, Rusard et sa saleté de chat sont en train de redescendre », indiqua le binoclard, les yeux rivés sur la Carte.
À peine avait-il entendu l'information que le grand Black montrait déjà les petites balles jaunes à ses amis, prêt à reprendre ses méfaits là où il les avait laissé.
« Et trois petits Serpentard ! Trois ! », s'extasia-t-il, après avoir atteint un petit groupe d'élèves.
Peter les rejoignit quelques minutes plus tard, les joues rouges et le souffle court.
« J'en peux plus ! », souffla le petit blond, en essuyant la sueur de son front.
« Tu nous as sauvé la mise, là, Peter ! », reconnut Remus, en adressant un sourire franc au jeune homme.
« Ouais, merci ! C'était une super idée ! », confirma James, qui regardait par la fenêtre. « T'as pas intérêt de viser Lily, Patmol ! »
« Oh, t'es pas drôle ! », constata Sirius, qui avait placé sa tête dans l'ouverture d'une autre fenêtre. « Mais par contre, rien ne m'empêche de ... »
Un cri de rage leur parvint aux oreilles, tout à coup, et les maraudeurs s'accroupirent à nouveau pour se cacher. Sirius pouffait de rire, fier d'avoir atteint sa cible. Il n'avait simplement pas prévu la colère noire de sa proie.
« JE VAIS ME LES FAIRE ! JE VOUS LE JURE, JE VAIS ME LES FAIRE ! », se mit à hurler Marlene, furieuse.
Le grand Black jeta un coup d'œil par la fenêtre et vit la jolie blonde se rapprocher de Lily et Mary. Elles étaient trop loin et il fut incapable d'entendre leurs échanges, mais il put voir la substance jaune disparaître d'un coup de baguette. Pour autant, il en fut nettement moins embêté que lorsque Rogue s'en était débarrassé.
« Décidément, elle est pas d'humeur aujourd'hui, Marlene. Normalement, elle aurait rigolé ! », fit remarquer James, perplexe.
« Ouais, il y a forcément quelque chose qui nous échappe, là ! », confirma Sirius, en adressant un coup d'œil songeur à son meilleur ami.
« Patmol, occupe-toi plutôt des Serpentards », grogna Remus, en arrêtant le geste de Sirius.
Le jeune homme était à deux doigts de lâcher une bombe sur un petit groupe de sixième année de Serdaigle. Sirius ne mit pas longtemps à comprendre la remarque de Remus, quand il constata que le groupe en question était constitué d'Althaïs, de Lysandra, d'Eden et de leurs deux autres amies. Il ne put s'empêcher de sourire d'un air un peu narquois, mais réussit à retenir une remarque moqueuse.
Au bout d'un quart d'heure, James rappela ses amis à l'ordre, commençant visiblement à s'impatienter. Il était temps de descendre au terrain de Quidditch.
« Impossible de louper le début ! », s'écria James, implacable.
« On va quand même pas gâcher ce qui nous reste », grogna Sirius, qui regardait la dizaine de balles jaunes encore au sol.
« Bouquet final, alors ! », annonça Remus, en agitant sa baguette.
Chacun des maraudeurs l'imita et les balles se mirent à léviter, se glissant toutes par les fenêtres. Elles s'arrêtèrent en plein vol, tandis que Sirius levait la main pour les interrompre.
« Attendez, il y a un groupe de troisième année qui arrive. À trois ! Un … Deux … Trois ! », annonça-t-il, en levant sa baguette.
Les balles tombèrent et s'éclatèrent sur la tête d'un bon nombre d'élèves. À vrai dire, il n'y avait pas que des troisièmes années, comme Sirius l'avait pensé. Il y avait aussi le professeur O'Donnell dans le lot et les quatre garçons en furent particulièrement réjouis. Sa voix grave et haineuse résonna dans tout le parc et Sirius fut cette fois-ci très déçu qu'ils n'aient pas trouvé une méthode pour rendre la peinture parfaitement indélébile. Il allait falloir songer à la question !
Lorsque Sirius se baissa pour ramasser son sac, il dégota une dernière balle. Il échangea un regard malicieux avec James, laissa à peine le temps à Remus d'ouvrir la bouche et la projeta dans le dos de Peter, qui avait baissé sa garde. La substance jaune et malodorante s'écoula de l'arrière de sa tête jusque dans son dos, le faisant grimacer.
« OH NON, SIRIUS ! », s'égosilla le plus petit des maraudeurs, en glissant une main dans son cou. « C'est dégoûtant ! »
« C'était trop tentant ! », se défendit Sirius, en soupirant d'aise.
« Bon, assez joué ! Il faut vite qu'on descende si on veut pas rater le début du match ! », assura James, en s'élançant par la porte.
Remus haussa les épaules et le suivit, ce que s'empressa de faire Sirius à son tour, après avoir fourrer le tout petit sac dans sa poche.
« Les gars, vous allez pas me laisser comme ça ! C'est quoi le sortilège pour nettoyer ? », demanda Peter, d'une petite voix.
Aucun des trois autres maraudeurs ne répondit, préférant s'échanger des regards amusés.
« Oh non, dites-le moi ! », gémit le petit blond, horrifié, qui descendait les escaliers derrière eux.
« Écoute Queudver … C'est pas contre toi. Mais si jamais on débarque tous les quatre dans le stade sans qu'aucun d'entre nous ne soit tout jaune, ça va sembler louche et tout le monde va comprendre que c'était nous les responsables. Ton sacrifice n'est pas vain, tu vois ! », expliqua Sirius, manquant cruellement de crédibilité, ne pouvant s'empêcher de sourire.
« Pourquoi c'est toujours moi ? », se plaignit le jeune homme, d'une voix lasse.
Le grand Black éclata d'un grand rire, tandis qu'il passait en premier les grandes portes du château. Le parc était inondé de soleil et le ciel d'un bleu profond. Un jour presque parfait pour le Quidditch.
« Avant que le coup d'envoi du match ne soit donné, voici un bref rappel des changements ! », annonça la voix déplaisante d'Aubrey. « Du côté de Poufsouffle, il ne va pas falloir s'attendre à du grand Quidditch ! L'attrapeur Martin Stebbins remplace Patrick Robbins au poste de capitaine – en espérant qu'il arrive à l'heure pour le début du match – et Jacob Perks, de cinquième année, intègre l'équipe au poste de poursuiveur. S'il tient son balai aussi mal que sa baguette, je pense que les jaunes et noirs ont du souci à se faire. »
« Il a oublié qu'il était à Poufsouffle, non ? », commenta Sirius, en haussant les sourcils.
« Pour Serpentard, en revanche, pas de nouveauté ! Mais le dernier match pour plusieurs joueurs de septièmes années, à savoir la grande capitaine – et je ne parle que de sa taille – Lucinda Talkalot, le batteur Owen Jugson et la poursuiveuse Madelyn Avery. Ce qui annonce un match sans grand suspens. Espérons simplement qu'il se termine le plus rapidement possible ! »
« Je crois qu'il a aussi oublié qu'il était censé aimer le Quidditch », ajouta Remus, avec un sourire désabusé.
« Et voilà que Mr Plumpton siffle le coup d'envoi. C'est parti ! Hilliard en possession du souaffle, elle passe à Perks qui … Le laisse tomber ! Qu'est-ce que je vous avais dit ? C'est désormais Avery qui fonce et … Quelle feinte ridicule ! Pas besoin de lire l'avenir pour l'avoir vu venir ! Contre-attaque de Poufsouffle, à présent ! Peut-être que si Grace Hilliard se décidait à maigrir un peu, elle pourrait rattraper les membres de son équipe ! Pour l'instant, il semble que son balai peine à … »
Le commentateur s'arrêta tout à coup de parler et un cri étouffé résonna dans le stade. Tout le monde tourna la tête vers l'endroit où Aubrey était supposé se trouver et Sirius ne fit pas exception. Il repéra une fille à la longue chevelure blonde tout près du Poufsouffle et ouvrit de grands yeux amusés, en la reconnaissant. Marlene McKinnon avait toujours eu beaucoup de ressentiments face à Aubrey et même à l'autre bout du stade, Sirius pouvait voir qu'elle semblait hors d'elle.
« GRACE HILLIARD A DOUZE ANS, ESPÈCE DE CRÉTIN ! », s'égosilla la jeune fille, qui avait empoigné le bras du malheureux commentateur et le secouait comme un vulgaire pantin. « Ta mère t'a jamais appris à ne pas t'attaquer à des plus petits que toi ?! »
Même certains joueurs en vol se figèrent pour observer la scène et une grande partie des spectateurs se mit à applaudir avec ferveur l'intervention de la jeune Gryffondor. Bertram Aubrey n'était vraiment pas très apprécié.
« HILLIARD, TU ES TRÈS BIEN COMME TU ES ! », ajouta Marlene, d'une voix forte et catégorique.
À nouveau, une vague d'applaudissements résonna dans le stade. Sirius put voir la poursuiveuse des Poufsouffles, qui s'était arrêtée comme les autres, rougir violemment. Il comprit rapidement pourquoi Marlene avait voulu prendre sa défense. Au milieu des nombreux cinquièmes, sixièmes et septièmes années, Grace Hilliard semblait vraiment minuscule.
« MAIS ENFIN, TENEZ-VOUS TOUS LES DEUX ! », s'écria le professeur McGonagall, qui semblait outrée et avait enfin réussi à se frayer un chemin jusqu'au commentateur. « McKinnon, retournez à votre place. Quant à vous, Aubrey, un peu plus de professionnalisme dans vos commentaires serait bienvenu ! »
A vrai dire, le coup de gueule de Marlene fut le seul moment sympathique du match. Le reste fut une véritable purge pour tout ceux qui supportaient Poufsouffle.
« En attrapant le Vif d'Or, Black met donc terme à ce … Semblant de Quidditch, au bout de presque trois heures de cauchemars. Serpentard remporte la partie, avec 210 points contre 20 pour les jaunes et noirs », annonça Aubrey, qui s'était considérablement calmé après l'avertissement de McGonagall.
« Serpentard vient peut-être de gagner le match, mais ils viennent aussi de perdre la Coupe de Quidditch », annonça James d'une voix forte, absolument rayonnant. « Si Regulus avait eu le choix et avait attendu plus longtemps pour attraper le Vif, peut-être que les Serpentards auraient eu le temps de nous rattraper. »
« On s'en fiche. On vient tout juste de gagner la Coupe », répliqua Sirius, tandis qu'ils se levaient tous des tribunes pour prendre le chemin du château.
« On est bien parti, mais il ne faut pas vendre le sang du dragon avant de l'avoir tué. On a encore un match », assura le capitaine des Gryffondors.
Sirius leva brièvement les yeux au ciel, en écoutant distraitement les analyses sportives de son meilleur ami. Le jeune Black, lui, savait très bien que la victoire contre Serdaigle était déjà assurée et que Gryffondor serait une fois de plus la maison championne. Quoi qu'en disent les autres, Sirius ne pouvait s'empêcher de penser que James avait parfois la modestie mal placée. La conversation se poursuivit jusqu'au château. Remus était évidemment d'accord avec le fait qu'il valait mieux rester prudent, quand Peter ne pouvait s'empêcher de montrer une excitation folle à l'idée de voir James brandir la Coupe à nouveau. Sirius sourit un peu. Impossible de ne pas être de l'avis de Peter. La fête qui avait eu lieu après la victoire de l'année dernière avait été la meilleure de toutes.
La foule réunie dans le hall du château interrompit rapidement la conversation passionnée des maraudeurs. Une bonne quantité d'élèves y était réunie. Il s'agissait uniquement de Serdaigles et de Gryffondors, comme si les accès aux escaliers supérieurs avaient été interdit. La foule les empêchait de voir clairement ce qu'il s'y passait. James, Sirius et Peter se tournèrent instinctivement vers Remus.
« J'étais avec vous tout le long. Je vois pas comment je serais au courant de quoi que ce soit », lança celui-ci, à moitié amusé.
« Vous êtes préfet, Lupin ! Aucune excuse ! », s'exclama Sirius, en imitant la voix sèche de McGonagall.
Les quelques élèves qui les entouraient éclatèrent de rire, à l'exception de Serpentards qui passaient par là. Eux pouvaient évidemment descendre jusqu'à leur salle commune et narguaient les autres du regard.
« Peut-être qu'ils ont enfin décidé de bloquer l'accès de l'école aux traîtres à leur sang. Tu n'es pas d'accord, Black ? », avait lancé une voix moqueuse.
Avery et Mulciber adressèrent un regard mauvais à Sirius lorsque celui-ci se retourna pour leur faire face.
« C'est le fait que vous venez de perdre la Coupe qui vous fait parler comme ça ? », répliqua James, en levant la tête, le sourire en coin.
« C'est sûrement ça. Une sorte de jalousie, en fait ... », ajouta Sirius, en affichant un sourire narquois à son tour.
« C'est comme ça, la vie. Des gagnants – nous – et des perdants – vous ! », lâcha James, du haut de tout son orgueil.
Sirius éclata d'un rire qui résonna par-dessus le bruit ambiant et la baguette d'Avery étincela de rouge. En moins de deux, les baguettes de chacun des maraudeurs étaient sorties.
« S'IL VOUS PLAÎT, VOTRE ATTENTION ! », les interrompit la voix du professeur McGonagall, du haut de l'escalier de marbre. « Sachez qu'un incendie vient d'endommager une partie de la bibliothèque. Il semblerait qu'il ait été allumé sciemment. Nous ignorons encore les raisons de ce geste et l'étendue des dégâts. Mais sachez que cet acte malveillant ne restera pas impuni. Par ailleurs, si certains d'entre vous ont connaissance d'éléments qui pourrait nous aider à comprendre, merci de nous les communiquer d'une façon ou d'une autre. »
Un silence abasourdi parcourut l'assemblée d'élèves présents. Passer d'un match de Quidditch à un incendie était assez stupéfiant, à vrai dire.
« Vous pouvez vous rendre dans vos salles communes », finit par lancer la directrice adjointe, de sa voix sèche et sans appel.
Le mouvement et les conversations reprirent, dès lors que McGonagall s'écarta pour laisser les élèves grimper dans les étages.
« Peut-être que cette fois, les sang-de-bourbes comprendront le message », leur souffla Avery, d'une voix presque inaudible.
« De quoi il parle ? », murmura Peter, en baissant la tête vers ses amis.
« Quel message, Avery ?! », questionna James, sans avoir beaucoup d'espoir de réponse.
Le Serpentard inclina la tête, en affichant un horrible sourire. Il haussa un peu les épaules et se retourna sans rien ajouter.
« J'vous jure que je ... », commença James, avant d'être stoppé net dans ses paroles.
La baguette serrée entre ses doigts, Sirius venait de penser « Levicorpus » suffisamment fort pour qu'Avery se retrouve la tête en bas. Le Serpentard n'étant pas très apprécié, beaucoup de rires se firent entendre parmi les élèves encore présents. Sirius abaissa sa baguette, sans lever le maléfice pour autant, et haussa les épaules à son tour.
« Peut-être que cette fois, les abrutis comprendront le message », lança-t-il, en reprenant la phrase d'Avery.
Sirius fut le premier à tourner le dos au Serpentard et à s'engager dans le grand escalier de marbre. Les trois autres ne perdirent pas beaucoup de temps pour le suivre.
« C'était sublime, Patmol ! », s'exclama Peter, en grimpant les marches deux à deux.
« Tu as la Cape, Cornedrue ? », demanda directement Remus.
Évidemment, la question était désormais de comprendre ce qu'Avery voulait dire en parlant de « message aux sang-de-bourbes ». Les maraudeurs s'attendaient au pire et ne perdirent pas de temps pour monter jusqu'au quatrième étage.
« Queudver, c'est le moment de te transformer », lui indiqua James, tout en sortant la Cape d'invisibilité de sa poche.
Il la lança en l'air, de façon à se dissimuler, ainsi que Remus et Sirius. Ce dernier grimaça un peu, en ayant l'impression d'être devenu très maladroit. Devoir se concentrer pour ne pas se faire voir tout en évitant de marcher sur les pieds de ses amis devenait plus compliqué d'année en année. Il sentit une main lui serrer le bras pour lui indiquer de s'arrêter. Sans doute celle de James. Sirius leva donc la tête et tendit l'oreille, rendant aveugle par un tournant de couloir. Une conversation avait lieu à quelques mètres d'eux, tout près de l'entrée de la bibliothèque. Un peu plus loin, d'affreux sanglots se faisaient entendre. Le jeune Black adressa un regard intrigué à Remus, le seul dont il pouvait voir le visage. Celui-ci lui répondit en formulant sa réponse – Mme Pince – sur ses lèvres, sans émettre le moindre son. Sirius acquiesça. Évidemment, après un incendie dans sa chère bibliothèque, ça ne pouvait être qu'elle qui pleurait de la sorte.
« Sans de nouvelles informations, il va être malheureusement compliqué de trouver les responsables de cet abominable gâchis », annonça la voix du professeur Dumbledore.
« Vu les circonstances, c'est tout de même très, très inquiétant », répondit le professeur d'études des moldus. « Vous savez ce qu'on dit : 'Là où on brûle des livres, on finit aussi par brûler des hommes'. »
« Vous n'avez pas l'impression d'exagérer ? », railla Rusard, de sa voix sifflante.
« Absolument pas ! », s'exclama le même professeur. « Il n'y a que la section des livres moldus qui a été visé. Les enfants de moldus sont des cibles désormais. A Poudlard comme partout ! Ne voyez-vous pas les attaques régulières ? Les sous-entendus dans certains journaux ? Ne savez-vous pas que la classe d'études des moldus a été dégradé l'année passée ? Ce n'est certainement une coïncidence. »
Les adultes échangèrent quelques soupirs, quelques grognements dans le cas de Rusard et plusieurs pas boitillants se firent entendre.
« Nous avons pu récupérer une dizaine de livres. Pour les autres, il n'y a rien à faire. C'est un maléfice qui les a brûlé, rien à voir avec du feu naturel », expliqua le professeur Brûlopot. « Je ne sais pas qui a pu faire ça, mais ils ne cachent pas leur intention. La marque des ténèbres a été reproduite à plusieurs endroits. »
« Qu'est-ce que je vous disais ? Il est plus que temps de s'inquiéter ! La marque des ténèbres à Poudlard, vous rendez-vous compte ?! », poursuivit le professeur d'études des moldus, d'un ton qui devenait un peu plus hystérique à chaque mot.
« Calmez-vous, David », lui intima le professeur Dumbledore de sa voix douce mais ferme. « Ne croyez pas que nous prenons le problème à la légère. Malheureusement, sans témoignage, il nous est pour l'heure impossible de désigner le ou les coupables. »
« Ne pensez-vous pas que certains Serpentards … », commença le professeur.
« Ce que je pense, David », le coupa le directeur. « C'est que des suspicions mal avisées seraient plus délétères qu'autre chose. »
Dumbledore poursuivit en promettant qu'ils allaient bien évidemment mettre tout en œuvre pour retrouver les coupables. C'est à ce moment-là que James serra de nouveau le bras de Sirius, l'invitant à prendre le chemin de la Tour des Gryffondors.
Le silence qui les accompagna jusque là ne fut interrompu que par les petites pattes de Queudver qui tapotaient le sol. La marque des ténèbres à Poudlard était évidemment l'un des événements les plus dérangeants de la soirée et Sirius, bien qu'il ne pouvait pas donner de nom précis, était d'accord avec le professeur d'études des moldus pour dire que les responsables étaient des Serpentards. D'ailleurs, il était convaincu que Dumbledore le pensait également. La moitié d'entre eux avait des parents mangemorts ou sympathisants de Voldemort, ça n'avait rien d'un secret.
« Avery était au courant, évidemment », soupira James, en se laissant tomber sur un lit une fois qu'ils furent arrivés au dortoir.
« Vous pensez que c'est lui ? », questionna Peter, le visage soupçonneux.
« Si c'était lui, je ne suis pas sûr qu'il s'en vanterait auprès de nous », nuança Remus. « Brûler une partie de la bibliothèque, faire apparaître la marque des ténèbres, ça n'a rien d'anodin. »
« Ça peut être n'importe lequel de ces petits serpents », conclu Sirius, qui faisait les cent pas entre les quatre grands lits.
Même Regulus pouvait très bien faire parti des responsables. Le plus âgé des Black ressentit une légère nausée à cette idée. Mais rien ne pouvait l'empêcher de soupçonner son frère. Celui-ci avait sûrement très envie de faire ses preuves auprès de ses merveilleux amis et ce genre d'actes était tout à fait à sa portée.
« Regulus était sur son balai tout le match, Patmol », lui lança James, qui avait apparemment lu dans son esprit.
« Bien sûr, je sais », répondit Sirius, brièvement.
« Les attaques sont de plus en plus nombreuses », constata Peter, qui se tordait les mains. « Que va-t-il arriver la prochaine fois ? »
« C'est une question qu'on se pose tous, Queudver », indiqua le jeune Potter, en soupirant ensuite bruyamment. « Et qui sera leur prochaine victime ? On sait tous que leur but premier, c'est de s'attaquer aux nés-moldus. »
Sirius tourna la tête vers James et croisa son regard empli de colère. Mais aussi d'une sorte de crainte. Plutôt facile de comprendre qui il avait en tête.
« Evans sait se défendre », souffla-t-il, en adressant un léger sourire à son ami.
« Je préférerais autant qu'elle n'ait pas à le faire », répliqua James, un peu à bout de nerfs.
« Il faut leur faire comprendre qu'ils ne resteront pas impunis », dit Sirius, qui réfléchissait à haute voix. « S'ils tiennent tant que ça à envoyer des messages, alors il faut qu'ils obtiennent des réponses. »
« Tu penses à quoi ? », l'interpella Remus, tout aussi concentré.
« Une explosion ? », s'exclama Peter, après quelques secondes de silence.
« Pourquoi tu veux une explosion ? », le questionna Remus, tandis que Sirius et James lui adressaient un regard surpris.
« Oh … Je ne sais pas. C'est toujours sympa les explosions ! », expliqua le petit maraudeur, déconfit.
« Mais quel intérêt ? », pouffa James, qui ne put s'empêcher de retenir un rire.
Les quatre jeunes gens se mirent à rire un peu et Sirius accorda à Peter le mérite d'avoir considérablement détendu l'atmosphère.
« Peut-être qu'on pourrait se débrouiller pour reconstituer le stock de livres moldus ? Comme ça, ces abrutis auront clairement perdu », proposa James, en se redressant sur son coude pour regarder ses quatre amis.
« On peut pas dire que ce soit hyper drôle comme idée, Cornedrue ! », nuança Sirius, qui grimaçait un peu.
« Peut-être pas, mais c'est brillant ! », répondit Remus, en hochant la tête, appréciatif. « Tout le monde a bien un livre moldu chez lui, il suffit que chacun participe et ça en fera déjà un sacré nombre. »
« Il va falloir quelques affiches pour prévenir tout le monde. Lunard, tu t'en occupes ? », proposa James, tandis que Remus acquiesçait.
« Il n'empêche que c'est une petite punition pour les coupables », poursuivit Sirius.
Celui-ci reprit ses cent pas, les mains bien enfoncées au fond des poches de son pantalon.
« Ils veulent faire passer des messages … Et si on remplaçait leurs bouteilles d'encre normales par de l'encre à disparition ? », proposa-t-il finalement, un grand sourire illuminant son visage.
Voilà une idée qui allait les occuper pendant quelques temps. Rien de mieux ! Les trois autres maraudeurs ne mirent d'ailleurs pas longtemps à approuver l'idée.
Le week-end fut finalement bien court pour les maraudeurs. Le soir même, les affiches pour proposer les dons de livres moldus furent affichées dans le hall d'entrée de l'école, ainsi que dans les différentes salles communes par le biais de leurs préfets, à l'exception bien sûr de celles des Serpentards. Ils finirent également par se rendre à la bibliothèque pour y déposer une affiche. L'espace d'une minute d'horreur, Sirius avait bien cru que Mme Pince allait les embrasser. Elle ne se demanda même pas comment ils avaient pu être au courant du fait que seule la section des livres moldus avait été touché. Le directeur fit une annonce le soir même pour annoncer les dégâts à toute la Grande Salle et partagea l'idée du don de livres, dont il avait pris connaissance par le biais d'une affiche au détour d'un couloir. Sirius crut même que Dumbledore leur avait adressé un clin d'œil au passage.
« Comment il a fait pour savoir que ça vient de nous ? Mme Pince lui aurait dit ? », demanda James, à voix basse, par dessus la table des Gryffondors.
« Il arrive toujours à tout savoir, c'est presque effrayant ! », ajouta Sirius, les sourcils levés.
« C'est Dumbledore », conclu Remus, en haussant les épaules.
Le fait que la marque des ténèbres soit apparue pour la première fois à Poudlard fut placé sous silence, sous doute pour ne pas angoisser encore plus les élèves. Beaucoup de murmures avaient déjà parcouru les quatre grandes tables. Les visages enfantins étaient devenus graves et certains jetaient déjà des regards inquiets vers leurs camarades nés de moldus. Les haines qui parcouraient le monde sorcier commençaient à prendre forme au sein de l'école de magie. Sirius remercia intérieurement Dumbledore de ne pas avoir rajouter une couche à une inquiétude déjà palpable.
Pour ce qui était de l'encre à disparition, ce ne fut pas une mince affaire. Tout pour plaire à Sirius qui adorait être occupé par autre chose que de l'inquiétude ou des sujets scolaires. Les maraudeurs eurent donc le droit à une petite escapade discrète mais hilarante à Zonko en passant par les souterrains … Sirius en profita pour dégoter un cadeau pour la petite Nymphadora, qui venait tout juste de fêter ses quatre ans.
Il fallut ensuite trouver une diversion parfaite pour remplacer les bouteilles d'encre de quelques étudiants choisis avec soin … Évidemment, il fut difficile d'avoir accès aux sacs des étudiants de Serpentard. Mais impossible n'était toujours pas maraudeur et au milieu de la semaine suivante, la grande majorité des septièmes, sixièmes et cinquièmes années s'était retrouvé en grosse difficulté d'écriture. Quel ne fut pas le plaisir des Gryffondors lorsqu'ils croisèrent Avery à la sortie de son cours de métamorphose … Il semblait furieux et était penché vers son ami Mulciber, avec une plume dans la main qu'ils examinaient tous les deux ainsi qu'un morceau de parchemin vierge dans l'autre. Une observation qui fit largement sourire les trois maraudeurs. Peter était le seul absent, n'étant absolument pas concerné par le cours de métamorphose.
« Alors Avery, il paraît que les messages deviennent de plus en plus difficiles à faire passer ? », lança Sirius, moqueur.
« C'est vous ?! », répliqua Mulciber, de sa voix grave rendue tremblante par la colère.
« Nous ? Jamais ! », s'exclama James, en se désignant du doigt, l'air tout à fait innocent.
Malgré son sourire goguenard, Sirius avait déjà attrapé sa baguette dans sa poche, prêt à se défendre en cas de besoin. A chaque fois que les maraudeurs se trouvaient en face de Serpentards, le monde semblait s'arrêter autour d'eux juste pour regarder la scène. Ils ne se retrouvaient jamais sans spectateurs. Sirius vit d'ailleurs James chercher Lily du regard. Par Merlin, ne s'arrêterait-il donc jamais ?!
« Les sixièmes années, vous rentrez, s'il vous plaît ! Je n'ai pas encore prévu de faire cours dans le couloir », annonça le professeur McGonagall, qui venait de sortir la tête de sa salle de cours.
« Professeur ! Toutes mes notes ont disparu », se mit à crier Avery, rouge de colère, brandissant son parchemin sous le nez de McGonagall. « Et ces traîtres à leur sang de Gryffondors … Ce sont eux les responsables ! »
La directrice adjointe haussa un sourcil, tout en remarquant enfin la tension qui régnait dans le couloir. Elle s'approcha un peu d'Avery, qui s'avéra bien plus grand qu'elle. Sirius resserra machinalement sa prise sur sa baguette. Il était presque impossible qu'Avery attaque McGonagall, mais son attitude disait pourtant tout le contraire.
« Pendant le cours, je vous ai repris trois fois à faire autre chose que de la métamorphose, Avery. J'ignore si vous aviez donc matière à avoir quelque note que ce soit », répliqua le professeur, d'une voix sèche. « Pour ce qui est de votre vocabulaire, il serait temps de le corriger. Cinq points en moins pour Serpentard. »
Avery secoua la tête, visiblement mécontent de se faire envoyer sur les roses par le professeur. Il tourna la tête et adressa un regard assassin aux trois maraudeurs, mais il n'ajouta rien.
« Alors ? Votre version, messieurs ? », demanda-t-elle sans préambule aux trois Gryffondors.
« Je vous assure que nos baguettes sont toutes restées au fond de nos poches, professeur », répondit un Remus impassible.
Sirius ne put empêcher un sourire en coin d'apparaître sur son visage. Même s'ils étaient tous absolument coupables, Lunard réussissait quand même à ne pas mentir.
« C'est vrai, professeur », confirma Lily, qui était toute proche désormais.
A côté d'elle, Marlene hochait la tête pour approuver les dires de son amie. Sirius sentit James souffler un peu. Impossible de s'empêcher de sourire largement. Pour une fois que Lily ne lui reprochait rien, James vivait sûrement un rêve éveillé.
« Les sixièmes années, vous rentrez, s'il vous plaît ! Et Mr Black, enlevez ce stupide sourire de votre visage », poursuivit McGonagall, sans sourciller.
Le groupe d'élèves s'engouffra donc par la porte ouverte, tandis que leur professeur tournait à nouveau les yeux vers Avery qui n'avait pas bougé.
« L'affaire est close », lui indiqua finalement McGonagall. « Il est temps pour vous de rejoindre le cours de sortilèges, il me semble. »
L'étudiant de septième année les fixa un long moment. Personne ne semblait vouloir bouger et Sirius se demanda un instant si Avery n'allait pas leur cracher dessus, tant le dégoût se lisait sur son visage. Il ne dit rien pourtant, mais leur adressa à tous un regard mauvais avant de faire volte-face pour s'en aller, Mulciber sur ses talons. Le visage de McGonagall n'affichait pas la moindre émotion, mais Sirius ne put empêcher plusieurs inquiétudes d'apparaître dans son esprit.
« Vous avez vu la tête d'Avery ? », lança James, à voix basse.
« La guerre est officiellement déclarée », murmura Remus, dans le dos de James et Sirius alors qu'ils rentraient finalement dans la salle de classe.
« Le point positif, c'est que pour une fois, Evans t'a défendu », ajouta Sirius, se voulant beaucoup moins dramatique.
« On finira mariés, je vous le répète », répliqua le jeune Potter, dont le sourire rejoignait presque les oreilles.
