- Bah alors ! On ne tient plus sur ses deux jambes !
Zenophys déglutit, avant de grogner en direction du blond, qui s'affala à ses côtés sur le sol. Il se colla à elle, sans même y faire attention. Mais elle le repoussa, en plissant le nez :
- Tu pues la transpiration Louis.
Ce dernier éclata de rire alors qu'il commençait à triturer son arme nerveusement, signe que quelque chose le dérangeait.
- Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda soucieusement la brune en se relevant.
- Est-ce que tu es heureuse ? D'être ma parabatai je veux dire ?
Zenophys regarda sa poitrine se soulever au rythme lent de sa respiration. Et elle l'observa, lui et ses cheveux blonds collés à son front couvert de sueur, lui et ses muscles saillants, lui et son aura apaisante mais rayonnante…
- Tu n'es pas heureux toi ? lui retourna-t-elle la question en fronçant les sourcils.
Zenophys se réveilla en un sursaut, passant une main sur son visage pour le réveiller. En ce moment, ses rêves étaient toujours des brides de souvenirs. Des souvenirs qu'elle avait voulu oublier, et elle avait presque réussis… Elle jeta un coup d'œil dans son petit bureau de l'institut et se désola de le voir autant en désordre. Les cartons l'avaient envahi… La psychanalyse soupira et s'approcha des murs pour y décrocher les cadres des photos de chats déguisés de chèvres ou de chèvres déguisées en chat, personne n'avait réussis à le déterminer.
- Alors c'est aujourd'hui ? déclara une voix féminine dans son dos.
Zenophys se retourna et découvrit face à elle, Maryse Lightwood, un petit sourire discret sur ses lèvres.
- Ainsi vous nous quittez vraiment…, murmura la matriarche des Lightwood.
Zenophys hocha la tête, sans trop savoir quoi répondre. Maryse observa les cartons, remplis de dossier, de bibelots.
- Je tenais à vous remercier en personne, pour votre travail sur nos jeunes shadowhunters.
La psychanalyste repositionna ses lunettes sur son nez, surprise. Des remerciements de la part de Maryse Lightwood, cela valait bien tout l'or ou toute la reconnaissance du monde.
- Je n'ai fait que mon travail…, murmura-t-elle humblement.
- Oh, j'ai cru comprendre que vous aviez fait bien plus et que vous aviez même prêté une oreille attentive à certaine créature obscure.
Zenophys haussa les épaules. Elle voulait aider. Shadowhunter, Vampires, Loups-garous, Fées ou même Terrestres, qu'est-ce que ça changeait au fond ? Il suffisait d'avoir un cerveau pour ressentir les choses et avoir des angoisses. Zenophys voulait se rendre utile, qu'importait la longueur des canines, la densité des poils ou le nombre de runes tatouées sur la peau.
- Je suis surprise de vous voir partir. Vous auriez encore beaucoup de choses à faire ici, soupira Maryse. Il reste tant de monde à aider, à écouter…
Valentin était mort, son fils également. Tout irait pour le mieux maintenant… Et pourtant, Zenophys savait que rien n'était pour autant réglé. Jace agissait de façon étrange depuis son retour. Alec était suspicieux, Clary réfléchissait aux moindres mots qui sortaient de sa bouche… La vie de guerrier était loin d'être facile, Zenophys le savait. Mais ce que voulait dire Maryse, paraissait bien plus personnel. La brune ferma les yeux et inspira un grand coup :
- Du monde comme vous, vous voulez dire ?
Maryse haussa les sourcils, déstabilisée avant d'esquisser un autre sourire, crispé.
- Vous savez, j'étais contre votre nomination à ce poste. J'ai exprimé mon désaccord auprès de l'enclave.
Cela n'étonnait même pas Zenophys.
- Je vous trouvais beaucoup trop jeune, vous veniez tout juste d'être diplômée, vous n'aviez aucune expérience… Je me voyais bien mal vous confiez les tourments des shadowhunters de cette institution, et encore moins, ceux de mes enfants.
- Vous avez changé d'avis ? demanda Zenophys.
- Non, rit Maryse. Je vous trouve toujours trop jeune, mais plus pour les mêmes raisons.
La femme arpenta la pièce, faisant claquer ses talons sur le sol. Elle s'empara d'un cadre et le décrocha pour le ranger dans un carton, posé sur le bureau :
- Vous m'avez prouvé que vous étiez plus que compétente. Alec ne dit que du bien de vous, Isabelle vous porte en très haute estime et Jace s'ouvre davantage. Mais vous restez trop jeune, et je me demande… Qui vous aide, vous ?
Zenophys ne s'était jamais posée la question. Peut-être parce qu'elle avait longtemps pensé qu'elle n'en avait pas besoin, d'aide. Elle se tortilla, mal-à-l'aise.
- Et vous Maryse ? Qui vous aide ?
- Je le reconnais, vous êtes habile dans l'art d'éviter de répondre aux questions qui vous fâchent, plaisanta-t-elle.
Oui, c'était l'un de ses talents… Elle l'avait toujours fait. Maryse l'avait tout de suite cernée… Cette dernière s'installa dans le fauteuil en face du bureau, un autre cadre dans les mains. Sa respiration s'était accélérée et Zenophys sentait son trouble à l'autre bout de la pièce.
- Mon mari et moi, nous allons divorcer.
Zenophys ouvrit la bouche, sous le coup de l'étonnement. Comme si les mots de l'ancienne directrice de l'institution de New-York lui avaient coupé les muscles de la mâchoire. Puis elle la referma, pour la rouvrir et essayer de dire quelque chose. Mais aucun son ne sorti. C'était… inattendu. Evidemment, les relations houleuses des Lightwood étaient connues de tous. Mais de là à parler de divorce…
- Oui je sais, ricana Maryse. Un divorce… Robert et moi n'arrivons plus à faire semblant. Et quand sa réputation à lui demeurera sauve, la mienne en pâtira parce que je suis née femme et que le monde tourne ainsi.
Maryse inspira, expira… Après tant d'années de mariage, tant d'années de vie communes, quatre beaux enfants… Tout était terminé. Et Maryse était le genre de femme à jeter le livre, pas à écrire un nouveau chapitre. Depuis que la décision était prise, elle avait des tas et des tas d'inquiétudes. Comment allait-elle s'adapter à une existence sans Robert ? Elle pensait qu'elle ne s'en remettrait pas. Le temps n'y faisait pas grand-chose, et la souffrance était toujours aussi présente.
Parce que ce divorce, c'était le signe de son échec, de leur échec à tous les deux.
Maryse n'avait pas d'amis, aucune relation en dehors de son travail. Personne à qui parler, avec qui échanger. Personne ne pourrait la comprendre. Tout le monde allait la juger. Peut-être que divorcer, à son âge, c'était être condamnée à l'isolement. Et ses enfants ? Alec, qui découvrait l'amour… Elle voulait qu'il continue d'y croire. Mais comment, quand ses deux parents allaient s'entredéchirer ? Et Isabelle ? Isabelle qui ne disait pas grand-chose, mais qui, d'un foncement de sourcils, en disait déjà trop. Et Jace ? Jace qui n'avait qu'eux comme famille, comme repère stable ? Et Max ? Son tout petit Max ? Son tout petit garçon… Il avait besoin de ses deux parents, apprenti shadowhunter ou non.
- Vous en avez parlé à vos enfants Madame Lightwood ? l'interrogea Zenophys.
- Je ne sais pas comment… Et s'ils m'en voulaient ?
Après tout, tout était de sa faute. Elle avait eu bien trop d'ambition. Elle avait toujours voulu se racheter, après ses erreurs qu'elle avait commise au sein du cercle. Maryse s'était vouée corps et âme, avait soutenu l'institution de New-York dans ses heures les plus sombres, pierres par pierres. Elle en avait négligé sa vie de famille trop souvent… Elle avait laissé le lien qu'elle avait avec Robert s'étioler, sans rien faire. S'il avait fini par voir d'autres femmes, ce n'était pas pour rien. Oh non, ça n'excusait en rien ce qu'il avait fait… Mais ça expliquait beaucoup et Maryse avait sa part de responsabilité. Son devoir angélique avait pris le pas sur son devoir de famille.
- Je ne pense pas qu'ils vous en voudront. Alec et Jace savent déjà pour les infidélités de Robert, Isabelle également. Ils comprendront j'en suis certaine, déclara la psychanalyste.
- Vous en ont-ils déjà parlé ?
Zenophys hocha imperceptiblement la tête.
- Max est encore jeune, mais je pense qu'il est préférable pour un enfant de voir ses parents heureux, plutôt que de les voir triste et en train de s'acharner à vivre une relation qui ne fait de bien à personne.
- Comment je vais lui dire…
- Commencez par lui faire comprendre que vous, vous l'aimerez toujours, même si vous n'êtes plus avec son père. Faites-lui savoir que ce n'est pas de sa faute, même si pour vous il n'a aucune raison de le penser. Dites-lui que vous serez toujours présente pour lui, que les histoires d'adultes, c'est compliqué...
Oui, Maryse allait lui dire ça…
- J'ai peur d'être seule…
- Mais vous n'êtes pas seule. Il y a vos enfants…
Maryse esquissa un sourire :
- Jocelyn est morte. Lucian est un loup-garou, tous mes anciens amis sont morts, avec Valentin, ou ils demeurent à Idris. Je suis seule. A part mes enfants, je suis seule…
- Il n'est pas trop tard pour rencontrer du monde…
- Je ne serais plus une Lightwood, se désola-t-elle.
- Parce qu'être une Lightwood fait de vous la femme forte que vous êtes ? Je ne pense pas.
Oui, Zenophys avait peut-être raison. Depuis leur décision de divorcer, Maryse n'arrivait plus… Elle n'arrivait plus à avoir confiance en elle, ou en les autres. Plus à penser qu'elle était effectivement cette femme pleine de poigne, d'autorité, que tout le monde voyait en elle.
- Si le nom a une importance pour vous… Je vous rappelle qu'avant d'être une Lightwood, vous étiez une Trueblood.
Maryse hocha la tête. Les Trueblood… Une famille aussi ancienne et puissante que les Lightwood. Mais Lightwood, c'était le nom de ses enfants, le sien depuis plus de vingt-ans… C'était un retour en arrière, qui la ramenait encore une fois, à son propre échec.
- Le temps vous montrera que vous êtes toujours la même personne…
- Et du temps j'en aurais à revendre… , rétorqua sèchement Maryse.
Zenophys fronça les sourcils, sans comprendre.
- Ils vont me retirer mes runes, expliqua Maryse.
Elle baissa la tête, les yeux, pour ne pas voir le regard horrifié de la psychanalyste. Retirer les runes d'un Shadowhunter, c'était l'exiler à tout jamais, c'était le renier, renier sa partie d'Ange… C'était faire de lui un simple Terrestre. Il n'existait pas de sentence plus sévère, si ce n'était la mort ou l'emprisonnement. Cette sanction était rarement prise, si bien que Zenophys pensait qu'il ne s'agissait que d'un mythe, pour effrayer les shadowhunters les plus rebelles.
- Est-ce que vous le saviez que j'avais un frère ? demanda Maryse. Il a renoncé à la vie qui était toute tracée pour lui, parce qu'il est tombé amoureux d'une Terrestre. Je lui en ai voulu pendant très longtemps, si bien que je ne me rappelle même plus les traits de son visage.
Zenophys en avait entendu parler. Ses parents en avaient chuchoté quelques mots une fois, alors qu'ils revenaient d'une réception organisée par les Trueblood, la famille de Maryse.
- Vous savez ce que vous allez faire ?
- Oh je ne sais pas. Je vais commencer par m'occuper d'Alec, d'Isabelle, de Jace et de Max.
- Prenez du temps pour vous, Maryse…
- Nous sommes tous des soldats, Madame Blodeuwedd. Même vous. Nous servons tous la cause pour laquelle nous sommes nés. Notre mission. Protéger les Terrestres, contenir les pulsions des créatures obscures. Quand on nous retire ce pour quoi nous sommes nés, que reste-t-il de nous ?
Ce n'était même pas une question… Maryse se demandait vraiment ce qu'il restait d'elle. Elle s'apprêtait à faire éclater en deux sa famille, et elle serait bientôt bannie de l'Enclave.
- Dura lex, sed lex, chuchota Maryse.
- La loi est dure mais c'est la loi, reprit Zenophys.
- Et je me plierai à elle, comme je les fais durant toute ma vie. Alors, je trouverai bien quoi en faire, désormais. Peut-être que je vais retrouver mon frère, apprendre que j'ai des neveux, ou des nièces. J'ai toujours voulu apprendre à faire de la pâtisserie ou à jardiner…
Zenophys ferma les yeux. Maryse était une guerrière si merveilleuse, si accomplie. L'Enclave condamnait l'un de ses meilleurs éléments, l'une des shadowhunter les plus compétentes de son temps.
- S'il y a bien une personne qui peut surmonter tout cela, c'est vous, Maryse.
Maryse releva la tête. Il y avait cette touche de sincérité dans la voix de Zenophys qui l'avait heurté en plein cœur. La psychanalyste croyait en ses mots, ça se voyait…
- Pourtant je sais ce qu'on dira de moi. On ne divorce pas dans le monde dans lequel nous vivons. Les Nephilims n'aiment qu'une fois dans leur vie.
- On se moque bien du regard des autres…
- Votre réaction tout à l'heure, quand j'ai annoncé que Robert et moi allions divorcer… Je l'ai bien vu. Vous désapprouvez…
Zenophys serra les poings. On lui avait toujours dit qu'elle avait un visage trop expressif.
- Ce n'est pas le divorce qui m'a choqué Maryse.
C'était la vérité. Les mœurs des shadowhunters étaient bien étranges… Bien sûr, les Nephilims n'aimaient qu'une fois dans leur vie... Les divorces étaient effectivement mal perçus. Les shadowhunters qui renonçaient à leur vie de soldat aussi, ceux qui avaient subi des transformations, comme Lucian… Les shadowhunters vivaient repliés sur eux-mêmes, pleins de préjugés et d'idées préconçues. Il fallait que cela change, Zenophys en était convaincue.
- Ce qui m'a étonné Maryse, c'est que vous ne vous soyez pas battue jusqu'au bout, expliqua Zenophys.
Et ce n'était pas la psychanalyste qui parlait. De toute façon, elle n'était plus en fonction depuis hier soir. Elle avait démissionné. Zenophys s'était rendue compte qu'elle avait besoin d'autres choses, et que ce n'était pas à l'institution de New-York qu'elle allait les trouver.
- Mais je me suis battue ! s'insurgea Maryse.
- Je croyais que par amour, vous auriez pardonné à Robert.
Maryse se leva et fît quelques pas.
- Vous êtes jeune Zenophys Blodeuwedd. Très jeune.
Elle se retourna vers la psychanalyste, qui triturait nerveusement sa petite statuette.
- J'ai pardonné à Robert ses infidélités pendant tout ce temps… Par amour comme vous dîtes. Pour lui, pour nos enfants.
- Alors pourquoi vous ne le faîte plus aujourd'hui …
- Parce que je n'en ai plus la force. Parce que l'amour ne suffit pas toujours. Parce que j'ai compris qu'il ne méritait plus que je le pardonne. On n'en veut, on est fâché qu'avec gens qu'on aime, les autres, on leur fait la guerre ou on les ignore. Je n'étais même plus fâchée, ou en colère contre Robert… J'ai su, à partir de ce moment, que c'était terminé.
Zenophys s'empara d'un nouveau cadre pour le ranger. Avoir la force de pardonner… Si Maryse avait pu pardonner à l'homme qu'elle aimait pendant toutes ces années… . « On n'en veut, on est fâché qu'avec gens qu'on aime, les autres, on leur fait la guerre ou on les ignore. ». Zenophys en voulait toujours atrocement à Louis. Cela voulait bien dire quelque chose… Est-ce qu'elle l'aimait encore suffisamment pour lui pardonner ?
- Vous savez, je ne regrette rien. J'ai pardonné à mon mari pendant tout ce temps, et je le referrais sans hésiter. C'est juste qu'aujourd'hui, il ne sert plus à rien de me faire du mal. Je n'en retire plus rien de bon, et s'acharner comme ça… Je n'ai plus la force de pardonner, répéta Maryse. Il arrive un moment ou l'amour ne suffit plus, et ne justifie plus rien.
Zenophys fouilla dans sa proche.
« Pardonne moi Zeno »
L'écriture fine, élégante… Son cœur se serra. Et elle sût ce qu'elle avait à faire. Elle serra dans ses mains le bout de papier, s'y rattachant de toutes ses forces.
- Vous n'avez pas à vous justifier auprès de moi, marmonna Zenophys en retournant à la réalité.
- Je sais. Mais je veux pouvoir tout dire à ma thérapeute.
Zenophys pencha la tête sur le côté, surprise :
- Vous n'acceptez déjà plus de clients ? s'alarma-t-elle.
- Si, si, bien sûr que j'en accepte, répondit la psychanalyste.
Son cabinet n'était même pas encore ouvert… Elle n'était même pas encore installée ! Mais elle avait déjà un carnet rempli… Des shadowhunters, des vampires, des fées, des loups-garous, des sorciers… Zenophys avait décidé d'investir ses économies dans ce projet. Elle voulait aider tout le monde, ou tout du moins, le plus de personne possible. Et en aidant Magnus, Simon, Lucian et même la petite Madzie, elle s'était rendue que c'était ce qu'elle voulait faire. Ce qui la rendait heureuse. Alors, avec l'appuie de Magnus, elle avait trouvé un local, dans un vieil immeuble de Brooklyn. Alec lui avait donné son aval, et lui avait demandé si elle pourrait toujours continuer à faire des consultations pour les shadowhunters de l'institut. Zenophys lui avait répondu qu'il n'était pas question qu'elle les laisse tomber, et Alec lui avait sourit en la prenant dans ses bras…
- On se revoit très vite alors, Madame Blodeuwedd.
- A bientôt, Madame …
Zenophys s'arrêta, sans savoir quel nom employer.
- Lightwood, Trueblood… Appelez-moi Maryse. C'est celle que je suis…, sourit Maryse en lui serrant la main.
Zenophys lui répondit chaleureusement et laissa Maryse s'en aller. Elle attendit dans son bureau, tournant en rond.
« Je n'ai plus la force de pardonner »
« Il arrive un moment ou l'amour ne suffit plus, et ne justifie plus rien. »
« On n'en veut, on est fâché qu'avec gens qu'on aime, les autres, on leur fait la guerre ou on les ignore »
Elle se massa les tempes. Et sortit de son bureau à son tour, serrant toujours dans ses mains le morceau de papier. Les jointures de ces dernières en étaient devenues blanches. Elle se mît à courir, sans même savoir ou aller. Elle chercha, tout autour d'elle, des hommes avec des cheveux blonds. Et Zenophys eut envie d'éclater de rire, tant elle était ridicule. Comme si elle allait trouver Louis dehors, comme par magie. Des larmes perlèrent au coin de ses yeux… Les parabatais n'avaient pas le droit de s'aimer. C'était la loi. Pourquoi était-elle tombée amoureuse du sien ? Pour qu'il lui soit arraché aussi brutalement ?
- Zeno ?
Une petite main s'était agrippée à sa jupe. L'interpellée baissa les yeux et répondit au sourire édenté de Madzie, que Magnus tenait dans ses bras.
- Nous étions venus voir Alec, mais manifestement, il me semble qu'une certaine jeune-femme a d'avantage besoin d'une dose de mignonnerie et d'innocence enfantine pour soigner son cœur tourmenté.
Magnus lui confia la main de Madzie qui ne tenait pas sa jupe et lui fit signe de disparaitre.
- Allez donc prendre l'air toutes les deux. Je devais m'entretenir avec Alec d'un sujet important de toute manière…
Zenophys hocha la tête, et avec la petite Madzie, s'en alla vers le parc. Elle se posa sur un banc, et la surveilla distraitement jouer avec les autres enfants. Puis elle plongea son regard dans les fontaines et noya son regard dans l'eau pour ne plus penser. Elle savait désormais que sa rancune, était moins forte, beaucoup moins forte que son amour pour Louis, et qu'elle avait la force de lui pardonner. Parce que Louis méritait qu'on le pardonne. Parce qu'elle avait toujours cette boule de sentiment indéfinissable au creux d'elle-même quand elle pensait à lui…
- Pourquoi tu saignes ?
Zenophys revient à elle, et suivit le regard de Madzie. La main de la psychanalyste était en sang, son poing toujours serré. Sans y faire attention, ses ongles avaient meurtri sa chair jusqu'à la faire saigner.
- Oh ce n'est rien…
- Tu veux venir jouer avec moi ? proposa la fillette
- Pourquoi pas !
Zenophys se leva, observant Madzie courir en direction des balançoires. Elle couru dans sa direction, avant de tomber, en perdant l'équilibre. L'un de ses talons aiguilles venait de se casser. Elle resta sur le sable, sans se relever…
- Bah alors ! On ne tient plus sur ses deux jambes…
Zenophys eut le souffle coupé. Elle regarda Louis, ses cheveux blonds en bataille et ses yeux bleus en amande. Il enleva l'une de ses mains fourrées dans ses poches et la tendit en direction de Zenophys. Et elle la regarda cette main… Avant de desserrer la sienne qui laissa s'envoler le mot que le jeune-homme lui avait écrit il y a longtemps. Elle accepta la main de Louis, et se remit sur ses deux jambes en souriant à travers ses larmes.
- Je suis heureuse que tu ne sois plus mon parabatai.
