Les personnages du manga Death note appartiennent à Takeshi Obata et Ooba Tsugumi.Cette fanfiction appartient à son auteur, TzviaAriella, qui m'a gentiment donné son accord pour la traduire, en espérant que la retranscription sera à la hauteur de l'histoire d'origine.
Une histoire qui m'a profondément marqué et influencé, il était donc temps que je rende à César ce qui lui appartenait. N'hésitez pas à laisser des reviews, je les traduirais en retour pour les transmettre à l'auteur.
Au niveau des avertissements, il s'agit d'une death fic, donc ne vous étonnez pas si elle venait à mettre en scène la mort d'un des personnages principaux.
C'est de cette manière que je disparaîtrais
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Les chaises qu'on mettait à la disposition des visiteurs qui venaient franchir les portes du parloir pour s'entretenir avec les détenus, elles étaient tout sauf confortables, L n'avait de toute manière pas besoin qu'elles le soient. Perché dans sa position habituelle, accroupi sur ses pieds dénudés, il martelait la table du bout des doigts pour marquer son impatience, impatience à l'idée de se retrouver n'importe où sur terre à l'exception de cette pièce.
Pourquoi est-ce que ça prends autant de temps ?
Il aurait été parfaitement heureux de laisser Light Yagami derrière lui, plutôt que de lui faire face une fois de plus, abandonnant l'adolescent dans la déchetterie mentale que L réservait à ses anciens adversaires comme aux affaires qu'il avait définitivement résolu. Mais ce n'était pas l'opinion du tribunal pénal international à qui on avait confié la lourde tâche de rendre son verdict sur l'affaire Kira.
Il lui sera peut-être plus facile d'encaisser la nouvelle si vous lui annoncez en personne. Nul doute que cela faciliterait aussi les choses pour sa famille. Et puisque vous devez retourner à Tokyo de toutes façons, si cela ne vous dérangeait pas...
Cela le dérangeait, justement, mais cela ne changeait rien à l'affaire. Le tribunal était persuadé qu'il s'adressait au représentant de L plutôt qu'au détective en personne, un subterfuge qui lui avait permis de conserver son anonymat, mais le revers de la médaille, c'est qu'il ne le plaçait guère en position de contredire les directives des juges qui lui faisaient face, de l'autre côté de la couverture.
Raison pour laquelle il s'était retrouvé à gâcher une heure de son précieux temps, entre les murs du parloir d'une prison, seul et irrité, dans l'anticipation du moment où il serait forcé d'expliquer au tueur en série le plus prolifique de la planète que l'anniversaire qu'il venait de célébrer récemment, le dix-neuvième de sa vie, il aurait la triste distinction d'être le tout dernier.
La porte métallique venait enfin de coulisser, événement tant attendu qui poussa L à lever les yeux, et faire face à Kira pour la première fois au cours des quatre mois qui venaient de s'écouler. Les chemises élégantes dont il était revêtu jadis, on leur avait substitué un uniforme carcéral des plus atypiques, qui par certains côtés évoquait une camisole de force, quand bien même ce modèle bien particulier laissait leur liberté de mouvement aux bras de son captif.
L connaissait la fonction de cette tenue maintenue sur la peau du prisonnier par les sangles que ses gardiens avaient noués derrière son dos. Même si Light avait été forcé de renoncer à la possession de sa death note, libérant Rem de l'obligation de demeurer à ses côtés, le livre maudit demeurerait plaqué directement contre son corps, comprimé par les entraves qu'il pouvait sentir le long de sa colonne vertébral.
Cette camisole n'était pas seulement physique mais avant tout mentale, tant qu'il la porterait, les souvenirs de ses crimes demeureraient soudés à la conscience du meurtrier. Ses poignets demeuraient enchaînés en permanence devant lui pour le soustraire à la tentation de dénouer le sangles qui lui comprimaient le dos.
Quand on avait invité le prisonnier à faire son entrée en scène, sur le seuil du parloir, ses chaînes habituelles avaient été complétées par celle d'une deuxième paire de menottes, verrouillée sur ses chevilles. Restriction supplémentaire à sa liberté de mouvement qui avait donné à son visiteur l'impression de contempler un nouveau né faire ses tout premiers pas, s'efforçant de conserver un équilibre précaire à chaque nouvelle tentative. Impression que le captif s'efforça de dissiper quand il leva les yeux à son tour, pour croiser le regard de L.Dès l'instant où le détective était apparu dans son champs de vision, il s'était redressé pour lui décocher la meilleure imitation possible d'un sourire exprimant l'insouciance comme la désinvolture.
Il a l'air d'avoir traversé l'enfer.
« Ca fait un bail, Ryuzaki. » s'exclama Light en s'installant sur la chaise disposée en face du détective qui l'attendait de l'autre côté de la table. « Je ne m'attendais pas à ce que tu viennes visiter ma prison. »
« Moi non plus. »
Light leva un sourcil. « J'en déduis que ce sont des raisons toutes professionnelles qui expliquent ta venue, ici. »
« Le tribunal a insisté pour que je vienne te saluer de leur part. »
Le prisonnier avait tressailli sur sa chaise, faisant cliqueter ses chaînes. Qu'il faille blâmer la lassitude qui étirait ses traits ou les cernes qui lui soulignaient les yeux, L avait l'impression dérangeante d'être face à son miroir plutôt qu'à un criminel. Une horde de démons avait dansés dans les yeux de Light Yagami, il n'y a pas si longtemps, mais les seules traces de leur présence étaient les empreintes que leur sarabande avait laissé sur leur ancien terrain de jeu. L'arrogance comme les rires avaient tiré leur révérence de ce visage, absence soulignés par la manière dont ses traits s'étaient durcies et ses joues creusées au cours de sa captivité.
Même s'il n'éprouvait guère de sympathie envers ce criminel, L ne pouvait s'empêcher de se sentir mal à l'aise face à l'ombre qu'il avait laissé derrière lui. Le visage qu'il offrait à la contemplation du détective lui évoquait à présent une maison hanté : vidée de ses occupants, sombre, et dissimulant une foule de créatures d'outre-tombe dans ses ténèbres.
Et très bientôt, il se réduira à ça, justement, un fantôme.
« Est-ce que tu me croirais si je t'avouais que tu m'as manqué ? Aussi étrange que cela puisse te paraître... » lui demanda Light.
« Étant donné les circonstances, étrange serait le mot approprié, oui. »
« Et pourtant... Se retrouver isolé entre les quatre murs d'une cellule, cela remet pas mal de choses en perspective. Au point de vous faire éprouver de la nostalgie pour ce qui demeure de l'autre côté des barreaux, y compris ce qu'on aurait souhaité laisser derrière soi, il n'y a pas si longtemps. Oui, je suppose qu'il ne faut pas chercher plus loin que ça...»
« Tu auras beaucoup de mal à regretter ma présence à l'avenir... »
« Tu pourrais être surpris. »
« Tu as essayé de manipuler un dieu de la mort pour qu'il m'assassine à l'aide d'un cahier d'écolier. Plus rien ne pourrait me surprendre de ta part après ça. »
Light se mit à sourire. « Est-ce que je dois prendre ça comme un défi ? »
« De quelle manière est-ce que tu souhaiterais mourir? »
Une certaine tension s'empara du prisonnier suite à cette question, tension qu'il s'efforça de dissiper en secouant la tête. « Tu n'as pas besoin de me menacer. C'était une simple plaisanterie.»
« Ce n'était pas une menace. C'est le message qu'on ma demandé de te transmettre. » Aucune émotion n'avait tracé l'ombre de sa silhouette sur le visage apathique du détective, mais il n'avait pas fourni le moindre effort pour dissimuler le mépris qui avait imprégné ses derniers mots. « Tu as été condamné à mort.»
Lorsque la sombre prophétie acheva de faire retentir son écho, le sourire du condamné se dissipa, aussi rapidement que l'eau disparaissait entre les interstices séparant les grains de sable les uns des autres dès qu'elle entrait en contact avec la surface du désert. Il a l'air tellement choqué. Aussi intelligent et éloquent que puisse lui paraître le reflet que lui renvoyait son propre miroir, derrière cette façade, il demeurait un adolescent naïf. Le temps comme l'expérience auraient pu corriger cet état de fait et combler cet écart, mais l'avenir venait définitivement de refermer ses portes face à Light Yagami. Les opportunités de changer resteraient derrière lui et non devant.
« Est-ce que cela te surprend?» lui demanda doucement L.
« Non. Je pensais juste que... Ils ne me demanderont même pas de me présenter à la barre pour témoigner ? »
« Si on prend la peine d'étudier la jurisprudence que tu as laissé derrière toi, tu as tendance à effacer des pans entiers de ta mémoire quand ça t'arrange pour donner l'illusion d'être innocent, et même si nous avons réussi à te priver des moyens de le faire, tu restes avant tour un menteur pathologique. Quel serait l'intérêt de t'écouter dans ces conditions?»
« J'ai le droit d'assurer ma propre défense. »
« Tu en as le droit, mais je doutes que ça t'avancerais à grand chose. Dans le meilleur des cas, tu pourrais les convaincre de retirer un chef d'accusation ou deux, un ou deux parmi tant d'autres. Cela ne suffirait pas pour sauver ta tête.»
« Oh merde, je ne vais pas m'amuser à plaider non-coupable, je veux juste avoir le droit de plaider pour avoir la vie sauve ! » Light s'humecta les lèvres, s'efforçant à grande peine de conserver son calme. « Pour l'amour de Dieu, Ryuzaki, tu pourrais au moins me laisser leur parler, me laisser les convaincre, en tout cas essayer...»
« Ce n'est pas moi qui t'en empêches. Ils se contrefichent de ce que tu peux avoir à dire pour ta défense, Light, et pour être honnête, c'est aussi mon cas. Tu n'es pas le premier meurtrier à estimer ses crimes justifiés, et tu ne seras pas le dernier. » L contempla la porte de la pièce du coin de l'œil, imaginant le petit en-cas qu'il pourrait dénicher de l'autre côté, regrettant sur le coup, après coup, de ne pas avoir pensé à en apporter un avec lui avant de franchir le seuil du parloir. « Je te le demandes à nouveau. De quelle manière est-ce que tu souhaiterais mourir?»
L'espace de quelques instants, Light se contenta de le regarder en silence, avant d'éclater finalement d'un rire sans joie. « De vieillesse.»
« Cette options là n'est plus à ta disposition. »
« Parce qu'il me reste des options ? »
« Quelques-unes. »
« Est ce que conserver la vie sauve en fait partie ? »
« Non. »
« Alors je n'ai plus aucune option. »
L manifesta son irritation par un claquement de langue. « Il te reste des options en ce qui concerne la méthode d'exécution. Cette décision là, le tribunal a eu la clémence de la laisser entre tes mains. »
« Tu n'es pas sérieux, là. »
« Je ne me serais pas dérangé à venir jusqu'ici pour une simple plaisanterie. »
Light se recroquevilla sur lui même, allant jusqu'à enfouir son visage derrière ses mains. Indifférent au spectacle, L se contenta de le regarder en silence, perché sur sa chaise comme un oiseau de proie de taille surdimensionnée. Finalement, le condamné se décida à se redresser et passa sa main dans les cheveux, après avoir essuyé ses yeux humides du revers de la manche. « J'y réfléchirais. »
« Réfléchis-y vite dans ce cas. Mes instructions sont de rester à tes côtés jusqu'à ce que tu me fournisse une réponse. » Un mensonge bien sûr, mais L avait déjà assez perdu de temps avec Kira. Quel que soit la manière dont elle se conclurait, cette visite sera la toute dernière. « Quelle méthode aura ta préférence?»
« Je ne sais pas. »
« Ce n'est pas une réponse. »
« Et c'est tout ce que tu obtiendras de ma part. Pour l'amour de Dieu, je ne peux pas... j'ai besoin de faire des recherches...besoin d'y réfléchir... »
« Est-ce que cela t'aiderais si je t'établissais une liste des options disponibles ? »
« Cela m'aiderais si tu te décider à la fermer pour me laisser un peu de temps ! Au cas où tu ne l'aurais pas compris, je ne suis pas en train d'hésiter entre deux saveurs différentes pour ma crème glacée, là ! Si je fais le mauvais choix... Si jamais...si jamais quelque chose tournait mal... »
« Dans tout les cas, tu mourras, la seule différence éventuelle tiendrait à la longueur du parcours, certains sont plus court, d'autres...plus long... Il n'y a pas vraiment de bonne ou de mauvaise réponse à cette question, Light. Tout les chemins te mèneront à Rome, peu importe celui que tu choisiras au final. »
Light serra les poings. « Dégages. »
Je ne t'aurais pas manqué bien longtemps, dis moi. L ignora les derniers mots du prisonnier et leva un doigt. « Pendaison. Méthode d'exécution standard au Japon. Si la procédure est correctement exécuté, la force de la chute entraînera une rupture nette des vertèbres cervicales, perte de conscience instantanée. Si la mise en œuvre laisse à désirer, tu risque la strangulation, dans ce cas, ce serait...plus lent. Cela peut prendre jusqu'à quarante-cinq minutes pour rendre ton dernier souffle, dans le pire des cas. » Un deuxième doigt se redressa aux côtés du premier.«Peloton d'exécution. Bénéfices éventuelles : Rapide, peu onéreux, t'offrira une certaine dignité pour ton départ, en plus de présenter le moins de risques en matière de complication éventuelles. Au niveau des aspects négatifs : Potentiellement traumatisant pour ceux qui t'exécuteront, en plus de laisser un cadavre en bien piteux état. Si la réaction de ta famille face au corps qui leur sera restitué te concerne, ce n'est peut-être pas la meilleure option.»
Le prisonnier s'était mis à pâlir. « Arrêtes-ça... »
« Chaise électrique. Pratiquement passée de mode ces jours-ci, il est vrai, mais cela reste une possibilité. 2500 volts pour une durée de vingt secondes, le courant fera son entrée en passant par les électrodes fixés sur ta tête et suivra le chemin le plus rapide vers le sol, tes jambes. Si la première décharge ne suffisait pas, une deuxième prendra le relais, puis une troisième, jusqu'à ce que la bonne soit derrière nous. Là encore, le corps ne sera pas beau à voir. Même en faisant abstraction du fait que ton cerveau sera littéralement grillé, il est déjà arrivé que des condamnés voient leurs globes oculaires sauter hors de leur orbites pendant la décharge. Quelques-un ont même pris feu en cours de cuisson. Personnellement, je ne te recommanderais pas cette méthode. » L ajouta un quatrième doigt à son décompte, donnant à sa main l'apparence d'une araignée qui remuait les pattes sous les yeux du prisonnier. « Peine de mort par injection:On utilise habituellement un cocktail de trois drogues pour cette méthode d'exécution, un barbiturique pour susciter l'inconscience, un paralysant pour bloquer la respiration, et finalement une solution à base de potassium pour susciter un arrêt cardiaque. La disponibilités des composants nécessaires à la procédure peut poser souci, tout comme la mise en place de l'intraveineuse qui t'injectera les produits. En raison du temps d'actions des drogues utilisées, il y a également une possibilité pour que tu demeure conscient jusqu'à la fin tout en demeurant paralysé, te plaçant dans l'incapacité d'exprimer ta souffrance au cours de ton agonie. Une éventualité des plus déplaisante en vérité, je suis certains que tu t'accorderas avec moi sur ce point.»
« Je t'ai dit d'arrêter ! »
« Tu me réclamais des options, Light. Chambre à gaz : Un mélange de cyanure et d'hydrogène est utilisé pour la mise à mort. Un gaz visible à l'œil nu, si tu t'intéresse à la question. Mais dans cette configuration, on ne te fournira aucun moyen d'atténuer tes souffrances jusqu'à ce que tu rendes ton tout dernier souffle. S'il t'arrivait de paniquer en cours de route, au point de bloquer ta respiration le plus longtemps possible, cela prolongera d'autant plus ton agonie. La variante au gaz de nitrogène présente l'avantage d'être invisible en plus d'être inodore. En théorie, si on avait recours à ce produit, tu ne sentirais absolument rien avant la perte de conscience, si ce n'est une légère euphorie. Mais cela reste du domaine de la théorie, justement. Cette méthode ayant été développé fort récemment, aucun test concluant en la matière n'a pu avoir lieu. » L fronça les sourcils en contemplant sa propre main. « Du coup, je ne sais pas si je dois compter cela comme une seule option ou considérer que cela constitue deux options à part entière...»
Light frissonnait de plus belle en plaquant ses mains sur ses oreilles, dans une attitude qui évoquait un enfant terrifié. Rien d'étonnant au fond, il se réduit précisément à ça au final.Pensée qui aurait pu susciter la compassion du détective, le dégoût fût la seule émotion qu'elle fit germer dans sa conscience. Tu l'appréciais tellement ta chère justice, quand tu étais du bon côté de la barrière, et maintenant que les tables ont tourné, tu pleurniches en marmonnant que ce n'est pas juste. Tu es un Dieu quand ça t'arrange, et quand ce n'est plus le cas, tu joue les gamins apeurés. A se demander comment j'ai pu espérer que tu puisse faire face à la mort comme un homme. Tu n'a jamais pu te décider à vivre comme un homme, une seule fois dans ta vie, alors mourir...
« Je peux m'arrêter au moment que tu souhaites, Light. » murmura le détective. « Il suffit de me dire quelle option a obtenu ta préférence. »
Light secoua simplement la tête. « S'il te plaît... Tu n'as pas besoin d'aller jusque là... »
« Jusque là ? Jusqu'à te demander ton opinion ? Ou jusqu'à te laisser mourir ? »
« Les deux... ou plutôt, ni l'un ni l'autre...Je... » Il rétracta ses lèvres entre ses dents pour les mordiller, avant de lever sa tête, s'efforçant d'entrecroiser son regard angoissé à celui de L.«Aides-moi.»
« Je l'ai déjà fait. Grâce à moi, il te reste ton mot à dire sur les derniers moments de ta vie. Bien plus que ce que tu as accordé à tes victimes. »
« Pourquoi est-ce que tu me fais subir ça ? »
« Là encore, il me faudrait d'avantage de précision sur le sens de ta quest... »
Light percuta la surface de la table de ses poings, réduisant L au silence avant de fondre en sanglots.
Tu en as mis du temps. L contempla le criminel en silence sans que l'ombre du moindre sentiment ne passe sur son visage apathique, derrière cette façade impassible, il demeurait écartelé entre l'exultation et l'irritante présence d'un semblant de culpabilité. Aucune raison de culpabiliser, vraiment, il récolte ce qu'il a semé. Si les rôles s'étaient inversés, ce n'est pas lui qui se serait retenu de jubiler devant le perdant. Mais quel que soient les atrocités que Light avaient fantasmé de commettre par le passé, l'instant présent l'avait abandonné au fond du caniveau. Il ne restait plus le moindre fragment d'arrogance à briser, maintenant, exposant ce qui se dissimulait derrière, un simple gamin terrifié à l'idée de mourir sous peu.
Modifiant légèrement sa position, L extirpa un mouchoir de sa poche avant de le tendre au prisonnier. »Utilises ça. »
« Tu as pris tes précautions avant de venir, hein ? »Light se moucha bruyamment avant froisser le bout de tissu entre ses doigts et de s'essuyer les yeux du revers de la main. «Merde, je pensais que j'étais meilleur acteur que ça... »
« En temps normal, c'est effectivement le cas. »
« Je sais. » Son sourire était si faible quand il ouvrit le passage à ces mots. « Tu sais, une partie de moi ne peut s'empêcher de penser que ce sera encore un simulacre d'exécution... Encore un de tes tests... »
« J'ai bien peur que non. »
« Peur. Une formulation des plus intéressante. »
L haussa simplement les épaules. « Une simple façon de parler. »
« Ouais, je le sais bien. »Le condamné fît basculer sa nuque en arrière, s'efforçant de focaliser son attention sur le plafond de la prison pour retenir ses larmes. « De mon côté, en revanche, ce n'est pas une façons de parler. J'ai peur... »
J'avais remarqué, oui. Extirpant un second mouchoir de sa poche, le détective le tendit silencieusement au criminel, préférant garder ses pensées comme ses remarques pour lui.
« La première fois que Ryuk est apparu dans ma chambre, j'étais persuadé qu'il venait pour me tuer. Tu le savais ? Il est apparu de nul part, du jour au lendemain, pour se présenter, cinq jours après avoir abandonné sa Death note dans ce monde. Quand je l'ai vu devant moi, je pensais qu'il venait s'emparer de mon âme, mais je n'avais pas peur à ce moment là. Pas encore. Et maintenant... » Light tamponna le mouchoir contre son visage avant de fermer les yeux. « Je ne sais pas ce qui m'est arrivé, Ryuzaki. Je ne sais pas à partir de quel moment les choses ont mal tournées... »
« Certains suggéreraient que c'est à partir du moment où t'es décidé à assassiner des gens en masse dans le but de régner sur ce monde... »
Light renifla. « Par certains, j'imagine que tu fais référence au tribunal. »
« Entres autres, oui. »
Le silence retomba à nouveau entre eux, tel une muraille, mais L ne sentait guère d'humeur à fournir le moindre effort pour ébrécher cette barrière. Quand bien même il aurait ressenti le besoin d'apporter le moindre réconfort au condamné, ce qui n'était guère le cas, il ne pouvait plus rien pour lui à ce niveau là. Certaines personnes souffriraient de la mort de Kira au point d'en porter le deuil, L n'en faisait pas partie, et peu importe si Light avait réellement changé ou non, cela ne changerait rien à sa destination finale. Oui, le seul réconfort qu'il se voyait offrir à Light dans ces circonstances, c'était de lui rappeler que très bientôt, il ne serait plus en état de regretter ses fautes, de fait il ne serait plus là tout court. Une consolation des plus amère en vérité, si on pouvait seulement la voir comme une consolation quelconque.
« Comment va Misa de son côté ? »lui demanda finalement Light. « Elle apprécie d'avoir été graciée pour ses crimes ? »
« Pour ce que j'en sais, elle a été intégrée à un programme de protection des témoins. Je n'ai pas la moindre idée de ce qu'elle peut bien faire ou penser à l'heure actuelle. »
« Un programme de protection des témoins, bien sûr. » Light secoua la tête sans dissimuler son amertume. « Elle a assassiné des innocents et m'a servi de complice jusqu'à la fin, mais ça n'a pas l'air d'avoir préoccupé le tribunal plus que ça. Et je me retrouve là, condamné à la peine capitale, pendant que de son côté, elle n'aura même pas besoin de passer un seul jour en cellule pour ses choix. Juste parce que son shinegami s'est décidé à collaborer avec vous. C'est ce que tu appelles la justice ? »
L se contenta de hausser les épaules. « Tu as essayé de manipuler Rem pour qu'elle m'élimine, alors même que cela reviendrait à un suicide pour elle. Est-ce qu'il faut s'étonner qu'elle ait préférer négocier avec nous à la place ? »
« Tu n'avais pas le choix quand il s'agissait d'épargner Misa. Rien ne t'obligeait à lui laisser sa liberté en plus. »
« Ce n'était pas l'opinion de Rem. Quelle importance au fond ? Sa sentence et la tienne ne sont en aucune manière connectée. Quand bien même j'emmailloterais Misa Amane dans une camisole de force jusqu'à la fin de ses jours, ce n'est pas ça qui te fera sortir de ta tombe, ce n'est pas ça qui t'en détournera non plus.»
Light grimaça. « Est-ce que tu es obligé de remuer le couteau dans la plaie ? »
« Tant que tu ne m'auras pas donné ta réponse, oui. »
« Si tu tiens tant que ça à en finir avec moi, écris mon nom dans la death note, cela suffira. Je ne rentrerais pas dans ton jeu. »
« Impossible. Le monde a besoin d'une preuve que l'ère de Kira a définitivement touché à sa fin. Si tu décédais d'une attaque cardiaque comme tes victimes, tout ce que cela démontrerait c'est que le pouvoir auquel tu as eu recours est toujours là, quelque part, à attendre que quelqu'un s'en empare pour prendre ta relève. Cela ne veut pas dire que nous n'écrirons pas ton nom sur la death note, simplement que nous avons besoin de préciser également de quelle manière tu mourras.»
« Tu n'as qu'à leur raconter le bobard que tu préféres sur la manière dont j'aurais tiré ma révérence. Ce n'est pas comme s'ils vont te croire sur parole de toute manière, ils ne le feront pas sans une pr... » Light se figea, les yeux écarquillés dans une expression horrifiée. « Tu va filmer...la scène... »
« Comme je l'ai dit, le monde aura besoin d'une preuve. »
« En conséquence, tu m'offres le tout premier rôle dans un snuff movie sans me laisser mon mot à dire sur la question ? »
« Non. Nous inscrirons ton nom et la manière de mourir que tu t'es choisi dans la death note de Misa, ainsi qu'une action possible mais extrêmement spécifique, ce qui démontrera au tribunal que le carnet fonctionne bien de la manière que je leur ai décrite. Si l'action que nous avons sélectionné comme test de la validité du pouvoir du carnet a bel et bien lieu, nous poursuivrons l'exécution jusqu'au bout, et oui, dans ce cas de figure, nous filmerons la scène. Si l'action en question ne se déroule pas comme nous l'avons spécifié, tu seras immédiatement gracié et libéré sur le champs. » L haussa de nouveau les épaules. « Qu'est ce qui t'apparaît spécialement injuste dans cette procédure ? »
Toute trace de couleur reflua du visage de Light au fur et à mesure du discours, lui donnant une pâleur appropriée à son futur linceul tandis que ses yeux s'écarquillaient de plus belle, jusqu'à atteindre des proportions qui auraient sans doute paru des plus comiques dans tout autre circonstances. « Tu ne peux pas...être sérieux... »
« Je suis on ne peut plus sérieux. Tu voulais une chance d'échapper à la peine capitale. C'est celle que je t'offre. »
« Me forcer à apporter la preuve de mon propre crime avant de justifier mon exécution avec, sans me laisser la moindre possibilité de faire autrement, c'est ça la chance que tu m'offres ? Bon Dieu, Ryuzaki ! Est-ce ce que tu réalises seulement l'inhumanité de cette farce? »
« Inhumaine sans doute, tout autant qu'un crime de masse. Peut-être que si tu avais pris la peine de réaliser l'inhumanité de tes propres actions, de ton côté, la situation serait différente, tu ne te retrouverais pas ici pour commencer. »
Light secoua frénétiquement la tête en agrippant ses propres cheveux de toutes ses forces, les étreignant avec une intensité suffisante pour se les arracher jusqu'au scalp. «Non...Non... Je ne le ferais pas... Tu ne peux pas... »
« Si tu préfère que le monde entier te regarde hurler et te débattre pendant qu'on te traîne jusqu'à l'échafaud, cela ne posera aucun problème à qui que ce soit. Mais tu le feras. Tu n'auras pas d'autre choix. »
« Ce n'est pas ce que tu me disais plus tôt... »
Oh, par pitié. « C'est exactement ce que je t'ai expliqué un peu plus tôt. Tu as ton mot à dire sur la méthode, pas le résultat. Nous te laissons libre de choisir le chemin, pas la destination finale. »
« Mon mot à dire sur la méthode... Peu importe la méthode, vous me l'accorderez ? »
« Dans les limites du raisonnable. »
« Si c'est le cas, mon choix est fait. La crucifixion. »
L plissa les yeux. « Dans les limites du raisonnable, j'ai pris la peine de le préciser. »
« Cela me paraît des plus raisonnable, justement. Du bois, des clous, un marteau, on ne peut pas faire plus simple si tu veux mon avis. »
« Nous n'allons pas te torturer, Light. »
« Qu'est ce qui t'en empêche, dis moi ? Est-ce que tu te sentirais un minimum concerné par mon bien être finalement ? A moins que tu ne sois simplement concerné par l'image que tu laisseras de toi sur la vidéo ? »
« Peu importe la raison, nous ne le ferons pas. »
« Très bien. Dans ce cas, ce sera le seppuku, traditionnel, pittoresque, tu pourras même m'assister. » Une étincelle illumina les yeux de Light à cette pensée. « Voilà. Tu voulais mon choix, je te l'offre. »
« Et je le refuse. Au cas où tu ne l'aurais pas compris, nous t'invitons à te présenter face à la justice, pas à faire ton entrée sur la piste d'un cirque. Si tu veux protester et contester la sentence, n'hésites pas à le faire, tes tout derniers mots rempliront cette office. Mais si tu penses sérieusement que je vais te laisser transformer ton échafaud en podium pour faire ta petite propagande à la gloire de Kira, tu ferais mieux d'y réfléchir à deux fois. »
« Curieuses paroles de la part de celui qui m'a offert une parodie de procès s'achevant par une condamnation in absentia. Je n'ai jamais voulu faire de cette affaire un spectacle de cirque, mais si tu me forces à faire un tour sur la piste, alors ne va pas demander en plus que je prenne cette comédie au sérieux, ou te plaindre si la performance que je t'offrirais au final ne sera certainement pas celle que tu anticipais. »
« La seule performance que nous t'accorderons sera celle du magicien qui se volatilise de la scène, pas celle du clown qui s'y éternise. Si j'étais à ta place, je ne m'inquiéterais pas tellement du message que je laisserais derrière moi, mais plutôt de la manière dont je pourrais éviter de me chier dessus quand on me sanglera à la potence. »
Light serra les dents en même temps que les poings. « Quel tact, décidément. »
« Tu te comportes comme un gamin, et je ne suis pas venu ici pour supporter tes comédies d'enfant gâté. »
« Alors pourquoi est-ce que tu es venu ici, au juste ? » cracha le prisonnier. « Qu'est ce que tu attends de ma part ? Que je m'agenouille ? Des larmes ? Du remords ? »
L demeura impassible, se contentant de hausser les épaules. « Cela ne ferait pas de mal, effectivement. »
« Dégages... »
« Pas avant d'avoir obtenu une réponse claire de ta part. »
« Je m'en contrefous, c'est clair ? Je n'en ai plus rien à foutre. Tu as mené l'enquête jusqu'au bout, tu as démasqué le coupable, à toi de décider. » Light détourna ses yeux de ceux du détective, préférant se focaliser sur le mur de la pièce. « Infliges-moi tout ce que tu veux, ce n'est plus mon problème »
« Menteur. Il est évident que cela te préoccupe un minimum, tu ne prendrais pas la peine d'en débattre avec moi, autrement. » Aucune nuance de critique dans la voix du détective, ses paroles eurent néanmoins l'impact d'une gifle sur son interlocuteur. « Si cela peut t'aider à digérer la chose, j'étais venu pour t'offrir une faveur, certainement pas pour te tourmenter. Je pensais que conserver un semblant de contrôle sur la fin de tes jours t'apporterait un semblant de réconfort »
Light secoua la tête. « Tu n'es pas venu pour me laisser mon mot à dire sur mon sort, mais pour me proposer de devenir le complice de mon propre assassinat. Ne va pas t'amuser à prétendre que tu puisse être un tant soit peu concerné par ce que je peux vouloir ou non, Ryuzaki. Ils prennent simplement leurs précautions, tout comme toi, si quelque chose venait à mal tourner pendant...le tournage de votre film, vous pourrez toujours vous réfugier derrière l'excuse bien commode que vous ne m'avez rien infligé sans mon accord. »
« C'est peut-être le cas, effectivement. Néanmoins, la situation demeure en ta faveur malgré tout. Le monde entier aura les yeux braqués sur ton exécution, en conséquence, ils ne laisseront pas la moindre place au hasard, encore moins à l'incertitude. Quel que soit la méthode que tu choisiras au final, ils feront tout leur possible pour que la procédure se déroule sans accroc. »
« Alors qu'ils décident à ma place dans ce cas, au lieu de me demander de signer gentiment mon propre arrêt de mort. Ce n'est pas... Cela ne devrait pas être ma responsabilité mais la leurs.»
« Non justement, ce n'est plus le cas. Tu es bel et bien le seul responsable des actions qui t'ont mené jusqu'ici, oui, c'est le jugement rendu sur ces mêmes actions qui n'était plus de ton ressort. Il a été rendu, que tu l'apprécie ou non, la sentence sera exécutée. La seule question qui reste en suspens est celle du comment. » L se pencha en avant pour transpercer du regard les yeux du condamné. « A partir du moment où tu auras pris la dernière décision que l'on exige de ta part, on ne te réclamera plus rien. Personne ne te demandera de mettre la mains à la pâte pour les préparatifs de la fête, simplement de répondre au carton d'invitation au lieu de te défiler. »
Une éternité s'écoula avant que Light ne se décide à sortir de son mutisme pour murmurer finalement sa réponse. « Le peloton d'exécution. »
« C'est ton dernier mot ? Tu es certains que tu ne te rétracteras plus par la suite ? »
« Mon tout dernier mot sur la question, oui, néanmoins, ce sera sous réserve d'une seule condition. »A son tour, Light transperça les yeux du détective par son regard. « Je souhaite que la tâche soit confiée à la cellule d'enquête. »
L fronça les sourcils, se rétractant prudemment en arrière pour revenir à sa position initiale. « Sur ce dernier point, je ne peux pas m'engag... »
« Considères ça comme ma toute dernière requête, ou ma toute dernière volonté. Je ne souhaite pas passer mes derniers instants au milieu d'étrangers, et ils ont mérité le droit de voir le dénouement de l'affaire de leur propres yeux. C'est à eux que je veux confier mon sort, personne d'autre. »
Caressant ses lèvres du pouce, le détective prit la peine de soupeser la réponse que Light s'était finalement décidé à lui fournir. La répugnance du condamné à confier la mise à mort à des inconnus, elle était on ne peut plus logique. Quiconque ressentirait suffisamment de rancœur vis à vis de Kira pour se porter volontaire pour procéder à son exécution, il y avait fort à parier qu'il pousserait le zèle jusqu'à manquer sa cible, une erreur qui serait soigneusement calculée, suffisamment loin du but assigné pour prolonger les souffrances du condamné, suffisamment proche pour ne pas l'épargner pour autant.
S'il réclamait qui que ce soit d'autre, le tribunal refuserait d'accéder à sa requête, de peur de baisser le pont levis à un de ses complices. Mais ceux qui ont procédé à son arrestation en premier lieu, on ne peut décemment pas les soupçonner de vouloir le mettre à l'abri de son châtiment. Des hommes avec la formation appropriée en matière de maniement des armes à feu, peu de chance qu'ils manquent la cible qu'on leur a assigné. Et surtout, quel que soient leurs sentiments vis à vis de Kira, ils éprouvent bien trop d'affection vis à vis du commissaire Yagami pour faire souffrir son fils au delà du nécessaire. Si on envisage les choses dans sa perspective, ils forment effectivement le choix idéal.
Ce serait un calvaire pour eux, bien sûr. Cribler de balles le fils aîné du supérieur auquel ils demeuraient dévoués corps et âmes, un adolescent qu'ils avaient non seulement connu de près mais également apprécié il fût un temps, celui à qui ils avaient offert toute leur confiance, il y a peu. Sans le moindre doute, le genre d'expérience qui laisserait des séquelles jusqu'à la fin de leurs jours. Du reste, il était probable que Light l'ait parfaitement compris et que cela explique en partie sa dernière requête à leur égard. Une vengeance aussi cruelle que mesquine, enrobée derrière une dernière démonstration de confiance. D'un autre côté, à le voir enlisé dans sa propre terreur comme ça, on peut se demander s'il a réellement conscience de ce qu'il leur demande...
« La cellule d'investigation... » Possibilité que L médita à voix haute en s'efforçant de déchiffrer le visage de Light tandis qu'il la lui murmurait. « Tu tiens vraiment à ce que l'inspecteur Matsuda pointe son revolver dans ta direction ? »
« Si j'en crois mon père, c'est l'un des meilleurs tireurs qui aient croisé sa route. Avec un peu de chance, il lui donnera raison sur ce point. »
« Et en ce qui concerne ton père, justement.. ? »
« Non. Il formera l'exception. Je... » La respiration de Light avait commencé à prendre un rythme saccadée tandis qu'il pressait son propre poing contre ses lèvres. « Si tu le lui demandais, je pense...je pense qu'il accepterait. Son sens du devoir. Et je pense...j'espère...que je ne lui en voudrais pas. Mais maman lui en voudrait, Sayu lui en voudrait, et par dessus tout, il s'en voudrait. Je ne peux pas exiger ça de sa part, je lui aie fait assez de mal comme ça... »
« Je comprends. » Tout le reste n'était peut-être qu'une comédie pour faire illusion aux yeux des autres, mais son admiration vis à vis de son père, elle était bien réelle. La seule chose pour laquelle je ne l'ai jamais soupçonné de mentir. L humecta ses lèvres avant d'entamer le décompte. « Aizawa, Matsuda, Mogi, cela fait trois personnes. Il t'en faudrait au moins cinq. Même en admettant qu'ils acceptent ta requête, ils ne seraient pas suffisamment nombreux pour te l'accorder... »
« Tu as oublié de compter deux personnes. Watari...et toi. Cela fait cinq tireurs en tout, ce me semble. »
Oh.
L fronça les sourcils. « Je ne peux pas t'accorder ça. »
« Pour quelle raison, dis moi ? Tu va écrire mon nom sur les pages de la death note, quelle différence que tu presses la détente ou non après cela ? »
« Je n'ai jamais affirmé que je serais celui qui écrirais ton nom. »
« Tu n'avais pas besoin de le faire. Si tu avais accordé ta confiance au tribunal au point de leur confier le cahier, ils n'auraient aucun besoin d'exiger la moindre preuve de la réalité de son pouvoir. Je suis peut-être le perdant à la fin de notre petit jeu, cela ne fait pas de moi un idiot pour autant... »
« Et c'est bien dommage si tu veux mon avis. Ta vie aurait sans doute connu un dénouement plus heureux... »
Si L avait anticipé une réplique de la part de son interlocuteur, il en fût pour ses frais. « Je sais. »
Le détective mordilla ses lèvres sans dissimuler le dégoût suscité par son prisonnier. Concernant la condamnation de Light Yagami et plus particulièrement la sentence qui s'abattrait, il n'y avait pas la moindre place pour les doutes ou les hésitations, encore moins la culpabilité. L'idée d'avoir recours à la Death note pour l'exécution, quitte à devoir inscrire lui même le nom du condamné sur les pages de ce qui deviendrait son arrêt de mort ? Là encore, elle ne lui avait posé aucun problème de conscience. Et pourtant, l'idée de transpercer le cœur de qui que ce soit d'une balle, fût-il Kira, c'était beaucoup plus difficile d'y faire face.
Et c'est précisément ce qu'il essaie de me faire comprendre avec sa maudite requête. Refuser de lui accorder, cela revenait à admettre devant lui qu'il y avait une différence significative entre inscrire un nom sur ce carnet et tuer quelqu'un de sa propre main, lui reconnaissant par là même des circonstances atténuantes. S'il se pliait à sa demande, il devrait se résoudre à l'idée de devenir un meurtrier à son tour. Non pas de manière indirecte, en restant à distance de l'atrocité, mais face à face, les yeux dans les yeux de sa victime. Il pourrait toujours rationaliser l'acte après coup, se justifier auprès de sa propre conscience, en dernière instance, les raisons qu'il invoquerait pour le faire ne seraient pas si différentes de celle auquel Kira avait eu recours de son côté. S'il essayait de se mettre à distance de ce meurtre, il se rapprocherait paradoxalement de Light au lieu de s'en éloigner.
Même maintenant, il s'amuse à me manipuler pour me faire rentrer dans son sale petit jeu. Je ne sais pas si je dois me montrer ulcéré ou impressionné...
« Je devrais peut-être faire preuve d'un minimum d'égards. »murmura L d'un ton incisif. « Une bonne partie de la population mondiale souhaiterait ta mort, et une fraction non négligeable préférerait rendre la sentence par ses propres moyens au lieu de s'en remettre à un autre pour la sale besogne. Je m'apprête déjà à leur coiffer la politesse sur ce point, il serait des plus discourtois de le faire pour la seconde fois d'affilée, tu ne crois pas ? »
« Pour la grâce de Dieu, qu'est ce que tu veux de plus ? Tu m'as demandé de choisir et c'est ce que j'ai fais. Ce n'est pas un piège que je cherches à te tendre, c'est simplement une faveur que je te demandes. »
« Et je ne te dois absolument aucune faveur, justement. Au cas où tu l'aurais oublié, tu as essayé de me tuer. »
« Ce que tu es en train de faire en ce moment, de ton côté. Tout ce que j'exige de ta part, c'est de le faire face à face. Je ne pense pas que ce soit trop en demander, non ? » Il le suppliait du regard. « Si tu refuses, papa s'imaginera qu'il est de son devoir de combler la place que tu laisseras vacante... S'il te plaît, Ryuzaki. Si tu me détestes tant que ça, tu sera libre de viser à côté. Mais pour ma famille, juste pour ma famille, presse au moins cette détente... »
La surprise poussa L à écarquiller les yeux. Il est sérieux. Light n'avait pas tort, s'il lui prenait l'envie de réclamer des volontaires pour se positionner devant le peloton d'exécution de Kira, Soichiro Yagami serait le premier à se présenter à l'appel, pour s'assurer que personne ne viendrait se substituer à la justice en s'amusant à prolonger l'agonie de son fils au cours de l'exécution. Il ne nous a pas choisi parce qu'il nous fait confiance, il nous a choisi parce que son père nous fera confiance.
Au moment précis où L avait enterré tout ses espoirs vis à vis de l'adolescent, tout espoir qu'il puisse s'avérer valoir mieux qu'un petit narcissique dont l'arrogance était proportionnel à la lâcheté, voilà qu'un fils le surprenait en manifestant un semblant de sollicitude vis à vis d'une autre personne que la sienne.
Je le ferais.
L presserait cette détente, il tirerait ce coup de feu, certainement pas pour Kira, même pas pour Soichiro Yagami, mais pour l'investigateur honnête et déterminé qu'il avait côtoyé jadis, déterminé à mettre Kira hors d'état de nuire, quand bien même il devrait sacrifier sa propre vie pour parvenir à ce but. S'il ne m'avait pas aiguillé en direction du groupe Yotsuba, ou si j'avais maintenu ce maudit cahier hors de sa portée, comme j'aurais du le faire, il serait resté le même adolescent, c'est à lui que je parlerais aujourd'hui à sa place... Cela n'excusait certainement pas les crimes de Light, pas plus que cela ne faisait de son exécution une injustice, mais cela signifiait néanmoins quelque chose. Si un simple fragment de cette version de Light continuait d'exister à travers celui qu'il avait fini par devenir, il méritait au moins le respect.
« Je ne te raterais pas. » murmura doucement L. « ...au moins, je m'efforcerais de ne pas te rater. »
Light lui adressa un faible sourire. « C'est tout ce que je te demandes. »
La chaise grinça sur le bitume tandis que L se relevait, faisant remuer ses épaules pour dissiper la tension qui tourmentait son dos. Après avoir acquiescé en direction du condamné en guise d'au revoir, il se retourna avant de se diriger vers le seuil de la porte d'un pas traînant, dans la position recourbée qui lui était coutumière, s'efforçant de prétendre qu'il n'avait pas entendu le son qui avait résonné derrière lui. Celui émis par Light tandis qu'ils 'effondrait sur la table pour enfouir sa tête entre ses bras.