Un pas après l'autre - saison 7 - épisode 2 (Juste une présence)
Adèle était enfin complète. Presque complète. Elle avait retrouvé sa sœur et espérait que les séances avec Elikia Massamba permettraient de la désintoxiquer d'Argos. Puis elle avait Ulysse maintenant. Deux personnes qu'elle aimait plus que tout et qu'elle devait protéger envers et contre tout. Contre tous. Mais surtout Argos… ce pervers narcissique qui avait détruit leur vie, et qu'il fallait arrêter le plus vite possible.
Elle avait autre chose aussi. Des amis. Chloé, puis Rocher. Elle savait qu'elle pouvait leur faire confiance. Leur présence la rassurait… surtout celle du commandant. Depuis qu'elle le connaissait, et même si elle avait essayé de ne pas s'attacher, elle se sentait irrémédiablement attirée par lui. Mais évidemment elle n'imaginait rien d'autre à ce moment précis que de sauver sa sœur.
Malgré tout, elle se sentait mieux à l'idée qu'il ne s'éloigne pas trop. Alors quand la nuit tomba, qu'Ulysse et Camille s'étaient endormis, et que Julien Derval était monté se reposer dans sa chambre, elle sortit le voir devant la maison. La fameuse maison qui leur servait de planque. Un lieu tenu secret qu'Argos ne pourrait jamais retrouver. En théorie.
Thomas était au téléphone quand elle referma la porte d'entrée derrière elle. Au téléphone avec son fils Lucas. Elle se sentit bête de ne même pas avoir demandé des nouvelles de l'adolescent.
"Ouais. Enfin ne te couche pas trop tard quand même. D'accord. Allez je t'embrasse bonne nuit", dit le commandant à son fils avant de raccrocher et de se tourner vers Adèle.
"Vous n'êtes pas encore parti?" demanda-t-elle avec une idée derrière la tête.
"Bah non", répondit simplement Thomas, qui sentait Adèle très fragile, au bord de la rupture. Il était content d'avoir retrouvé Camille, de lui avoir rendu une partie de sa vie, et de la personne qu'elle était désormais. Il n'avait plus vu les manières de sale gosse qui l'avait tant rebuté par le passé.
"Merci d'être là". "De rien". Il sentait que quelque chose n'allait pas. Elle était complètement effrayée. Terrorisée même. "Ça vous rassure si je reste cette nuit?" "Oui", parvint-elle à articuler. "Eh bien je vais rester".
Thomas entreprit de rentrer dans la maison mais Adèle ne bougea pas. Il entrouvrit la porte et se retourna vers elle. "Vous venez?" Pas de réponse. Pas de regard non plus. "Adèle venait il fait froid". Toujours rien. Alors il tendit la main et le saisit doucement le poignet. Là enfin il parvint à capter son attention.
"Vous devriez vous reposer un peu Adèle. Demain va encore être une journée… compliquée". Adèle ôta son bonnet et se passa les mains sur le visage. "Je ne peux pas dormir… A chaque fois que je ferme les yeux… Je vois Argos. Il vient me reprendre Ulysse et Camille". "Vous savez que je ne le laisserai pas faire ça n'est-ce pas?" "Je… je sais mais Argos a des ressources et…" Il la stoppa net. "Nous aussi on a des ressources. Vous n'êtes plus toute seule Adèle. C'est fini tout ça. Je suis là… je veux dire on est là pour vous protéger". Il lui étreignit l'épaule et ça la fit sourire. Une première petite victoire.
Puis il ajouta: "Vous savez ce qu'on a d'autre?" "Je… non". "Du café! Puisque vous ne pouvez pas dormir, et que je dois rester éveillé… Autant qu'on ingurgite un maximum de caféine pour nous aider à garder les yeux ouverts. Non?"
Elle sourit encore. Une deuxième petite victoire. Le chemin vers la guérison passait par là. Par les petites victoires. Un pas après l'autre.
Ils entrèrent dans la maison. "Allez vous asseoir dans le salon. Je vous apporte une tasse", lança Rocher à Adèle. Il la rejoignit quelques minutes après avec un plateau, deux tasses et des petits sablés.
"J'ai trouvé des petits gâteaux. C'est une planque alors je ne sais pas depuis combien de temps ils sont là. Faudra être indulgente". Troisième sourire. Elle attrapa la tasse de café qu'il lui tendit et se pelotonna dans un plaid sur le canapé. Le commandant vint s'asseoir à côté d'elle. Elle trempa les lèvres dans le café et Thomas engagea la conversation.
"Vous avez imaginé la suite?" Elle releva brusquement la tête vers lui. "De… de quelle suite vous parlez?" "De votre vie avec Camille, Ulysse… Votre vie professionnelle aussi". Elle secoua la tête, désabusée. "Je ne projette pas. Tant qu'Argos est dehors… C'est impossible".
"Mais vous êtes criminologue Adèle. Vous savez comme moi que les pervers narcissiques comme lui peuvent s'évanouir dans la nature pendant des années. Vous vivriez en fuite tout le temps?"
"Parce que vivre avec une épée de Damoclès sur la tête c'est mieux? Sans savoir quand il viendra tout me prendre? Pourquoi construire quelque chose si dans six mois, un an, deux ans ou plus, il vient tout détruire?" Elle avait dit tout ça bien trop sèchement. Elle posa sa tasse de café sur la table basse et s'excusa. "Excusez-moi. Je… je suis reconnaissante de tout ce que vous faites pour moi".
"Vous en faites pas", lui répondit-elle en posant également sa tasse sur la table. Puis il fit quelque chose qu'il n'aurait jamais imaginé faire au début qu'ils se connaissaient. Il lui prit la main et la garda entre les siennes quelques secondes. Comme pour la réchauffer.
"Je ne sais pas si on attrapera Argos… Mais je sais qu'il ne vous empêchera plus de vivre comme vous le souhaitez. Je serai là pour m'en assurer. Tous les jours".
"Tous les jours?". "On sait jamais ce qui peut arriver hein? On n'a jamais trop de deux criminologues dans une brigade". "Je… attendez c'est une proposition? Une proposition de travail?" "Pourquoi pas… Vous me faites confiance?" Elle répondit "oui", sans hésiter. Il allait l'aider à se construire une petite vie bien à elle. Un pas après l'autre.
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