C'était l'été de l'an 1834, le Caire. Haydée avait 16 ans, et habitait avec Monte-Cristo dans une jolie maison qu'il avait prise en location. La maison avait une piscine dans un jardin paradisiaque. Ils se baignaient souvent dans cette piscine, mais jamais ensemble ; lorsque l'un était dedans, l'autre prenait du soleil sous les palmiers. Mais en général ils se baignaient seuls, accompagnés juste par leurs serviteurs.

Un jour Monte-Cristo entra dans le jardin fatigué et en sueur. Il enleva sa chemise et se mouilla les épaules et la poitrine d'une fontaine. Il faisait très chaud. Haydée était dans le jardin aussi, papotant avec Myrto et ses servantes. Elles riaient. Le Comte les a entendues. Haydée se rendit compte de sa présence et arrêta de parler.

-Maîtresse, qu'y a-t-il ? demandèrent ses servantes.

- Allez-vous-en ! Je veux être seule.

Ses servantes obéirent les commandes de leur maîtresse et se retirèrent.

Monte-Cristo apparut, rhabillé de sa chemise, mais les manches montées et le col ouvert.

-Maître, tu es arrivé !

-Oui, mon ange. Tu ne devais pas renvoyer tes servantes. Tu as besoin de compagnie.

- Pourquoi en aurais-je lorsque j'ai toi! répondit-elle.

-Fille ! Mon seul amour !

Haydée rougit comme un coquelicot.

Le lendemain Haydée marchait dans le jardin, cherchant son médaillon, dans lequel il y avait son portrait et le portrait du Comte qu'elle avait fait. Le portrait du Comte était assez réaliste, c'est pourquoi elle avait peur que quelqu'un ne le retrouve et le lui montre. Il n'y avait personne dans le jardin. Elle accourut au banc où elle pensait le retrouver. Le médaillon était là, effectivement.

«Ouais, il encore là, et pas ouvert.»

Mais le même instant elle entendit un bruit indistinct. Son cœur se mit à battre très fort. Elle se tourna et vit Ali, un esclave Nubien qui fur acheté par le Comte en Algérie. Si Ali était là, alors Monte-Cristo était là aussi, c'est sur ! Elle entendit aussi des bruits de vagues. Elle s'approcha un peu plus et se cacha derrière un palmier. Elle allait voir son maître nu ! Sans chemise ! Il doit être encore plus beau qu'il y a quelques années, pensait-elle.

Le Comte nageait le papillon. Ses yeux étaient fermés, ses cheveux noirs mouillés et brillants de l'eau. Ses bras étaient musclés, mi-bronzés mi-blancs. Après chaque plongée, il soulevait sa tête en bousculant ses beaux cheveux, ce qui fit soupirer Haydée. Elle laissa tomber son médaillon par terre. Monte-Cristo arrêta de nager et se mit à écouter attentivement. Le bruit ne réapparut. Il se décida de continuer son bain, ce que Haydée profita pour regagner ses appartements, oubliant complètement son médaillon.

-Mon Dieu, s'il m'avait vue ! pensait-elle en se jetant sur son lit et rêvant.

Entretemps Monte-Cristo s'était habillé et prenait le chemin de ses appartements lorsqu' il sentit quelque chose craquer sous ses pieds. Il vit le médaillon d'Haydée, le prit et l'ouvrit. En voyant son portrait il fut surprit, et à la vue de celui de sa fille, il sourit. Il s'en alla vers Haydée.

-Seigneur, la maîtresse dort, lui dirent ses servantes à l'entrée.

-D'accord. Allez-vous-en.

Il entra dans sa chambre, où il retrouva sa jeune esclave dormir sur son lit, entourée de coussins de soie.

-Elle est si mignonne. Dors bien, mon ange.

Il voulut poser le médaillon sur sa table de chevet, mais il changea de plan et ouvrit la porte pour sortir. A ce moment-là Haydée ouvrit ses yeux et se leva.

-Oh, mon seigneur, ne t'en va pas !

Elle l'invita de s'asseoir à ses côtés.

-Je ne voulais que de te rendre ceci, dit-il en lui mettant dans la main son médaillon.

-Oh !fit-elle toute confuse. Je, je… voulais te demander un service, mon seigneur.

-Oui ?dit-il intrigué.

-Je voulais aller à la plage demain, avec mes servantes, bien sûr. Voir la mer, me baigner.

-Bien sûr, mon enfant. Je vais t'emmener personnellement. On y ira ensemble.

-Oh, merci beaucoup, mon seigneur !dit-elle en lui baisant la main.