Notes de l'auteur :
Bonjour à tous !
On se retrouve aujourd'hui pour le dernier chapitre, l'épilogue de cette longue histoire, qui m'aura pris énormément de temps mais je suis tellement contente de la voir se concrétiser, même si c'est toujours un peu affligeant de terminer quelque chose qu'on a mis tant de temps à réaliser. Malgré toutes les difficultés et les pannes d'inspiration, l'écriture est vraiment un plaisir et j'ai vraiment aimé passer ce moment avec vous !
Merci pour vos messages sur le dernier chapitre, j'espère que cette touche finale vous plaira !
Bonne lecture :)
Chapitre 20
Epilogue
Reposant sa jambe contre le tapis, les poids cognant sur le sol, lourds et métalliques, il se releva sur ses coudes, le sourire étiré jusqu'aux oreilles. Il réajusta le bas de son jogging, réalisant que de la sueur maculait le bas de son dos. Il chercha Leo du regard, sachant que ce dernier l'avait quitté quelques minutes plus tôt mais il n'eut pas à le faire longtemps, celui-ci, comme à son habitude, était toujours là pour garder un œil sur lui. L'expression de pure fierté que Stiles put lire sur sa figure lui donna presque envie de rougir tant elle était irradiante.
« Tu as vu ? Ça a marché, ajouta-t-il quand même, comme s'il ne venait pas tout juste d'assister à toute la scène.
- C'était impressionnant », il confirma, s'approchant jusqu'à se mettre à genoux, examinant sa cuisse avec précaution, Stiles le laissant faire sans hésitation. « Et il n'y aucune boursouflure, ni de gonflement. Tu crois que tu pourrais recommencer avec un peu plus de poids ?
- Je peux essayer. »
L'exercice s'avéra éreintant mais étrangement, cette fatigue s'accompagna d'un sentiment de satisfaction profonde, qui le poussait à accentuer ses efforts pour en connaître à nouveau le goût. Presque entièrement allongé, il tenta pour la cinquième fois de soulever la jambe, sa prothèse bien fixée et cette fois, il n'émit qu'une vague grimace.
« Tu as réussi », s'exclama Leo, venant tout de suite récupérer les pièces en acier pour lui permettre de retrouver son souffle.
Il resta encore quelques secondes par terre, essoufflé mais heureux d'avoir accompli quelque chose. La douche lui fit du bien, l'eau chaude relaxant les muscles qui l'avait titillé et le rendant moins rigide. Il s'habilla avec les vêtements de rechange qu'il avait apporté avec lui en venant, passant par le bureau de son kiné avant de partir. Il n'était pas bien grand mais Stiles ne savait pourquoi, quelque chose dans la façon dont il était meublé, dont les cadres photo d'enfants souriant face à l'objectif décoraient la pièce, conféraient une atmosphère chaleureuse, un endroit où il aurait été possible de venir trouver refuge.
« J'espère que tu es d'attaque car je compte doubler les temps d'activités la semaine prochaine. Il faut garder le rythme si tu veux conserver cette ligne directrice. Mais je ne me fais pas de soucis, tu as vraiment progressé, Stiles. »
Et il le dit de manière si tendre que Stiles pensa que les choses auraient été bien différentes si l'homme n'avait pas été à ses côtés pour le pousser constamment. Il l'avait apprécié depuis le début mais se souvenait aussi d'avoir eu de très mauvais jours et la patience de Leo avait été d'une grande utilité pour canaliser la colère qui bouillonnait en lui comme une sorte d'animal en cage, prisonnier et irrité.
« Je sais que je peux compter sur toi pour ne pas me ménager. Et puis, je me disais que ce serait peut-être l'occasion d'essayer cette nouvelle prothèse finalement », il souffla, les yeux rivés sur ses baskets délassées. « Tu sais, juste au cas où. »
Le silence qui l'entoura augmenta son malaise et il se dit un cours instant que c'était trop tard, que Leo avait changé d'avis et avait décidé d'abandonner le projet.
« Juste au cas où », il répéta, hochant la tête, et Stiles sut qu'il avait compris ce que ça signifiait. Et qu'il était ravi de pouvoir l'accompagner dans cette démarche.
Dans cette dernière tirade, il y avait des mots cachés. Des excuses, d'avoir été si borné et difficile et une réponse, positive, celle qui disait que tout était pardonné. Ils parlèrent encore un peu, Stiles découvrant comment Derek et lui avaient engagé les aménagements pour le centre et il en éprouva un plaisir particulier. Ils avaient permis à Scott de participer à l'avènement d'une nouvelle entreprise et ça n'aurait pu être meilleur hommage.
Le saluant une dernière fois, il s'engouffra dans le couloir, celui qu'il avait tant de fois parcouru avec Kit lors de leurs réunions et il se promit de continuer à s'y rendre, même quand il n'en ressentirait pas particulièrement le besoin. Car la guérison ne passait pas seulement par la réparation du corps. Et peut-être qu'un soir, alors qu'il irait se servir une tasse de mauvais café, il rencontrerait le regard perdu et dépossédé d'un jeune garçon, blessé par la vie, dont les pores suinteraient d'une rage peu contrôlable, un garçon qui lui ressemblerait et qu'il pourrait à son tour tenter d'aider.
En sortant, il fut étonné de déceler un visage familier mais auquel il ne s'attendait pas, replaçant la lanière de son sac sur son épaule, alors qu'il partait à sa rencontre.
« Eh, désolé si tu espérais te délecter de ma merveilleuse compagnie mais ma mère vient me chercher, lança-t-il, contemplant Derek adossé contre sa voiture, sa tenue entièrement noire le fit sourire, sachant à quel point le jeune homme était fan des couleurs écarlates.
- Je sais, je lui ai dit que je venais te récupérer. »
Cette fois, il ne dit rien mais ses sourcils qui se levèrent presque comiquement, parlèrent à sa place. Derek roula des yeux, ouvrant la portière pour l'inviter à entrer et Stiles ne cacha pas son enthousiasme, claquant une bise bruyante et joueuse sur sa joue avant de s'asseoir à sa place.
« Où est-ce qu'on va ?
- Tu verras.
- Quoi, encore une surprise ? Est-ce que je devrais m'attendre à étouffer entre des larmes de joie et des rires hystériques ?
- Je crains ne plus avoir ce genre de présents à t'offrir et tu risques d'être fortement déçu, il confia, enclenchant son clignotant pour indiquer qu'il quittait le centre-ville.
- Si tu promets de ne pas te moquer de mon manque flagrant d'énergie, je suis prêt à apprécier tout ce que tu auras préparé. »
Et quelle ne fut pas sa surprise quand il découvrit que Derek avait bel et bien organisé leur escapade, s'arrêtant près de ce qui semblait être un préau aménagé, près d'un parc, déchargeant du coffre un sac en plastique, contenant des sandwiches, deux bouteilles d'eau et une tarte, dont il avoua qu'elle avait été préparée par sa mère. Il le laissa disposer leur attirail, examinant ses gestes sans faire mine de s'asseoir, lui aussi.
« Attends, c'est un rendez-vous ? Je veux dire, tout ça », il pointa leur déjeuner du doigt, vif, « c'est toi qui m'invite à un rendez-vous ? »
Le visage de Derek resta neutre lorsqu'il lui répondit mais Stiles n'était pas dupe. Il imaginait avec précision les pensées qui devaient actuellement traverser son esprit, lui qui abhorrait se confier sur ce type d'actions, mais il ne comptait pas lui faciliter la tâche. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle il avait été si chamboulé face à la réalisation que Derek pouvait être l'auteur d'attention qu'il aurait jugé de romantique.
« Oui. »
Le ventre rempli et l'esprit ensommeillé, il s'étala sur lui, posant sa tête contre le haut du torse de l'autre homme, le visage tourné vers le ciel. De là où il était, il pouvait distinguer les bras nus des arbres, dessinant des lignes crochues au-dessus de leurs têtes.
« Est-ce qu'on n'est pas un peu cinglés de sortir, par ce temps ? Demanda Stiles, dont la tête se mouvait au gré des respirations de son compagnon.
- Il ne fait même pas si froid, argua l'autre, un peu trop présomptueux.
- J'oubliais, Monsieur la fournaise ne craint pas l'hiver.
- Pas vraiment, juste que je ne me plains pas à chaque fois que je mets le nez dehors », objecta-t-il, taquin et Stiles n'eut pas besoin de le regarder pour savoir qu'un petit sourire en coin était venu s'installer sur ses lèvres.
Il s'empara soudainement d'une de ses mains et Stiles se demanda si leur état glacial ne le dérangeait pas. Il ne fit aucun geste pourtant, si ce n'était resserré la prise qu'il avait autour de sa paume.
« J'aimerais pouvoir quitter Beacon Hills », Stiles avoua presque inaudible, avant de se raviser, constatant que sa phrase pouvait refléter une fausse vérité. « Pas pour toujours, juste quelque temps, pour pouvoir voyager, voir autre chose que ce que je connais, découvrir d'autres endroits et ne pas rester coincé ici par peur de ma jambe. Je ne veux plus qu'elle soit mon ennemie.
- On le fera », intervint Derek, le ton si sûr que Stiles se tourna vers lui, l'oreille presque collée à son cœur. « On conduira jusqu'à la frontière de l'état et on pourra choisir où aller à partir de là. Je ne te laisserais pas nous dicter la destination, évidemment, car te connaissant, tu nous ferais accoster dans une ville perdue au beau milieu de nulle part, juste pour assister à des futilités estivales, du genre, un festival de la tomate. »
Son rire le secoua si brusquement qu'il s'asphyxia à moitié, se rendant compte que ce n'était vraiment pas si improbable et Derek le regarda à son tour, un sourire si franc que Stiles aurait juré avoir distingué une jolie paire de fossettes se creuser sous sa barbe épaisse. Dans ces moments-là, il paraissait tellement jeune, une pointe de vulnérabilité irradiant autour de lui, donnant envie à Stiles de lui raconter tout ce qui lui permettrait d'être rassuré.
« Tu resterais coincer dans une voiture avec moi, pendant des heures entières ? Ne put-il s'empêcher de plaisanter.
- Je crois que mes intentions sont désormais explicites. Mais je pourrais toujours te bâillonner si l'envie m'en prends.
- Quel charmant voyage en perspective, tu sais décidément comment user d'arguments imparables.
- J'ai juste envie que tu sois avec moi, alors oui, j'userais de stratagèmes s'il le faut pour convaincre tes parents. »
Il l'avait dit de manière si naturelle que ça le prit un peu au dépourvu. Derek voulait être avec lui. Et il le voulait aussi. Seulement, il s'était convaincu tellement de temps que personne ne pourrait sciemment vouloir de ce qu'il était devenu qu'au lieu de le détendre, cette phrase le crispa, réalisant que le jeune homme s'attendait peut-être à ce qu'il change de comportement et agisse vraiment comme un... petit-ami ? Mais Stiles se savait maladroit et alors que son cerveau bouillait sur l'attitude à adopter, il vit avec frustration le visage de Derek se transformer.
« Qu'est-ce qu'il... Tu rougis ?
- Non. »
Mais l'expression carnassière qu'il développa fit rapidement monter le sang vers le haut de son corps, accentuant déjà l'état cramoisi de ses joues. Luttant pour se remettre dans une position assise, il échoua lamentablement face à l'étau dans lequel Derek le serrait. Grognant, il choisit de bouder.
« Je ne veux plus rester ici. Tu te moques de moi.
- Je ne me moque pas.
- Je ne suis pas... Les relations ne m'ont jamais vraiment réussies », il expliqua, ses mains gigotant en l'air, bien qu'il tenta de les maîtriser. « Je suis trop bruyant, trop exténuant et tu t'es plains suffisamment de fois sur l'impressionnant débit de paroles dont je suis doté. Je ne suis absolument pas séduisant, je ne sais pas flirter, et je vais probablement agir le plus souvent comme si tu étais un simple ami. Je me retrouve très souvent dans des situations grotesques dont je suis la majeure partie du temps responsable et je me rends compte que je ne suis pas censé te dire toutes ces choses. Ce que j'essaye de dire, c'est que tu n'as pas vraiment été chanceux dans la loterie Beacon Hills et... tu te moques encore.
- Non, je me rends compte que tu es quelqu'un de vraiment innocent. Je suppose que c'est ce qui fait en partie ton charme. »
Stiles fronça les sourcils, ne comprenant pas ce que Derek pouvait bien trouver d'attirant dans tout ce qu'il venait malgré lui de révéler mais il fut une nouvelle fois happer par son voisin.
« Il faut que tu arrêtes de me regarder comme ça. »
Ce n'était pas un mauvais regard, au contraire, il avait l'impression d'être quelque chose d'important à ses yeux et cette façon qu'il avait de le contempler était différente de la manière révérencielle dont ses propres parents pouvaient le considérer parfois, comme s'il avait accompli quelque chose de fantastique. La réaction que cela déclenchait en lui était aussi étrangère, comme si l'intérieur de son corps s'était mis à danser la java à mille à l'heure.
C'était devenu facile, se pencher en avant pour l'embrasser. Sentir ses mains, grandes et chaudes, sur lui. Détecter cet air suffisant lorsqu'il se dégagea et qu'il commençait doucement à maudire. Plaquant ses deux paumes sur ses joues brûlantes de manière soudaine, il maugréa, cherchant à se dérober sous les rires de l'autre homme.
« Tu m'énerves. Où est passé le Derek grognon et maussade et qui est donc ce gars sûr de lui et goguenard, hein ?
- Oh, il doit traîner quelque part dans les parages. »
Le ranch n'avait pas eu d'effets tangibles uniquement sur lui, en fin de compte. Ils avaient tous changé. Et Derek, peut-être plus que tout le monde. Il aimait se dire qu'il y était un petit peu pour quelque chose, qu'il avait réussi à ouvrir une porte minuscule chez lui, qui lui permettait aujourd'hui d'être moins revêche.
« Merci d'avoir été patient avec moi, Stiles confia, conscient que peu de gens auraient été capables de le supporter aussi longtemps. Mais, au fond, il le remerciait surtout d'avoir continué ses efforts, de ne pas avoir abandonné, de s'être battu pour lui.
- Je crois que ça en valait la peine, il répondit, imperturbable mais Stiles détecta la lueur amusée qui brillait au fond de ses pupilles.
- Tu crois, seulement ? Tu peux le dire si tu veux qu'on redevienne de simples connaissances de voisinage, ça m'est totalement égal. »
Ça n'était pas vrai, évidemment. Mais, ils pouvaient être deux à jouer. Derek ne le laissa pas s'échapper, l'emprisonnant plus férocement contre son torse et il se laissa faire, cachant sa figure du froid, enveloppé par son parfum et sa chaleur.
« Tu es un très mauvais menteur », souffla Derek au creux de son oreille et il sourit malgré lui, de toutes ses dents.
- Ne te méprends pas, si je restes avec une personne aussi exécrable que toi, c'est simplement parce que j'ai peur de finir congeler en me levant d'ici.
- Evidemment. »
C'était incroyable à quel point Derek avait conscience de son attachement à son égard. Mais il s'en fichait, parce qu'il savait que le brun tenait à lui. C'était le plus important.
o
« Non.
- Sérieusement, Stiles ? Ne me fais pas ça, mec, allez quoi, ça va être marrant.
- Non. »
Éteignant le four qu'il avait préchauffé pour garder les pizzas que Boyd et Derek avait apporté au chaud, il empila des verres entre ses bras et son corps, priant pour ne pas les faire tomber, alors que Clive le suivait piteusement, l'air malade.
« Je comprends pas ce qui t'ennuies au juste, on aura à manger et à boire gratuitement et on pourra danser, inviter des jolies filles – enfin, pas vraiment dans ton cas, mais c'est de ta faute si tu as décidé de devenir exclusif, quitte à rejeter froidement ma demande en mariage – et faire les guignols tous ensemble. Ça va être génial.
- Très bien, alors je vais te la faire rapide : primo, je ne sais pas si tu as remarqué mais ça fait un moment que j'ai quitté le lycée. Secundo, rien ne nous empêche de faire la fête ici, si c'est vraiment ce que tu veux. Tertio... Je n'aime pas les fêtes de ce genre.
- Mais c'est le bal de l'hiver, Stiles. Et puis, ce n'est pas vraiment le lycée qui l'organise mais plutôt la municipalité, pleins de lycéens vont ramener leurs petits copains et amis extérieurs pour passer la soirée », indiqua-t-il, espérant le faire changer d'avis, quand sa voix se fit douteuse et ses yeux se plissèrent. « A moins que tu ne nous considères pas assez proches.
- Je m'apprête à recevoir des adolescents affamés sur le canapé que mon père considère comme plus coûteux financièrement que l'entièreté de mon existence et que je devrais par conséquent, faire en sorte qu'il s'échappe indemne de ce dîner. Ce n'est pas une preuve suffisante ?
- D'accord, ton père aime son canapé plus que toi, c'est vraiment triste. En attendant, une fête en moins chez lui, c'est moins de risques de faire des dégâts, pas vrai ?
- C'est toujours non. »
Peut-être qu'il avait tort de s'entêter mais l'idée de se retrouver à ce bal, entouré de ceux qu'il avait laissé derrière lui, le laissait perplexe, son diplôme qu'il avait passé à domicile, bien au chaud dans son cadre, en était le témoin. Revenir au lycée, même le temps d'une soirée, lui semblait être un exploit qu'il ne se sentait pas encore totalement prêt à affronter.
« Boyd, je t'en prie, fait quelque chose. Tu le connais depuis plus longtemps que moi, tu n'aurais pas une vieille photo compromettante ou un souvenir suffisamment humiliant pour le convaincre de venir ?
- Évidemment que j'en ai mais je ne les utiliserai pas pour te permettre de lui faire du chantage, gamin. Qu'est-ce qu'on vous apprend à l'école ?
- D'accord, j'ai compris, c'est un complot, vous voulez me voir seul et malheureux pour le reste de mes jours parce que vous êtes sans cœur et absolument pas compassionnelle. J'ai saisi, je vous laisse tranquille et je vais aller m'asseoir sur ce tabouret, en bout de table, pour ne plus vous ennuyer avec mes problèmes, manger ma pizza sans doute refroidie par tous vos sentiments blasés. »
Stiles croisa alors le regard de Boyd et grimaça car le garçon était foutrement doué. Il savait qu'il n'aurait rien obtenu en continuant à le harceler mais en usant de la corde sensible – et de son incroyable don pour la comédie dramatique – il était certain de pouvoir arriver à ses fins. Ce qui l'agaça prodigieusement, ce fut de voir son sourire satisfait lorsqu'il se tourna vers lui, soupirant largement pour montrer sa défaite et se préparant à lâcher prise.
« Parfait, je serai là, sale môme. Content ? »
Clive se contenta de mordre dans sa part comme s'il s'agissait du met le plus exquis qu'il n'ait jamais mangé. Stiles s'installa à côté de Derek, sans cesser de le fusiller du regard. Ils se mirent ainsi tous d'accord pour s'y rendre, Boyd accompagné d'Erica et Jackson se renseignerait pour savoir si Lydia serait également disponible. De son côté, l'appréhension commença à le gagner, bien qu'il tenta de ne pas le laisser paraître. Ils jouèrent aux cartes le reste de la soirée et engloutirent des pâtisseries qu'il avait spécialement acheté l'après-midi même.
Il proposa aux plus valeureux d'entre eux s'ils désiraient un café, l'interdisant formellement à Clive et Gale sous leurs exclamations indignées et s'en alla dans la cuisine, se préparant pour lui-même, un thé à la menthe. La chaleur de la tasse fumante fit du bien à ses mains qu'il posa sur la surface en céramique. L'inscription disait « Meilleure maman », Scott et lui en avaient offert chacun une à leurs mères respectives et il se demanda un court instant si Melissa utilisait toujours la sienne. Il ne prit pas garde à la silhouette qui s'était avancée jusqu'à lui, sursautant lorsqu'il s'aperçut de la présence de Derek dans la pièce.
« Merde, tu m'as fait peur. »
Il était accoudé au frigo, et son expression paraissait étrange, au point qu'elle fit Stiles s'arrêter sur place. Ses sourcils étaient froncés, les bras croisés et il n'était pas difficile pour lui de comprendre que quelque chose n'allait pas.
« Erica vient de confirmer à Boyd qu'elle viendrait avec lui à la soirée, l'informa-t-il d'une voix blanche et Stiles ne saisit pas ce qu'il y avait de si surprenant.
- Elle doit être enchantée, tu veux dire. Ça lui donne une nouvelle occasion d'aller s'acheter une tenue faite sur mesure.
- Je n'étais pas certain que tu acceptes de t'y rendre.
- Bah, Clive se serait plains jusqu'à la fin des temps alors... C'est un gosse, il veut juste s'amuser. Je vais probablement m'ennuyer à mourir à jouer la cinquième roue du carrosse mais ce n'est pas comme si je perdrais un membre en lui faisant plaisir », dit-il avant de se rendre compte de l'ironie de sa phrase.
Se concentrant sur l'attitude inhabituel de son vis-à-vis, il hésita, pas sûr de savoir où toute cette conversation les menait. Il songea brièvement à une raison qui aurait pu expliquer son soudain changement de comportement mais cela lui sembla si invraisemblable qu'il refusa d'abord de se lancer. Mais la brusque gaucherie du plus âgé le fit douter face à son incertitude. Ce fut alors avec une incroyable maladresse qu'il requérit, se sentant ridicule.
« Tu voudrais m'accompagner ? »
Le visage de Derek se décomposa si vite qu'il n'eut pas le temps d'en demander davantage avant que celui-ci ne se redresse et que son masque d'impassibilité ne refasse surface.
« Oublie ça.
- Quoi, non, attends. »
Il s'apprêtait à sortir mais Stiles l'attrapa par le bras, déterminé à ne pas le laisser disparaître aussi facilement, sans qu'ils n'aient pu discuter de ce qui s'avérait être un très gros malentendu.
« Tu voudrais vraiment... Je pensais que tu n'accepterais jamais de venir à ce genre de fête avec moi. Mais, je serais ravi », ajouta-t-il rapidement, manquant d'avaler sa salive de travers, « ravi que tu m'accompagnes. Je veux dire, j'étudie cette soirée d'une manière totalement différente maintenant que je sais que tu y seras. C'est juste que ça me paraissait tellement impensable...
- Que je veuille me rendre avec la personne avec qui je sors à une fête ? »
- Dit comme ça, ça semble tout de suite plus logique, se renfrogna-t-il aussitôt, constatant qu'il était vraiment plus dur de savoir ce que l'autre avait dans la tête que ce qu'il avait imaginé.
- Tu viendrais avec moi, alors ? S'intéressa-t-il, ne parvenant pas à retirer la pointe d'inquiétude qui perçait en fin de phrase, comme si une partie de lui s'attendait à ce que le jeune homme le rejette.
- Si c'est ce que tu veux, alors oui », répondit l'autre simplement et Stiles s'empressa de hocher la tête pour prouver son assentiment.
Il prit du temps à choisir sa tenue, ce jour-là, n'étant pas vraiment féru des smokings et de toutes ces autres fringues qu'il trouvait trop guindé à son goût. Mais aujourd'hui, il avait envie de plaire, de voir dans le regard de son compagnon qu'il n'était pas juste le gamin chétif qu'il avait rencontré il y avait bientôt un an. Il avait alors prit la décision d'acheter un vrai costume avec l'aide de son père, ce dernier étant bien trop heureux de pouvoir se mêler de ses affaires pour émettre un éventuel refus. Il obligea Stiles à en essayer plusieurs, discutant à de multiples reprises avec le tailleur pour avoir la coupe parfaite. Il n'avait pas voulu avoir recours à un professionnel au départ mais son père n'avait rien voulu savoir et au fond, il savait ce que cela représentait pour lui d'être en mesure de participer à ce qu'il n'aurait jamais cru possible, il y avait encore quelques mois alors il ne dit rien, joua les parfaits mannequins en se changeant autant de fois qu'il fut nécessaire.
Sa mère de son côté, ne put s'empêcher de le bombarder de photos, le flash l'aveuglant à moitié si bien qu'il se dit qu'elle ne trouverait probablement aucune représentation potable de lui. Ils étaient supposés partir de la maison dans un petit peu plus de vingt minutes mais il faisait déjà les cent pas, angoissé alors qu'il n'avait pas véritablement de raison de l'être. C'était un peu bête mais il s'agissait de sa première sortie officielle avec Derek, en tant que petit ami, où ils seraient en public et quelque chose dans cette vérité l'effrayait un petit peu.
Derek arriva en avance, évidemment impeccable dans sa veste sombre mais Stiles remarqua presque instantanément les changements qui s'étaient opérés. Il remarqua qu'il avait fait attention à coiffer ses cheveux, ces derniers légèrement plaqués et lui donnant une allure d'homme public. Ses mains gigotaient également de manière inaccoutumée et il reconnut avec soulagement qu'il n'était finalement pas le seul à être tendu. Mais ce qui le toucha plus particulièrement, ce fut la récompense, le regard de Derek qui s'attarda sur lui sans honte et qui lui donna l'impression d'être devenu une créature séduisante et il rougit furieusement.
Ils durent utiliser deux voitures et lorsqu'ils arrivèrent à destination, la fête battait déjà son plein. Il y avait tellement de monde que Stiles se sentit un peu étouffé choisissant rapidement de se mettre à une table située un peu en arrière salle où il retrouva un peu le cours de sa respiration. Il en profita alors pour faire la connaissance de la fameuse Lydia Martin, alors que Jackson et Derek s'étaient levés pour leur ramener des boissons. Elle était différente de ce qu'il s'était imaginé, moins conforme à cette image de poupée arrogante dont il était persuadé qu'elle serait. Au lieu de ça, il découvrit une jeune femme courtoise, intelligente et dont l'esprit sarcastique faisait férocement rivalité au sien.
Bientôt, leur groupe se sépara, certain préférant se trouver un coin plus tranquille alors que d'autres n'avaient pas perdu de temps pour caresser la piste de danse. Clive et Gale étaient d'ailleurs au milieu de la foule, étant les seuls à ne pas être venus accompagner mais ne semblant pas du tout s'en offusquer. Ils accomplissaient une sorte de duo sous les applaudissements de probables camarades de classe et Stiles les observa un moment, amusé. Il le fut bien moins lorsque Derek débarqua avec un air bien trop reconnaissable sur le visage, lui faisant signe de se lever. Stiles l'ignora, trouvant un intérêt certain pour son verre vide.
« Je ne danse pas, dit-il, précautionneux.
- Ce soir, si, répliqua Derek qui paraissait bien trop sûr de lui.
- Au cas où tu aurais louper un épisode, mon sens de l'équilibre, qui était déjà bien désastreux avant mon accident, n'est pas ce qu'on pourrait qualifier des plus gracieux et je ne sais pas toi mais je n'ai vraiment pas envie de me ridiculiser devant tout ce monde.
- C'est pourquoi tu as la chance d'avoir avec toi un excellent cavalier », se vanta Derek d'une voix suave.
Cette information le fit se retourner subitement, curieux malgré lui.
« Tu sais danser ? Je croyais que tu... Tu sais quoi, non, ça ne m'intéresse pas car je n'irai pas », se secoua-t-il, tentant de rester concentré sur le sujet, laissant de côté le sourire en coin de Derek qui l'observait, égayé.
- Stiles. »
Il agita la tête, de gauche à droite, sentant pourtant sa volonté faiblir lorsqu'il s'adressait à lui de cette façon. Ce n'était pas qu'il ne savait pas tenir ses décisions, juste que la voix de Derek pouvait parfois avoir un étrange effet sur lui. Il perçut sa main frôler ses côtes avant de s'ajuster sur ses hanches afin de le pousser sur ses pieds et il se laissa faire, comme une marionnette. Il dut le regarder avec anxiété car il se pencha vers son oreille et lui chuchota que tout allait bien. Il eut l'impression que tout le monde les observait, constatant avec aigreur qu'il ne s'agissait pas d'une simple impression lorsqu'il croisa brièvement des yeux clairs qu'il connaissait bien et put lire à loisir la surprise qui s'y jouait. Il pouvait cependant reconnaître que l'ébahissement de Kennan n'avait rien de surprenant, quand il savait qu'il avait failli ne pas venir.
Mais Derek avait eu raison, en fin de compte. Car s'il s'était sentit gêné et nu devant toutes ces personnes, il parvint à capter toute son attention. C'était comme s'il était capable à lui seul d'effacer tous les éléments indésirables de sa vue et ne lui offrir que les bons moments en échange. Il ne regretta pas une seule seconde d'être venu car Derek savait le faire rire d'une façon qui lui démontrait que le bonheur parfait été possible, ses éclats se perdant derrière la force de la musique mais sa joie illuminant son visage, penché vers son cou et percevant les effluves de son parfum entêtant. Les autres les rejoignirent alors et il réussit à passer ce qu'il qualifierait plus tard d'un des meilleurs moments de son existence, sans toutefois ressentir une seule seconde cette culpabilité familière de le faire sans Scott.
Lorsque Derek et lui décidèrent de sortir dehors pour prendre un peu d'air frais, Stiles en profita pour récupérer sa béquille qu'il avait apporté dans le coffre de la voiture, la danse ayant rendu ses pieds aussi mous que du chewing-gum. Il s'appuya contre le véhicule, reprenant son souffle, profitant du froid qui, pour une fois, ne lui frappait pas le visage, tel une morsure. Il souriait stupidement et il ne pouvait même pas le mettre sur le compte de l'alcool car il n'en avait pas bu une seule goutte.
« Attends. »
Derek s'approcha, l'air amusé par quelque chose que Stiles ignora, jusqu'à ce qu'il récupère ce qu'il découvrit être des confettis, coincés visiblement dans ses cheveux.
« Merci », chuchota-t-il, comme pour ne pas briser cette bulle de silence qui s'était installée depuis qu'ils étaient sortis.
Il ne savait pas vraiment si c'était à cause de l'endorphine sécrétées par son cerveau mais il lui semblait que les yeux de Derek étaient particulièrement brillants et il se retrouva à les contempler sans gêne, sa lèvre inférieure à moitié grignotée et cachée derrière ses dents. Il ne sut pas qui embrassa l'autre mais ça importait peu, au final. Parce-qu'une fois que sa bouche rencontra celle de Derek, il ne ressentit absolument plus le froid, ne se souvenant pas d'avoir jamais éprouvé cet espèce de feu brûlant dans son bas ventre au point qu'il fut étourdi, à la fois par le manque d'oxygène mais aussi par l'étreinte qui se faisait plus intense. Il caressa la nuque de son compagnon, jouant avec ses cheveux vers l'arrière et apprécia l'air assouvi du brun qui, s'étant reculé quelques secondes, se pencha à nouveau cette fois-ci pour lui dévorer la mâchoire, puis le cou.
« Ça serait vraiment cliché », commença-t-il, essouffler, tentant par tous les moyens de ne pas laisser échapper un gémissement qui le rendrais à coup sûr aussi rouge que son pick-up, « de terminer la soirée, nus, dans ta voiture.
- Je n'ai rien contre les stéréotypes s'ils signifient que tu restes exactement à l'endroit où tu te trouves, débita l'autre, le visage toujours tourné vers le cou de Stiles qui frissonna sous l'assaut d'une morsure plus féroce.
- Tu ne diras pas ça lorsque quelqu'un avertira le bureau du shérif pour dénoncer un crime d'attentat à la pudeur et que tu devras faire face au regard réprobateur de mon père. Il a promis de nettoyer son arme devant toutes les personnes que je lui présenterais. »
- Tu comptes lui en présenter beaucoup d'autres ? Susurra le brun à son oreille, railleur.
- J'en sais rien, tu en penses quoi ? Tu te sens à la hauteur, parce que je suis réputé pour être insupportable, répliqua Stiles mais sa réplique qu'il avait voulu narquoise, perdue de sa hauteur.
Il abandonna son projet de n'émettre aucun son de plaisir car Derek était définitivement bien doué dans son domaine. Or, cette idée de premier abord, anodine, le fit momentanément se crisper, maudissant son esprit qui ne cessait de l'envoyer vers des rivages obscurs, qu'il aurait préféré éviter. Mais plus il essayait de refouler ses pensées, plus elles revenaient avec force s'abattre sur lui, au point qu'il se détacha un peu abruptement, le regard soudain inquiet de Derek qui se demandait certainement ce qu'il avait fait de mal, le rendant désolé.
« A ce propos, on n'a jamais discuté de ça, et pour cause, ce n'est pas le genre de conversation à avoir en plein déjeuner mais je ne suis pas... Je ne l'ai jamais fait avec personne », indiqua-t-il, se sentant risible, maintenant que Derek lui portait intérêt, avant de prendre une profonde inspiration pour ce qu'il savait arriver ensuite, et qui était pour lui encore plus important. « Je n'ai jamais été dans une situation aussi intime avec quelqu'un et je pense qu'il faut que tu te prépares. Je sais, les gens disent souvent qu'on exagère, que ce ne doit pas être si grave mais... ça ne l'est pas dans mon cas et je... je veux que tu sois préparé à ça. Ce n'est pas quelque chose de simple à intégrer, mes parents ont pris des semaines afin de s'y faire. J'ai pris du temps à m'y faire.
- Stiles...
- C'est important que tu le saches. » Il rit jaune avant de se décaler de manière plus effective du corps chaud de Derek, se frottant les paupières devant la difficulté de la tâche. « Ouah, je me rends compte que je viens de gâcher complètement l'ambiance mais il fallait vraiment qu'on en parle. Tout le monde ne réussit pas à s'habituer, et c'est normal, ce n'est pas supposé être dans cet état mais je ne voudrais surtout pas t'affoler ou te rendre mal à l'aise. Quand on parle, c'est facile de s'imaginer ce qui nous attend mais en réalité, ce n'est pas vrai. Je suis habitué à ne plus avoir de jambe mais pas toi. Ça fait partie de moi et si tu ne te sens pas suffisamment préparé pour affronter ça, tu n'y es pas obligé. Je comprendrai, je te jure que je comprendrai. »
Deux mains vinrent encadrer son visage, si grandes qu'il eut l'impression d'être minuscules entre elles, emprisonné dans leur étau. Le visage de Derek était fermé et il se maudit d'avoir lancé le sujet, d'avoir éteint cette euphorie qui l'habitait encore quelques minutes plus tôt.
« Écoute-moi bien car j'aimerais que tu retiennes ce que je vais te dire jusqu'à ce que tu n'aies absolument plus de doutes : ça n'a aucune importance pour moi, tu comprends ? Tu es ce que tu es Stiles et si quiconque te fait te sentir ne serait-ce que moins qu'extraordinaire alors c'est qu'il ou elle n'en vaut pas la peine. Et si tu te voyais comme moi je te vois, alors tu n'aurais plus du tout peur, parce que tu l'es pour moi. Tu m'as eu à la seconde où tu es entré dans la grange et tout le reste n'a été que fioritures. Et je suis là, aussi longtemps que tu voudras de moi », finit-il en murmurant.
Une part de lui le savait, savait que Derek ne le laisserait pas tomber, mais l'entendre le lui dire, l'entendre le rassurer sur ce qui l'angoissait le plus, sur ce qu'il était sûr, l'empêcherait de pouvoir un jour partager une relation réelle avec une autre personne, ne fut pas comparable. C'était lui offrir de nouvelles perspectives, qu'il délecta avec envie et impatience. C'était lui montrer qu'il était plus que son corps, plus qu'un accident, plus qu'un amputé. C'était lui donner une chance d'être reconnaissant d'être en vie.
Six mois plus tard
C'était un peu le chaos. Des cartons jalonnaient l'entrée, empilés les uns sur les autres, tenant par il ne savait quel miracle, reconnaissables par les descriptifs inscrits par son père au marqueur noir et qui ressemblaient davantage pour lui à des pattes de mouche. S'offrant une pause dans tout ce capharnaüm, il promit à sa mère qui l'appelait depuis le salon de la rejoindre dans une minute. Ils avaient tous fait le déplacement pour lui dire au revoir, Boyd, Jackson, Derek, Esteban et son père s'étaient mis à cinq pour empiler ce qu'ils pourraient dans les deux voitures et le reste de la bande était certainement quelque part dans la maison, percevant avec netteté la voix de Laura et celle de Clive, se disputant sur une bêtise et il était à la fois anxieux et fébrile de débuter ce nouveau chapitre, mélange étrange qui le paralysait, ignorant comment il devrait se comporter.
Mais c'était ce qu'il avait voulu et savoir qu'il avait l'entier soutien de ses parents avait beaucoup facilité les choses. Assis au bord de son lit, il regardait les murs, s'attachant à chaque détail, chaque recoin qu'il pourrait ensuite emporter avec lui lorsqu'il se sentirait trop nostalgique. C'était très important, car sur toutes les pièces de la maison, c'était celle qui le connaissait le mieux, qui avait été témoin du plus grand panorama de ses émotions, lieu censé être le plus intime et ce n'était pas aisé de dire adieu à tout ça.
Quand il eut terminé son tour, balayant tout ce qu'il y avait à voir, il se pencha sur le bout de papier qu'il avait dans la main, désormais jauni et chiffonné par le nombre de fois où Stiles l'avait lu, à des instants très divergents et dont il avait encore besoin aujourd'hui. Il se l'était juré, pourtant, qu'il ne la lirait pas. Qu'il la garderait secrète. C'est ce qu'il fit pendant un certain temps, la laissant dans sa boîte, sans jamais oublier une seule fois qu'elle était là, sans jamais oser s'en débarrasser pour de bon.
Il déplia la lettre, laissa ses yeux glisser sur quelques lignes avant de se concentrer sur la fin, en particulier. Il la connaissait par cœur, Scott la répétant dans sa tête, comme s'il s'était tenu à côté de lui, son regard brun et son sourire facile.
Tu n'as rien dit mais je suis sûr que tu as trouvé ça stupide, que j'avoue mes craintes à l'idée de te voir partir. Tu m'as dit que rien ne changerait, que tu ne m'abandonnerais jamais et j'ai choisi de te croire. J'ai choisi de faire confiance à la personne qui me connaît le mieux et qui serait capable de faire n'importe quoi, n'importe quoi qui pourrait me rendre heureux. J'ai choisi de croire en tes mots parce-qu'ils sont toujours parvenus à me rassurer, même lorsque je n'étais qu'un gosse apeuré, trop en colère contre son père pour constater la chance qu'il avait d'avoir une mère aussi parfaite. J'ai choisi d'accepter de te perdre parce-que tu m'as juré de revenir et parce-que tu n'as jamais, ne serait-ce qu'une fois, manqué à ta parole. Ça n'a pas été évident de le faire, tout simplement car je suis une personne égoïste et comprendre que ce qui nous rend confortable ne sera bientôt plus aussi facile d'accès représente une étape que je ne me sentais pas franchir si rapidement et je suis désolé si je t'ai rendu malheureux en nourrissant une culpabilité qui n'avait aucune légitimité.
C'est vrai, j'ai peur. J'ai peur de me perdre, de ne plus savoir ce que je veux et ce que je suis capable d'accomplir. J'ai peur pour ma mère, et de lui faire défaut en désertant. J'ai peur d'être seul et de m'apercevoir que je ne suis plus rien sans toi. Mais tu m'as appris à voir plus loin qu'un verre vide, tu m'as aidé à prendre conscience de ce que la foi en quelqu'un peut représenter, une foi si puissante qu'elle est capable de transformer le plus pur des athées en fervent croyant, pas en un quelconque dieu ou une nouvelle divinité mais en lui-même parce que c'est de cette façon que tu aimes les gens, Stiles. Tu les aimes jusqu'à ce qu'il n'existe plus aucune parcelle d'incertitude quant à leur valeur. Tu as été pour moi, une famille, un foyer qui a su combler celui qui avait été brisé par de mauvaises intentions, des gestes violents et des paroles acides jetées à la figure.
Alors, pour toi, je jouerai ce rôle. Je serai celui que tu mérites, celui qui malgré la profonde volonté de te voir rester, te poussera le plus fort pour que tu réalises ce que tu souhaites. Je serai celui que tu voyais en moi, celui qui me donnait l'impression de pouvoir concrétiser tout ce que j'aurais commencé. Je te dirai que je sais que tu es effrayé, de ne pas être la hauteur, de ne pas être assez bien, mais de ne pas t'en faire car la véritable erreur ne se situera pas dans ton échec mais dans ton refus de continuer à avancer. Mais tu ne me décevras pas, quoi qu'il se passe et quoi que tu fasses. Tu resteras ce garçon qui, un après-midi ordinaire, à accepter de partager son goûter avec un gamin chétif et asthmatique et qui, par ce petit geste, a transformé pour de bon toute son existence. Je sais que tu aimes t'en vanter mais tu as raison sur un point, Stiles Stilinski : avec ton débit infatigable, ton excitation chronique sur tout ce qui t'entoure, et ta curiosité sans borne, tu as bouleversé ma vie et j'aimerais beaucoup te remercier pour ça mais j'aurais trop peur que tu ne te moques de moi, jusqu'à ce que je n'aie plus assez de neurones pour m'en souvenir.
Je t'aime mon pote, peu importe que tu te serves de cette information pour me faire du chantage affectif ou pour l'ajouter à cet aspect de ma personnalité que tu qualifies de niais mais que tu affectionnes au fond. Je peux le voir dans tes yeux bien que tu aimes te dire très bon menteur alors je te laisserais baigner dans l'illusion encore quelque temps car je suis quelqu'un de génial.
Je sais que je te verrais bientôt et d'ici là, sache une chose, tu es mon super héros.
Ton ami,
Scott.
Cette lettre, il l'emporta avec lui mais n'en parla à personne d'autre. Elle était pour lui, elle lui appartenait. Il s'en imprégna tout au long du voyage, y repensa quand ses parents et Derek le laissèrent le soir même, ce dernier promettant de venir passer le week-end avec lui et de prendre soin du ranch, en son absence. Il la relut enfin une dernière fois, le lendemain, avant de sortir de son dortoir et la serra dans sa main, juste avant de monter les escaliers qui le menaient vers la grande porte, où il irait se présenter pour débuter son inscription et que l'air s'était soudainement mis à manquer, entre l'immensité du campus et la foule présente sur les lieux et autour de lui. Il ferma les yeux, s'accordant dix secondes avant de relever la tête et, tranquillement, faire un premier pas. il reçut un message de Derek sur son téléphone, qui lui souhaitait bonne chance et il se sentit déjà impatient de le retrouver.
Scott avait raison. Parce que malgré l'anxiété et la frustration que cela pouvait parfois procurer, il y avait de la beauté dans le fait de se livrer à ce que l'on aimait le plus, des choses qui pouvaient parfois être très simples. Comme dessiner jusqu'à en avoir mal aux mains, les articulations lancinantes et les doigts rouges. Ou monter à cheval et conduire si fort et si vite que, l'espace d'un instant, il était possible de faire corps avec la terre et le ciel, ne formant plus qu'une seule entité. Il lui arrivait encore de douter, de ne pas parvenir à la voir, cette nuance capable de faire basculer le poids du côté nécessaire, le côté où il était possible de voir et de se dire « Tout va bien. Je vais bien. » mais ce n'était pas grave. C'était devenu une sorte de jeu, comme un murmure, qu'il se répéterait à lui-même. La différence ? Aujourd'hui, c'était vrai.
Tout va bien. Je vais bien.
Fin
C'est terminé, ce gros bébé est finalement arrivé à son terme. Je sais que je le répète chaque semaine mais je tiens vraiment et sincèrement à vous remercier pour votre soutien, vos gentils messages, vos mises en favoris qui sont pour moi, de très belles attentions. Je suis particulièrement heureuse que vous ayez aimé mes personnages un peu cassés, un peu démolis par la vie. Cette histoire, comme chacune écrite par un auteur, je pense, compte énormément pour moi et avoir pu mettre ce mot de fin à toutes ces péripéties me réconforte énormément.
J'en profiterai pour remercier en particulier Babylon et Fanny qui, je crois, ont presque commenté cette histoire depuis le début : merci à vous, pour tous vos mots, qui m'ont donné le sourire à chaque fois ! Je serais d'ailleurs curieuse de savoir si tous les guests qui passent par ici seraient intéressés par l'idée de recevoir une réponse à leurs reviews. Pendant un temps, j'avais entendu dire que le site interdisait la réponse aux RW sur les histoires, mais en relisant attentivement les conditions d'utilisation, je crois avoir compris qu'il était possible de le faire en fin de chapitre.
Bien que j'avais dit que je n'écrirais pas avant un moment, je dois avouer que je me suis déjà remise à l'écriture de deux autres fanfics (comme quoi, les engagements et moi, ça fait deux). On se retrouvera donc certainement cet été, avec une petite histoire toute fluffy (eh oui, je ne me reconnais plus :p)
En attendant, je vous souhaite à tous de passer de merveilleuses fêtes de fin d'année, en espérant que 2019 soit placée sous l'angle de la joie et du bonheur ! Portez-vous bien, et surtout, continuez de lire et de rêver !
Des bisous :*
