Hey girlz !
Oui, oui, je sais, j'étais censée poster la suite de "Magical Dick" et à minima, celle de "Pornstars", mais que voulez-vous, l'inspiration a ses raisons que la raison ignore...
Je m'excuse pour l'attente engendrée, mais voici que je vous sers justement de quoi patienter !
Une nouvelle histoire, a priori "courte" et je dis bien "a priori", parce que je ne sais jamais d'avance jusqu'où mon imagination va me guider.
J'espère néanmoins que cet AoKaga qui suit le "canon" du manga originel vous plaira, sa petite particularité étant de présenter nos deux fauves dans la peau d'adultes quarantenaires...
Bref, enjoy !
« Qu'est-ce que tu racontes ? Ce n'est pas terminé, idiot ! Nous pourrons encore nous affronter, quand tu voudras ! »
Presque vingt-cinq ans plus tard, ces mots raisonnaient encore dans sa tête.
Mais pourquoi y repensait-il maintenant, à ce moment précis ?
Etait-ce un signe ?
…
Finalement, cette défaite d'apparence anodine l'avait marqué au fer rouge, indélébile.
Même s'il demeurait trop fier pour se l'avouer.
Cet événement qui aurait pourtant dû se révéler insignifiant, avait décidé du reste de sa vie dans son entièreté.
Sa carrière, ses amours, ses amitiés, même sa personnalité, tout ce qui constituait Aomine Daiki semblait avoir déterminé par ce seul instant.
Ce moment de … faiblesse.
D'aucuns diraient de « lucidité », mais au vu de la tournure prise par son avenir, Aomine avait du mal à percevoir ce qui avait découlé de sa défaite, autrement que comme quelque chose de foncièrement négatif…
Sa rivalité avec Kagami Taiga…
Ne s'était jamais totalement éteinte.
Elle couvait comme des braises sous la cendre, ne demandant qu'à être ravivée.
Peut-être parce que le brun l'entretenait toujours, même après deux décennies passées à ressasser.
En effet, il ne parvenait pas à aller de l'avant et à passer à autre chose. Et pour cause, quelque chose le bloquait, le retenant inéluctablement en arrière, coincé dans une faille temporelle, à une autre époque, pourtant révolue… Sa vie s'était arrêtée ce jour-là. Ce qui aurait du être une renaissance s'était finalement mué en malédiction.
Une malédiction obsessionnelle et obscène qu'il traînait comme un boulet depuis vingt-cinq putains d'années, sans parvenir à s'en défaire.
Et à vrai dire… sans vraiment essayer non plus.
Mais il fallait bien reconnaître que cela faisait un moment qu'il n'avait plus pensé à Kagami. Alors pourquoi maintenant, pourquoi aujourd'hui ? En réalité, c'était de sa propre faute. Aomine aurait du commencer par s'éloigner géographiquement de son… bourreau ? Hmm… le mot était sans doute un peu fort, alors disons plutôt… « responsable de tous ses malheurs » ? Pffff… encore pire… mais le brun était toujours prompt à se trouver des excuses pour rester inactif et c'était sa passivité qui était à blâmer concernant l'état (bordélique) actuel de sa vie, plus encore que son ancien adversaire.
Cependant, il fallait bien admettre que sa première erreur avait été de rester aux USA et de tenter de s'y construire un avenir, dans l'ombre de Kagami…
Kagami le soleil, Kagami le prodige et surtout, Kagami qui prenait toute la place.
A croire qu'il était de trop et que les deux anciens as du Japon ne pouvaient pas coexister sur le même territoire…
Parce que c'était bien là tout le problème aux yeux d'Aomine : Kagami l'avait complètement éclipsé ! Pourtant, le brun s'estimait autrement plus talentueux que son rival de toujours.
Alors pourquoi ?
Pourquoi était-ce Kagami qui avait été choisi pour connaître une carrière aussi prolifique que fulgurante en NBA ?
Pourquoi le tigre et pourquoi pas la panthère ?
Aomine ne l'avait jamais compris et encore moins accepté. Or depuis, il nourrissait une rancœur féroce envers celui qui l'avait pourtant sauvé de lui-même fut un temps en lui enseignant le poids de la défaite. Mais cette défaite s'était si profondément ancrée dans chaque pore de sa peau, que malheureusement, Aomine n'avait pas su lutter contre son emprise, se laissant entraîner par le fond au lieu de rebondir.
Peut-être était-il encore trop fragile, à peine remis de sa dépression, ou alors… peut-être que le basané se cachait derrière ce seul événement isolé pour justifier le ratage intégral de son existence.
Mais pour l'heure, son réveil venait de retentir au son de « Welcome to the Jungle » des Gun's Roses. Car depuis qu'Aomine avait mis les pieds en Amérique, ses goûts musicaux avaient drastiquement changé. Exit la pop japonaise acidulée et place au bon vieux rock'n roll à papa, façon Yankees ! Car si au départ, il était venu ici dans l'espoir de se faire repérer par des chercheurs de talents de la NBA et ainsi marcher dans le sillage de son éternel rival, son séjour, qui ne devait donc être que temporaire, s'était finalement prolongé…
… jusqu'à présent.
En réalité, Aomine vivotait plus qu'il ne vivait réellement, de petits boulots insipides et souvent mal rémunérés.
A peine de quoi payer son loyer et ses bières quotidiennes, pour être franc
La plupart de ses repas étaient frugaux et il parvenait rarement à en prendre deux par jour, alors carrément les trois qui étaient recommandés, vous pensez bien...
Mais malgré tout, c'était cette soif insatiable de revanche envers Kagami qui le maintenait à flot. Tellement plus simple de rejeter la faute de son destin brisé sur les épaules du rouge que de se remettre soi-même en question… Chaque matin (ou après-midi, selon le job miteux qu'il occupait au jour le jour…), Aomine se réveillait avec cette hargne, cette incapacité à passer au-dessus de l'échec qui avait plombé ses rêves.
Un fort sentiment d'injustice coulait dans ses veines et il tendit mollement le bras pour venir chiner sous son lit usé d'éventuels « restes » qui pourraient faire office de petit-déjeuner. Et ce matin-là comme bien d'autres auparavant, ses doigts se posèrent sur une bouteille de bière à moitié vide, en guise de nourriture.
La descendant d'un trait sec, Aomine se leva ensuite et il se dirigea vers les toilettes pour délester sa vessie encombrée.
Rituel matinal.
On pourrait également pointer du doigt sa trop grande consommation… liquide, mais toujours était-il que la première chose que le brun avait envie de faire en sortant de son lit au sommier esquinté était invariablement d'aller pisser. Une fois son forfait accompli, il se posa quelques instants pour écouter les infos du jour, devant sa vieille télévision à écran cathodique parce qu'il n'avait pas les moyens de s'en offrir une neuve et que, de toute façon, celle-ci, il ne l'avait même pas payée car l'ancien locataire qui occupait son minuscule deux pièces miteux, l'avait oubliée avant de partir. Ou de passer l'arme à gauche, selon la version de l'histoire que vous préférez. Et le pauvre bougre n'ayant aucune famille, Aomine en avait donc hérité.
Ou plutôt, il s'en était attribué l'héritage exclusif sans prendre la peine de consulter qui que ce soit. De toute façon, il y avait prescription depuis le temps et le brun estimait que si personne ne s'était manifesté et bien tant pis, c'est que les dieux avaient décidé qu'il pouvait garde ce qu'il avait trouvé ! Non mais !
En tout cas, force était de constater que cette vieille télévision carrée tenait encore plutôt bien la route. Bon, la qualité de l'image n'était certes pas au top et le son avait tendance à grésiller par moment, mais pour un truc pour lequel il n'avait pas eu à débourser un seul centime de sa poche, Aomine en était plutôt satisfait. Tellement satisfait d'ailleurs, que jamais il n'avait pensé à la remplacer. Sauf peut-être en cas de panne et encore, ce n'était vraiment pas certaine étant donné que pour cela, encore faudrait-il déjà qu'il ait les moyens de le faire, ce qui était très loin d'être le cas. Déjà qu'il payait souvent son loyer avec deux à trois semaines de retard et que cette petite manie avait tendance à faire criser son propriétaire, Aomine ne pouvait vraiment pas se permettre d'investir quelques extras dans son confort personnel…
Par chance ce matin-là, il lui restait une brique de lait NON PERIME dans le frigo et un paquet de céréales pas encore entamé dans ses placards, ce qui constituait son dîner dans 90 % des cas, les autres 10 % étant consacrés à la consommation de pizza. Or, ce qu'il y avait de bien aux USA, comparé au Japon, c'était justement cette variété et la diversité de l'offre en termes de céréales. Il en existait en effet de toutes formes et de toutes les couleurs, mais ceux qu'Aomine préférait étaient ceux qui représentaient des petits animaux. Parmi eux, il s'agissait de trouver le fameux pingouin, mascotte de la marque, qui était extrêmement rare et souvent absent des paquets qu'achetait Aomine, dans l'espoir justement, de tomber dessus. Mais lui… il avait plutôt la malchance de tomber SYSTEMATIQUEMENT sur le TIGRE !
Et à chaque putain de fois, ça ne manquait pas de lui faire penser irrémédiablement à Kagami, dont c'était l'animal totem ! A croire que ce maudit rouquin le poursuivait et qu'il faisait toujours tout pour se rappeler à son bon souvenir ! Jamais il ne le lâcherait… et c'était dur de s'y résigner… Par moment, il arrivait qu'Aomine parvienne à l'oublier temporairement, mais cela ne durait jamais assez longtemps à son goût.
Et pour cause…
Les deux hommes étaient en quelque sorte restés voisins.
Etat de fait qu'Aomine se ramassa encore une fois de plein fouet dans la face, alors qu'il avait pris le volant de sa vieille Pontiac typiquement américaine, à la peinture bleu électrique défraîchie pour se rendre sur son lieu de travail, ne remarquant même pas le camion de déménagement fraîchement garé devant sa résidence... En tout cas, on ne pouvait nier que la panthère avait pris pli de sa nouvelle vie sur le continent découvert par Christophe Colomb ! Un authentique américain plus vrai que nature, vivant à l'heure américaine (puisqu'en effet, il allait même jusqu'à regarder le Super Bowl ! Et en entier.) et consommant américain (toujours cet amour pour les sneakers collector de la marque à la virgule...) ! Bordel, il se sentait même davantage l'âme d'un gringo que la majorité de ceux nés sur le sol états-unien, alors qu'il n'en possédait toujours pas la nationalité ! Seul son accent improbable – qu'il n'avait jamais perdu en dépit de toutes ces années passées chez l'Oncle Sam – et ses yeux légèrement bridés qui trahissaient ses origines asiatiques. Mais là n'était pas le sujet : son rival avait encore trouvé le moyen de s'immiscer dans ses pensées…
Et de se les accaparer une bonne partie de la matinée…
Comme si ce n'était pas déjà suffisant d'avoir rêvé de lui… et de s'être réveillé avec une bonne grosse gaule des familles, en suce… heu SUS… !
…
!
Ah mais non AMIE(S) LECTRICE(S), ce n'est pas DU TOUT ce que vous croyez !
Il n'y avait strictement AUCUN lien entre son érection matinale intempestive et son rival !
Non, c'était uniquement le fruit d'une réaction biologique NATURELLE pour tout être masculin ayant dépassé le stade de l'enfance, même si – et bien qu'il refuse catégoriquement de le reconnaître – ce genre de petites manifestations anatomiques se produisait de moins en moins ces derniers temps. Sans doute à cause de l'âge. Ou des préoccupations qui parasitaient son esprit. Couplés à la consommation régulière d'une quantité d'alcool suffisante pour assommer un cheval…
Bref, toujours était-il que le brun avait eu la mauvaise idée de croiser le chemin d'un…
« Bordel de merde, non mais je rêve putain… »
… panneau publicitaire.
Faisant la part belle à son plus illustre et coriace adversaire.
Un panneau immense, juché au sommet d'une pancarte qui surplombait la vallée et sûrement visible à des kilomètres à la ronde ! (et non, Aomine n'exagérait pas du tout, ce n'était absolument pas son genre…) Sur l'image, Kagami souriait de toutes ses dents parfaitement blanches et disposées en rang d'oignon, comme tout bon Golden Boy qui se respecte. Il portait également un costume assurément taillé sur mesure, assorti d'une cravate ROUGE bien évidemment, soit la panoplie du parfait entrepreneur à qui tout réussit. Sous le panneau on pouvait lire la légende suivante : « Chez Tiger Concession, on dunk la concurrence ! »
…
Putain… Aomine manqua d'en griller un feu rouge. D'ailleurs, c'était lui qui voyait rouge, là.
Non mais quelle arrogance !
Et Aomine en savait quelque chose, il était même vachement bien placé pour parler ! (en connaissance de cause…)
Cependant, impossible de nier que Kagami avait su rebondir (LOL) après l'arrêt du basket… pas comme certains… si vous voyez ce que je veux dire de manière tellemmmmmmmmmmmennntt subtile !
Depuis l'arrêt de sa carrière en NBA, suite à une blessure importante à la jambe, Kagami s'était reconverti dans la vente… de voitures de luxe ou de collection.
Et ouais.
Rien que ça.
Mais quel rapport y avait-il entre le ballon orange et les belles carrosseries me demanderez-vous ? Aucun. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle cette reconversion avait étonné Aomine au départ, mais force était de constater que Kagami avait bien su mener sa barque, étant donné qu'il avait su exploiter sa petite notoriété acquise au basketball, pour la transformer en un business florissant par la suite. Et ce, même si, sur le papier, les deux secteurs étaient diamétralement opposés.
D'après Aomine, le rouge devait en grande partie son succès dans les affaires, au capital sympathie qu'il était parvenu à acquérir en peu de temps au sein de la NBA, mais pas uniquement. Parce que l'image ne fait pas tout et que Kagami n'avait jamais été une foudre de guerre et encore moins un requin de la finance, ni du marketing. Mais comme bien souvent, une femme se cachait derrière de la réussite de son homme. Or, celle de Kagami était réputée pour son intelligence et sa grande classe. Issue d'une famille aisée, elle avait le contact facile et disposait d'un carnet d'adresses extrêmement touffu.
Aomine se souvenait de l'avoir croisée une fois, mais sans plus.
Il avait d'ailleurs du mal à se rappeler à quoi elle ressemblait…
… En revanche, ce qu'il n'avait pas oublié, c'était que cet enfoiré de Kagami, non content de lui avoir volé la place qui lui revenait de droit en NBA – car le bleu s'était toujours estimé beaucoup plus talentueux que son comparse rouge, mais pourtant c'était Kagami qui lui avait été préféré… – lui avait également piqué sa PETITE AMIE de l'époque ! Ben ouais, vous comprenez, la gloire et la reconnaissance ne suffisaient pas au tigre et alors qu'ils étaient en dernière année de fac, Kagami avait apparemment jugé bon de courtiser sa nana… et putain, tous, absolument TOUS les codes sur l'amitié virile s'étaient trouvés bafoués par ce geste aussi intolérable qu'inélégant. Pas que les deux japonais aient été un jour les meilleurs potes du monde, mais il y avait quand même un minimum putain de bordel de bite couilles chatte ! Ce genre de choses ne se fait tout simplement pas entre compatriotes. SURTOUT entre compatriotes, même ! Ils étaient au contraire censés se serrer les coudes et lutter ensemble contre les discriminations dont ils pouvaient potentiellement être victimes, mais au lieu de cela, Kagami avait décidé de ne pas la jouer réglo, en osant lorgner sur ce qui appartenait à autrui !
Et ça… Aomine avait aujourd'hui encore du mal à le digérer. Pire même, cette petite brouille de jeunes adultes n'avait fait que jeter de l'huile sur le feu de leur rivalité. Et s'ajouter à la liste des reproches déjà très longue (CMB !) que le brun tenait à l'encontre de Kagami, attisant l'animosité naturelle dont faisait déjà preuve Aomine au quotidien.
Dès que le feu devint vert, l'ex-as des Miracle s'éloigna sans attendre de ce désagréable obstacle, poursuivant sa route. Et au passage, il ne se priva pas pour adresser un bras d'honneur bien senti à son ancien rival. Même si ce n'était qu'à l'image de ce dernier et pas directement en face à face, cette petite audace personnelle le soulagea sur le coup. Ca faisait un bien fou, même !
Le cœur un peu plus léger, Aomine continua donc son petit bonhomme de chemin jusqu'à la villa perchée dans les hauteurs de Los Angeles, dans le quartier huppé d'Hollywood, où son patron l'avait envoyé pour plusieurs interventions à domicile.
Mais à peine son pied eut-il foulé le sol goudronné composant la chaussée, que son chemin croisa celui de deux gamins qui faisaient du vélo dans la rue. Dans leur course, ils se retournèrent sur lui, le toisant avec dédain.
« J'le r'connais ce type, il est venu nettoyer la piscine de mes parents le mois dernier ! » Lança le blondinet.
« Pfff… non mais t'as vu sa pure dégaine de looser… ? Les mecs comme lui ont bien de la chance qu'on fasse appel à eux pour déboucher nos chiottes et qu'on leur donne une petite pièce pour ça, sinon, ils finiraient SDF ! » Répliqua l'autre en ricanant lorsqu'il passa devant Aomine.
Le tout avec un regard aussi méprisant que le ton qu'il employa.
Le respect des aînés était définitivement mort et enterré par cette nouvelle génération de petits privilégiés.
« Hey bande de petits merdeux, j'vous ai entendus hein ! »
Ses détracteurs se mirent à pédaler plus vite pour s'éloigner rapidement du susceptible homme à tout faire. Hélas pour eux, le mal était fait. Parce qu'évidemment, il n'était pas question pour Aomine de les laisser s'en tirer aussi facilement, après une remarque aussi désobligeante. Le brun ne se priva donc pas pour leur faire savoir à sa manière toute en retenue, ce qu'il pensait de leur bienveillant jugement. En effet, une fois que le cortège roulant se fut suffisamment éloigné, il se baissa pour ramasser une caillasse qu'il envoya dire bonjour à la roue du vélo de l'un des deux chenapans.
Or, malgré le poids des années grevant sa condition physique, additionné à la présence d'alcool qui circulait déjà dans ses veines de si bon matin, il fallait bien reconnaitre qu'Aomine n'avait rien perdu de son talent de lanceur, puisque l'impitoyable projectile vint se loger dans le cylindre avant qu'il avait délibérément visé, provoquant la chute de son propriétaire sur l'asphalte fort inhospitalier.
Ah ça, il faisait moins le malin maintenant ce sale mioche avec sa guibole éclatée contre le bitume !
Et tandis que le gamin se retrouva au sol à chouiner comme un lâche, le genou en sang, Aomine se dépêcha de disparaître de la zone incriminée, sans laisser la moindre trace, des fois qu'on serait tenté de remonter sa piste pour l'accuser de cet accident aussi malencontreux que fortuit.
Traduisez : Aomine prit ses jambes à son cou en réalisant la portée de son méfait.
Car face à un jury d'adultes dénués de la moindre autorité parentale, pas moyen qu'il ait gain de cause face à ces gosses de riches et ce, bien que ces derniers aient commencé en premier à lui chercher des noises et même malgré la légitimité du châtiment corporel qui venait de s'abattre sur eux.
S'empressant de déguerpir en mode, « pas vu, pas pris » à l'aide de son courage si caractéristique, Aomine se réfugia derrière le portail de l'immense maison construite de plein pied dans laquelle il devait accomplir plusieurs petits travaux de manutention, faisant par là même preuve d'une grande maturité, lui qui avait préféré se défendre face aux deux gosses lui ayant manqué de respect, plutôt que de laisser couler comme tout adulte sensé l'aurait fait.
Mais ainsi était Aomine Daiki.
Malgré ses quarante et un ans bien tassés.
Au fond de lui, il demeurait un éternel adolescent, incapable de résister aux provocations et réduit à se chamailler avec des enfants qui n'avaient de toute évidence pas encore perdu toutes leurs dents de lait...
Caisse à outils sous le bras, il remonta donc la grande allée et, les propriétaires de cette luxueuse demeure étant absents pour la matinée, le basané pris ses aises et alla donc se servir directement à la source, dans leur garage abritant pas moins de quatre voitures neuves et rutilantes, pour prendre une échelle. Juché sur son perchoir et chaussé de ses gants de protection, il commença donc par nettoyer la gouttière garnie de feuilles mortes et autres végétaux – et animaux – en décomposition. Puis, il balaya la grande allée qui s'étendait du portail au garage et enfin, il pénétra à l'intérieur de la maison pour effectuer sa dernière mission d'appoint, non sans avoir au préalable consulté sa « to do list » d'instructions envoyée par son patron.
Honnêtement, avant de quitter le Japon et en dehors du basket – naturellement – et de la branlette – aussi… -, Aomine n'avait jamais été spécialement doué de ses mains. C'était même tout l'inverse, n'ayant jamais fait preuve d'une quelconque prédisposition dans l'accomplissement des tâches manuelles. Cependant, ses rêves de passer professionnel au basketball avaient très rapidement été étouffés dans l'œuf et Aomine avait dès lors été contraint de se sortir les doigts, dans tous les sens du terme. C'était son unique alternative pour avoir de quoi manger dans son assiette, étant donné qu'il était hors de question pour lui de rentrer au pays, la queue entre les jambes.
Il s'était donc accroché pour gagner sa place aux USA, un hypothétique retour au Japon relevant tout simplement du domaine de l'inenvisageable à ses yeux. Il avait tellement tenu à partir – ce qui avait demandé des sacrifices et autres privations conséquents à ses parents – en clamant à qui voulait l'entendre qu'il ne reviendrait pas avant d'être devenu une star du basket, qu'à cause de sa trop grande fierté, Aomine s'était piégé lui-même dans un cercle vicieux sans issue. Parce que quitter cette terre d'asile, ce serait un véritable aveu de faiblesse et il ne supporterait pas de subir le regard des autres… Résultat des courses : cela faisait vingt-trois ans qu'il était coincé ici, comme un con, sans aucune possibilité de rétropédalage. Et cet échec, il le devait à sa grande bouche et à la peur qu'il avait de décevoir ses parents…
… parents qui ignoraient tout de la précarité financière – et, ne nous leurrons pas, affective également – dans laquelle vivait leur fils. Aomine avait bien du mal à maintenir la tête hors de l'eau, malgré ses efforts. Certains mois, sa bonne volonté payait, mais la plupart du temps, il évoluait sur le fil du rasoir, dans un numéro d'équilibre que n'auraient pas renié certains artistes de cirque. Mais il était le seul à blâmer, parce qu'il refusait d'admettre publiquement qu'il s'était trompé et qu'il avait misérablement échoué. Amis et parents ne lui en auraient probablement pas tenu rigueur, sachant qu'au moins, il avait tout mis en œuvre pour essayer de tutoyer ses rêves… Cependant, pour Aomine, seule la victoire était une option valable.
Ainsi, cela faisait près de deux décennies qu'il faisait croire à ses proches qu'il menait la vie respectable d'un bon citoyen, alors qu'en réalité il était coincé au pays du rêve américain. Rêve qui avait pris la tournure d'un affreux cauchemar dont il peinait à émerger. Car tout n'était que mensonge, à commencer par la vie qu'il s'était inventée de toute pièce, jamais à cours de subterfuges lorsqu'il s'agissait d'éviter à ses parents et amis de s'inquiéter pour lui. Dès qu'on lui demandait revenir passer quelques jours au Japon ou qu'on lui posait des questions trop pointues sur cette vie fantasmée, Aomine trouvait toujours une pirouette pour décliner l'invitation ou esquiver l'interrogatoire.
Et le plus triste, c'est que jusqu'ici, personne ne s'était jamais douté de rien.
Pas même ses propres géniteurs, qui avaient pourtant insisté pour venir le voir à maintes reprises, mais s'étaient laissés convaincre sans difficulté par la gouaille mensongère de leur rejeton, passé professionnel dans l'art de s'inventer une vie factice menée tambours battants, sans répit…
Kise également, du fait de son métier de pilote et accessoirement mannequin à temps partiel, avait plusieurs fois émis la possibilité qu'ils se voient lors d'un de ses nombreux séjours aux USA. Mais Aomine avait toujours tenu bon en refusant. A vrai dire, même Momoi qui avait pourtant fait sa vie en Amérique, du côté de New York avec un certain autre brun bien connu de Kagami, n'était jamais parvenue à le voir chez lui et ignorait jusqu'à l'apparence quasi insalubre du miteux appartement que son meilleur ami occupait.
Malgré tout, elle était la seule qui parvenait encore à VOIR physiquement Aomine une à deux fois par an (pour Thanksgiving et Noël), en lieu et place de juste avoir de ses nouvelles (fictives), quand il daignait en donner. Mais Aomine ne voulait pas inquiéter ceux qui comptaient pour lui, alors il se confortait et se complaisait même dans ses illusions… Après tout, ses parents n'étaient plus tous jeunes et apprendre que leur fils unique vivait au jour le jour, à la limite de la pauvreté, risquerait de les décevoir dans le meilleur des cas.
Foutue conception typiquement japonaise de l'honneur !
Mais même dans le cas où il n'aurait pas eu peur de décevoir ses parents, Aomine ne serait de toute manière probablement pas rentré au Japon pour autant. Parce qu'aussi bizarre que cela puisse paraître, il se plaisait ici et finalement, si l'on effectuait un calcul rapide, on se rendrait compte que l'ancien Miracle avait passé plus de temps sur le sol américain qu'au Japon, son pays de naissance. Et encore une fois, il convenait de souligner à quel point et surtout à quelle vitesse Aomine s'était acclimaté à sa nouvelle patrie d'adoption. Sa grande adaptabilité lui était encore d'une grande aide aujourd'hui, en particulier dans le contexte professionnel où il enchaînait les petites missions alimentaires. Comme ce matin justement. Encore une fois, il allait devoir faire preuve d'ingéniosité pour mener à bien son job de manutention.
Car maintenant qu'il s'était occupé de l'extérieur, il restait l'intérieur à faire. Or, son instruction du moment consistait à fixer une télévision écran plat dernier cri au mur. Dur de croire que celui qui était né avec un poil dans la main de la taille d'un baobab maniait à présent la perceuse comme personne ! Exit le bricoleur du dimanche, place au Mac Gyver asiatique ! En même temps, ce n'était pas comme s'il avait réellement eu le choix… bien obligé d s'y mettre pour économiser quelques Pokédollars en réparations obsolètes. Système D, ma gueule ! C'est ainsi que gros crayon de bois juché en équilibre sur son lobe d'oreille, Aomine prit quelques mesures et consciencieusement, il installa le (lourd) bijou de technologie sur son nouveau support. Puis, après avoir effectué les branchements de rigueur, Aomine testa avec succès le bon fonctionnement de son labeur, télécommande à la main. Satisfait de son œuvre, il recula légèrement pour pouvoir l'admirer et se jeter quelques fleurs mentales bien méritées, au passage. (du moins, de son point de vue.)
Ce fut à cet instant précis que la porte d'entrée claqua, laissant apparaître une péta… pardon, une femme légèrement plus jeune que lui, vêtue d'une robe de grand couturier qui à elle seule, devait sans doute valoir trois à quatre mois de loyer. Le tout accompagné du gros collier de perles véritables qui va bien et des talons aiguilles à la célèbre semelle rouge…
Le parfait cliché de la desperate housewife californienne, dont le mari trop souvent absent avait fait fortune dans une start up quelconque. Ne manquait plus qu'elle tienne un verre de Martini et la panoplie serait complète.
« Qu'est-ce que c'est que ça ? » Eructa la brunette BCBG, la voix chargée de dégoût.
… et sa main droite impeccablement manucurée posée sur son cœur, pour ajouter au drama ambiant.
« Ben c'est la télé que vous vouliez que j'accroche au mur… » Se vit obligé de préciser Aomine.
Des fois qu'elle ait oublié d'enfiler ses lentilles (forcément) de couleur pour voir…
« Non mais je ne suis pas aveugle hein ! Mais que fait-elle posée sur CE mur !? »
« Ce sont pourtant les instructions que vous avez communiquées à mon patron et… »
« Foutaises ! » Le coupa t-elle avec autorité. « J'avais EXPRESSEMENT demandé à ce que la télévision soit fixée au mur se trouvant à côté de la porte ! »
Suspicieux, Aomine jeta quand même un rapidement regard derrière lui pour évaluer la situation et… la gravité de son erreur.
Sauf que…
« Bah c'est bien ce que je viens de faire. »
« Mais non bougre d'andouille ! L'AUTRE mur, à côté de l'AUTRE porte ! » Cria t-elle en pointant le mur opposé, qui effectivement, remplissait aussi tous les critères.
« Non mais attendez, il y a de toute évidence eu malentendu et je… »
« Je n'attends rien du tout ! Vous vous êtes trompé, alors débrouillez-vous pour réparer ! J'EXIGE que la télévision soit à la place pour laquelle je vous ai PAYE avant ce soir ! »
« Quoi ? Avant ce soir ? Mais madame, vous ne vous rendez pas compte, c'est beaucoup de travail ! Il va encore falloir que je dévisse tout, que je la décroche et je reprenne des mesures… qui ne seront pas les mêmes que pour ce mur. Ca va également m'obliger à retourner au magasin de bricolage qui se trouve à l'autre bout de la ville et avec la circulation j'ignore si… »
« Je ne veux RIEN savoir ! Ce n'est pas MON problème, vous n'aviez qu'à pas vous planter dès le départ ! Alors assumez vos bêtises, espèce d'analphabète ! Ne vous a t-on donc pas appris à lire dans votre pays de sauvageons !? »
…
Insultes raciales, check.
« Ecoutez madame, pas la peine d'être insultante, j'ai bien compris que j'avais fait une erreur, mais ça ne vous donne pas le droit de me parler sur ce ton. En plus, je viens de vous dire que j'allais le faire sans vous refacturer bien évidemment, mais que cela devrait attendre demain parce que je… » Parvint-il MIRACULEUSEMENT à garder son calme.
Hélas, il se refit couper la parole aussi sec, avec encore plus de véhémence que la fois précédente.
« Je me moque de vos excuses ! L'emplacement doit être changé AVANT la réception que je donne ce soir et peu importe s'il vous faut passer le reste de la journée dans les bouchons ! J'ai payé d'avance pour un service et j'entends bien le recevoir QUAND et COMME je le désire ! »
Ah bordel, ça ne servait à rien d'essayer de se justifier avec elle…
Et s'il y avait bien une chose qui n'avait pas changé avec son expatriation, c'était bien le caractère de cochon de la panthère !
La moutarde commençait même SEVEREMENT à lui monter au nez et pas facile dans ces conditions de conserver son calme. On a beau dire que « le client est roi », le mec qui avait inventé cet adage le premier mériterait d'être pendu haut et court pour cela, s'il n'était pas déjà mort, bien entendu… Parce que s'il y avait bien quelque chose qu'Aomine exécrait au plus haut point, (en dehors de se cogner le petit orteil dans un meuble…) c'était bien qu'on lui manque de respect ! Et ça, c'était un trait bien souvent commun à tous ces riches nantis, imbus d'eux-mêmes juste parce qu'ils possèdent un (non, plusieurs même…) compte en banque bien fourni ! Et dans le cas présent, Aomine était CERTAIN d'avoir bien lu et scrupuleusement respecté les instructions !
Or, cette nana avait sans doute dû changer d'avis au moment où elle avait posé ses gros panards ridés (sérieux, elle chaussait au moins du 41 cette mégère…) dans la pièce, décrétant que finalement, la télévision serait plus à sa place sur le mur d'en face et rejetant la faute sur lui, pour ne pas avoir à débourser un centime de plus ! Car c'est bien connu, ce sont souvent les plus aisés qui se révèlent les plus pingres en réalité, du coup Aomine n'était absolument pas dupe de son petit numéro.
« Je comprends votre colère et elle est tout à fait légitime, mais j'viens d'vous dire que c'était impossible pour ce soir, le délai est bien trop court putain… »
« Pardon !? »
« Quoi ? »
« Vous venez de me traiter de putain ! »
Wow. That escalated quickly comme on dit aux Amériques...
« Hein ? Mais non ! Ce n'était pas vous que je… » Répliqua Aomine, les yeux exorbités de surprise.
« Si ! Si ! Je sais très bien ce que j'ai entendu ! Seriez-vous en train de me traiter de menteuse, par hasard ? Vous aggravez votre cas là ! »
« Menteuse peut-être pas, mais chieuse, ça c'est clair ! » Pensa l'ancien basketteur.
« Mais ça ne va pas se passer ainsi, ça, c'est moi qui vous le dis ! » Poursuivit la matrone, de sa voix de crécelle.
« … »
« Vous n'allez pas vous en tirer aussi facilement, ça va aller très très loin cette histoire ! Avez-vous seulement idée de QUI est mon mari ? J'appelle votre patron sur le champ ! Dehors sale d'incapable ! »
« Tsss… Oh et puis merde après tout… Faites ce que vous voulez, moi j'me casse d'ici ! »
Ramassant sa caisse à outils à bout de bras, le brun préféra débarrasser le plancher sans broncher. Ca ne servait à rien de discuter avec des gens aussi butés ! Et il en savait quelque chose, étant lui-même particulièrement bien placé pour en parler.
Marre, il en avait marre qu'on s'adresse à lui comme à un chien et qu'on s'essuie les pieds sur lui à longueur de journée. Car ce n'était pas la première fois. Comme l'avaient encore prouvé les deux mioches impolis, les riches avait cette fâcheuse tendance à confondre « esclave » et « personnel de maison ». Aomine avait bien trop souvent fermé sa bouche, prenant sur lui pour éviter un esclandre.
Hâtant le pas, il s'engouffra dans son bolide. La portière côté conducteur claqua sèchement.
Il était las.
Ce n'était pas la vie dont il avait rêvée.
Pas la vie qu'il méritait.
La tête appuyée contre le volant, il resta dans cette position un moment, dans l'espoir que sa colère finisse par se dissiper.
Il allait avoir des problèmes et se retrouver sur la paille, c'était certain…
Putain.
Tout ça pour ça.
A cause d'une vieille rombière sans doute mal baisée…
Soupirant, Aomine enclencha le contact avec sa clé et pour se changer un peu les idées, il alluma la radio.
Après tout, ne dit-on pas que la musique adoucit les mœurs... ?
… Quelle saloperie de brillante idée.
« …. Exceptionnellement ce week-end, journée portes ouvertes chez Tiger Concession ! Jusqu'à 20 % de discount, parce qu'on dunk la compétition ! Et en cadeau, un ballon de basket dédicacé pour chaque vente ! »
« Aaaahh quelle bonne journée de merde, comme je les aime… » Soupira Aomine, en éteignant aussitôt la radio, refroidi.
Au moins cette annonce lui donna t-elle la motivation de démarrer son fidèle véhicule pour s'éloigner fissa de ce quartier d'emmerdeurs...
« Mais bien-sûr que non Joe, je ne l'ai pas traitée de pute ! Ni même de catin, pour qui tu m'prends !? J'ai juste dit « putain », ok, je l'admets, ça m'a échappé, mais j'parlais absolument pas d'elle quoi ! »
Téléphone portable vissé à l'oreille, le brun avait garé sa voiture un peu plus loin pour éviter de devoir répondre au volant à l'appel de son « patron ». Non parce que s'il s'était fait choper par les flics et qu'il avait encore du se manger une amende exorbitante (qu'il n'aurait de toute façon, pas les moyens de payer…) par-dessus le marché, ça aurait été le pompon !
« Nan mais écoute-moi deux secondes… Quoi, t'es sérieux ? Tu peux pas m'virer comme ça, merde ! J'ai des droits et… PUTAIN T'AS INTERET A M'PAYER TOUT C'QUE TU M'DOIS espèce de pourri, t'entends !? Jusqu'au dernier centime ou je… ! »
A l'autre bout de la ligne, seul un tut tut désagréable lui fit écho, signe que son interlocuteur venait de lui raccrocher au nez. Et Aomine détestait ça. C'était typiquement le genre de comportements qui lui donnait envie de balancer rageusement son (innocent) téléphone par terre, mais il ne pouvait malheureusement pas se le remettre, au risque de faire plonger sa situation financière encore plus dans le rouge…
Aomine Daiki était parfaitement conscient que la nature - ou la génétique… - l'avait doté d'un « hot temper » comme le disent les gens d'ici. Entendez par là qu'il n'appréciait guère qu'on vienne lui baver de trop près sur les rouleaux. Exactement comme Chuck Norris, ouais, vous avez à peu près saisi l'idée générale du truc.
… Aussi, lorsqu'une voiture percuta de plein fouet la sienne, pourtant à l'arrêt, il lui fallut déployer des trésors de retenue et de patience, toutes droit héritées des cours de méditation que suivait assidument Momoi à une époque.
Peine perdue, son impressionnante maîtrise de soi ne dura pas plus de vingt secondes (pourtant son record à ce jour) et le fauve enragé émergea en trombe de son cockpit, une grosse veine de contrariété battant sur son front.
« Hey mais vous êtes complètement inconscientes ou quoi !? Putain mais où vous aviez la tête !? Regardez dans quel état vous avez mis ma caisse bande de petites connes pourries gâtées ! Descendez immédiatement de votre bagnole, avant que je n'décide de venir vous chercher moi-même par la peau string ! » Rugit la terrible panthère, le regard injecté de sang.
Mais les occupantes du véhicule – puisqu'il s'agissait bel et bien de trois ouailles adolescentes : une rousse, une blonde (au volant) et une brune – prirent évidemment peur. Le ton menaçant d'Aomine les fit trembler dans leurs petites culottes en coton mouillées par l'angoisse et au lieu d'assumer pleinement leurs responsabilités en proposant d'établir un constat à l'amiable suite aux importants dommages occasionnés , la chef des Totally Spies écrasa l'accélérateur, pied au plancher, dans l'espoir d'échapper à leur bourreau. Le tout, à grands renforts de cris aigus dignes d'un écureuil cardiaque effrayé par le bruit d'un pétard lancé en forêt. Et Aomine eut beau cavaler derrière elles en hurlant comme un possédé – se tapant même pour l'occasion l'un des plus beaux sprints auquel Sunset Boulevard ait jamais assisté - le trio ne le gratifia pourtant d'aucun ralentissement et bientôt, le quarantenaire les perdit de vue, à l'angle d'un carrefour très fréquenté.
Manquait plus que ça !
Et pour encore ajouter au méfait dont il venait d'être victime, tout s'était passé tellement vite qu'Aomine n'avait pas eu le temps de penser à relever le numéro de leur plaque d'immatriculation…
Super journée, vraiment.
Merveilleux !
Afin de ne pas risquer un ulcère foudroyant, Aomine réalisa qu'il devait relativiser au plus vite.
Ce qu'il tenta donc de faire avec un résultat mitigé.
Naïvement, le brun pensa que sa seule consolation résidait dans le fait qu'il ne voyait pas comment la situation pourrait encore s'aggraver.
Mais comme le clame hélas le célèbre adage, « il ne faut jamais dire jamais » et Aomine n'allait pas tarder à l'apprendre à ses dépens…
« Attendez, attendez, vous être sûre que je ne peux pas laisser ma caisse garée ici et revenir la chercher plus tard ? » Demanda t-il à la conductrice du camion de dépannage.
« Si je vous laisse faire cela monsieur, ce ne sera plus une dépanneuse, mais bel et bien la fourrière qui viendra enlever votre voiture. A vous de voir ce que vous préférez. »
« Hmmpff… ok… mais heu dites… vous n'pourriez pas au moins la remorquer jusqu'à Reseda dans ce cas ? Parce que c'est là que j'habite… »
« A San Fernando Valley ? Et bien... oui, c'est dans ma circonscription, mais j'avais plutôt reçu l'ordre d'évacuer cette épave vers … »
« Hey ! Ne parlez pas de ma brave Titine comme ça, ok !? Elle est très sensible et elle vous entend parfaitement quand vous la traitez d'épave, vous savez… » Fit-il semblant de lui cacher les « oreilles » avec les mains, en les apposant de chaque côté du capot. « En plus.. c'est pas une épave... enfin, pas encore tout à fait... »
Quelque part, Aomine avait du mal à entendre ces mots particulièrement durs, parce qu'il avait l'impression que c'était lui qu'on traitait de la sorte... Il n'était plus tout jeune non plus et il commençait à avoir pas mal de kilomètres au compteur mine de rien, tout comme sa fidèle compagne du bitume, qui le transportait depuis tant d'années... Il l'avait acquise il y a près de vingt ans, à son arrivée à L.A. et elle ne l'avait jamais quitté depuis. Au départ, le brun s'était montré plutôt réticent à passer son permis à et faire l'acquisition d'une voiture, mais sous l'impulsion d'un... certain ami... qui lui avait ouvert les yeux sur le fait qu'un véhicule était INDISPENSABLE pour se déplacer ici, contrairement à Tokyo et à son réseau de transports en commun hyper développé, Aomine avait fini par céder à l'appel du volant.
« Ecoutez, je regrette, mais notre procédure interne m'interdit de la remorquer jusqu'à chez vous. Par contre, je peux quand même faire en sorte de la déposer près de votre domicile hmmm... » La femme un peu enrobée dégaina alors son téléphone, qu'elle consulta pour géolocaliser la concession automobile la plus proche du quartier d'habitation de son client. « … Il y a justement une concession située à Encino, ça vous irait ? »
« Encino ? Ouais je vois, c'est pas très loin au sud de chez moi. Mais c'est chez les riches là-bas ! J'espère qu'ils ne vont pas en profiter pour me faire cracher encore plus de fric... »
« Mais moi... à votre place, je pense que je ne m'encombrerai pas trop de ce tas de ferraille... A mon avis, il va entraîner des dépenses de remise en état supérieure à sa valeur véritable. Vous devriez vraiment vous en débarrasser à la casse et essayer de vous faire un peu d'argent dessus, notamment grâce à la vente de ses pièces détachées. »
« Hors de question ! » S'exclama Aomine, avant de se plaquer au capot, faisant rempart de son corps. Puis, il la caressa affectueusement. « Déjà, j'ai pas les moyens de m'offrir une autre bagnole et ensuite... celle-ci a une valeur sentimentale à mes yeux, même si je sais qu'elle ne vaut probablement plus un copec... »
« C'est vous qui voyez hein, ce n'était qu'une suggestion. » Abdiqua la femme, tout en s'approchant de lui pour lui remettre une carte de visite sur laquelle étaient inscrites les coordonnées de la fameuse concession. « En tout cas, elle sera à venir chercher ici dès ce soir. Un conseil cependant : appelez-les quand même avant de passer, pour vous assurer qu'elle est bien prête à être récupérée. »
Et le sang du brun ne fit qu'un tour lorsque son regard se posa sur les lettres dorées ornant le petit bout de carton vernis...
« Putain... j'y crois pas... héhé... » Ricana t-il nerveusement. Ce n'était pas possible. Le sort s'acharnait vraiment sur lui aujourd'hui... et il kiffait ça en plus, le salop ! « Kagami... t'as vraiment décidé de te remettre à me pourrir la vie on dirait... »
Jusqu'ici, et malgré le fait qu'ils soient quasi-voisins, Aomine s'était toujours admirablement bien débrouillé pour ne jamais recroiser son ancien rival. Mais apparemment, le destin en avait décidé autrement et ça ne lui plaisait pas trop trop... M'enfin, il était trop tard pour changer de concession maintenant et puis, étant donné qu'il allait devoir s'y rendre à pied ou prendre un de ces bus bondés sans climatisation pour se rendre sur place, autant rester sur le choix de cette concession, qui avait au moins l'avantage d'être située à environ quatre pâtés de maisons de chez lui.
Et puis, c'était surtout l'occasion d'en finir une bonne fois pour toutes, en mettant au clair la situation avec Kagami...
Ouais, Aomine était bien décidé à ne pas se dégonfler à la moindre petite épreuve ou contrariété et ce n'était certainement pas celle-ci qui aurait raison de lui !
Plus déterminé que jamais, le fringuant quarantenaire enfonça donc la carte dans la poche arrière de son jean usé et il alla choper le premier bus qui passa, sans réellement se soucier de sa destination...
Grave erreur.
Car il était un peu plus de dix-sept heures lorsqu'Aomine rentra chez lui, épuisé. Enfin... « rentrer », « parvenir » semblait plus juste, vu la manière dont il avait galéré à se repérer et à prendre le bon chemin. Après avoir pris pas moins de cinq bus différents (ce qui lui avait coûté tout le contenu de son portefeuille, ou presque...) et moult péripéties moites de transpiration, il était finalement arrivé dans un quartier à l'est du sien, celui de de Lake Balboa et de là, il avait préféré terminer sa route à pied. C'était plus sage ainsi et cette décision salvatrice lui évita de se perdre davantage.
Une fois à l'intérieur de son appartement situé en rez de chaussée, une odeur franchement nauséabonde le pris à la gorge, rappelant à Aomine qu'il avait oublié de sortir les poubelles ce matin. Qu'à cela ne tienne, il rassembla les bouteilles vides et autres cartons de pizzas décomposées et à moitié entamées qui fleurissaient sur le sol de chaque pièces, en enfouissant un maximum dans un sac noir dans l'espoir de faire disparaître le fumet vomitif qui flottait tenacement dans l'air. Prenant le reste des récipients en verre qui avaient refusé d'y entrer dans son autre main, il sortit de chez lui les bras chargés, croisant dans l'allée un gamin aussi basané que lui, qui jouait innocemment avec un ballon de basket.
Aomine ne se soucia guère de le bousculer en passant, mais il ne put tout de même pas s'empêcher de jeter un rapide coup d'oeil à la façon (médiocre) dont l'adolescent d'une quinzaine d'années dribblait. C'était... rare de voir des jeunes jouer au basket dans le coin. Et puis, il n'avait encore jamais vu ce gosse auparavant et pourtant, il vivait ici depuis près de vingt-ans. A qui appartenait-il et surtout, d'où sortait-il ?
Hmm... ce n'était pas son problème et puis de toute façon, il s'en foutait.
Aomine se dirigea donc d'un pas pressé vers le container, parce que le sac venait de se percer et qu'un liquide poisseux aussi dégueulasse que difficilement identifiable menaçait de tâcher ses sneakers de collection, seule extravagance vestimentaire à laquelle Aomine avait refusé de renoncer. Et peu importe s'il était possible de le suivre à la trace et tant pis pour ses voisins s'il était en train de souiller toute l'allée ce faisant.
Mais alors qu'il s'apprêtait à déverser le contenu de son régime alimentaire déséquilibré, Aomine fut interrompu par l'adolescent indélicat qui ne trouve pas mieux qu'attendre qu'Aomine ait le dos tourné pour l'attaquer sournoisement par derrière, d'un coup de ballon bien placé pile entre les omoplates.
Et ça ne faisait pas du bien.
Déjà qu'il avait mal aux cervicales à cause de la sorcière qui l'avait agressé tout à l'heure, ne sachant pas s'il devait attribuer cette douleur à la tension nerveuse ou à l'effort conséquent qu'il avait été obligé de fournir pour accrocher sa putain de télévision, avant que cette pouffiasse ne se rétracte le moment était bien mal choisi pour qu'on vienne encore lui baver sur les rouleaux.
Se figeant sur place, Aomine fit volte face vers son bourreau, prêt à lui passer un savon dont le jeune allait se souvenir jusqu'à l'âge de sa retraite.
« P... pardon Monsieur... ! Mon ballon m'a échappé ! »
Aomine confisqua immédiatement ledit ballon, le gardant bien coincé sous son bras pour empêcher l'adolescent de le récupérer. Et ce n'était pas quelques excuses formulées de manière hypocrites qui allaient lui sauver la mise... Ah... ce qu'il pouvait avoir horreur de tous ces petits cons mal élevés qui ne trouvaient rien de mieux que venir jouer dans ses pattes ! Et MAL, par dessus le marché !
Mais même devant le manque de réaction de son interlocuteur (et son air constipé...), le garçon ne se dégonfla pas pour autant et il reprit la parole :
« Heu je... je m'appelle Cristobal et j'ai emménagé ici avec ma famille, ce matin... »
« Super. Encore des putains d'immigrés... » Lâcha Aomine avec un enthousiasme à couper au couteau. « Et puis, Cristobal ? Sérieusement ? C'est quoi ce nom à deux balles ? Tes parents ne devaient pas beaucoup désirer ta venue au monde pour t'affubler d'un blase pareil ! »
Pour donner plus de poids à ses mots, Aomine tourna à peine la tête afin de le jauger de la tête aux pieds : et le gamin était... plutôt grand, il devait toiser le mètre quatre-vingt cinq et il avait des cheveux noir de jais coupés très courts, le front à moitié caché sous un genre de frange sculptée au gel bon marché et de petits yeux marrons en amande. Il portait un vieux sweat à capuche gris chiné sans marque et une paire de baskets usées au bout. Mouais... pas très impressionnant... Il ressemblait à un coton tige géant, grand et fin, sans muscle. Pas de quoi se chier dessus, ni même lâcher un petit petou de trouille dans le fond du slip !
Or, si ça avait été le cas, Aomine lui aurait sans doute rendu son ballon sans broncher, mais là... pas de quoi flipper de cette grande asperge un peu trop grillée. Au contraire, il pouvait même se permettre de déverser gratuitement sur lui un discours aux relents racistes bien sentis.
« Et d'où tu viens comme ça ? Ils t'ont pas r'callés à la frontière ? J'croyais que Trump devait faire construire un mur... »
« Heu je... suis né ici, en Amérique, Monsieur... » Précisa le gosse, pas vexé pour un sou.
« Ouais bah l'Amérique c'est vaste ! Et ça comprend l'Amérique du sud aussi. Alors quoi ? Mexique ? Argentine ? Madrid ? »
« … Oakland, dans le New Jersey et heu... Madrid, ce n'est même pas un pays. Et ça ne se situe pas non plus en Amérique du sud, hein... »
Conscient que ça lui en touchait une sans faire bouger l'autre, Cristobal s'empressa d'enchaîner, main tendue en signe d'amitié.
« … mais enfin, peu importe ! Je suis ravi de faire votre connaissance, Monsieur... ? »
« Aomine... » Souffla le quarantenaire entre ses dents, sans pour autant accepter de serrer la mimine à ce mangeur de tacos.
Et de s'en retourner à ses affaires personnelles, pour envoyer ses bouteilles vides rejoindre son sac dans le container cette fois.
« Vous savez, je viens tout juste d'arriver dans la résidence, mais je crois que le verre ça va dans le bac bleu avec tout ce qui est recyclable... »
… Ce qui n'empêcha naturellement pas Aomine d'ignorer sa remarque, obligeant le jeune homme à changer de sujet, histoire de continuer à faire la conversation.
Par politesse, sûrement.
« Au fait, vous n'avez pas de problèmes de tuyauterie vous aussi ? Quand ma mère a voulu faire la vaisselle tout à l'heure, l'évier de la cuisine s'est mis à déborder et... »
Le japonais referma sèchement le couvercle du container en un bruit sourd pour le faire taire, manquant au passage d'amputer Cristobal de ses dix doigts, lui qui avait eu la bonne idée d'appuyer ses mains contre le rebord de métal.
« Toute la copropriété est touchée par des soucis d'évacuation. » Répondit Aomine d'une voix morne.
« Oh... »
« … Et on a souvent des remontées d'égout. Et l'eau du robinet a un goût de pisse. Ca fait près de vingt ans que je suis coincé dans ce trou à rats... » Lança le brun en se retournant vers le jeune homme pour le regarder droit dans les yeux pendant qu'il parlait. Et ainsi mieux faire passer le message. « … et le seul avantage que j'y trouve, c'est qu'au moins en vivant ici, je ne suis obligé de parler à PERSONNE. Est-ce que c'est clair, gamin ? »
« Ou-ouais... je crois... » Balbutia le jeune, qui ne s'attendait certainement pas à essuyer un tel revers, lui qui essayait simplement de se montrer amical.
La « discussion » étant close, Aomine s'éloigna alors vers son appartement non sans lui avoir lancé un dernier regard noir au passage.
« Attendez, Monsieur Aomine ! Est-ce que vous pouvez juste m'rendre mon ballon ? » Tenta l'hispanique.
Ce qu'Aomine fit, dans sa grande magnanimité, l'envoyant valser en un geste aussi impressionnant que précis, sans même se retourner...
… droit dans la poubelle d'à côté, dont le couvercle était grand ouvert.
Celle qui servait JUSTEMENT à recycler le verre...
Sous le regard médusé, mais admiratif du jeune Cristobal, qui venait de comprendre par ce geste technique que son voisin n'était décidément pas comme les autres.
Son portable était formel : dix-neuf heure six.
Il avait la daaaaaaaaaaaalle.
Et doute rien au frigo, pas même une petit bière qui s'y sentirait délaissée.
Mais il ne pouvait pas commander à bouffer tout de suite, puisqu'en effet, la concession auto fermait ses portes à vingt heures. Son estomac allait donc devoir attendre encore un peu.
Et le temps qu'il attrape un bus (pas de quoi se payer un Hubber) et qu'il se rende sur place, son téléphone affichait dix-neuf heure trente sept lorsqu'il se présenta à l'entrée de la concession.
Un grand bâtiment à l'architecture moderne, parsemé de baies vitrées pour laisser entrer la lumière. Aomine se sentait tout petit à côté de ce qui se trouvait être le symbole de la réussite absolue de Kagami.
Il était encore temps de faire demi-tour...
Mais Aomine savait pertinemment qu'il n'aurait pas le courage de revenir demain.
Un flot incontrôlé de souvenirs commençait à refaire surface de manière inopinée et Aomine décida d'y couper court en inspirant un grand coup pour se donner du courage, puis il pénétra dans l'enceinte du rutilent établissement.
A l'intérieur du grand hall aseptisé aux couleurs froides, des employés – hommes et femmes – tous en costumes ou tailleurs tirés à quatre épingles s'affairaient auprès des clients. Et à en juger par les fringues que ces derniers portaient également, ils avaient les moyens de mettre la main au portefeuille pour s'offrir toutes les options possibles et imaginables sur leur nouvelle voiture. Contrairement à lui qui ne pouvait même pas remplacer son allume cigare... et dont la tenue vestimentaire détonnait grandement avec le reste de la clientèle.
Intimidé, Aomine considéra un moment de se planquer derrière la plante verte qui agrémentait la salle d'attente, avant de renoncer à cette option, peu confiant dans ses réelles capacités de camouflage.
Lorsqu'enfin l'hôtesse d'accueil lui fit signe de s'approcher, il se présenta sommairement, expliquant de manière aussi brève que possible l'objet de sa venue et...
… tandis qu'il balayait du regard la grande pièce centrale, celle où les modèles de voitures les plus coûteux étaient exposés, Aomine aperçut une silhouette bien connue.
Or, malgré le poids des années et la canne qu'il employait encore parfois pour se déplacer plus aisément, Kagami n'avait rien perdu de sa superbe. Une aura féroce émanait toujours de lui et Aomine sentit comme un courant électrique lui remonter le long de la colonne vertébrale. Il en avait la chair de poule et son cœur loupa même un battement. Après tout ce temps et même s'il s'était préparé mentalement à ce qui allait arriver, ça lui faisait un PETIT quelque chose de revoir son rival et ancien ami d'antan.
… bon ok, un GROS quelque chose même !
Tellement gros que le brun fit soudainement pris d'un sentiment de panique irrépressible ! Par chance, Kagami ne l'avait pas encore remarqué et Aomine avait encore le temps de quitter les lieux sans se faire remarquer, ni vu, ni connu !
« … Ah je l'ai trouvée Monsieur. Oui, nous l'avons bien reçue et elle est actuellement dans notre atelier pour réparations, mais cela va prendre au moins deux semaines pour la remettre en état et... »
« Faites la transférer ailleurs. »
« Quoi ? Mais Monsieur... je vous prie de croire qu'il n'existe pas de meilleur service ni de meilleur prix dans toute la ville. Vous ne trouverez vraiment pas mieux qu'ici. » Essaya de le convaincre la blonde à gros seins. Astucieuse technique pour inciter les hommes à s'attarder ici ou à confier leurs belles cylindrées à réparer... pendant qu'ils étaient plongés dans l'observation d'un autre genre de gros cylindres...
« Ecoutez, le client est roi ici aussi, non ? » Wow, il avait vraiment bien retenu la leçon dispensée par la pimbêche de ce matin... « Alors j'exige que ma voiture soit... oh bon sang, c'est pas vrai ! »
Le brun gronda en constatant que Kagami venait tout juste d'en finir avec ses clients.
« Et merde ! » Lâcha t-il, avant de prendre ses jambes à son cou, enfin, ça aurait été suspect, donc il se contenta juste de se diriger vers la sortie en accélérant le pas, priant pour que Kagami ne le reconnaisse pas et...
… de toute façon, de dos, il n'y avait aucune chance pour que ce soit le cas, donc il était tranquille, tant mieux parce que...
« Aomine !? Aomine, c'est bien toi ? »
…
RAAAH PUTAIN DE PIEDS QUI NE L'AVAIENT PAS PORTE ASSEZ VITE !
Mais même à l'appel de son nom, Aomine ne ralentit pas. Surtout à l'appel de son nom, d'ailleurs ! Au contraire, il accéléra le pas pour s'enfuir comme le gros lâche qu'il était, au plus vite ! Derrière-lui, il pouvait entendre Kagami qui continuait de l'interpeller en se rapprochant dangereusement à l'aide de sa canne. Pas question de se retourner. Pas question de prendre le risque de faiblir...
« Attends ! »
Malheureusement pour Aomine, Kagami n'avait rien perdu de sa ténacité, ni de sa détente légendaire et tel un fauve, il plongea littéralement à plat ventre sur le comptoir de l'accueil, sous le regard ébahi de son employée. Dans la foulée, il s'empressa d'appuyer sur l'un des boutons qui contrôlait l'ouverture des portes automatiques.
Cela eut pour effet de les VERROUILLER et un choc violent fit écho alors dans tout le bâtiment. Car, comme il fallait s'y attendre, le front d'Aomine (ainsi que son nez) heurta de plein fouet la vitre en plexiglas, le faisant gémir de douleur. Foutues portes ! Et ce fut un Kagami essoufflé qui en profita bien évidemment pour rejoindre sa proie à moitié assommée, elle. Pas très fair play comme technique de chasse, on vous l'accorde, mais diablement efficace !
Vexé de s'être laissé afficher devant tout le monde et au comble de la douleur physique, Aomine fit volte face pour confronter son adversaire, le nez gros comme une patate et une bosse poussant sur son front meurtri.
Ouuuh que ça allait chier !
« ESPECE DE GROS TAS DE MERDE A SOURCILS ! Non mais ça ne va pas de me claquer la porte à la tronche comme ça !? Un peu plus et j'aurai été défiguré à vie, faut vraiment t'faire soigner ! »
Enfin, en l'occurrence, c'était plutôt lui qui allait avoir besoin de se faire soigner et sa note d'hôpital (sans assurance, bien évidemment, parce que sinon, ce ne serait pas drôle...) risquait d'atteindre une somme à quatre chiffres...
« C'était le seul moyen pour te forcer à t'arrêter PAUVRE CLOCHE A LA PEAU BASANEE SI SEXY ET AUX MUSCLES SI SAILLANTS PARFAITEMENT MOULES DANS CE T-SHIRT SI JUDICIEUSEMENT FLATTEUR ! »
« Hein ?! »
« Quoi ? »
« … Tu fantasmes sur moi Kagami ? »
« Alors ça, c'est la meilleure, j'suis marié, j'te signale ! »
« Oui, mais tu viens d'avouer que tu me trouvais incroyablement sexy ! »
« J'ai juste dit SEXY, pas INCROYABLEMENT ! »
« Haaaan tu vois ! T'as recommencé ! Tu viens de le redire ! » S'écria Aomine en agitant un index accusateur vers Kagami.
« Pfff n'importe quoi ! Je suis 100 % hétérosexuel, moi monsieur ! »
« Ah ouais ? Alors pourquoi t'es en train de baver sur mon corps de dieu grec si c'est l'cas ? »
« Je ne bave pas. Et dois-je te rappeler lequel de nous deux avait des magazines porno GAYS planqués sous son lit à la fac ? »
« Je t'ai déjà dit que c'était UNIQUEMENT pour comparer ! » Rougit Aomine, qui, de rage, se jeta sur le tigre en l'empoignant par le col de sa veste impeccablement repassée.
De là, un pugilat général d'en suivit, mais Aomine eut facilement le dessus sur son adversaire et il parvint à le repousser en le plaquant sur le capot d'une voiture et...
« Aomine ? »
Retour à la réalité. Le brun secoua la tête pour rappeler son esprit vagabond à l'ordre. Fini de divaguer et d'un demi-tour rapide sur lui-même que n'aurait pas renié Mickael Jackson, Aomine se présenta à son rival. Main sur le nez bien entendu, pour ne pas montrer qu'il était blessé et conserver le peu de dignité qu'il lui restait encore.
« Non, je suis le pape et j'attends ma sœur ! »
« Hmm... » Maugréa Kagami, qui n'avait jamais été très réceptif niveau blagues de toute façon. « Je bien savais que c'était toi. »
« Tiiiiiiens Kagami ! Moi, je ne t'avais pas reconnu dis donc ! »
Et de s'empresser de rajouter une petite saloperie gratuite, histoire de rester crédible :
« En même temps, il faut dire que t'as pris un méchant coup de vieux ! »
Comme il fallait s'y attendre, cette pique bien placée ne fit pas franchement bondir de joie Kagami, (ce fut même plutôt tout l'inverse...) puisque ce dernier gratifia l'ancien Miracle d'un coup de canne bien senti dans les côtes. Et par réflexe, Aomine se servir de la main qui dissimulait jusqu'alors son visage, pour s'en servir afin de protéger son flanc droit. Ce geste anodin eut pour conséquence de laisser son appendice nasal bien visible et le tigre ne manqua pas d'apercevoir le mince filet rouge qui ne demandait qu'à se faire la mal. Remarquant l'instance avec laquelle Kagami le fixait à présent, Aomine renifla pour forcer la goutte de sang à faire discrètement (non) le chemin inverse, ni vu ni connu en mode « même pas mal » !
Et rien que cette tentativette désespérée de conserver la face le fit douiller comme pas possible, signe que son nez était PROBABLEMENT cassé.
Allez, ce n'était rien !
La douleur, c'est dans la tête...
Uniquement dans la tête !
« J'ignorai que... tu vivais toujours dans le coin. »
Kagami relança les hostilités en premier, apparemment pas décidé à le laisser lui filer entre les doigts sans une bonne explication.
« Moi non plus... Enfin, je veux dire, je ne savais pas que tu étais revenu habiter à Los Angeles ! » Mentit éhontément Aomine.
Parce qu'il le veuille ou non, Kagami était plutôt difficile à « rater » ici, en particulier avec le nouveau panneau publicitaire géant qui lui faisait la part belle juste au bout de la rue où le brun demeurait.
« Si... avec ma femme Karen et mes deux enfants, Dana et Alexander. Après l'accident... Il faut dire je n'avais plus vraiment ma place à Chicago... Alors je suis rentré ici pour tout reprendre à zéro. C'était la meilleure option nous tous. »
« Hmm... sans doute... » Répondit évasivement Aomine, sans trop y croire néanmoins. « Et donc, maintenant tu vends des voitures ? »
« Il semblerait, oui. » Sourit chaudement Kagami. « Il s'agit de l'ancienne concession des parents de Karen, ce sont eux qui nous l'ont cédée. »
« Je vois. Les affaires ont l'air de plutôt bien marcher pour toi. C'est... cool. »
« Ouais, c'est cool. J'avais peur de ne pas savoir comment rebondir après le basket, mais finalement, je n'ai pas eu à me poser la question trop longtemps et j'ai eu de la chance que tout se passe bien. Ce n'est jamais facile une reconversion professionnelle, mais... tu dois le savoir aussi, j'imagine ? Et toi, qu'est-ce que tu fais de beau en ce moment ? D'ailleurs... est-ce que tu joues encore au basket de temps en temps ? »
… Kagami risquait d'être bien déçu par sa réponse, aussi, en éluda t-il volontairement la première partie.
« Nan je n'joue plus depuis un petit moment déjà. »
« Plus du tout ? »
« Non. »
« Quel dommage, tu étais si doué. »
« Toi aussi, tu l'étais. Mais pour tout te dire... j'ai arrêté de jouer sérieusement quand tu t'es blessé. C'était plus pareil sans toi et puis de toute façon, c'était toi et seulement toi que j'avais envie d'affronter... »
Moment de silence.
Malaisant ou pas... ?
« Dis donc, tu n'serais pas en train d'essayer de me draguer, toi ? Tu sais que tu n'as pas besoin de ça pour obtenir une réduction ? » S'empressa de le taquiner Kagami, comme pour briser l'atmosphère un peu trop sentimentale qui venait de s'abattre sur eux. « Alors, que puis-je faire pour toi ? Je suppose que tu n'es pas venu ici pour papoter du bon vieux temps. Tu cherches une nouvelle voiture ? On a justement ce nouveau modèle qui... »
« Nan, j'suis pas v'nu pour ça t'as raison et... pas non plus pour acheter une nouvelle bagnole. J'suis toujours aussi fauché, ça, ça n'a pas changé. En fait... je venais récupérer la mienne, elle est ici normalement, vous avez du la recevoir ce matin... »
« Ah bon, la tienne ? Hmm... laisse-moi vérifier ça... Un instant, je te prie. » Fit Kagami en demandant à l'hôtesse de lui apporter une tablette tactile, qu'il consulta scrupuleusement. « Ah oui, c'est exact, j'ai bien une voiture à ton nom dans notre atelier... Une... Pontiac Firebird de 1982, couleur bleu électrique... ? Really Aomine... » Soupira t-il concerné et in english please, alors que le reste de leur conversation s'était fait exclusivement en japonais jusqu'ici. « Tu ne voudrais pas plutôt profiter de ta présence ici pour passer à quelque chose de plus... disons... moderne... ? »
« Pas question. Ecoute, je veux juste récupérer ma voiture, alors dis-moi simplement combien j'te dois pour les réparation et ensuite j'me casse. Après ça, tu ne me reverras plus, t'en fais pas. »
Un peu étonné par les paroles du brun, Kagami replongea le nez dans les chiffres affichés par la tablette et il secoua la tête, d'un air … embarrassé.
« Je pense qu'il serait plus sage qu'on te cherche plutôt un modèle d'occasion, parce que même en entrant mon code personnel et en t'appliquant le discount réservé aux amis et à la famille... »
« Amis et famille » ? Vraiment ? Alors Kagami le considérait encore ainsi... ? Malgré tout leur passif... ?
« … le coût total d'une remise en état s'élève à trois mille huit cent dollars... soit plus que le prix auquel tu pourrais espérer revendre ce tas de ferraille... Ca n'vaut pas l'coup de te lancer dans de telles réparations... » Annonça aussi gentiment que possible le tigre.
Malheureusement, ce ne fut pas suffisant pour attendrir la panthère et cette annonce suffit à lui faire voir rouge...
« C'est cette voiture que je veux et pas une autre ! MA voiture ! Et puis, pourquoi est-ce que je te croirai ? Après tout, tu m'as bien piqué Jennifer à la fac ! Si ça s'trouve, tu vas encore m'faire le même coup avec ma Titine ! » Asséna fourbement Aomine.
Bien entendu, cette affirmation fit immédiatement réagir Kagami, qui, se sentant agressé, haussa le ton à son tour.
« Hein, quoi !? Tu as un sacré culot de m'accuser de t'avoir volé ta petite-amie de l'époque ! En plus, tu débloques complètement parce que vous étiez séparés quand ELLE s'est jetée dans mes bras, de son propre chef, alors ne confonds pas tout ! »
« Ouais, c'est ça bien-sûr ! Prends-moi pour une truffe ! Tu savais pourtant très bien que je tenais à elle ! Et puis, on n'était PAS séparés elle et moi ! On faisait juste une pause, mais c'était en train de s'arranger et il a fallu que tu viennes tout foutre en l'air, comme d'habitude ! »
« Comment ça, comme d'habitude !? »
« Oh c'est bon, fais pas l'innocent ! Tu sais très bien que toutes les nanas n'avaient d'yeux que pour moi, dès qu'elles apprenaient que tu allais jouer en NBA ! Suffisait qu'elles soient aux courant et hop, elles me délaissaient toutes pour venir se pâmer devant toi ! »
« What !? Mais ce n'était même pas moi qui leur disais ! C'est TOI qui leur balançais cette info pour les appâter ! « Regardez mon pote va jouer en NBA et devenir une star ! » Tu sais très bien que moi, je n'aurai jamais utilisé cette méthode ! » Se défendit Kagami.
« Ah ouais ? Et pourquoi ça ? »
« Parce que je ne l'approuvais pas ! »
« Mito ! Pour quelle raison ? Parce que tu te croyais déjà tellement mieux que moi en ce temps là ? Genre, moi, Môssieur Kagami, je n'ai pas besoin d'avoir recours à tels subterfuges pour pécho de la gonzesse ! »
« Tu n'y es pas du tout Aomine ! »
« De toute façon... t'as toujours adoré être le centre d'attention de tout le monde... A tel point que le jour où tu t'es blessé, tu as totalement renoncé au basket parce que tu ne pourrais plus te donner en spectacle... Et c'est à ce moment là que j'ai compris tu n'étais pas digne de ma confiance... Parce que tu m'avais jure qu'on jouerai toujours ensemble... quand et à chaque fois que je le voudrai... mais tu as rompu ta promesse... sans même penser à moi... »
Ce fut comme un coup de poignard porté en plein cœur, faisant ressurgir des rancoeurs enfouies et Kagami eut même un mouvement de recul, profondément choqué et blessé par ce qu'Aomine venait d'insinuer. Dire qu'il pensait en avoir fait son deuil depuis longtemps...
« T'étais pas... j'veux dire, t'étais pas obligé de complètement abandonner le basket... tu pouvais juste... arrêter la NBA si c'était trop dur physiquement pour toi, mais continuer quand même à jouer avec moi... Je suis sûr... que tu aurais pu le faire... mais t'as pas voulu... t'as même pas essayé... A aucun moment t'as pensé à moi, en fait. A aucun moment tu t'es dit que peut-être... t'étais en train de me laisser sur le carreau moi aussi... Le basket n'avait plus d'intérêt pour moi si tu n'étais pas là... ! J'avais même changé de fac pour pouvoir t'affronter ! Putain, tu m'as tellement déçu ce jour-là Taiga... »
« Comme d'habitude... tu te montres toujours extrêmement dur envers les autres. Beaucoup plus qu'envers toi et tu ne manques jamais une occasion de les juger. Et comme d'habitude, tu rapportes toujours tout à toi. On ne pouvait pas passer notre vie à juste nous affronter au basket comme des gamins, Aomine ! J'espérai qu'après toute ces années, tu l'aurais enfin compris, mais j'ai de toute évidence était bien trop optimiste... Il serait temps de grandir un peu, merde ! A t'entendre, on dirait que ça a été facile pour moi de tirer une croix sur le basketball... mais tu ne réalises pas tous les sacrifices que j'ai du faire pour en arriver là ! »
« Pfff... tu l'as dit toi-même : tu n'as eu qu'à épouser une greluche et à hériter de ses parents ! De toute façon, t'as toujours eu le cul bordé de nouilles ! Même ton père avait de la tune, t'as jamais connu ni affronté la misère toi ! Tout ce que tu voulais, tu l'as toujours obtenu tout cuit dans le bec ! T'as jamais été un battant en fait... c'est ça la différence entre nous ! »
« De quel droit oses-tu tenir un tel discours et insinuer que j'ai pu me marier par intérêt avec Karen ? Surtout après ce que tu as fait... et sachant que tu es en partie responsable de la blessure qui a brisé mes rêves ! Non mais regarde-toi, pauvre type, tu es pathétique à vivre coincé dans ta jalousie... à n'avoir jamais rien réussi à faire de ta vie et à venir ensuite le reprocher aux autres... » Répliqua avec mépris le tigre qui avait sorti les griffes.
Les deux hommes étaient vraiment à couteaux tirés, le regard planté l'un dans l'autre. Il y avait de l'électricité dans l'air et deux employés masculins avaient même commencé à s'approcher d'eux pour pouvoir intervenir au cas où les deux fauves décidaient de se sauter à la gorge en public.
« Tu sais quoi ? Tu m'as trop soûlé là, ça m'a donné envie de te péter ta jolie petite gueule. Et si tu crois que je ne vais pas oser te taper dessus parce que t'es un éclopé, c'est que tu m'connais pas aussi bien qu'tu adores le prétendre... » Prévint d'emblée Aomine, tout en faisant craquer ses phalanges.
C'était à son tour de se sentir blessé par les propos de Kagami.
Comment ce dernier pouvait-il croire une seule seconde que la panthère puisse être impliquée de près ou de loin avec le handicap qui avait causé sa déchéance ? C'était complètement con ! Ca aurait été comme de se tirer une balle dans le pied, alors qu'Aomine n'avait jamais demandé rien de mieux que pouvoir continuer à jouer avec Kagami... Pourquoi, dès lors, l'aurait-il privé de ses facultés physiques ?
« Doesn't matter to me... bring it... just like old times... » Répondit Kagami, qui avait même délaissé sa canne pour l'occasion, prouvant la gravité de la situation.
Aomine ne put s'empêcher d'avoir un rictus mauvais, dévoilant ses canines.
Il n'était pas rare que les deux garçons en viennent aux mains à l'époque de la fac. Ca faisait partie intégrante de leur relation. Ils n'allaient bien entendu jamais jusqu'à s'envoyer mutuellement à l'hôpital, mais en général, après une bonne petite baston, les compteurs étaient remis à zéro et ils pouvaient repartir sur ce bonnes bases, chacun ayant pu exprimer et évacuer sa frustration. Aomine avait d'ailleurs toujours pensé qu'à la manière qu'ils avaient de se bouffer le nez continuellement que ce soit par jeu ou plus sérieusement, si Kagami avait été une meuf, ça se serait plutôt fini en position horizontale entre eux. Si vous voyez ce que je veux dire...
Et alors qu'ils étaient prêts se bondir dessus, poings et mâchoire serrés, une gamine arriva par derrière et sauta sur le dos de Kagami. Un saut magnifique, vraiment, puisqu'elle parvint sans mal à atterrir sur le quarantenaire qui tutoyait pourtant facilement les deux mètres de haut...
« Dad ! ^_^ »
« Dana ? Bon sang, tu m'as fait peur ! »
Instantanément la voix et les traits du visage du tigre se radoucirent.
« Désolée, d'habitude, tu m'entends toujours arriver... _ »
Surpris, Aomine baissa sa garde, observant la scène. Et bien vite, la dénommée « Dana », donc, le remarqua. Elle était grande, pour une fille et toutes proportions gardées hein, approchant le mètre quatre-vingt. Ses fines jambes étaient particulièrement longues et Aomine en avait un bon aperçu étant donné que l'adolescente d'environ seize ans ne portait qu'un short en jean rikiki. Bon par contre, niveau nibard, c'était plutôt circulez, y a rien à voir ! Le calme PLAT même mwahaha ! Dommage, parce qu'à part ce léger manque mammaire, elle était plutôt mignonne avec son nez aquilin et ses longs cheveux rouges rassemblés en une queue de cheval entourée d'un ruban de la même couleur.
Une chose était sûre : elle devait être liée à Kagami par le sang, vu la ressemblance frappante entre les deux. (la frange, surtout.)
Ah et aussi, indice irréfutable, elle l'avait appelé « papa » !
Attends, quoi ? Papa !?
Cette ado était la fille de Kagami !?
A moins que ce ne soit son sugar daddy.... ouais, nan, très peu plausible quand on connaissait Kagami... (mais lui, en revanche, il aurait carrément été partante. Dommage qu'il n'ait pas assez de tune pour se le permettre !)
Hmm... c'est vrai que tout à l'heure, Kagami avait mentionné avoir des enfants, deux, mais Aomine n'y avait pas fait très attention sur le coup, occupé qu'il était à mater son... NON !
« Tu ne me présentes pas ton ami, Dad ? » Demanda t-elle carrément, sans quitter Aomine des yeux, comme si elle était en train de le détailler sans pression.
« Mon ami ? Ce n'est pas mon hmmm... » Toussa Kagami, gêné, avant de se ressaisir. Mieux valait que la chair de sa chair ignore ce que lui et son « ami » comptaient se faire avant qu'elle n'intervienne. Il lança d'ailleurs un regard implorant à Aomine comme pour lui demander de bien consentir à – temporairement – enterrer la hache de guerre. « Dana, je te présente Aomine... Aomine Daiki. »
« Oh ! Un autre compatriote japonais ! Comme oncle Himuro et tante Satsuki ? »
« Heu oui voilà, c'est ça. Je t'avais déjà dit que nous étions revenus vivre aux USA à quatre, non ? Et bien Aomine est ce fameux quatrième larron. »
« Hmm... c'est vrai ? » Fit-elle, suspicieuse, avant de descendre du dos de son paternel destrier.
Elle se pencha alors vers Aomine, plissant les yeux, dans le but d'afficher sa conviction pour le moment aux abonnés absents.
« Bien-sûr que ça l'est ! D'ailleurs, au passage, Satsu était ma meilleure amie biiiiiiiien avant même d'épouser ce... enfin... cet... ton oncle Himuro quoi. C'est moi qui l'ait connue en premier ! »
« Ah oui ? Alors comment se fait-il que ni elle, ni Daddy ne m'aient jamais parlé de vous ? »
« J'en sais rien moi. Ils ont du oublier. Probablement. »
Genreeeeeeeee il était POSSIBLE de l'oublier, lui, le GRAND, l'UNIQUE, Aomine Daiki !
Donc bon, niveau excuse, c'était absolument à chier, on est bien d'accord. Mais sur le coup, c'était tout ce qu'Aomine était parvenu à inventer. Et il ne fallait pas trop lui en vouloir, car après tout ce n'était pas si mal pour quelqu'un qui s'apprêtait, il y a encore quelques minutes de cela à peine, à refaire intégralement le portrait du père de cette mioche...
« Hmm... »
Pas convaincue la lycéenne.
Mais faute de mieux, elle s'en contenta...
… Pour le moment.
« Ta journée s'est bien passée ma fille ? » Enchaîna rapidement Kagami, histoire de ne pas laisser son adorable progéniture s'immiscer davantage dans ses affaires privées.
« Ah heu... oui mais hmm... à ce propos de ça, j'étais justement venue te parler de quelque chose... mais tu dois me promettre que tu ne vas pas te fâcher, d'accord ? »
Bizarre...
A bien la regarder, cette petite (grande) demoiselle lui évoquait vaguement quelque chose, Kagami mis à part, évidemment.
Mais quoi ?
C'était presque comme si... il l'avait déjà croisée quelque part, furtivement, mais sans pouvoir se rappeler précisément où...
Quelle étrange sensation.
« Qu'y a t-il ? Tu sais très bien que tu peux absolument tout me dire, mais moi en revanche je ne peux pas te faire une telle promesse, je regrette... »
« S'il te plaît ! Sinon, je ne te dirai rien... ! »
« Et bien ne me dis rien alors. Tant pis pour toi. »
« Mais... c'est super injuste ! Je viens vers toi en te disant que je suis prête à t'avouer une faute et toi tu me rembarres tout ça parce que j'ai osé te demander de ne juste pas t'énerver... ?! »
« C'est bien ça, tu as tout compris. J'ai horreur du chantage et tu le sais pourtant. »
« Hmmpff... » Bouda t-elle de manière trop mignonne en gonflant les joues, ce qui ne manqua de rappeler Satsuki au même âge à Aomine. « Hey vous, le soit disant « ami de la famille », vous n'pourriez pas m'aider ? » Le harangua justement Dana.
Et d'ajouter :
« Après tout, si vous connaissez Tante Satsuki, c'est que vous êtes un peu mon oncle vous aussi ! »
« Quoi ? Moi, « oncle » ? Ca va pas, nan ? Tu m'as bien r'gardé ? Est-ce qu'un type aussi cool que moi a une gueule à être tonton ? » Manqua de s'étrangler le brun.
« Ben qu'est-ce qu'il y a ONCLE Aomine, on n'assume pas son nouveau rôle ? » Se moqua Kagami à son tour.
« Mais j'vous emmerde moi, j'ai rien à voir avec vos histoires de famille à la con ! Et puis quoi encore !? » S'égosilla la panthère en sautillant sur place.
Non mais ! Lui, il n'avait rien à faire de près ou même de loin avec la famille Kagami ! Et si Satsuki en faisant par alliance partie, maintenant parce qu'elle avait décidé d'épouser le cyclope, ce n'était pas SON problème à lui !
« Tsss... vous n'êtes vraiment pas sympa comme bonhomme, vous savez ! Pas étonnant avec ce genre d'attitude que Papounet et Tante Satsuki vous aient « oublié » !
…
Non mais comment elle lui rabattait le caquet cette petite péronnelle !
Aomine n'en revenait pas !
Ne devrait-elle, genre, pas avoir peur de lui ou quelque chose comme ça ? Après tout, sans son intervention, il aurait massacré sans pitié le gars qui lui servait de géniteur !
SO CHOCKING !
« Enfin bref... j'imagine que dans le fond, tu n'as pas réellement envie de savoir comment s'est passée ma journée, alors... » Fit-elle mine d'être affligée.
ET CELA FONCTIONNA !
« Bon... c'est d'accord, je te promets de rester calme quoi que tu dises. Ca te va ? »
Merde, Kagami ! Là, tu décevais beaucoup Aomine ! Lui qui te pensait un peu plus... ferme sur tes positions ! Enfin, seulement quand ça l'arrangeait d'une quelconque manière...
« Parfait ! Alors donc aux alentours de midi, Jessica a nous a proposé à Cindy et à moi de sortir manger dehors parce que le menu de la cantine ne l'inspirait pas. Elle a pris sa voiture et nous sommes allées faire un tour du côté de Sunset Boulevard, histoire de trouver un bon resto ! Sauf que ben... à un moment, Jess a perdu le contrôle du véhicule, apparemment, une sombre histoire de talon aiguille se serait pris dans la pédale de marche avant au lieu de la marche arrière d'après ce que j'ai compris... Un accident vraiment bête, quoi ! Heureusement, moi et Cin on avait bien mis nos ceintures et Jess aussi, parce qu'on est rentrées dans l'arrière-train d'une voiture, qui, heureusement, était déjà à l'arrêt elle. Et personne n'a été blessé, sinon, ça aurait pu être beaucoup plus grave, comme tu l'imagines ! Sauf que ce qu'on avait pas vu, c'était que son proprio se trouvait encore à l'intérieur, sûrement un SDF ou quelque chose comme ça vu le vieux jean déchiré qu'il portait, un truc qui ne se fait plus depuis les années 90 au moins, tu te rends comptes, il y avait plus de trou que de jean, enfin bref... »
LOL
Aomine ne put s'empêcher de ricaner en imaginant la scène.
« Et alors, vous avez fait quoi du coup ? Vous avez appelé la Fashion Police pour signaler ce grave crime contre la mode ? » Lança t-il, un peu pince sans rire.
Sans même se douter que...
« Haha... très drôle... je suis morte de rire, tiens. Bref, si vous pouviez continuer à ne pas vous en mêler cher Tonton, je vous en serai extrêmement grée. Je disais donc... que la voiture était occupée et là le type a surgi comme un fou échappé d'un asile psychiatrique ! Je t'assure, ça faisait flipper ! Il avait de l'écume aux lèvres et tout ! Alors tu connais Jess... elle s'est enfuie direct en hurlant ! Elle a démarré en tombe et j'ai eu beau la supplier de s'arrêter, parce que ça ne se faisait trop pas pour le pauvre gars... elle a refusé d'entendre raison et de revenir établir un constat d'accident... Quand elle a décidé un truc celle-là, impossible de la faire changer d'avis, une vraie bourrique... »
« Oh mon Dieu, Dana ! Tu sais que c'est très grave ce que vous avez fait ? C'est du délit de fuite ! »
« Dad... n'oublie pas ta promesse stp... » Le reprit immédiatement la jeune fille.
« Bah ouais Daaaad, n'oublie pas ta promesse, allons ! Je sais que t'as une mémoire de poisson rouge, mais quand même ! Tu l'as faite il n'y a même pas cinq minutes ! » Se moqua allégrement Aomine, bras croisés sur le torse.
Finalement, il avait bien fait de rester. Il s'amusait beaucoup et normalement, Kagami n'allait pas tarder à péter une durite, sanguin comme il était !
Et il lui tardait d'assister au réveil du tigre !
… Mais au lieu de cela, il eut plutôt droit au numéro d'un autre animal : celui de l'inoffensif papa-poule...
« Allons Dana, tu me déçois beaucoup... je ne t'ai pas élevée comme ça... »
« Pardonne-moi papa... je sais que c'est très mal ce que nous avons fait, mais je t'assure... que j'ai tout essayé pour obliger Jessica à venir se dénoncer... Je regrette vraiment ce qui s'est passé et pour être franche, ça m'a même dégoûtée de monter à nouveau en voiture avec elle... je crois que je vais plutôt prendre le bus dorénavant pour me rendre au lycée, si toi ou maman vous n'avez pas le temps de m'y déposer avant de partir travailler, bien-sûr. »
« Bon d'accord, je te crois. Allez, viens me faire un câlin ! J'imagine que tu as du avoir très peur ma puce... »
« Oh oui ! C'était hyper impressionnant, même pour un si petit accident... et ce pauvre homme... J'espère que de son côté, il n'a rien de cassé... Parce que quand je vois à quel point ça à suffi à complètement ravager son véhicule... »
Aomine ricana à nouveau.
Ouais, ça lui faisait du bien d'apprendre qu'un autre type s'était fait ruiner sa caisse aujourd'hui.
Et ouais, ça faisait également de lui un grooooooos enfoiré de l'admettre.
« Pour te dire, son pare choc arrière s'est carrément décroché sous le choc ! Heureusement que c'était une vieille voiture n'empêche... je n'ose même pas imaginer le montant des dégâts que ça aurait engendré sur une voiture de valeur tout juste sortie d'usine ! »
« Elle était si vieille que ça ? C'était peut-être une voiture de collection... tu te souviens du modèle ? »
« Pas vraiment... je me rappelle jusque que c'était une voiture américaine et... qu'elle était bleu... genre... bleu pétant... d'une couleur qu'on ne voit pas très souvent, alors ça m'a marquée... »
...
Attends une seconde... ?
Une voiture D'UN BLEU PETANT ?
SUR SUNSET BOULEVARD ?
VERS MIDI ?
PERCUTEE A L'ARRET ALORS QUE LE CONDUCTEUR ETAIT ENCORE A SON BORD ?
…
Aomine sentit son propre sang se mettre à bouillir dangereusement dans ses veines, tel un volcan prêt à entrer en éruption !
Et Kaga sembla arriver à la même conclusion que lui parce qu'il cacha Dana derrière lui afin de la protéger de la race destructrice digne d'un Super Saiyan de son ancien rival !
« Calme-toi Aomine... on peut régler ça entre adultes civilisés ! »
« Dégage de là Kagami... toi, t'as peut-être promis de ne pas t'énerver, mais moi, rien ne m'empêche de le faire ! »
« Ok, ok... dans ce cas, disons que j'accepte de prendre entièrement en charge la réparation de ta voiture à mes frais... »
« ELLE M'A TRAITE DE SDF ! »
Dana comprit alors...
… pile au moment où son regard se porta non pas sur le regard de fou d'Aomine, semblable à celui qu'il leur avait lancé au moment de l'accident, mais sur son jean... troué... étant donné que le brun n'avait même pas daigné se changer avant de venir. Oui, ce fut bel et bien ce détail vestimentaire qui lui mit la puce à l'oreille.
« C'est toujours mieux que FDP... » Marmonna t-elle, sans se douter qu'Aomine allait l'entendre.
« QUOI !? » Vociféra l'agresseur.
« … L'autre vilain mot en trois lettres, mais pas SDF papa... »
« Heu... MST.. ? »
« On dit IST maintenant. Mais c'est pas ça... Quoiqu'il doit en avoir aussi vu sa tronche... »
Mesdames et Messieurs, les Kagamis !
« ARRETEZ DE M'IGNORER BORDEL ! »
« Très bien, tu as gagné Aomine ! Je t'offre des sièges en cuir également ! »
« … Tu crois VRAIMENT que tu peux m'acheter aussi facilement, juste après que ta garce de fille ait essayé de me tuer ? »
« … Dois-je te rappeler qui a essayé de tuer l'autre le premier ? »
Son regard rubis s'assombrit immédiatement et Aomine calma donc ses chevaux, comme on dit aux Amériques...
« … Bon d'accord, disons qu'on est quitte et va pour les sièges en cuir en supplément. Mais je veux de nouvelles jantes chromées aussi ! »
« Deal... Dana, tu veux bien aller m'attendre dans la voiture, le temps que je fasse signer à TONTON Daiki son bon de commande ? » Exigea t-il en tendant les clés à son aînée.
« Oui p'pa... heu... Tonton Dai, j'ai été... pas ravie de te connaître en tout cas ! A la prochaine ! »
Elle lui adressa un clin d'oeil espiègle avant de disparaître, les laissant entre adultes consentants. (ou pas.)
« Dis donc... elle n'a peur de rien ta gamine, sacré caractère qu'elle a là... Tu vas en chier avec elle plus tard si tu ne lui mets pas un p'tit coup de serrage de vis dès maintenant ! »
« Je te remercie pour tes conseils PARENTAUX avisés, toi qui ne saurais même pas faire la différence entre un nourrisson et un poupon en plastique, Ô Aomine le Grand, mais tu peux te les foutre au cul. Et t'asseoir dessus tant que tu y es... » Rétorqua Kagami, qui n'appréciait pas des masses qu'on vienne lui dire comment éduquer ses enfants.
Décidément, le papa-poule savait se muer en véritable TIGRESSE lorsque l'on s'en prenait à sa progéniture...
Aomine en eut des frissons.
« Pas la peine de l'prendre comme ça, chill bro... Moi j'disais ça, c'était pour toi... »
« Je te remercie de ne pas te mêler de ma vie de famille, Aomine. Si tu tiens tant que cela à donner ton avis, fonde la tienne ! »
« Hey ! Commence pas à m'emmerder Kagami ! C'est ta fille qui m'est rentré dedans, j'te signale ! C'est MOI la victime dans cette sordide histoire, alors n'inverse pas les rôles à ta convenance ! »
« Oh je vois... alors c'est ça le problème... » Répondit pensivement le rouge.
Et dans la foulée, Kagami abandonna sa tablette sur le rebord d'un comptoir et il s'approcha d'Aomine, le forçant à reculer. Une fois qu'ils eurent disparu du champ de vision des autres employés, derrière la grande plante verte nichée dans l'entrée et que le dos d'Aomine se cogna contre une vitre, Kagami se pencha vers lui pour lui souffler chaudement à l'oreille les paroles suivantes :
« … tu es aigri parce que c'est ma FILLE qui t'est rentrée dedans... alors qu'on sait très bien tous les deux que tu aurais préféré que ce soit moi qui te défonce l'arrière-train... »
La panthère pouvait sans mal sentir l'haleine mentholée du tigre, si fraîche... qui caressait tendrement son lobe.
Mais trop surpris pour réagir sur le coup, Aomine pensa qu'il était à nouveau en train d'halluciner, tout comme cela avait été le cas un peu plus tôt, lorsqu'il venait de franchir le seuil de la concession. Il repoussa donc Kagami avec une fermeté dont il ne se serait jamais cru capable et il lui lança :
« T'as intérêt à ce que ma caisse soit refaite à l'identique, sinon, je dénonce la petite pétasse qui sert d'amie à ta fille au commissariat ! »
Le brun venait à nouveau de ruiner l'ambiance...
« Ce sera fait, tu as ma parole. Par contre... » Reprit-il en tendant le bras pour récupérer sa précieuse tablette. « … mauvaise nouvelle, ils ne fabriquent plus du tout en usine la même référence que ta peinture bleue... Enfin bon, c'est l'occasion parfaite de changer de couleur ! Pourquoi ne pas la repeindre en rouge ? C'est une teinte qui va très bien aux Pontiacs... »
« Mais oui, bien-sûr en ROUGE ! Et pourquoi pas en marron caca d'oie aussi, tant qu'on y est !? »
« Heu... je ne crois pas qu'on ait cette couleur là, mais si tu y tiens je peux me renseigner si tu v... »
Excédé par la trop grande crédulité de Kagami, Aomine lui arracha des mains son calendrier Maya ou peu importe et il le fixa droit dans les yeux, ne cachant aucunement sa déception.
« J'en étais sûr putain... tu n'te souviens vraiment de rien... Déjà tout à l'heure, quand je suis entré, j'avais un doute, mais à présent, j'en suis certain... »
« Qu'est-ce que tu racontes encore ? »
« Réfléchis bien... c'est à propos de cette voiture... »
« Ben c'est une Pontiac, quoi... comme celle que tu avais quand tu es arrivé à Los Angeles. C'est peut-être pas exactement le même modèle, mais elle y ressemble en tout cas. »
« Alors tu t'en rappelles quand même un peu... » Soupira Aomine, en lui tournant le dos.
« Bien-sûr. On l'avait dégotée grâce à mon père. Hmm... et donc ? »
Un espoir.
Une bride de souvenir...
Comme une braise qui ne demande qu'à se rallumer.
« Si tu te souviens de ça, alors tu te rappelles sans doute aussi qu'on avait passé tout un été à la retaper... ? Rien que toi et moi... dans l'allée du garage de ton daron... Putain, on commençait à bricoler dessus aux aurores et on ne s'arrêtait qu'à la nuit tombée, le seul moment où on pouvait jouer au basket, d'ailleurs, tellement on passait tout notre temps dessus pendant la journée... »
« Je m'en souviens vaguement oui... mais où veux-tu en venir ? »
« Qu'est-ce qu'on avait pu galérer, n'empêche ! On était nuuuuuuuls en mécanique et pourtant, on voulait s'occuper de tout, d et on ne voulait surtout pas que quelqu'un s'en mêle, ni Himuro, ni même ton père. Elle a englouti toutes mes économies cette caisse, ainsi qu'une bonne partie des tiennes et j'ai même été obligé de prendre un petit boulot de nuit pour pouvoir continuer à la financer, mais avec pas mal de persévérance et un peu de chance, on a réussi à la remettre en état... Et puis cette peinture bleue, putain, cette peinture ! Quelle histoire ! C'est toi qui m'avais conseillé de prendre cette foutue voiture de marque AMERICAINE et non une Honda comme c'était prévu au départ... mais tu avais tellement insisté que j'ai pas su dire non... mais tout ce que je voulais en retour c'était que tu m'aides à la retaper. Pour pouvoir passer du temps avec toi. Et aussi... que je puisse choisir sa couleur. Et t'avais dit ok et au final, c'est toi aussi qui as trouvé ce bleu-là... un type louche de Santa Monica qui avait réussi à t'en refourguer une vingtaine de pots qu'on a eu du mal à écouler par la suite parce que c'était de la bonne saloperie chargée de plomb hyper nocif... Mais nous, on en avait rien à foutre, parce que c'était NOTRE bleu, NOTRE couleur, à tous les deux... »
Sa voix tremblait un peu d'émotion, alors il avait tout dit d'une traite pour être bien sûr d'arriver au bout. Jamais il n'aurait cru avoir à reparler de ces instants de bonheur, profondément enterrés au fond de son cœur et sur lesquels il avait pourtant tiré une croix.
« I'm sorry Aomine, really, I didn't realise... Pour moi... c'était une autre voiture, une voiture différente de celle qui se trouve actuellement dans mon atelier... Je ne pouvais pas savoir... Ici, les gens changent souvent de voiture, ça va avec la culture du pays et par conséquent, je croyais que... »
« C'est bon, pas la peine de te justifier... »
« Je suppose que ces moments passés ensemble n'étaient tout simplement pas aussi importants pour toi que pour moi... » Pensa mélancoliquement le fauve sombre.
« Ne t'en fais pas... ta voiture sera remise en état à l'identique, je te le promets ! » Affirma Kagami, en lui sortant son plus beau sourire commercial.
Hmm... il devait sans doute se faire blanchir les dents plusieurs fois par an pour qu'elles soient aussi étincelantes. Mais quand on est dans la vente comme c'était son cas, on se doit d'avoir une image irréprochable. Cependant, Aomine ne sentait plus la moindre authenticité chez le tigre lorsqu'il s'adressait à lui comme à un client lambda. Pourtant, tout n'était pas perdu... Aomine avait aperçu le véritable Kagami tout à l'heure. Son masque de gentil concessionnaire conciliant était tombé le temps d'une dispute et Aomine en avait ressenti des frissons d'excitation. C'était exactement comme avant et cela faisait longtemps que lui non plus n'avait pas ressenti une telle exaltation...
Lui pour qui plus rien n'avait de sens, ni même d'importance...
A part ses souvenirs... Ceux d'une autre vie... et qu'il chérissait.
« J'espère bien. J'passerai la chercher quand elle sera prête. »
« Je peux venir moi-même te la déposer si tu veux, ça t'évitera d'avoir à te déplacer à nouveau... »
Son cœur se mit à battre la chamade d'imaginer que Kagami pourrait venir chez lui... dans son quartier... dans sa résidence... puis dans son appartement... et enfin dans son lit... Il avait intérêt à tout bien ranger et à changer les draps pour... AHEM !
« Wooow carrément ? Le grand PDG serait prêt à venir me personnelle dans mon quartier mal famé pour me livrer ma voiture ? Je ne sais pas si je dois me sentir extrêmement flatté ou plutôt... insulté... J'te connais Kagami... et j'ai bien capté que ta proposition n'avait rien à voir avec une quelconque générosité de ta part. En réalité, si tu daignes me faire cette offre, c'est uniquement pour éviter que je remette les pieds dans ton magasin, car sait-on jamais, je pourrai me remettre à foutre le bordel ou faire un autre scandale, comme aujourd'hui et ça risquerait de salir ton image bien lisse. » Se ressaisit la panthère, pas dupe de la soudaine gentillesse du tigre à son égard.
Kagami arrivait peut-être à tromper son monde ici, mais pas lui.
Jamais.
Et évidemment, cette remarque ne manqua pas de faire froncer ses sourcils (toujours) bifides au roux.
« Fuck you Aomine... puisque tu le prends comme ça, je demanderai à ce qu'un de mes employés t'envoie un SMS pour te prévenir quand tu pourras venir récupérer ton véhicule et je m'arrangerai naturellement pour être en voyage d'affaires à ce moment-là ! »
Sans trop savoir pourquoi, Aomine ne put s'empêcher d'avoir un petit sourire narquois face à la réponse de Kagami... Peut-être parce qu'il était familier de ce genre de comportements de la part du tigre. En effet, déjà à l'époque, Kagami ne manquait jamais une occasion de prendre la mouche et par conséquent, Aomine prenait un plaisir particulier à venir le titiller, afin de le pousser à bout. C'était même... ouais... l'un de ses petits plaisirs personnels favoris.
Mais chut, pas question de l'avouer au principal concerné, bien évidemment... ça perdrait toute sa saveur si Kagami était au courant. Ses réactions deviendraient beaucoup moins spontanées, déjà qu'il semblait hélas avoir gagné en maîtrise de soi avec les années... au grand damne d'Aomine...
« Ouais, on n'a qu'à faire comme ça, bref, sur ce je me casse et j'espère que nos routes ne se recroiseront plus jamais ! »
« De même, Aomine, de même. Oh mais attends... avant de partir... c'est la procédure pour tous les clients, j'ai quelque chose à te remettre... »
Cette fois, le sourire narquois changea de camp puisque ce fut Kagami qui l'afficha. Il passa devant la panthère et se dirigea d'un pas décida vers ce qu'Aomine devina être un genre de... réserve... (?) dont il revint avec un... BALLON DE BASKET !?
« Tiens, chaque acheteur repart toujours avec un ballon de basket dédicacé par moi. » Sourit-il fièrement en le lança dans les bras du brun.
« Ohhh je vois, excellente marque de fabrique. Le basket et les voitures, ça va tellement de paire, faut dire ! Et puis ça tombe bien, je me disais justement qu'il me manquait un bon punching ball pour faire mon sport... »
« Parfait alors, je suis ravi de savoir qu'il ne prendra pas la poussière sur une étagère. » Répondit Kagami sans se départir de son sourire. Mais lorsqu'il se rapprocha pour lui glisser quelques mots à l'oreille, son ton changea radicalement. « … même si je préférerai qu'il finisse dans ton lit... tu pourrais dormir avec, il te tiendrait compagnie, toi qui n'as malheureusement jamais trouvé de femme assez folle pour te supporter plus de deux semaines d'affilée... »
« Enfoiré... » Persifla Aomine, la mâchoire serrée.
« For you, I can be anything you want... See ya around Dai. »
Et sur ces bonnes paroles, il s'éloigna, plus souriant que jamais.
Laissant un Aomine perdu, planté là comme le dernier des cons.
Et se demandant si Kagami était du genre à flirter avec tous ses clients...
Ou juste avec lui.
La nuit venait de tomber et à cause de toutes ces émotions, il avait besoin d'une bonne bière.
Tout de suite.
Non, plusieurs, même.
Et peut-être d'une bouteille de whisky aussi, tiens.
Recroiser Kagami ça lui avait donné envie de très vite tout oublier. Et pour ce faire, quoi de mieux que fêter (noyer) leur rencontre dans l'alcool ?
Pour Aomine, la question ne se posait même pas. Il ressentait un immense besoin d'ivresse.
Machinalement, il avait gardé le ballon de basket dédicacé offert par Kagami sous le bras, tandis qu'il se rendait à la supérette la plus proche de son domicile. Un endroit paumé dans un minuscule centre commercial composé de cinq boutiques au maximum, à côté du duquel se trouvait un terrain de streetball défraîchi et bien souvent désert.
Aomine poussa la porte de l'enseigne sans nom, aux néons qui projetaient une lumière bleutée blafarde sur la rue. Tâtant, puis fouillant ses poches pour évaluer à la louche de combien il disposait financièrement, Aomine attrapa une bouteille de vodka directement et il décida de s'offrir également une part de pizza, tant pis pour la bière. De toute manière, il ne pouvait pas ramener grand chose, vu qu'il était venu à pied.
La pizza reposait dans un mini-four crado juché sur le comptoir, derrière lequel s'affairait un gros bonhomme joufflu (probablement d'origine hispanique), dont la barbe abondante lui bouffait la moitié du visage. Aomine se gratta mécaniquement le menton. Merde, il avait complètement oublié de se raser ce matin. Paie ton allure négligée. Et avec son jean usé en plus, pas étonnant que Dana l'ait traité de SDF... Pendant qu'il faisait la queue pour être servi, il remarqua que le client qui faisait la queue derrière lui (le seul du magasin...) se trouvait être son jeune voisin de pallier, croisé un peu plus tôt dans la journée. Aomine lui lança un rapide regard, que le garçon lui retourna uniquement par politesse, mais il resta néanmoins silencieux. Parfait, le gosse avait bien retenu la leçon...
… Ou pas...
« Ma grand-mère ne se sentait pas très bien, alors je suis passé lui acheter quelques médicaments... » Tenta t-il maladroitement de justifier sa présence ici, des fois qu'Aomine puisse se figurer qu'il l'avait peut-être suivi en cachette.
« Osef. » Lui répondit abruptement Aomine, avant de reporter son attention sur le caissier, qui semblait galérer avec sa part de pizza. « Oi gros lard ! T'aurais quand même pu enfiler un gant pour me la servir, au lieu de mettre tes grosses paluches poilues dessus ! Tu sais, pour l'hygiène, ce truc vachement important qui n'existe probablement pas dans ton pays de porcs ! »
L'employé de la supérette roula des yeux, les levant au ciel en signe d'agacement et c'est alors que Cristobal remarqua le ballon qu'Aomine tenait toujours inconsciemment sous son bras, semblant le couver comme un gros œuf d'autruche...
« Woaah ! Il est vraiment trop cool votre ballon ! Moi, je n'ai pas les moyens de m'en offrir un comme ça... »
Rien à voir, en effet, avec le machin vaguement rond et à moitié dégonflé avec lequel Aomine avait surpris son jeune voisin en train de jouer dans l'allée.
« Hein ? Oh, ce vieux machin... tu viens de me rappeler que je comptais justement m'en débarrasser en le jetant aux ordures... »
« Quoi !? Mais pourquoi feriez-vous une chose pareille ? Il est tout neuf en plus, ça se voit qu'il n'a encore jamais été utilisé ! Ce serait dommage de le balancer aux ordures alors qu'il peut encore servir ! »
« Ok, j'ai compris, tu l'veux c'est ça ? » Soupira Aomine, déjà gavé rien qu'à l'entendre piailler.
« Noooon, vous me le donneriez ? Mais... j'ai pas d'quoi l'payer... »
« Vas-y c'est bon, on n'a qu'à dire j't'en fais cadeau vu que j'comptais le lourder de toute façon. Mais en échange, tu dois me promettre d'arrêter de venir me parler, d'accord ? Je croyais que tu avais déjà compris tout à l'heure que j'aimais pas les gens. En plus, tu ne m'intéresses pas et j'ai pas envie de discuter, ni même de me faire des amis, c'est assez clair cette fois ? »
« Voui... » Approuva Cristobal, non sans une pointe de déception dans la voix.
« Good. « Il remit donc le fameux ballon au petit brun en guise de pacte, avant de reporter son attention sur le proprio. « Bon, ça vient cette pizza oui ou merde !? Et foutez-la moi dans une assiette au moins, putain ! »
« Este pendejo debe de tener una pequena polla... » Marmona t-il dans sa barbe.
Ce qui eut pour effet de faire pouffer l'adolescent, qui bien entendu, avait tout compris, lui.
Et ce fut très loin de plaire à Aomine.
« Qu'est-ce qu'il vient de dire là ? »
« Oh hmm... rien de spécial ! »
« Dis donc toi, je sais où tu habites au cas où tu l'aurais oublié... »
« Il... il a juste dit que vous deviez certainement avoir une petite bite pour être aussi chiant... »
« Quoi ? Il pense que je suis frustré à cause de la dimension de mon chibre ? Putain, il manque pas d'air ce gras du bide... Tu peux lui dire que... »
« Je comprends l'anglais Senor ! Ca fera un cinq dollars quatre-vingt... »
Aomine maugréa à nouveau avant de laisser l'argent sur le comptoir à contrecœur. Il récupéra sa part de pizza ramollie et il s'empressa de sortir. Etant donné qu'il n'était pas franchement pressé de rentrer, il posa son royal fessier sur le bord du trottoir qui bordait le parking, puis il se mit à manger tranquillement, sa précieuse bouteille de vodka postée près de lui et prête à l'emploi.
Mais à peine eut-il le temps de prendre sa première bouchée, qu'une femme à l'aspect négligé et débraillé, les cheveux en bataille, pas de maquillage et en guenilles, l'aborda.
Une sans domicile fixe.
« Hush ! C'est MON supermarché, MON territoire, ici ! Alors finis ta pizza et va mendier ailleurs ! »
« Putain... mais j'suis pas un clodo moi ! » Répondit Aomine avec une moue de dégoût.
Et une pointe de vexation, du fait qu'on ait pu le prendre pour un éventuel clochard... La femme s'éloigna finalement en poussant mollement son caddie rempli d'immondices, lorsqu'un hummer fit irruption sur le parking, musique hip hop à fond la caisse. L'imposant véhicule déversa alors trois adolescents de sexe masculin, qui passèrent devant Aomine en se charriant et en lui soufflant dessus la fumée puante d'un joint... Ah putain... qu'il détestait ce genre de petits cons... Déjà à l'époque, lorsqu'il avait leur âge, Aomine avait horreur de ces racailles irrespectueuses...
« Hé Rodney ! Pas de bière sans alcool cette fois, ok ? Et n'oublie pas de prendre des capotes aussi ! » Lança celui qui semblait être le chef de la bande.
Un grand asiatique plutôt beau gosse, sapé tout en marques.
Aomine les suivit du coin de l'oeil, jusqu'à ce qu'ils disparaissent dans la supérette.
Putains de gamins bruyants...
Mais son répit ne fut que de courte durée, car à peine le convoi eut-il franchi le seuil de la boutique, que des éclats de voix retentirent.
Pas moyen de bouffer sa pizza tranquille...
Aomine décida néanmoins de ne pas s'en mêler. Après tout, ça ne le regardait pas.
Même si les brutes du coin étaient en train de s'en prendre à son jeune voisin.
« Tiens, tiens... qu'est-ce qu'on a là... ? »
Le chef poussa Cristobal sur le bitume et il se pencha ensuite pour ramasser le maigre butin de sa victime : soit un billet de cinq dollars, une boîte de médicaments et le fameux ballon gracieusement offert un peu plus tôt par Aomine.
« Une boîte de cachetons pour la chiasse ? Alors comme ça, on a la diarrhée looser... ? Et c'est quoi ça ? Hmm... ? »
« Rendez-moi mon ballon ! »
« Ton ballon ? Kagami Taiga, number #10... eh mais il est dédicacé par le père de Dana ! Où tu l'as trouvé ? Tu l'as volé, c'est ça !? »
Aomine releva la tête, observant la scène de loin.
« Pas moyen qu'une fiotte comme toi ait pu se l'offrir ! Alors, dis-moi à qui tu l'as chouré ? »
L'asiatique écrasa la joue du malheureux Cristobal avec son pied, l'enfonçant bien au sol. Le pauvre latino lança un regard désespéré en direction d'Aomine main tendue vers lui, sans doute pour implorer son aide, mais le grand basané continua de l'ignorer. Il avait bien assez d'emmerdes comme ça...
Cependant, ce geste ne passa pas inaperçu aux yeux de l'asiatique et ce dernier délaissa sa proie, non sans l'avoir gratifiée d'un dernier coup de pied dans le ventre, la faisant se tordre de douleur. L'impact fut si violent que Cristobal se tordit de douleur, tandis que ses agresseurs se déplacèrent tel un groupe de hyènes ricanantes vers la panthère.
« ... »
« C'est ce clodo qui t'a refilé un si beau ballon ? » S'exclama le blond de la meute.
« J'suis pas un clochard... » Répondit posément Aomine. « Ecoutez les mecs, je ne cherche pas les ennuis, d'accord ? Alors foutez-moi la paix et allez jouer ailleurs. »
« Pas un clodo ? Pourtant, t'es en train de picoler sur le parking désert d'une supérette, en jean troué et mal rasé... » Ajouta le gamin tête à claques.
« Hey mais... j'le reconnais ce type ! Il est venu chez moi déboucher les chiottes en début de semaine ! » Rétorqua un petit gros aux cheveux frisés.
« Ah c'est pour ça qu'il sent la merde... j'me disais bien aussi ! » Rit le blond.
Avant même que l'adulte n'ait pu réagir, il se saisit de la bouteille de vodka pas encore entamée d'Aomine et il fit une passe furtive à son chef avec, lequel se trouvait déjà à quelques mètres de là, sur le terrain de streetball.
« Hey rendez-moi ça bande de petits enculés ! C'est le dernier avertissement ! »
« Ouuuhhh ! Sinon tu vas faire quoi sale clodo ? »
« Vous botter le cul. »
« Bah vas-y viens, espèce de vieux dégueulasse ! »
Et sur ce, l'asiatique envoya le précieux breuvage du brun valser... tout droit dans le panier de basket... En retombant, la bouteille se brisa naturellement, dispersant ses éclats de verre un peu partout sur le sol. Cela eut pour effet de causer l'hilarité générale du groupe de jeunes délinquants.
Pris d'une colère sourde, Aomine se leva promptement et d'un pas déterminé, il se dirigea vers le caïd de la bande, qui faisait tourner le ballon de basket signé par Kagami sur son index. Apparemment, ce gamin avait quelques solides notions de basket.
« Quoi, qu'est-ce tu vas faire, bouffon ? »
« T'as cherché des noises à la mauvaise personne, bridé de mes couilles... »
« Bridé ? Putain, mais tu t'es regardé toi ? »
Mesdames et Messieurs, Aomine Daiki ! Le seul gars qui serait capable de traiter son frère (s'il en avait eu un...) de « fils de pute » sans remarquer qu'ils avaient la même mère...
« J'parie que la dernière fois qu'il l'a fait, son miroir a du exploser en mille morceaux, exactement comme sa bouteille de poivrot ! » Ricana le blond.
Mais tandis que les trois garçons étaient occupés à rire et à se moquer, Aomine en profita pour fondre sur leur chef à la vitesse l'éclair, lui dérobant sans mal le ballon. Puis, il leur lança un défi solennel :
« Vous avez des notions de basket, non ? Alors affrontez-moi sans vous chier dessus... »
Le trio de gus cligna des yeux un instant face à la vivacité du geste, avant de se remettre à aboyer.
« Tous les trois ? Tu vas te faire laminer papy ! » Affirma le frisé, sûr de lui.
« Tu sais à qui tu t'adresses au moins ? On est pas des rigolos nous, on est dans l'équipe de basket du lycée de Reseda ! Et on n'va faire qu'une bouchée de toi, gros ! »
« Et toi, tu sais à qui tu parles, sale merdeux ? »
« Aomine Daiki... qui a remporté... huit championnats de streetball avec son équipe à Venice Beach... » Murmura Cristobal, qui s'était relevé entre temps.
Il avait tout juste réussi à boiter en se tenant l'abdomen, jusqu'au grillage séparant le parking du terrain.
« Aomine Daiki hein ? Ouais, j'ai entendu parler de toi, en effet... Petit truand qui arnaquait les autres joueurs en pariant illégalement de l'argent pendant les matchs et on m'a même raconté que c'est toi qui avais mis un terme à la carrière du père de Dana... » Enonça l'autre asiatique, pas impressionné pour un sou.
Il fit alors signe à ses gars de se mettre en position, un sourire carnassier aux lèvres, qui rappelait beaucoup le sien à Aomine.
« Parfait. Je vais pouvoir venger le père de Dana en te roustant, je suis sûr que ça me sera très utile pour arriver à la baiser... »
« Putain... tout ce que je voulais moi, c'était juste picoler tranquille... mais il a fallu que je tombe sur la bande de masos du coin... Quelle journée de merde, jusqu'au bout. » Soupira Aomine en se mettant à dribbler.
Il effaça sans aucun problème les deux potes de l'asiatique. Les yeux fermés.
Parce que même s'il était beaucoup moins rapide qu'avant, Aomine avait toujours le basket dans le sang. Et ce n'était pas quelques gamins désoeuvrés qui allaient lui apprendre à jouer. Se débarrasser des deux pots de colle ne fut donc qu'une formalité. Il feinta le premier par la gauche, quant au second, il le piégea en exploitant l'ouverture laissée par ses jambes trop écartées, qui avaient laissé apparaître un trou béant à travers lequel la balle n'eut aucun mal à passer.
Par contre, ce ne fut pas le même son de cloche face au leader des terreurs...
Le gamin était incontestablement doué comparé à ses deux faire-valoir et Aomine n'en attendait pas moins de celui qui avait la plus grande gueule. Un peu de résistance ne lui ferait pas mal et le quarantenaire dût faire preuve d'ingéniosité pour le mettre dans le vent. L'asiatique vint au contact, s'interposant efficacement entre Aomine et le panier. Malheureusement, le basané se trouvait encore trop loin pour tenter un tir direct. Dans sa prime jeunesse, il en aurait sans doute été capable, mais avec deux décennies de plus dans les pattes et un manque handicapant de luminosité, Aomine préféra ne pas s'y risquer, de peur de louper sa cible. Obligé de stopper sa course le temps de trouver une solution, Aomine parvint tout de même à conserver le ballon. Son adversaire le suivait à la trace, anticipant chacun de ses mouvements et paraissant lire dans ses pensées.
Hmm...
Tant pis.
Les techniques classiques ne suffiraient pas à en venir à bout.
Aomine comprit donc qu'il lui faudrait ruser en tentant la solution la plus audacieuse. Un regain d'adrénaline fouetta les veines, lui donnant l'impulsion nécessaire à marquer le panier de la victoire en effectuant un magnifique alley oop parfaitement maîtrisé. Accélérant brusquement, il lança le ballon au dessus du filet, le faisant stratégiquement rebondir sur le cadre, qui lui renvoya le projectile dans les bras, ce qui lui permet de dunker au dernier moment. Le gamin ne put rien faire pour l'en empêcher, littéralement soufflé sur place par l'éclair bleu.
GAME. OVER.
Les deux comparses de l'asiatique détalèrent sans demander leur reste, mais ce dernier ne bougea pas, s'entêtant à rester planté sur place.
« Hey les gars, r'venez ! J'veux une revanche ! » Exigea t-il, mauvais perdant. « T'as eu un coup de bol, l'ancêtre ! »
« C'était pas d'la chance. Mais du talent. Sauf que t'es trop con pour le comprendre ! »
Brusquement, Aomine lança le ballon dans la figure de son adversaire qui, de toute évidence, ne s'y attendait pas. Le bronzé profita du vacillement engendré pour le faire tomber au sol d'une balayette bien placée, puis, il écrasa le poignet du jeune brun, avant d'appuyer sur le visage de cet asiatique prétentieux, à la manière dont il l'avait fait avec Cristobal tout à l'heure.
« Et maintenant, tu vas me nettoyer tout ce bordel que t'as causé avec ta langue ! »
« Pardon !? Hors de question que je lèche cette vodka bon marché dégueulasse ! »
N'acceptant pas son refus, Aomine lui enfonça davantage la tête dessus...
« Arrêtez ça merde ! Y a du verre partout ! J'risque de m'couper et choper le tétanos ! » Paniqua le jeune homme, plus si arrogant tout à coup...
« Rien à foutre. »
« Monsieur Aomine ! » L'interrompit Cristobal au son des sirènes de voitures de police qui arrivaient sur place. « Les poulets arrivent, faut pas qu'on traîne dans l'coin, venez vite ! »
Il tira alors Aomine par la manche de son sweat et le bleuté ait à peine le temps de ramasser son ballon, enfin, celui qu'il avait confié à l'hispanique. C'était sûrement le gérant de la supérette qui avait alerté les flics du grabuge qui était en train de se produire sur le parking. Malgré l'envie qu'Aomine pouvait avoir de continuer à en découdre avec le jeune foireux qui avait osé lui tenir tête, son voisin parvint à l'éloigner suffisamment des lieux du pugilat pour l'empêcher de se faire arrêter par la police.
Grâce à sa réactivité, Cristobal lui avait évité de finir sa nuit en taule, mais bien loin de se montrer reconnaissant, Aomine se contenta de l'ignorer sur le chemin du retour à leur bercail commun. Une fois à l'intérieur de la résidence, Aomine envoya le ballon au jeune homme qui le rattrapa sans mal et il s'empressa de se diriger vers son appartement pour se remettre de ses émotions, ou plus précisément dans son cas, évacuer sa rage. En vrai, il douillait un peu au niveau des mollets... ça faisait longtemps qu'il n'avait pas touché un ballon et fait du basket de manière sérieuse. Or, il n'était plus tout jeune et son corps lui ferait sûrement son excentricité à coup de courbatures douloureuses dès demain.
« Attendez ! Je... je voulais vous remercier pour tout à l'heure... » L'interrompit l'adolescent.
« C'est bon, tu l'as fait. Maintenant, rentre chez toi et ne m'adresse plus jamais la parole. »
« Non... s'il vous plaît... écoutez au moins ce que j'ai à dire... Vous êtes une telle légende du basketball de rue ! Quand vous m'avez donné votre nom tout à l'heure, j'ai tout de suite su qu'il me disait quelque chose, alors je suis allé me renseigner sur Wikipédia pour en avoir le cœur net et... Bon sang, vous avez été GENIAL là-bas ! »
« Y a vraiment pas d'quoi chier une pendule du fait que j'ai mis une branlée à une bande de petits branleurs... »
« Ben moi, je vous ai trouvé EPOUSTOUFLANT ! Dios mio... qu'est-que j'aimerai devenir votre élève ! Vous pensez que vous pourriez m'apprendre à dunker aussi bien que vous ? » S'enflamma le gamin.
« C'est pourtant pas moi le pro du dunk... » Souffla Aomine, plus pour lui-même, avant de reprendre. « Ecoute boulet heu... putain c'est quoi ton nom déjà... »
« Cristobal ! Mais appelez-moi comme vous voudrez ! » Le coupa le gosse, un peu trop fana.
« … Chris... si j'suis célibataire et sans chiard, c'est qu'il y a une bonne raison : j'ai déjà bien du mal à m'occuper de moi-même pour devoir m'encombrer d'une personne supplémentaire. Alors trouve-toi un autre daron de substitution. Et puis d'abord, ouais c'est une super idée ça, va plutôt demander à ton padre de t'apprendre le basket ! »
« …. J'ai pas d'père... » Avoua Chris, la tête basse.
« Tsss... comme par hasard, j'aurai du m'en douter tiens... »
Aomine et la compassion, ça faisait décidément toujours deux...
« S'il vous plaît ! Je ferai tout ce que vous me demanderez ! »
« Même nettoyer ma caisse... ? Ah mais merde, c'est vrai j'en ai plus pour le moment... »
« Ben quand vous l'aurez récupérée alors ! J'suis vraiment prêt à TOUT pour que vous deveniez mon coach ! »
« J'sais pas si c'est une bonne idée... j'veux dire, t'es quand même sacrément nul... Ma réputation risque d'en prendre un coup, si on apprend que c'est moi ton prof... Hééé mais qu'est-ce que tu fous ? » Grogna Aomine, tandis que Cristobal se mettait à genou devant lui.
« Por favor ! J'obéirai sans poser de question ! » Insista t-il.
« Non ! Ecoute, j'ai pas que ça à foutre, j'viens d'me faire virer et il faut que j'trouve un taf rapidement ! »
« Bah justement, ça vous laisse plein de temps libre alors ! »
« … T'es pas une flèche, toi. »
« Mais plus sérieusement, avec votre talent naturel, vous pourriez ouvrir votre propre école de basketball, qu'est-ce que vous en dites ? Vous deviendriez riche en un rien de temps si vous donniez des cours ! »
« Tu comptes vraiment pas m'lâcher hein ? »
« Non, jamais ! Et même si vous déménagiez, je vous collerai aux basques jusqu'à ce que j'obtienne gain de cause ! »
« Merde... j'avais encore jamais eu de groupies aussi fada que toi aussi. Tu veux pas que je te te saute aussi, j'espère ? »
« Quoi ? Non... ! Même si je dois admettre que vous êtes très bel homme, je n'aime que les filles Monsieur Aomine ! »
« T'es sûr ? Non parce qu'avec ta dégaine de fragile... »
« … Je vis avec ma mère et ma grand-mère. Uniquement des modèles féminins... »
« Mouais. On va dire que je tolère cette excuse, faute de mieux. »
« Alors c'est d'accord, vous acceptez de m'entraîner Monsieur Aomine ? »
« Ca va dépendre de ta réponse à ma question. T'as l'air de bien aimer le basket et de t'y connaître, mais entre être un simple spectateur averti et devenir un vrai joueur, il y a un putain de fossé. Donc ma question c'est : pourquoi t'as tellement envie d'apprendre à jouer ? »
« Bah... »
« Ces mecs qu'on a croisé sur le parking taleur, ils sont dans ton bahut pas vrai ? »
« Ou-ouais... »
« Je doute qu'ils arrêtent de te martyriser du jour au lendemain, même après la fessée que leur ai donné. Parce que n'oublie pas que je ne serai pas présent pour te protéger quand tu seras en cours. »
« Je le sais... mais... peut-être que... enfin, si je suis vos cours de manière assidue, je serai capable de les battre sans votre aide. »
« Je vois. Alors c'est ça la raison de merde qui te pousse à vouloir devenir meilleur ? C'est uniquement dans le but de te faire respecter par les racailles de ton lycée... »
Mouais, il aurait du s'y attendre... Rien de bien glorieux, mais Aomine était tout de même prêt à intervenir en sa faveur...
Sauf que le jeune Chris parvint à le surprendre.
« Non, ce n'est pas ça, vous n'y être pas, M'sieur... »
« Ha ? Qu'est-ce que c'est dans ce cas ? Parle, putain ! »
« … I... il y a cette fille... et heu... »
« Une fille ? Tu veux dire que tu es prêt à en chier grave avec le pire prof de la planète juste pour impressionner une fille...? »
« Mais c'est pas n'importe quelle fille ! » Se défendit le jeune brun en rougissant.
« Est-ce qu'elle est bonne ? » Sourit Aomine, dont l'intérêt venait d'être piqué au vif.
Ca lui rappelait lui à son âge...
« … Elle est... intelligente... »
« Mais bonne ? »
« … et drôle... et gentille et... »
« Est-ce qu'elle a des seins gros comme des pastèques au moins ? »
« … belle. Ok, oui, d'accord, elle est belle aussi ! Mais c'est pas l'essentiel ! »
« Attends d'avoir la tête entre ses seins et on verra si tu maintiens que c'est pas important ! »
« M'sieur Aomine ! » Couina Chris.
« Ce sera Aomine Sensei à partir d'aujourd'hui ! C'est bon, tu m'as convaincu. Je vais réveiller la panthère qui sommeille en toi... et t'apprendre le basket à la dure dont votre génération de fillette a désespérément besoin... Ce ne sera pas facile... mais je ferai de toi un homme... et comme ça, quand ton heure de gloire viendra... tu pourras impressionner cette nana et la mettre dans ton lit ! » Enonça le professeur en devenir, le regard pétillant.
Son discours empli de promesses et de détermination hypnotisa complètement son futur élève. Fasciné, le jeune homme scella ce pacte par une poignée de mains viriles avec son voisin.
Et ainsi, Cristobal Ibanez, dit « Chris » fut le premier à se rallier à la nouvelle cause d'Aomine.
Nouvelle cause qui, sans le savoir, impliquait de mettre un(e) Kagami dans son lit...
Chacun le sien.
Chapter end !
Alors, vous en avez pensé quoi ?
Aomine et Kagami en sexy quadras, ça passe ?
Et Cristobal ? Et Dana ?
Dites-moi tout en reviews et à très vite je l'espère pour la suite !
Des bisous.
