Cet OS a été écrit à l'occasion de la cent-vingtième nuit du FoF et rédigé en une heure sur le thème « Unanime ». Pour plus d'informations, contactez-moi par MP.

This is real dumb et ça se passe pendant le camp de Tokyo,


À la question, « Est-il nécessaire de sortir Bokuto Kōtarō de sa galère ? », les membres de Fukurodani tendaient plutôt vers le « non » définitif. Le libérer ne mènerait à rien, clamaient-ils haut et fort. Ce n'était pas comme s'il était en danger. Il n'était pas tombé dans une crevasse au milieu des bois, n'avait pas non plus été alpagué par des individus louches au coin d'une rue mal éclairée. Non, Bokuto allait bien. Enfin, il allait bien pour l'instant, ce qui, en toute franchise, était tout ce qu'ils avaient besoin de savoir.

Tant qu'il pouvait jouer, pas la peine d'élever la voix. Et puis, Bokuto était grand. Peut-être pas très malin, mais musclé, plus ou moins. Il avait une personnalité imprévisible et changeante, d'accord, ce qui ne l'empêchait pas de toujours s'en sortir. Aucune raison qu'il décède cette fois-ci en particulier.

L'équipe de Shinzen tendait à donner la même réponse. Ce genre d'épreuve, ce n'était pas si mal. On en sortait grandi. C'était comme envoyer un enfant rendre visite à sa grand-mère dans une forêt sombre alors que rôde le loup. Au pire, le loup le dévore. Au mieux, l'enfant revient plus malin qu'avant.

Ses geôliers n'étaient pas carnivores, eux, ni des cannibales — pas aux dernières nouvelles. Certains avaient certes exprimé quelques doutes, mais on les étouffa vite fait. Pas la peine d'y réfléchir pendant toute la soirée. Bokuto absent, c'était un peu plus de souper pour chacun. Un avantage non-négligeable quand on passait la journée à courir dans tous les coins.

À Ubugawa, les joueurs n'avaient guère d'avis. Ils ne s'étaient plongé dans le débat qu'au moment où celui-ci commençait à s'enflammer. La plupart d'entre eux s'étaient éloignés fissa. Ceux qui étaient restés assistaient aux échanges sans émettre d'autre son que des bâillements à faire trembler les murs du gymnase.

Tout était pour le mieux, donc. Bokuto, abandonné à son sort, coincé entre les quatre murs d'une classe à l'abandon. Nul ne savait ce que ses gardiens lui faisaient subir. Il avait des torts à réparer, pour sûr, et s'il arrivait à Akaashi d'être clément, Kuroo, lui, était plutôt du genre à jouer avec sa proie jusqu'à la voir rendre son dernier soupir. Tous deux étaient également doués d'une patience hors du commun. Personne n'était assez idiot pour se les mettre à dos — surtout quand on les fréquentait pour une semaine entière. À Nekoma, d'ailleurs, les paris étaient ouverts. Deux personnes anonymes parié sur la mort prochaine de Bokuto ; deux sur celle d'Akaashi (ils étaient en première, ils ne pouvaient pas savoir) ; un sur un carnage complet, et Kenma avait répondu sans lever les yeux de son téléphone : « Bokuto ne va pas mourir. Il est déjà mort. »

Le reste de l'équipe fut grandement impressionné.

À Karasuno, toutefois, un petit groupe murmurait discrètement, fomentant sans doute un complot de grand envergure, un plan d'évasion, peut-être, ou de sauvetage in-extremis. Tsukishima ne disait rien, mais un étrange sourire satisfait agitait le coin de ses lèvres. Les troisièmes années préféraient rester en dehors de tout conflit, trop fatigués pour enfoncer une porte, aussi fragile fût-elle. Kageyama n'écoutait même pas la discussion. Ennoshita l'écoutait, mais il refusait toute implication. C'était Hinata, qui posait problème, lui, Tanaka et Nishinoya, ou, comme on les appelait, le trio infernal.

— Pas moyen qu'on l'abandonne aux mains de ces êtres cruels, s'exclama Tanaka en croisant les bras.

— Comment on va s'entraîner, ce soir, s'ils ne sont pas là ? ajouta Hinata. Il a promis qu'il m'apprendrait des trucs !

— De toute façon, c'est une question d'honneur, renchérit Nishinoya. Un homme est en danger. Quelqu'un doit le sortir de là.

— Qu'est-ce qu'il a fait, exactement ? demanda Kageyama qui venait de revenir à lui.

Yamaguchi se pencha vers lui.

— Hier, il a volé le dessert d'Akaashi, énuméra-t-il comme on listait des chefs d'accusation. Aujourd'hui, il a perdu l'une des chaussures de Kuroo, bien qu'on ne sache pas trop comment. Il a failli inonder les toilettes en oubliant de fermer le robinet, et je crois qu'il leur doit de l'argent.

— Laissez-le où il est, jugea Kageyama.

C'était une chose d'inonder les toilettes, mais on ne volait pas le dessert des autres.

— Ça mérite pas la torture, quand même ! s'exclama Hinata.

Kenma apparut derrière lui à la manière d'un revenant, ses cheveux devant le visage et le dos courbé.

— Libérez-le, si ça vous dit. Personne ne vous en empêchera.

Ses yeux félins brillaient d'une étrange lueur ; Hinata en eut froid dans le dos.

— Très bien, décida Tanaka, on y va. On y va tout de suite. On n'est pas des lâches, nous. On sait agir quand il y a urgence.

— Bon courage.

Hinata fut le seul à le remercier.

Ils étaient trois à monter à l'étage, et si le silence qui y régnait leur glaça le sang, ils n'en manifestèrent rien. Eux-mêmes se déplaçaient sur la pointe des pieds, semblables à des chevaliers s'en allant subtiliser le trésor d'un dragon endormi. Un objet, au loin, tomba au sol avec un bruit sourd. Une chaise, peut-être, on le corps de Bokuto.

Ils s'arrêtèrent devant la porte de la classe 3-6, tendirent l'oreille, ne perçurent rien d'autre que quelques grincement.

Puis, comme étouffé, un long gémissement.

Tanaka n'hésita pas. Il ouvrit la porte ; Nishinoya se précipita à l'intérieur.

Dans la pièce, rien ne bougeait. Ni Bokuto, visiblement évanoui sur une chaise de bois. Ni Akaashi qui, une main à quelques centimètres de ses cheveux, tenait fermement une paire de ciseaux brillants. Encore moins Kuroo, lequel les fixait en silence, les yeux luisants d'un animal ayant repéré sa proie.

Avant que leur raison n'ait pu tirer la moindre conclusion, leur instinct les poussa dehors, et ils s'en furent, le cœur battant, prêts à oublier tout ce qu'ils avaient vu. Personne ne leur demanda de rapport. Et c'est unanimes, cette fois, qu'à la question « Est-il nécessaire de sortir Bokuto Kōtarō de sa galère ? », ils répondirent non.


J'ai ni antidote ni inspiration so be nice to me okay...