Merci pour vos reviews ! Je vous l'avais dit qu'il n'y avait plus que deux chapitres (mais pourquoi on me croit jamaiheu !)
oO Fic Dédiée à Mystick et à son incroyablement gentille review, merci à toi ! Oo
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« Colonel, que … »
Teyla déboule dans la tente, arme au poing et se fige lorsqu'elle reconnaît la forme qui se trouve par terre, plaquée contre la paroi en toile, essayant de se fondre avec elle. Elle se précipite et me balance presque son P-90 dans les bras, avant de se laisser tomber devant Rodney.
Elle se met à lui parler doucement, un peu comme si elle s'adressait à un enfant. Je vois sa main se poser sur celle de Rodney et j'attends le cri, mais Rodney ne dit rien, son corps est secoué de tremblements, mais il accepte que Teyla le touche. Sans se retourner, Teyla me lance :
« Colonel, je crois que vous devriez nous laisser. »
Elle caresse ses cheveux, sa voix entonne une mélodie, une sorte de berceuse ou quelque chose dans le genre, et Rodney se détend. Je hoche la tête même si Teyla ne me regarde pas, et je sors.
Arrivé dehors, je pique un sprint, bousculant Ronon, j'arrive près d'une petite palmeraie, me laisse tomber par terre et lâche un long hurlement. Curieusement, ce dernier n'est pas sans ressembler aux cris que poussent Rodney. Entre fureur et détresse.
J'essaye de comprendre ce qui m'arrive, pourquoi je réagi ainsi, pourquoi ce qui est arrivé à Rodney me touche autant. J'ai déjà perdu des coéquipiers, j'en ai déjà sauvé quelques-uns, mais je n'ai jamais rien vécu qui m'ait bouleversé autant.
C'est peut-être Pégase, les wraith, les géniis … tout ici est tellement plus barbare, violent, inhumain. Peut-être que je suis en train de craquer sous la pression. Peut-être que le colonel Summer avait raison après tout … je n'aurais jamais du venir ici.
Ou bien c'est autre chose, quelque chose que j'expérimente pour la première fois. Quelque chose qui me fait peur.
Lorsque je reviens vers notre campement, Lorne et ses hommes me dévisagent comme si j'étais fou, je les ignore et fonce vers ma tente. Ronon est dehors, montant la garde. Il a tout d'un touareg, fier, un sabre passé dans sa ceinture, son visage encadré par plusieurs couches de tissus. Il jette un regard concentré autour de lui. A mon avis, même un moustique ne parviendrait pas à passer par lui. Il me fait un petit signe de tête et j'entre sous la tente.
J'entends la voix de Teyla qui chante doucement. Rodney se trouve à ses côtés, sur l'immense lit de coussins que nous avons installé dans un des coins de la tente. Teyla l'a recouvert d'un drap et il est allongé en position fœtale. Il serre les mains fines de Teyla contre sa poitrine, comme s'il s'agissait de bouées de sauvetage. Ses yeux papillonnent mais dès qu'ils se ferment, il les rouvre en sursaut. Je maudis intérieuement cette ordure de marchand pour avoir créé ce réflexe, garder les yeux ouverts pour séduire le client. Dieu seul sait quel a été le prix de sa désobéissance ... parce que je sais qu'il a du désobéir. Au début du moins ...
Près de lit se trouve une gourde d'eau. Je fais un signe à Teyla en direction de la gourde. Elle secoue tristement la tête. Il doit refuser de boire, pensant sans doute que l'eau est droguée. Je soupire.
J'observe Teyla. Elle est allongée sur le lit elle aussi et berce doucement Rodney dans ses bras. Elle se penche et dépose un baiser sur ses cheveux et les tremblements de Rodney se calment immédiatement. Je souris. Teyla ferait une mère exceptionnelle en attendant, je suis heureux de l'avoir dans mon équipe, et …
Et je réalise soudain la vérité. C'est comme un flash aveuglant, un bruit assourdissant.
Un choc.
Ronon, en protecteur, Teyla, en mère poule et moi, en père vengeur … qu'est-ce qui nous fait agir de la sorte ? Nous sommes tous les trois des guerriers. Impitoyables. J'ai tué et j'ai vu Teyla et Ronon en faire autant. Des wraith, des humains … Alors qu'est-ce qui nous rend notre humanité, là, maintenant ?
La réponse est à la fois évidente et surprenante. Rodney. Curieux non ? Sans lui, Teyla, Ronon et moi nous ne serions qu'une autre équipe SGA. Armés, prêts à tout, constamment en « mode GI Jo ». Je me rends compte qu'avec lui dans l'équipe, je suis différent, nous sommes différents.
La force, le cœur, l'esprit. Le protecteur, la guérisseuse, le leader. Mais que serions nous sans une âme. Que serions nous sans le souffle, la lumière et l'espace (10). Que serions nous sans Rodney ?
Le Général O'Neill avait raison lorsqu'il m'a dit, peu de temps avant notre départ, de « prendre de soin de lui ». Je n'ai pas compris ce qu'il disait, et surtout pourquoi il me disait ça ? McKay avait l'air d'un total abruti à l'ego surdimensionné, mais O'Neill savait de quoi il parlait. Il avait eu le docteur Jackson. J'avais pris McKay dans mon équipe pour faire ça, l'avoir à l'œil. Et c'est en fin de compte sa présence qui m'a sauvé. De moi-même, de mes pulsions. Et c'est la même chose pour les autres, même si je doute que Ronon le reconnaisse.
Je m'installe près du lit.
« Hey, Rodney ? »
Je murmure, essayant de donner un ton moins masculin à ma voix. Pas terrible, mais Rodney ne crie pas et ne cherche pas à fuir, c'est le principal. Il cligne des yeux, puis fixe son regard sur moi. Il n'est pas encore tout à fait avec nous mais ses yeux ont perdu leur aspect voilé, ses pupilles sont réactives. Je lui souris. Il me répond en esquissant quelque chose qui ressemble plus à une grimace qu'à un sourire.
« Bon retour parmi nous Rodney, bon retour … »
Et je pleure, je pleure parce que j'ai retrouvé plus que mon coéquipier, plus que mon ami : j'ai retrouvé mon humanité.
J'ai retrouvé notre âme …
Fin !
(10) Voir la citation en exergue de la fic.