All you need is love… All you need is love, love, love

Love is all you need…

Oh, pitié, je n'ai vraiment pas besoin de ça ! Je tourne le bouton de la radio d'un geste sec, tentant de trouver un morceau un peu plus entraînant.

C'est un fameux trois- mâts fin comme un oiseau

Hissez-ho… Santiano…

Ah, voilà qui est bien plus approprié. Je repose le poste sur la table du cockpit et retourne à mes notices de montage. Le chantier a remis Chipiron à l'eau hier, et, ce matin, j'ai enfin pu quitter le port pour me rendre dans une petite crique abritée, et isolée. Ces quelques heures au mouillage, loin de la ville, m'ont permis d'installer quasiment l'intégralité du nouveau matériel électronique que j'ai commandé. Seul le GPS me résiste encore ; enfin, pour l'instant.

Les histoires d'a… les histoires d'amour finissent mal…

En général…

Nouveau changement de station. Depuis que je suis rentrée, j'essaye de me tenir éloignée de toute forme de romantisme, ce qui me contraint à un zapping forcené dès que j'allume la télévision ou la radio. J'ai eu beaucoup de mal à prendre la mer ce matin, le simple fait de me retrouver à la barre de mon voilier m'a serré le cœur au moment de quitter le port. Oh Davy, mon doux capitaine, la mer n'a plus vraiment la même saveur sans lui. Si seulement je pouvais le contacter… Mais il soit être loin, sans doute reparti vers ces mers du Sud dont il m'a tant parlées. Si seulement…

Message in a bottle…

Je tente de chasser ces pensées et de me concentrer sur le réglage de c fichu appareil Allons, ce n'était pas si difficile la dernière fois… Il devrait normalement s'allumer, faire « biiiip » et afficher ma position et mes coordonnées. Mais depuis plus d'une heure que je bricole, pas le moindre clignotement.

Message in a bottle…

Une bouteille à la mer ? Pfft, ils vont vraiment chercher n'importe quoi dans leurs chansons. Ah, peut-être qu'en branchant ce fil sur l'antenne du mât ? Non, pas mieux. Je jette l'éponge, il vaut mieux que je passe à autre chose. Je lance un regard meurtrier à cette stupide machine qui persiste à afficher « loading » et m'empare de mon journal de bord, flambant neuf. Je l'ai acheté hier : un nouveau départ, pour mon voilier comme pour moi. Je mâchonne pensivement mon stylo en me demandant comment commencer.

I'll send an SOS to the world
I hope that someone gets my
Message in a bottle

Une bouteille à la mer, envoyer un SOS au monde… Après tout, qu'est ce que je risque ? Je vide une bouteille de bière (dans l'évier…) et j'attrape un bouchon en liège et une bougie. Mais qu'est ce que je vais bien pouvoir lui écrire ?

Davy,

C'est déjà un bon départ…

Depuis mon départ je ne cesse de penser à toi…

Non, trop larmoyant. J'arrache la page.

Davy, je t'aime…

Et puis quoi encore ? Je n'ai qu'à lui écrire que je ne peux pas vivre sans lui tant que j'y suis. J'arrache à nouveau la page.

Davy, tu me manques.

Pas mal… Bah, après tout, vu la que la probabilité que mon message arrive à son destinataire est nulle, inutile de faire un roman. Je n'ai jamais su écrire, et encore moins décrire mes sentiments alors…

Biiip !!!

Tiens, tu te réveilles toi ? Mon GPS a visiblement décidé d'encourager mes efforts littéraires. Je reprends mon stylo pour apporter une dernière touche à ma lettre.

Davy, tu me manques.

43° 38' 34'' Nord - 1° 25' 51'' Ouest

Je glisse le papier dans la bouteille, enfonce le bouchon et celle le tout avec la cire fondue de la bougie. Après tout, qu'est-ce que je risque ? D'être déçue, me répond une petite voix intérieure. Tant pis, je prends le risque, attendre sans rien faire m'est devenue insupportable. Je lève l'ancre en direction du pour ; arrivée au large, dans une zone de forts courant, je jette ma bouteille de toutes mes forces. Elle s'envole, et retombe avec un « splash » et une petite gerbe d'eau avant de disparaître au milieu des vagues. Allez, retour à la maison, guidée par un petit point qui se promène en clignotant sur l'écran du GPS. Mais je n'écoute plus les bips-bips qui tentent pourtant d'attirer mon attention. Une autre musique trotte dans ma tête…

Message in a bottle…


Je remerçie bien entendu les Beattles, Hugues Auffrey, les Rita Mitsouko et Police qui ont contribué involontairement à ce chapitre ;-)