Vous pouvez commencer ou recommencer cette fanfiction sans crainte : elle est terminée. Je publierais tous les trois ou quatre jours. Elle est courte donc pas d'affolement.

Je vous laisse dès à présent en compagnie de cette intrigue, sans prétention, en espérant qu'elle vous plaira.


Il faisait noir, comme minuit. Les ténèbres étreignaient l'atmosphère froide des environs. C'était un dimanche d'aout, perdu dans les landes d'Ecosse. Les températures avoisinaient les six degrés et le brouillard s'étendait sur l'herbe comme un spectre vengeur. Une silhouette encapuchonnée faisait face aux nuages pesants. On percevait son souffle rauque et ses soupirs douloureux. Quelques perles argentées s'échappaient du trou noir qui siégeait à la place de son visage.

L'étranger leva son bras vers la lune, laissant apparaitre sa main et son bras d'albâtre. Au bout de ses doigts, une fine baguette brillante luisait sous la lumière astrale. Au creux de son poignet, une trace de morsure laissait échapper une trainée écarlate parsemée de reflets nacrés.

L'inconnu agita brièvement sa baguette vers le ciel et les nuages s'écartèrent dans un ballet silencieux. Aussitôt, le vent se mit à souffler en bourrasques agitées. La cape de la silhouette voletait au vent, battant la bruyère déjà bien emportée. Quelques cheveux blonds s'échappèrent du capuchon et la pâle lumière lunaire vint s'y perdre en reflets cendrés.

- Orage, orage, au firmament, perds tes nuages dans tes tourments... Orage, orage, étoiles brûlantes, laisse ton cœur s'embraser comme il vente…

La voix mélancolique se perdit dans l'Helm et la capuche s'envola pour de bon, révélant aux étoiles le visage de l'inconnu. Les délicats cheveux blonds parsemaient un visage fin et livide. La bouche laissait s'écouler le même liquide rougeâtre qui trainait sur son bras ; il s'étalait tel du rubis liquide jusqu'au menton.
Deux joues plutôt saillantes ornaient un nez droit. Mais le plus étrange et le plus saisissant restaient les yeux du jeune homme. Deux opales grises, hématites luisant tel le néant qui attire. Deux yeux d'ange et de démon, balayé par de légères mèches flavescentes.
Le garçon avait tout l'air d'une créature divine, perdue dans la lande.

- Orage, orage, égaré sur la plaine, gorge la fougère. Pluie, élance la lune jusqu'à la trêve ultime, ténue et complice. Que le soleil égorge par tant de maladresse… Au fin fond des grottes d'antan, c'est l'astre de minuit qui brille au firmament.

Deux canines, découvertes par ses lèvres purpurines, vinrent accroitre l'impossibilité de la scène. Le sourire carnassier, l'étranger rangea sa baguette dans la poche de sa cape et tourna les talons sur la plaine.

- Va, va, astre du jour, brûler tous ceux qui t'auront défié, et berce les vivants d'un peu de lumière pour égayer leurs deuils entamés. Deux crocs enfoncés, deux crocs retirés et du sang déserté : les créatures de la nuit les ont fait trépasser…
Et plus jamais, ô toi soleil, tu ne laisseras ces massacres commis… Car ce sont des enfants, dont le sang s'est enfui…

Aussitôt, comme si rien n'était arrivé, la silhouette avait disparu de la lande, et le vent s'arrachait une plainte déchirante.


L'année allait être joyeuse, et enfin tranquille. Enfin tranquille. Après six longues années de lutte intensive et de morts affligeantes, c'était enfin fini. La guerre s'était arrêtée là où elle avait commencé et Voldemort s'était éteint avec elle, emportant avec lui dans les limbes les restes de son règne tant désiré. Les mangemorts : terme obsolète qui ne désignait plus que le néant. Plus de mangemorts, plus de menace. Ou plutôt, moins de menace.

Ceux qui avaient appuyé la domination du mage noir avaient fui vers l'Est et le Nord, assez intelligents pour comprendre que leur traque ne s'arrêterait que lorsque la conscience commune serait apaisée. Mais certains restèrent, notamment des enfants. Sangs-Purs, orphelins d'un nouveau monde : victimes innocentes et embrigadées dans cette quête insensée.

Poudlard acceptait volontiers ces élèves en perdition et leur offrait logis, appui et soutien. Nombre de citoyens sorciers trouvèrent la mesure injuste mais le désir de Dumbledore de protéger chacun de ses élèves, quel qu'il soit, avait perduré après sa mort. Minerva MacGonagall était à présent la nouvelle directrice et comptait bien veiller à la réalisation de ses vœux les plus chers.

C'était donc dans ce contexte post-chaotique qu'Harry Potter, Ronald Weasley et Hermione Granger rentraient en septième année. La plupart de leurs camarades des années précédentes étaient là également et l'on semblait vouloir oublier les anciennes querelles au profit d'une année plus saine et plus joyeuse que les précédentes. Seulement, certains conflits ne pouvaient tout simplement pas s'arrêter. Ceux entre les maisons étaient revendiqués par tous : notamment car il s'agissait plus d'une compétition que d'autre chose et que c'était l'un des seuls repères restant, après cette guerre sans merci qui les avaient tous éliminés. Bien sûr, la conscience collective savait que les conflits devaient rester légers et fanfarons. Les barrières entre maisonnées céderaient à la moindre attaque envers Poudlard, cela coulait de source. Les élèves resteraient solidaires et se lieraient entre eux, qu'ils viennent du lion, de l'aigle, du blaireau ou encore du serpent. Ce dernier était malheureusement beaucoup moins bien vu que les autres : l'image que les jeunes sorciers en gardaient était celle d'une maison maudite, pestiférée et engendreuse de sorciers malintentionnés. Pourtant, beaucoup d'entre eux avaient juste les traits de la maison Serpentard et n'avaient rien à voir avec les complots de Voldemort.

On savait cela mais dans cette ambiance d'urgence et d'après-panique, les préjugés prévalaient telles des valeurs sûres…

Le Poudlard Express s'imposait enfin sur les rails de la gare de Londres. Hermione Granger, empressée comme jamais d'y grimper, enlaça une dernière fois ses parents en leur adressant un sourire tendre, et tourna les talons, malle en main. Elle était préfète en chef. Rien de plus normal auraient dit les autres, mais l'adjectif « exaltant » semblait l'emporter sur l'humeur de la jeune Lionne. Son insigne fièrement apposée sur sa poitrine, elle pénétra dans le wagon des préfets pour y déposer sa malle. Le rendez-vous n'étant que dans trois quart d'heures, elle décida d'aller faire la conversation aux garçons qui devaient venir d'arriver sur le quai. Elle repéra automatiquement la tignasse rousse de Ron et celle de Harry, encore plus désordonnée qu'à l'origine. Il devait y avoir du nouveau car Harry et Ginny se tenait amoureusement la main en se jetant des regards complices. Ronald les couvait de regards méfiants mais satisfaits, comme un vieux paternel s'inquiéterait de son gendre, pourtant son meilleur-ami. Lorsque le roux l'aperçut, son visage s'éclaira quelque peu et il arbora un sourire maladroit mais sincère.

- Hermione !, l'interpella-t-il en attirant l'attention des deux amoureux-transi.

Elle répondit à son sourire avec ses dents blanches. Ronald. Il lui avait manqué. C'était cet été que les choses s'étaient éclaircies comme par magie. Leurs rapports avaient changé : ils étaient plus proches que jamais, mais ce n'était plus la même chose qu'auparavant. L'amitié avait remplacé la tendresse… La guerre changeait les gens, tout simplement. Le trépied des sorciers s'était rapproché d'autant plus, se protégeant mutuellement de l'influence néfaste qu'avait la guerre sur chacun d'eux. Ils étaient ressortis de cette guerre toujours aussi unis. Que cela était agréable d'avoir des gens sur lesquels compter. Ils s'enlacèrent tous, Ginny, un peu perplexe, les accompagna dans cette effusion vigoureuse : elle rentrait également peu à peu dans leur univers.

Elle s'était également énormément rapprochée d'Hermione durant la période de guerre. Comme des meilleures amies, elles aimaient se confier les choses qui les tracassaient et tenaient à se soutenir quand la pression était trop forte.

On sentait que le quai était abondant de cette mélancolie et de cette bonne humeur débordante car nouvelle.

Quelqu'un semblait pourtant échapper à l'équation du bonheur. Appuyé contre une rambarde rouge, Drago Malefoy observait les gens de son regard irisé, glacial.

Quelle était cette ambiance écœurante ? Chacun avait vraisemblablement décidé d'épancher le plus possible ses sentiments. Tous ces rires, ces espoirs et ces humeurs ravies ne donnaient qu'une envie à Drago : vomir. La tête lui tournait devant autant de mièvrerie. Au cœur de tout cela, qui faisait attention aux orphelins qui avaient perdu leurs parents ? Qui faisait attention à ceux qui n'étaient plus là ? Ils étaient tous noyés dans leur niaiserie et ne faisaient attention à rien, s'acharnant plutôt à détruire davantage d'humanité avec leurs sourires imbéciles.

Il saisit sa malle et traversa la masse de gens sans faire attention : qu'importait, sa grâce naturelle lui permettait à la fois de se glisser dans l'étroitesse et également de faire s'écarter les gens autour de lui. D'ailleurs, les persifflages et les silences commencèrent. Aussitôt, on entendit les parents commérer et les enfants suivre l'exemple. Pathétique. Alors, il n'avait pas assez pris de coups durant cette guerre ? On ne lui avait pas assez fait payer ses erreurs ? Les deux camps l'avaient privé de tout ce qu'il avait cru aimer. Et maintenant, il ne lui restait plus rien : ni repères, ni envie d'en posséder.

Tous ces gens le regardaient avec tant de réserves, tant de méfiance. Il eut envie de leur prouver à quel point ils avaient tort, mais également à quel point ils avaient raison. En quelques secondes, il aurait pu tous les massacrer, mais à quoi bon ? A quoi cela aurait-il bien pu servir ?

Rien.

Et la seule chose dont était sûr Drago Malefoy, à cet instant, c'était qu'il ne ferait plus rien en dehors de servir son propre intérêt.

Le regard glacé du Serpentard balayait la foule sans s'arrêter. Rien n'avait vraiment d'importance : c'était ce qui transparaissait dans ses prunelles, et Hermione sentait ses membres se pétrifier devant une telle froideur. Il n'avait jamais été aussi insensible qu'à présent. C'était d'ailleurs curieux mais elle aurait préféré qu'il revienne, plus narquois que jamais, avec ses répliques racistes et sa clique de chiens de garde. Mais voilà, des chiens de garde, il n'en avait plus, et apparemment, l'envie de se moquer des autres avait disparu en même temps que sa dernière once d'humanité. D'ailleurs, quel était ce charme qui émanait de lui ? Une aura de surpuissance qu'il n'avait jamais eue. Hermione en avait des sueurs froides. Il semblait plus grand, plus beau et plus inhumain que jamais. Comme si plus rien des affres de ce monde ne pouvait le toucher à nouveau. C'était inexplicable, juste perceptible… Ses yeux plongèrent alors dans les siens, pas plus de quelques secondes puisqu'il n'y accorda pas plus d'importance qu'au reste. Le temps de ce regard, elle se sentit mourir. Il était vide. Si vide qu'elle aurait juré se pencher vers un abîme sombre et sans fin, rien qu'en croisant ses yeux.

Terrifiant

Les autres devaient souffrir du même malaise car elle sentit la main de Ginny serrer la sienne. Drago Malefoy ressemblait à un fantôme.

Il grimpa dans le train, sans accorder plus d'importance à la clique qui l'observait toujours, yeux ronds et bouches en culs de poules. Il s'engouffra dans un wagon vide et ferma la porte calmement, déroulant les rideaux miteux qui empêcheraient les curieux de regarder à l'intérieur. Il suffit d'un sort et le compartiment était verrouillé de l'intérieur, parfait. Pas envie de participer à l'allégresse générale et aux potins merveilleux d'un été paisible…

La bande de Gryffondor entra à son tour dans le train, Ronald félicitant avec ironie l'élection d'Hermione en tant que préfète-en-chef. Il feint la surprise avec les autres, afin de laisser renchérir Hermione sur l'exaltante nouvelle… Elle finit par s'en rendre compte et lui donna un coup sur la tête. Mais c'est vrai qu'après avoir vu passer Malefoy, la tension était très perceptible. L'ambiance s'était refroidie comme jamais et il était dur de relancer son humeur joviale.

Hermione devait aller à la réunion d'information des préfets et quitta le compartiment. Elle passa devant celui de Drago sans s'arrêter, frissonnant légèrement sans pouvoir se l'expliquer.

La réunion se passa rapidement et comme d'accoutumée, bien qu'une absence soit à noter. Le train finit par arriver à Poudlard. Hermione aida les nouveaux préfets à guider les premières années et tous les élèves s'installèrent dans la grande-salle. La répartition contribua à la chaleur du dîner et les conversations prirent à nouveau une teinte d'entrain bien trop éclatante. Assis en bout de table, Drago était plongé dans un livre sur l'étude des créatures magiques humanoïdes. Au début, beaucoup le regardèrent avec insistance mais son indifférence finit par lasser les élèves qui se détournèrent de lui. Personne ne fit attention au fait qu'il ne mangeait rien.

Tout le monde finit par quitter la grande-salle et par se rendre dans son dortoir respectif. MacGonagall interpella alors Hermione et Drago, ce qui étonna tout le monde… Les deux élèves se rendirent près d'elle afin d'entendre ce qu'elle avait à dire, tandis que les autres professeurs dispersaient les autres jeunes sorciers dans les couloirs.

- Monsieur Malefoy ne s'est pas présenté durant la réunion des préfets mais sachez que vous êtes tous les deux préfets-en-chef. Vos appartements sont séparés, ne vous inquiétez pas, et vous pourrez passer autant de temps que vous le désirez dans les salles communes respectives à vos maisons. Je vous informe également de l'existence d'une salle commune propre aux préfets-en-chef, liant vos deux appartements, ainsi que d'une salle de bain. J'espère que vous vous mettrez d'accord pour vos ordres de passage et qu'il n'y aura pas de disputes vaines à ce sujet…

Hermione jeta un coup d'œil à Drago, qui lui l'ignora superbement en acquiesçant à peine poliment devant la directrice.

- Des questions ?

Ils restèrent silencieux.

- Très bien, dans ce cas, laissez-moi vous accompagner jusqu'à vos appartements.

Ils grimpèrent tous trois dans une des ailes Est du château. Dans un des nombreux couloirs, une porte s'imposait majestueusement au mur. MacGonagall enfonça une clé ancienne dans la serrure et l'y tourna dans un cliquetis authentique. Elle finit par donner deux autres clés aux jeunes sorciers, avant d'ouvrir la porte et de pénétrer dans la pièce. Cette dernière était visiblement la salle commune. Verte et or, elle offrait les couleurs des deux maisons, panachées et déclinées de sorte à harmoniser la pièce. MacGonagall désigna trois portes, l'une comme étant la chambre de Drago, une autre comme celle de la salle de bain, et une dernière comme étant la chambre d'Hermione. Elle finit par les laisser en leur souhaitant une bonne nuit. Les deux sorciers ne s'attardèrent pas non plus et s'enfermèrent dans leurs chambres sans formuler un mot de plus.


Hermione était sur le seuil de sa chambre, émerveillée par la décoration. Cela ressemblait vraiment aux dortoirs de la maison Gryffondor mais en plus majestueux. Le lit était ce qu'il y avait de plus impressionnant. Il était énorme et à colonnes. Deux fenêtres aux vitres entrecroisées donnaient sur le lac et offrait une vue plein Est. C'était tout ce qui lui fallait. Elle se déshabilla et enfila un peignoir en éponge qui trainait par là, décidant de s'offrir un petit bain pour découvrir un peu la salle de bain à laquelle ils avaient droit en tant que préfets-en-chef. Elle pénétra en peignoir, ses affaires de toilettes à la main, dans la salle commune. A pas feutrés, elle se glissa jusqu'à la porte de Drago et frappa légèrement.

- Malefoy ? C'était… Pour… C'était pour te prévenir, je prends une douche. Ne t'inquiète pas, je ne serais pas longue, tu pourras te coucher tôt.

Elle entendit comme un ricanement amer derrière la porte. S'attardant un peu en espérant une réponse plus concrète, elle finit par abandonner cette idée...

Elle entra dans la salle de bain et ferma la porte derrière elle. La baignoire était tout simplement énorme et des dizaines de robinets couleur or s'enchevêtraient tels des tentacules de poulpe désordonnés. Elle actionna quelques-uns d'entre eux au hasard et se déshabilla. L'eau chaude et parfumée coulait à flot : elle se glissa dedans en soupirant d'aise.

Je crois que je vais très vite m'habituer à ce confort…

Malgré ce qu'elle avait dit à Drago, elle prit son temps et se lava consciencieusement, nettoyant ses cheveux par deux fois tant l'eau faisait des miracles sur eux. Elle finit par sortir et saisit une grande serviette dans laquelle elle s'enveloppa.

Quelque chose ne tournait pas rond. Elle ne savait pas dire quoi, mais c'était vraiment perceptible.

Il était tard, elle quitta la salle de bain et s'avança hardiment vers la chambre de Drago. Elle frappa légèrement, resserrant sa serviette autour d'elle.

- J'ai fini, murmura-t-elle.

Personne ne répondit et elle entendit la fenêtre battre contre son rebord. Elle frappa à nouveau.

- Malefoy ?

La fenêtre buta encore. Elle décida d'entrouvrir la porte. La chambre était baignée dans les ténèbres, hormis celle de la lune qui passait à travers les rideaux. Ces derniers voletaient avec violence contre la vitre. La pièce était vide…

Hermione déglutit avec difficulté et rebroussa chemin, s'enfermant dans sa chambre en essayant de se débarrasser des frissons qui la parcouraient.


Entre les grands chênes éternels et les pins immenses, un petit sentier se déroulait vers le lac. Drago Malefoy foulait la terre battue dans un rythme calme. La forêt interdite n'était plus vraiment terrifiante pour lui : il y était maintenant l'un des principaux prédateurs. Ses yeux céruléens aux reflets anthracites dévalaient les environs, indifférents.

Poudlard.

Un nom que jamais il n'oublierait.

Au loin, un tentacule noire émergeait de l'eau et dansait sous la lune. Drago leva le regard vers le ciel d'encre. Une page s'était tournée. C'était une nouvelle ère : une nouvelle ère dans laquelle il n'était pas le bienvenu. En tant que personne, en tant que Drago Malefoy… En tant que néo-carnivore impénitent.

Ses paupières se fermèrent. Il avait juste besoin du silence de la nuit et de la solitude. Il n'avait besoin de rien d'autre. La chaleur était un luxe omis et le soleil un ennemi, à présent. Le bien-être se trouvait dans les ténèbres. Le sommeil avait disparu de ses priorités, comme l'envie d'un bon repas bien chaud. Comme l'envie d'être enlacé par sa mère, ou d'être couvé d'un regard fier de son père. L'envie de paraître toujours plus et toujours mieux. L'envie d'être celui que les autres respectent par dû et non pas par lignée. Cette envie de rester un être fier et prompt, un être toujours prêt. Un être révéré et suivi. Un être honoré. Un être aimé et craint. Un être exceptionnel.

Tout cela avait disparu avec le reste. Il ne restait plus rien sinon les décombres d'un ancien lui sans avenir. Il ne restait rien. Aussi loin qu'il pouvait s'en souvenir, il n'avait jamais ressenti ce vide et cette sombre plénitude. Il ressentait la douleur à son paroxysme, sans oublier pourtant que le fond était encore bien loin. Les autres ne semblaient pas le comprendre, et moins encore le reconnaitre. Cela finirait ainsi, à mourir au bord des routes et des chemins, dans l'indifférence générale.

Ses muscles tressautaient, c'était la pleine lune. Il leva alors son bras, comme tant de fois auparavant. Approchant ses lèvres ourlées de son poignet de marbre blanc, il entrouvrit ses mâchoires et planta ses canines dans les veines les plus proches. Aussitôt, du sang jaillit dans sa bouche festin divin et met princier s'écoulant dans son gosier comme l'assoiffé boirait le vin dans le désert. Aussitôt… Aussitôt la tête qui tourne et l'avidité qui s'accroit. Tout qui disparait aux alentours et plus que les hurlements stridents des loups dans la nuit.

Plus rien n'existe sinon la tiédeur du doux et amer parfum de l'oubli.

Plus rien n'existe.

Adieu Poudlard, adieu faux-semblants et faux-amis. Adieu professeurs, adieu famille. Adieu ennemis, renommée et réputation. Notoriété cédera place à l'oubli. Adieu à ceux qui ont disparu, à ceux qui sont ou se sentent perdus. Adieu à eux et puis aux autres. Adieu au monde et puis tant pis.

Adieu au monde et puis, tant pis.

Adieu, Soleil.

Bonjour, la Nuit.