Cette histoire commence un vendredi, alors finalement, je poste mon prologue un vendredi. =)

Trust Issues

Rating : T, pour le langage de Lisbon surtout.

N/A: L'idée m'est venue après un visionnage de mon épisode favori, le 2x19, où Jane fait renvoyer Lisbon et s'en veut terriblement. Lorsque Hightower leur dit « Je croyais que vous aviez confiance l'un en l'autre. » et que Lisbon avoue piteusement qu'elle le croyait aussi, ça a fait tilt, et l'idée ne m'a plus lâchée. [Ajoutons à cela la « chute de la confiance »…] Cependant, cette histoire ne prend pas forcément place pendant la saison 2. Vous comprendrez d'ici quelques chapitres de quoi vient le fameux problème de confiance.


"We're never so vulnerable than when we trust someone - but paradoxically, if we cannot trust, neither can we find love or joy"

Walter Anderson

[Nous ne sommes jamais si vulnérables que lorsque nous faisons confiance à quelqu'un – mais paradoxalement, si nous ne pouvons pas faire confiance, nous ne pouvons pas non plus trouver l'amour ou la joie.]


Prologue : Apocalypse Now !

Le calme régnait dans le CBI, un calme doux et plat, ponctué d'ennui et de quelques discussions à voix ténues. Le son régulier des ordinateurs et des allers et venus berçait l'openspace à l'étage des Crimes Majeurs, résultant en un ronronnement de fond assez efficace pour endormir les plus motivés. C'était un vendredi après-midi, il faisait beau et chaud, et comme chaque été, la réduction des effectifs ainsi que la réticence des criminels à frapper par une telle chaleur plongeait l'étage dans un ralenti ennuyeux.

L'équipe de l'Agent Senior Teresa Lisbon avait beau avoir obtenu tous les honneurs, être tenue en haute estime par les plus grands, elle n'échappait pas pour autant à la règle. Wayne Rigsby s'était assoupi, la tête posée dans sa main, à moitié avachi sur son bureau vide de dossiers, Kimball Cho avait entamé sa pile de livres de réserve depuis deux jours et tournait les pages du Portrait de Dorian Gray mécaniquement, déconnecté du reste du monde, et enfin Grace VanPelt entamait un énième jeu abrutissant sur son ordinateur, le ponctuant une fois encore de soupirs réguliers et de regards courroucés vers le ventilateur en panne à côté d'elle.

Le calme et l'ennui régnaient, deux éléments essentiels à l'équipe manquaient à l'appel, et les deux faits allaient de paire.

Soudain, les trois agents furent sortis de leur léthargie par un cri de rage féminin, suivi de bruits de pas fermes et agacés.

-Où est-il ? hurla alors la voix étranglée de colère de Lisbon.

Immédiatement intéressés par cette distraction bienvenue, les trois agents se tournèrent vers le couloir des salles d'interrogatoire pour voir une Teresa Lisbon échevelée et débraillée débarquer dans l'openspace, les joues rouges, les yeux noirs.

-est-il ? répéta-t-elle dans un grondement colérique à l'intention de son équipe. Je me fiche de savoir combien il a acheté votre silence, je vous suspends si vous ne me dîtes pas tout de suite où il se cache !

Ils échangèrent des regards perdus. Bien sûr, ils savaient exactement de qui elle parlait, seul Patrick Jane, leur consultant, pouvait mettre Lisbon dans un tel état. Cependant, ils n'avaient aucune idée de la localisation exacte de l'enfant terrible du CBI.

-J'attends, leur signala Lisbon, les poings serrés à s'en rentrer les ongles dans la peau.

-On… On ne sait pas, marmotta Grace, aussi gênée qu'effrayée.

Lisbon allait recommencer à hurler sa frustration lorsque Rigsby lui fit signe de se retourner. Patrick Jane avait fait son entrée, sa fidèle tasse de thé à la main, et son immense sourire enfantin bien vissé. Lisbon se dirigea immédiatement sur lui et il posa sa tasse de thé pour lever les mains devant lui en signe de défense.

-Espèce de… commença-t-elle.

-Bonjour Lisbon, la coupa Jane non sans malice. Comment allez-vous Lisbon ?

-Vous avez hypnotisé McCarthy ! explosa-t-elle. Vous l'avez hypnotisé alors que c'est contre les règles ! Je vous ai dit cent fois de ne pas hypnotiser les suspects, bon sang Jane ! Mais comme d'habitude vous n'en avez fait qu'à votre tête, vous avez voulu tout faire tout seul ! Avez-vous seulement une notion de ce que veut dire travailler en équipe ?

-Si vous n'aviez pas été si impatiente d'entrer dans cette salle d'interrogatoire, j'aurais eu le temps de le dés-hypnotiser, lui signala-t-il insolemment.

Le regard de Lisbon devint encore plus noir si possible. Elle l'avait su, à l'instant même où elle était entrée dans la salle d'interrogatoire, elle avait senti le parfum de Jane flotter dans l'air. Plutôt que de vérifier le bien-fondé de cette désagréable sensation, il avait fallu qu'elle fonce et interroge le suspect. Se rendre dans la pièce d'à côté pour y prendre Jane sur le fait aurait pu lui éviter le drame.

-De toute façon, reprit Jane, il était aussi inoffensif qu'innocent, l'hypnose ne rend pas les gens inoffensifs violents.

-Il m'a sauté dessus ! glapit-elle, outrée.

Jane fronça les sourcils.

-Comment ça, sauter dessus ? s'étonna-t-il.

-J'ai eu le malheur de prononcer les mots « vous avez envie » et il m'a sauté dessus !

Jane recula d'un pas pour la jauger de la tête au pied puis, sans même tenter de se retenir, il éclata de rire.

-Il a essayé de vous embrasser ? rit-il. Pauvre homme !

Lisbon se mordit l'intérieur de la joue pour retenir ses envies de meurtre, gardant ses poings pourtant brûlants le long de son corps.

-Je ne trouve pas ça drôle, précisa-t-elle.

-J'aurai tellement voulu voir ça ! s'exclama son consultant, gai comme un pinson. Lisbon se faire assaillir par un suspect… quand ça va se savoir !

Cette fois, elle ne tint plus, son poing droit partit et rencontra violemment la mâchoire de Jane qui arrêta de rire en gémissant de douleur.

Lisbon se tourna pour voir les membres son équipe l'observer avec des airs embarrassés.

-Oh ça va, s'exaspéra-t-elle, il le méritait celui-là !

-Vous n'avez aucun humour, pesta Jane en se massant la mâchoire.

-Moi non plus, les interrompit la voix autoritaire de Madeleine Hightower.

Lisbon se décomposa, déglutissant, puis se tourna lentement pour faire face à sa supérieure. Elle lui adressa un sourire aussi gêné que coincé alors que Jane se contentait d'un signe de la main en guise de bonjour, trop occupé à marmonner contre son agresseur.

-Je crois qu'un tour dans mon bureau s'impose, annonça Hightower en leur indiquant le chemin d'un signe de tête.

Dès qu'elle fut passée devant eux, Lisbon fusilla Jane du regard, mauvaise comme une teigne, puis suivit sa supérieure, les épaules basses telle une écolière prise en faute par sa maîtresse. Jane fit la grimace dans son dos avant de suivre les deux femmes, pas vraiment troublé –il était après tout un habitué des visites du bureau de cette chère Madeleine.

Les trois agents restés sur place s'adressèrent des regards indécis, puis, sans plus de cérémonie –ni plus de solidarité, ils retournèrent à leur ennui.

Et le calme reprit ses droits.


-Je pensais que vos problèmes relationnels n'avaient plus lieu d'être, soupira Hightower en prenant place derrière son grand bureau.

-C'est le cas, confirma Jane en prenant place dans le canapé.

Lisbon serra des dents mais ne répondit pas, droite comme un i en face du bureau, dos à Jane.

-Ça ne l'est visiblement pas, contesta leur supérieure. J'ai appris que Monsieur McCarthy avait été hypnotisé sans que l'agent Lisbon ait été au courant, Patrick ?

-Un petit problème de timing, déplora Jane en haussant les épaules. Si elle faisait moins bien son travail, j'aurais eu le temps de mettre fin à la transe.

Il ne voyait pas le visage de Lisbon, mais il devinait –non sans amusement– au combien elle devait se mordre la langue pour ne pas l'insulter devant sa supérieure.

-J'ai également appris que ledit Monsieur McCarthy s'est précipité sur l'agent Lisbon pour tenter de l'embrasser, ce qui a entraîné l'intervention de deux policiers et fait donc de cet évènement un incident public que n'importe quel avocat utilisera contre nous.

-De toute façon il est innocent, répondit Jane, pas le moins du monde perturbé par ce qui s'était passé. Et puis, on ne peut pas lui reprocher d'avoir trouvé Lisbon charmante, ajouta-t-il en souriant de toutes ses dents.

Hightower se força à garder son sérieux, elle était de moins en moins imperméable au charme du consultant, et son humour était redoutablement efficace malgré l'affection qu'elle portait à la pauvre Lisbon.

-Le problème n'est pas là, se reprit-elle. Le problème, c'est que ce n'est pas un incident isolé. Ces derniers mois, de nombreuses affaires ont été compliquées par l'absence de dialogue entre vous deux. N'avez-vous donc plus la moindre confiance l'un en l'autre ?

Lisbon ne s'abaissa même pas à répondre, son regard exaspéré en disait bien assez long.

-J'ai confiance en Lisbon, assura Jane.

L'intéressée ne put s'empêcher de laisser échapper un son moqueur, preuve qu'elle en doutait. Le consultant perdit un peu de son sourire. Certes, il aimait jouer seul et taper sur les nerfs de la jeune femme, mais leur relation ne se résumait pas à cela.

-Eh bien, de mon point de vue, continua Hightower, je ne vois pas une once de confiance, que ce soit de votre part Patrick, ou de celle de Lisbon. Or, les meilleures équipes se construisent avec la confiance. Compte tenu des incidents de ces derniers temps, je me dois d'intervenir.

Jane perdit tout sourire. La dernière fois que sa supérieure était intervenue, Lisbon avait été suspendue. Ça ne l'avait certes pas empêché de la faire venir sur l'enquête, mais c'était tout de même plus pratique lorsqu'elle avait un badge. Et puis, si elle était suspendue une deuxième fois à cause de ses frasques, il doutait que la brunette accepte de le revoir avant un bon moment, ce qui, il devait bien l'avouer, l'ennuyait profondément.

-Cela fait plusieurs jours que j'ai retrouvé le numéro d'un séminaire au sud de la Californie, les informa Hightower en cherchant un bout de papier dans ses post-it.

-Un séminaire ? releva Jane, surpris.

-Oui Patrick, un séminaire. Un séminaire sur le travail à deux et la confiance.

-Vous me voyez, moi ? Dans un séminaire ? s'amusa-t-il, à nouveau amusé – et soulagé que le danger d'une suspension soit écarté.

-Je vous y vois très bien. Je vais appeler mon contact pour savoir s'il reste deux places pour le prochain séminaire.

-P-pardon ? balbutia Lisbon, soudain réveillée. Un séminaire avec Jane ?

-Seul, ça ne servirait à rien, la confiance se construit à deux.

Jane ne put se priver d'un sourire ironique, mais avant de pouvoir sortir une réplique cinglante, il fut interrompu par un gémissement de Lisbon :

-S'il vous plaît madame, vous êtes sûre de ne pas vouloir me suspendre une semaine ?

-Oh Lisbon, c'est vraiment blessant, déplora Jane dans un sourire qui disait tout le contraire.

Hightower leur fit signe de se taire alors qu'elle téléphonait. Elle s'entretint à peine quelques minutes avec quelqu'un qui semblait être une connaissance, puis, souriante, elle raccrocha.

-Il y a un bus lundi matin à huit heures, il passera devant le CBI, annonça-t-elle. Oh, et préparez de quoi marcher, vous allez sûrement faire de la randonnée. Et de quoi nager, ils aiment l'eau là-bas.

-Vous pensez vraiment qu'on va y aller ? s'étonna Jane, soudain plus pâle.

-Le séminaire dure en théorie deux semaines, mais si l'équipe juge le résultat mauvais, elle peut prolonger le séminaire de quelques jours. Elle me fera ensuite un rapport et je verrai quelle décision prendre.

-Je crois qu'on ne s'est pas compris, reprit Jane, je ne tiens pas du tout à aller m'enrôler dans une secte de bienheureux.

-Vous n'avez pas le choix.

-Testez-moi, répliqua-t-il sans une once d'humour.

Il y eut un moment de silence, puis Hightower croisa les bras sur son bureau, l'air sérieux.

-Patrick, je crois que vous n'êtes pas conscient de ce qui se joue dans ce bureau. Si vous n'allez pas à ce séminaire pour améliorer votre relation de travail avec l'agent Lisbon, ce n'est pas une petite suspension qui la guette, c'est la porte.

Lisbon parut horrifiée mais ne dit pas un mot. Jane grinça des dents, coincé. Il connaissait assez bien le fonctionnement de Madeleine Hightower pour savoir qu'elle ne plaisantait pas. S'il fallait virer l'un de ses meilleurs agents pour le rendre moins indiscipliné, elle le ferait, même s'il s'agissait en l'occurence de sa favorite.

-Bien, reprit Hightower. Je prends votre silence pour une acceptation. Lundi, huit heures, devant le CBI, ne faîtes pas de bêtises.

Jane ne dit rien alors que Lisbon semblait respirer à nouveau : au moins elle gardait son poste. Elle marmonna une formule de politesse puis s'éclipsa –sûrement pour aller s'enfermer dans son bureau et se lamenter sur son sort. Jane mit un certain temps à se lever.

-Je ne change pas d'avis, l'informa Hightower sans même lever la tête vers lui, plongée dans une nouvelle tâche.

Il lui adressa un regard mauvais, puis il partit sans un mot. Il allait devoir assumer les conséquences de ses actes avec Lisbon pour la première fois, et, se retrouver à la place de ses victimes habituelles.

Ça ne plaisait pas le moins du monde à son ego.


Serez-vous au rendez-vous lundi devant le CBI ? =)