Cette fic est donc officiellement la deuxième histoire que je finis d'écrire DE MA VIE (l'autre étant Dilemma). Par pitié, critiquez à outrance et laissez-moi des reviews ! J'ai besoin d'avoir votre avis, de savoir ce qui ne va pas et ce que vous avez particulièrement aimé, hein ! Je veux m'améliorer ! Vous ne pouvez pas me vexer alors allez-y franco !

Introduction
Bon enfant, vraiment très bon enfant – surtout au début - mais je vous jure que ça fonctionne bien et ça m'amuse un peu d'écrire sans me prendre la tête avec les soucis liés au même sexe. A la base, j'étais censée m'arrêter à la Caverne de Glace, mais je n'ai pas pu résister au plaisir de décrire la scène du Temple de l'Eau avec l'ombre de Link, et j'ai embrayé sur Cocorico et son puits hanté... et puis j'ai eu été fichue, j'ai refait tout le jeu.

Rythme : Cette fanfiction sera publiée par chapitres tous les jeudis jusqu'à l'épilogue :) ce n'est pas bon de tout ingérer d'un coup, c'est comme les animes, après ça on ne retient rien et on est frustré. C'est pour votre bien :3

/!\Attention ! Lire cette fanfic implique que vous ayez terminé le jeu Ocarina of Time, et que vous êtes au courant de l'énorme révélation de fin concernant Sheik. A ce propos, j'espère que ma version des faits satisfera tout le monde :) SPOILERS GRAVES donc. BEWARE.

Cette histoire contient une bonne dose de yaoi, c'est-à-dire qu'il y a des relations homosexuelles masculines. Don't like, don't look.

Disclaimer : Il n'existe pas un seul personnage dans cette fic qui n'appartienne pas à Nintendo et le sacro-saint Shigeru Miyamoto ! Le texte est à moi, alors pas touche non plus. Ou alors vous me demandez d'abord.

EDIT : fait mumuse avec la ponctuation u_u il en manque par-ci par-là...

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Link s'assit sur les marches de pierre de la dalle du Temple du Temps et tendit les mains devant lui. Ces mains gantées de cuir, si fines qu'on aurait presque dit celles d'une fille, et bien plus lisses que la dernière fois qu'il les avait regardées. Sept ans sans manier l'épée et le bouclier... était-ce vraiment possible ? Il les frotta convulsivement l'une contre l'autre. Des picotements courraient dans ce corps d'adulte, ce corps étrange qui n'aurait pas dû être le sien, qu'aucun Kokiri n'aurait dû avoir. Pour tout dire, il se sentait assez mal, nauséeux même. Il avait envie de se lever et courir jusqu'à la limite de ses capacités, juste pour voir où elles étaient maintenant, et tout à la fois il aurait voulu s'allonger à même le sol et s'endormir pour se réveiller de ce mauvais rêve. Entre ses mains, l'épée légendaire à pommeau couleur crépuscule ne pesait presque rien... il en fendit l'air et la tint un instant devant lui. Elle était très agréable, comme si elle avait été spécialement conçue pour sa paume, avec le centre de gravité porté au premier tiers de la lame, seyant parfaitement à son style de combat.

Au moment où il venait de décider de sortir du temple, il sentit très nettement une présence derrière lui et se retourna d'un bond. Une silhouette se tenait devant le socle de pierre, bras croisés, et le dévisageait... C'était un jeune homme, le corps couverts de bandages et de tissu bleu son visage était à demi masqué par un rideau de cheveux aussi blonds que les siens propres, et la bouche couverte d'un masque de lin sale, ne laissant apparaître qu'un œil au regard intense, rouge, flamboyant d'une émotion contenue. Baissant les yeux, Link reconnut, sur la poitrine ornée d'un tabard usé de l'inconnu, l'œil symbolique du peuple Sheikah, protecteurs de la famille royale ! Cela le tranquillisa quelque peu et il relâcha sa poigne sur la garde de l'épée. Ils se dévisagèrent un instant en silence, puis l'homme décroisa les bras et fit quelques pas en avant avec une souplesse que Link identifia aussitôt comme la démarche d'un homme aguerri au combat.

- Je t'attendais... Héros du Temps... Link, Kokiri d'adoption, Hylien de naissance, l'ocarina royal du temps à la ceinture, accompagné de Navi la fée, envoyée de l'arbre Mojo, et brandissant l'épée de légende. Les mots ne suffisent pas à exprimer tout ce que je ressens à te voir là, devant moi, après ces sept années de ténèbres.

Link se tut. La voix du Sheikah était grave, et vibrante d'une émotion qui ne laissait pas le moindre doute sur la véracité de ses paroles. Ledit Hylien se sentait comme transpercé par cet œil de feu qui semblait le jauger. Navi avait un commentaire à faire et bourdonnait à son oreille, mais il ne pouvait se détacher de la formidable présence que dégageait le jeune homme qui lui parlait.

- Tu dois avoir tant de questions à poser... hélas, je n'ai que peu de réponses, et peu que je puis partager avec toi aujourd'hui. Aussi, Link, admirable Link, devons-nous aujourd'hui faire appel à ta bonté et à ton courage, et charger sur tes épaules une quête dont dépend le sort d'Hyrule. Tu as parlé avec Rauru. Je n'ajouterais que ceci : quand le mal arrive, les sages se réfugient dans les cinq temples. Dans une profonde forêt, sur une haute montagne, dans un vaste lac, dans la maison des morts, et dans la déesse de sable.

L'étranger eut un geste circulaire pour accompagner ses paroles. Link lui demanda :

- Qui es-tu ?

- Cela fait partie des secrets qui ne m'appartiennent pas... mais mon peuple des Sheikahs a longtemps protégé le sang royal d'Hyrule, peuple dont je suis aujourd'hui l'un des derniers survivants. Ganondorf nous a décimé les uns après les autres pendant les sept années où tu es demeuré endormi. Seul, ma mission est de te guider sur le chemin de la lumière selon notre légende, transmise de génération en génération... mon nom est Sheik. Et, crois ceci par-dessus tout, je suis ton ami et je désire ton bien.

Un léger tremblement agitait les poings du jeune homme, et son œil brillant d'une bienveillance sans bornes acheva de convaincre Link que c'était effectivement le cas. Une présence amie dans un monde qu'on lui disait hostile et métamorphosé. Un point d'ancrage, un allié fidèle et immuable. Un Sheikah qui œuvrait pour le bien et la protection du peuple dans l'ombre à ses côtés ainsi qu'ils l'avaient toujours fait. Le jeune homme sentit ses épaules se détendre et ses mains se décrisper. Navi était silencieuse à présent. Elle ne manquerait pas de lui donner son avis plus tard sur le mystérieux inconnu.

- Je... merci, Sheik.

- Je fais mon devoir. Ce sera un honneur de servir aux côtés du Héros du Temps... je serais toujours là quand tu auras besoin de moi. Pour l'heure, au revoir, Link !

Sheik recula alors et disparut avec une légère détonation. Link fit volteface et sortit du Temple du Temps d'un pas ferme. La désolation l'attendait à l'extérieur. Tout était rouge ou noir... plus de ciel bleu, plus de pelouses vertes. Les parterres de fleurs n'étaient plus que cendres et gravats, l'allée pavée bien propre disparaissait presque sous la crasse et la poussière cendreuse, des pierres étaient descellées. Au loin, la Montagne de la Mort était nimbée d'un halo rougeâtre très inquiétant et crachait un épais nuage noir qui se perdait dans le ciel de la même couleur... et devant lui... les maisons étaient dévastées. La plupart d'entre elles n'avaient plus de toits, ou alors était-il à demi écroulé et les charpentes brûlées jusqu'au cœur. Là où autrefois – quelques heures, semblait-il – les villageois résidant au château faisaient joyeusement leur marché, il ne restait plus que le vent et les cailloux. En leur lieu et place, une série d'Effrois attaquèrent Link, qui mena son premier combat dans son nouveau corps d'adulte. Il découvrit que son bras était plus puissant, son bouclier Hylien plus efficace que la targe Kokiri, qu'il avait une meilleure allonge... mais il ne s'attarda pas sur la place du marché, horrifié par les dégâts. Voilà donc ce qu'était la fureur de Ganondorf lorsqu'il avait pénétré dans le sanctuaire... traversant rapidement le pont-levis brisé, il sortit au pas de course dans la plaine d'Hyrule – elle au moins n'avait pas changé – et put souffler un peu, prendre surtout le temps d'assimiler tout ce qui venait de lui arriver.

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- Ce Sheik fera un allié de poids !

- Tu es donc du même avis que moi ! tinta joyeusement la fée des forêts. C'est une chance de trouver des gens qui se battent pour la justice malgré les ténèbres... son cœur était des plus honnêtes et son regard droit ! Ah, Link, tu as le don de t'attirer autant d'ennuis que d'amis précieux ! Oh ! Le ranch Lon-Lon ! Penses-tu que Malon y est encore ?

Lorsqu'ils pénétrèrent dans l'enceinte, ce fut pour trouver le palefrenier jaunâtre régnant en maître des lieux, et la douce voix de Malon ne se faisait plus entendre. Link paya dix rupees pour entrer dans l'enclos, et repéra rapidement la belle Epona. Malgré sa prétendue mauvaise éducation, elle portait une selle richement décorée, mais pas de filet : trop mauvais caractère pour accepter le mors ? Sortant son ocarina, le jeune homme joua les six notes de sa mélodie, ce qui fit accourir la jument de trait vers lui, et Malon à la fenêtre du bâtiment. De petite pouliche de solide carrure, elle était devenue large jument aux jambes massives et aux yeux doux. Il ne l'avait reconnue que par la couleur, car son apparence avait totalement changé. Il parvint à se hisser sur son dos, et, s'aidant de la voix et des talons, la lança au galop autour du corral. Bonheur ! Il n'était jamais monté à cheval, mais son corps semblait se placer tout seul correctement pour accompagner le mouvement. Même sans bride, la jument répondait parfaitement aux jambes. C'était comme si elle anticipait les désirs de Link ! Après quelques tours, le patron finit par lui proposer une course, que le Héros du Temps remporta facilement puis il courut une nouvelle fois, ce coup-ci pour gagner Epona, ce qui se solda par une seconde victoire. Les muscles de sa monture étaient puissants et il paraissait impossible à Link qu'il puisse être battu de vitesse lorsqu'il était sur elle. Furieux, l'homme au teint jaune lui ferma les portes du ranch peut-être pensait-il que Link reviendrait ainsi sur sa décision ? Mais la jument se dirigea tranquillement vers un mur d'enceinte, et, prenant de la vitesse, parvint à le sauter pour atterrir en contrebas dans la plaine. Satisfaite, Navi lança :

- Tu vas vraiment finir par ressembler à un héros ! Un destrier, une arme de légende... et bien sûr, une fée sans peur et sans reproche pour te guider !

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La nuit tombait lorsque Link parvint à son village natal. Il eut un coup au cœur en constatant d'une part que plus aucun Kokiri ne trainait dans les herbes du village, et un autre lorsqu'il entra dans sa maison en se cognant au plafond. Il dépoussiéra quelques graines conservées dans le sable pour les manger, se lamentant au passage sur l'état d'abandon poussiéreux de sa fière cabane... Son lit était devenu bien trop petit pour lui, mais il s'y pelotonna tout de même pour dormir, et prétendit pour une nuit n'être que l'insignifiant Link, le petit Kokiri sans fée agité de cauchemars la nuit.

Le lendemain, Navi le tira du sommeil tôt pour se rendre au Temple de la Forêt... mais Link prit tout de même un moment pour faire le tour de son village d'adoption. Aucun Kokiri ne le reconnut. Ils avaient tous un air de lassitude et de fatigue qui n'était pas coutumier du peuple de la forêt, et ils ne firent même pas de commentaire sur la tenue Kokiri du grand monsieur qui leur rendait visite - quelques uns remarquèrent toutefois la fée qui l'accompagnait, sans poser trop de question, le regard fuyant, les yeux perdus malgré leurs sourires. Les monstres avaient envahi l'herbe verte du village. Link passa un moment à les décimer, avant de se rendre compte que ça ne servait à rien : aussitôt qu'il tournait le dos à un endroit, le mal y revenait élire domicile. La protection de l'Arbre Mojo n'était plus... Terrifié par ce qu'il avait causé par sa sottise d'enfant, le Héros du Temps prit ses jambes à son cou et s'engouffra dans les Bois Perdus.

Après une traversée relativement simple des tunnels qu'il connaissait bien, Link arriva devant un enfant roux avec stupeur, il reconnut Mido, le dur qui l'avait maltraité toute son enfance. Ses cheveux étaient ternes, son visage creusé et ses yeux cernés du noir de la fatigue. Le regarder de haut sans le voir témoigner autre chose que de la lassitude et de la peur à son égard acheva de troubler Link. Le petit Kokiri terrifié refusa de le laisser passer jusqu'au moment où Link eut l'idée de lui jouer la mélodie secrète que Saria apprenait à ses amis ébahi, Mido s'exclama :

- Mais... comment pouvez-vous connaître cette musique ? Est-ce que vous connaissez Saria ? Et ces habits verts... et cette fée qui vous suit... je... je ne comprends plus rien...

- Je connaissais Saria il y a longtemps, répondit Link, pris de pitié pour cet enfant qui menaçait d'éclater en sanglots. Je vais aider. Je la retrouverais, je te le jure.

Mido resta un moment indécis, puis s'écarta du passage.

- C'est troublant... à vous voir, à vous regarder, j'ai presque l'impression de le revoir... lui...

Sans répondre, plus ému qu'il voulait bien laisser voir, Link s'engagea dans le passage et retrouva sans mal le chemin du temple.

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Après un rude combat contre une brute géante, et beaucoup moins lisse et neuf qu'à sa renaissance, Link posa enfin le pied en haut des marches, dans le sanctuaire de verdure où il avait vu Saria pour la dernière fois. La vieille souche était encore là, couverte de lierre et de champignons, et le Héros du Temps s'en approcha pour passer la main dessus. Saria... était-elle encore seulement en vie ? Il ne se rappelait pas l'avoir croisée au village... son pied heurta alors quelque chose de dur. La dalle de la Triforce ! Se redressant, il découvrit Sheik, debout au centre. Il s'approcha de lui sans bruit, comme si ses pieds flottaient au-dessus des feuilles mortes plutôt que de les toucher.

- La course du temps est cruelle... Sa vitesse est perçue différemment par chacun, mais personne ne peut la modifier... Seule la mémoire des jours anciens n'est pas altérée... Sors ton ocarina, Link. Je vais t'apprendre le véritable pouvoir que recèle sa musique.

Une harpe d'or se matérialisa soudain dans le bras du Sheikah. L'instrument était fin, ouvragé, et gravé de symboles il s'agissait là d'un objet magnifique, précieux, qui semblait presque déplacé entre les mains bandées et calleuses du jeune homme. Ce dernier se percha sur un mince rocher couvert de verdure, et passa doucement les doigts sur les cordes, qui frémirent.

- Reproduis ceci après moi :

Et Sheik joua distinctement six notes, que Link n'eut aucun mal à retrouver sur l'ocarina de Zelda. Aussitôt, les instruments scintillèrent à l'unisson et Link ôta vivement le sien de ses lèvres, saisi.

- Il s'agit du Menuet de la Forêt... chaque fois que tu le joues, tu seras téléporté sur cette dalle de pierre.

- Ça me sera bien utile...

- J'ai fait un peu de ménage à l'entrée et aux abords du temple, tu devrais être tranquille les premiers temps.

Puis Sheik le dévisagea sévèrement et demanda soudain :

- Tu as mangé ce matin ?

- Quoi ? fit Link, pris complètement au dépourvu. Heu, non, je...

- Inadmissible négligence ! Tu ne peux pas te permettre d'affronter les dangers du temple sans t'être alimenté d'abord ! Apprends que si tu ne prends pas soin de ton corps, tu ne peux pas mieux prendre soin de quoi que ce soit d'autre ! Impa me l'a répété un nombre de fois incalculable et je n'ai jamais pris cette règle en défaut jusqu'-...

- Impa ! Tu connaissais Impa ?

- Je... oui, bien sûr. Elle a été mon mentor pendant très longtemps c'était une Sheikah, elle aussi, et point des moindres. Assieds-toi et mange, reprit-il avec autorité en tendant quelques fruits et un quignon de pain à Link.

Celui-ci prit la nourriture et obéit, trop médusé pour parler. Sheik avait été l'élève d'Impa ? La nourrice royale avait dû bien cacher son jeu alors, il avait toujours cru qu'elle ne se consacrait qu'à protéger Zelda elle-même. Mais dans le fond, la dernière fois qu'il l'avait vue, elle enlevait la princesse aux griffes de Ganondorf... il avait pu se passer bien des choses depuis ! Le jeune Hylien se sentit soudain très petit et très en retard.

- Sheik ? appela-t-il doucement.

Le jeune homme assis en tailleur devant lui leva son œil pour le transpercer du regard.

- Sept ans ont passé en ce qui m'a semblé se compter en minutes, et ce que tout le monde a vécu et sait, je l'ignore... pour commencer, où est la princesse Zelda ? Est-elle en vie ?

- Zelda ? Oui, elle est en vie. Elle se cache et œuvre pour son peuple dans l'ombre. Et crois-moi, laisser Hyrule penser qu'elle l'a abandonné est pour elle pire torture que tout ce que pourrait lui infliger le seigneur des ténèbres !

Link dévisagea Sheik, surpris par la véhémence de son ton. Ce dernier fronça le sourcil, comme agacé par sa négligence, et se renfrogna.

- Ces sept ans ont été bien longs et bien sombres pour ceux qui attendaient ta venue, Link. Et le temps doit encore sembler bien sombre à ceux qui n'attendent aucune aide... l'anonymat te protège, et prions pour qu'il ne se brise pas trop tôt. Si Ganondorf a vent de la renaissance du Héros du Temps, je n'ose imaginer... il doit te sembler cruel de laisser les habitants dans l'ignorance, mais c'est hélas nécessaire.

- Je comprends.

Link mordit dans une pomme en silence, absorbé dans ses réflexions. Il avait encore du mal à croire qu'autant de temps ait pu passer en un clin d'œil, et pressa Sheik de lui en dire d'avantage. Ce dernier lui conta les évènements, comment Ganondorf, fort de son nouveau pouvoir, avait détruit le château en tuant la plupart des Sheikahs qui protégeaient la royauté, puis comment il avait semé la terreur parmi les habitants en les menaçant de les changer en zombies. Il avait occulté le soleil et la lune, laissé les monstres envahir les terres, tué beaucoup de gens. Impa et Sheik s'étaient parfois retrouvés face à lui lorsqu'il avait percé leur cachette à jour. Malgré toute l'habileté des Sheikahs, le seigneur des ténèbres avait trop souvent pris l'avantage, et plusieurs des compagnons de Sheik avaient du donner leur vie pour sauvegarder la sienne.

- Afin que je puisse accueillir le Héros du Temps... Nous aurions aimé être plus nombreux à tes côtés, mais je crains qu'il ne faille te contenter de ma modeste personne...

- Sheik. Tu es déjà tout ce qui me pousse en avant. Ma famille ne me reconnait plus, tous ceux que j'ai croisés dans ma vie m'appellent « monsieur », le bien s'est changé en mal... tu es mon point d'ancrage, le seul qu'il me reste, et je suis plus reconnaissant à tes amis que tu ne peux l'imaginer.

Les yeux de Sheik brillèrent avec plus d'intensité, et Link devina un sourire derrière son vieux col de lin.

- Ces mots me réchauffent le cœur, Héros du Temps.

- Il y a juste une chose que je ne comprends pas. Si je puis me permettre... pourquoi s'est-on sacrifié pour toi ? Es-tu quelqu'un de très important au sein des Sheikahs ?

Le jeune homme se tortilla sur son rocher verdoyant.

- Je... ne me suis pas posé la question.

Il sembla à Link que ces mots voulaient plutôt dire : ''je ne sais pas ce que je peux t'en dire et je n'ai pas préparé de réponse'' mais il n'insista pas. Il était déjà trop heureux de compter le jeune Sheikah dans ses alliés et il voulait lui faire confiance. Son cœur lui soufflait qu'il pouvait entièrement se reposer sur cette amitié toute neuve. Posant les vestiges de son repas au sol, Link se leva, alla au rocher où le jeune homme faisait mine de partir et l'étreignit avec chaleur. C'était spontané et naturel, mais il sentit Sheik se raidir nettement, et il recula en le tenant par les épaules sans insister.

- Souhaite-moi bonne chance, mon ami !

- Je... bonne chance, Héros du Temps. Bonne chance.

Link se tourna vers le temple tandis que Sheik disparaissait derrière lui, et entra d'un pas résolu.

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De son côté, le Sheikah était secoué jusqu'aux tréfonds de son âme. Dissimulé par son sort, il se sentait déjà moins vulnérable à ce à quoi la mort et la désolation l'avait résolument fermé : les émotions. Il s'était blindé contre tout depuis la destruction du palais, contre la mort de tous ces serviteurs et personnes qui avaient entouré Zelda toute son enfance. Son enfance était morte. Il avait fermé son âme et son cœur, et n'avait conservé que son devoir. Il avait pu fuir tandis que ses compagnons Sheikahs, avec lesquels il avait appris, se faisaient tuer d'atroce façon par le monstre. Il avait pu fuir en les abandonnant, par nécessité. Pour retrouver le Héros du Temps. Link. Zelda se souvenait encore vivement du petit garçon de la forêt qui était venu lui parler, il y a si longtemps, dans les jardins royaux, après avoir fièrement déjoué la surveillance des gardes. Que ça avait été amusant ! Quelle insouciance était alors la leur ! Sheik escalada lestement un arbre pour observer Link en proie avec un coffre caché en hauteur. Lui-même ne l'avait pas repéré tout à l'heure... Intérieurement, Zelda se félicita que le destin d'Hyrule fut entre d'aussi bonnes mains et Sheik ressentit tout aussi intensément son admiration et son attirance pour le beau héros. Il n'y avait pas de temps à perdre avec ça, mais il observa malgré tout le jeune homme en vert jusqu'à ce qu'il soit hors de vue.

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Lorsque Link ressortit du temple avec le médaillon et le cœur en paix quant à Saria, il n'avait définitivement plus rien de neuf et lisse. Une estafilade courrait le long de son avant-bras gauche, souvenir du fantôme de Ganondorf, et il avait reçu un coup de lanterne au mollet qui le faisait boiter. Dans l'ensemble, il était sale, il avait mal un peu partout, et son bras droit lui faisait souffrir le martyr à cause des efforts intenses qu'il avait dû fournir avec un corps à la musculature sous-développée.

- A l'avenir, Navi, je te le jure, je vais m'entrainer très régulièrement pour ne plus jamais avoir à parer de coups aussi misérablement !

- Bien de ton avis ! Epona est là-bas...

- Ah non, d'abord je vais m'écrouler juste ici (il se laissa tomber dans l'herbe) et m'endormir aussi sec (il ferma les yeux). Réveille-moi dans huit heures, j'ai besoin de récupérer.

Link se laissait aller au sommeil lorsqu'une ombre passa sur lui. Il se redressa, en alerte, pour trouver un fantôme tout près, bien trop près ! A ce moment, un reflet brillant fendit l'air et vint frapper l'esprit de plein fouet, le mettant en fuite. A demi réveillé, Link vit arriver Sheik, un second poignard à la main.

- Sheik ! Mais... depuis quand y a-t-il des revenants sur la plaine d'Hyrule... en plein jour ?

- Je te laisse deviner... As-tu triomphé du mal dans la forêt ?

- On peut dire ça. Blessure de guerre ! fit-il avec un sourire en brandissant sa cicatrice au bras.

- Cette plaie n'est pas belle, elle me semble noire... et peu naturelle... où l'as-tu reçue ?

- Le monstre qui gardait Saria prisonnière était un reflet de Ganondorf, un fantôme vivant dans une salle de tableaux au centre du-

- Comment ?

Link s'interrompit, surpris de l'alerte soudaine de Sheik. Cependant, ce dernier réfléchissait à toute allure. Se pouvait-il que ce fantôme soit un fragment de l'âme du roi maudit ? Si c'était le cas, Ganondorf allait être mis au courant de l'existence de Link ! S'il décidait de se lancer en personne à sa poursuite comme il avait poursuivi Impa pendant un temps, tous leurs plans seraient anéantis... Link n'était pas prêt, pas prêt du tout ! Il fallait absolument mesurer les implications, et vite. Il fallait en parler à Impa. Il brûlait au jeune homme de reprendre son identité de Zelda et d'utiliser son rayonnement magique pour sonder l'esprit du seigneur des ténèbres, mais le risque était immense, car elle serait aussitôt détectée et prise en chasse. Et si l'on trouvait Sheik sur les lieux où Zelda aurait dû physiquement se tenir... Le Sheikah se mordit la lèvre.

- Sheik ? Sheik ? Ça ne va pas ?

- Comment ? Si, tout va bien. (il se força à sourire) Tu as vaincu un fragment de Ganondorf ! C'est un exploit ! Je savais qu'on pouvait se fier à toi, Link, tu es le héros que le peuple attend.

Link esquissa un sourire timide, complètement ignorant des compliments.

- Dors. Je veille sur toi.

- Merci, Sheik.

Le jeune Kokiri se laissa glisser dans un repos réparateur et oublia le monde.

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