Et voici donc la fin de cette petite fic. J'ai fait tellement d'ajouts en relisant cet ultime chapitre, et pas seulement concernant le Greg/Mycroft^^, que du coup il s'avère aussi long que les deux premiers réunis. Je pense que c'était ce qu'il fallait pour rester un minimum cohérent et je n'ai pas eu envie d'en faire deux parties ;) Nous verrons si j'ai eu raison.

J'espère que vous apprécierez cette fin. Merci à vous pour vos reviews, vous êtes des amours.

Fan, moi aussi j'ai horreur de les voir séparés, ça doit donc être un bon indice sur ce qui va suivre XD Merci pour ton message.

ooOoo

Assis à même le sol dans le salon, Sherlock fixait John d'un regard douloureux. Le médecin gardait pour sa part les yeux obstinément baissés afin d'éviter toute confrontation. Ce n'était peut-être pas une mauvaise chose étant donné la grosse dispute qu'ils venaient d'avoir. Le détective savait depuis le début que la dernière partie de son plan serait sujette à polémique, il n'avait simplement pas prévu à quel point. Durant ces trois années il avait poursuivi patiemment chacun des membres influents de l'organisation de Moriarty, mais son bras droit était demeuré parfaitement insaisissable. Le colonel Sebastian Moran, radié de l'armée pour conduite déshonorante avant de vouer sa vie au crime, qui s'avérait pratiquement aussi doué que son défunt mentor. Sherlock l'avait traqué avec zèle des mois durant sans parvenir à le confondre, arrivant dans ses planques, débusquant ses complices avec systématiquement un temps de retard. Déroutant pour quelqu'un habitué plutôt à mener la danse. Il avait alors décidé changer de tactique, tentant le piège parfait en médiatisant son retour. Ainsi il laisserait Moran, informé de son retour, s'attaquer directement à lui au lieu du contraire et de cette façon être certain de le débusquer. Jusqu'à ce qu'il se montre, Sherlock servait d'appât tandis que la police surveillait la rue.

John et Lestrade trouvaient ce plan hasardeux. Qui pouvait prévoir quand Moran frapperait ? Depuis le temps il était peut-être passé à autre chose, se concentrait sur de nouvelles affaires douteuses plutôt que tout risquer pour un homme qui avait été incapable de mettre la main sur lui. Sherlock avait balayé ces objections d'un revers de la main agacé. C'était une affaire d'égo, dans ces conditions l'issue était prévisible. Moran frapperait, et rapidement, pour donner un sens à la mort de Moriarty. Pour se débarrasser de cette menace qui continuerait de planer tant que le détective serait de ce monde.

Apparemment trois ans de clandestinité n'avaient pas émoussé la logique de Sherlock. Ainsi dès le second soir qui avait suivi la nouvelle de sa résurrection miraculeuse – et dieu sait si les médias s'en était donnés à cœur joie, comme ils l'avaient fait à l'époque de sa prétendue imposture – un homme louche avait été aperçu observant quoi que discrètement l'appartement du détective. Ce même homme qui venait de se faufiler, dès le lendemain, dans l'immeuble vide où Sherlock venait de passer dix jours. Lestrade l'avait suivi et attendait tapi dans l'ombre de pouvoir le prendre sur le fait pour autre chose que voyeurisme et effraction. De l'autre côté de la rue le mannequin que Sherlock utilisait souvent pour des expériences et que John ne s'était jamais résolu à jeter, trônait devant la fenêtre, régulièrement déplacé pour plus de vraisemblance. Le médecin s'était souvent demandé s'il s'agissait d'une coïncidence que ce mannequin ait justement le gabarit de son ami, ainsi que la même tignasse sombre et bouclée. A croire que Sherlock avait tout prévu des années à l'avance. Ce qui était terrifiant, sans être tout à fait improbable.

Désormais les deux hommes attendaient. Moran, pour une raison connue de lui seul, faisait traîner les choses. Profitait-il de la jouissance d'être enfin victorieux ? Ou peut-être attendait-il certainement que la rue soit totalement déserte afin d'être certain de pouvoir se replier en sécurité avant que l'alerte ne soit donnée après son geste, sans se douter bien sûr que toute retraite était déjà barrées, promeneur nocturne ou pas.

John n'aimait pas attendre dans un tel contexte, pourtant il avait fait ses armes par le passé au côté du détective. Et l'atmosphère pesante qui flottait dans la pièce n'arrangeait rien. Conscient de cela, Sherlock décida de tenter de désamorcer cette situation malsaine par un babillage léger.

« Je pense que Mycroft et Lestrade vont enfin concrétiser toute cette attirance qu'il y a entre eux, dit-il donc avec une tranquillité parfaitement feinte.

- Qu'est-ce qui te fait dire ça ? Non parce que ça fait quand même plus de trois ans qu'ils se tournent autour. Ton frère semble apprécier de laisser traîner les choses.

- Non, tu n'as pas compris, Mycroft se sent enfin le droit de s'occuper de sa vie privée.

- Comment ça ? insista l'aînée.

- Je crois que durant ces trois ans il s'est obligé à se faire souffrir pour se punir du mal qu'il vous faisait à tous en vous mentant quant à mon sort. »

John sursauta, se sentant incroyablement mal en entendant cela. Ces propos étaient terribles et pourtant Sherlock les prononçait avec un détachement absolu, ce qui était probablement le pire.

« Attends, grogna le médecin. Tu es en train de dire que ton frère a mis tous ses désirs de côté, qu'il a fait du même coup souffrir mon meilleur ami, juste pour se punir d'une faute qui était plus la tienne que la sienne ? Et toi tu trouves ça normal ?

- Eh il est assez grand pour prendre ses décisions, dit Sherlock avec un haussement d'épaules. Il a toujours eu une âme de martyr.

- Tu es tellement égoïste ! s'écria John en faisant mine de se lever.

- Ne bouge pas ! Moran pourrait toujours s'en prendre à toi. Il faut qu'il croie que je suis seul. »

John avorta son geste mais n'en avait néanmoins pas fini avec ses remontrances.

« Et toi bien sûr tu n'aurais pas pu lui faire comprendre que tu étais le seul responsable, qu'il n'avait rien à payer et pouvait vivre sa vie ?

- Je ne m'occupe pas de la vie sentimentale de mon frère.

- Non, évidemment ! Tu as dû te réjouir de le voir souffrir. Parce que je t'assure qu'il a souffert, presque autant que moi. J'ai cru à l'époque qu'il pleurait son frère disparu, mais ça ne change pas grand-chose à la limite. Et maintenant tu laisses entendre que tu aurais pu l'aider simplement en le déchargeant de cette responsabilité, en le libérant de ce poids. »

Sherlock eut une moue affectée tandis que ces propos terriblement durs, le touchaient. C'était si rare.

« Peut-être bien que je ne voulais pas qu'il soit heureux, avoua-t-il à contrecœur. D'abord pour qu'il paye toutes ses révélations qu'il a faite à Moriarty. Et puis surtout parce que tu étais malheureux, moi également, alors le voir souffrir lui aussi… »

Trois ans plus tôt, John aurait apprécié voir ainsi son compagnon se dévoiler, avouer qu'il avait mal vécu la situation, pourtant à cet instant il n'éprouva rien. La preuve une nouvelle fois que ces années l'avaient changé. Il avait l'impression de ne ressentir rien d'autre qu'une grande tristesse, et pas mal de colère contre le cadet également.

« Tu n'as pas de cœur, souffla-t-il.

- C'est physiologiquement impossible.

- Oh bon sang, arrête de jouer avec les mots ! Ce que je veux dire c'est que… eh bien ton cœur ne sert à rien ! Tu es incapable de la moindre compassion. Pas même pour ton frère. Pas même pour moi.

- Oh John, nous avons déjà eu cette conversation.

- Eh bien je n'en ai pas fini ! Pour tout le mal que tu m'as fait je mérite bien quelques minutes. Je t'en veux tellement. Le pire c'est que tu n'as pas changé le moins du monde. Toujours aussi arrogeant, à te foutre des conséquences, de tes actes sur autrui.

- Tout ça parce que Mycroft a attendu tout ce temps avant de se lancer dans quoi que ce soit avec Lestrade ? Alors que soit dit en passant il ne pourrait pas y avoir de couple plus absurde. »

John respira profondément, se forçant à ignorer la dernière pique ou il risquait bien de devenir méchant.

« Plutôt tout ça parce que tu trouves ce qui se passe normal, dit-il dans un souffle. Rien ni personne ne te touche. J'espérais, du temps où on était ensemble, t'avoir fait changer, au moins un peu. Je vois que je me suis battu pour rien. Comme si toi et moi ça n'a jamais eu aucun sens.

- Tu m'as demandé de patienter mais finalement à présent tu préfères que nous en restions là, c'est ça ? Tu ne veux plus de moi ? s'enquit le cadet d'un ton douloureux.

- Je ne sais plus Sherlock. Je ne sais plus ni ce que je veux, ne ce qui est bon pour moi… Je ne suis pas comme toi, je ne peux pas faire abstraction de ces trois ans d'un simple claquement de doigts. »

Il se tut un instant, fixant le vide avant d'être secoué d'un petit rire sans joie.

« Tu devrais peut-être bouger ton mannequin. Tu vois, j'ai même l'impression que lui est plus expressif que toi, reprit-il tandis que son compagnon s'exécutait. Et je suis fatigué d'essayer en permanence de provoquer une réaction quelconque chez toi pour m'assurer que tu es bien humain. En ce moment c'est vrai tu as l'air affecté, mais tu as vu ce que ça m'en coûte ? Je dois passer pour le méchant de service. Et je sais que si je t'avais pardonné dès qu'on s'est retrouvés, comme je le désirais tant, tu n'aurais pas montré la moindre émotion face à l'enfer que j'ai traversé. Que nous avons tous traversés. »

Sherlock baissa les yeux comme un gamin pris en faute, décidément de moins en moins à l'aise avec cette situation qu'il avait pourtant lui-même provoquée.

« Pardonne-moi John. Je pense que je ne m'en serais pas rendu compte si tu n'avais rien dit.

- C'est bien le problème soupira le blond. J'en ai assez de devoir toujours t'assister, te servir de conscience pour provoquer chez toi des réactions somme toute tellement élémentaires. J'ai l'impression d'être tombé amoureux d'un putain de robot, et je t'assure que c'est bien moins amusant que ça ne l'était au début.

- Qu'est-ce que je peux faire pour arranger tout ça ? Dis-le moi John ! »

Ils furent surpris autant l'un que l'autre par cette requête, Sherlock n'était pas le genre d'homme à demander conseil à qui que ce soit, y compris John. Pourtant ils ne firent aucune remarque, conscients que le moment ne s'y prêtait guère.

« Je ne sais pas, souffla le médecin. Je ne suis pas sûr d'être capable de t'aimer encore, pas après tout ça.

- Et je refuse cette alternative », grogna le cadet d'un ton qui semblait effectivement sans appel.

John secoua lentement la tête, réalisant qu'il aurait dû se sentir flatté par une réaction aussi excessive, et c'était bien le cas, même si une certaine contrariété demeurait.

« Il me semble que tu n'as pas trop le choix, dit-il avec lassitude. Ecoute Sherlock, je te l'ai dit, je ne sais plus où j'en suis. C'est touchant de te voir insister de la sorte, mais ça n'arrange pas les choses. C'était avant tout ce gâchis que tu aurais dû me témoigner cet attachement.

- Je suis désolé.

- Je sais. »

A ce stade Watson ne se sentait même plus la force de se mettre en colère. Il se sentait las, dépassé. Il appuya son front contre ses genoux remontés, entoura ses jambes de ses bras et se plongea dans ses pensées, songeant au temps où tout était tellement plus simple.

Tandis que John sombrait dans le sommeil – il avait toujours tendance à s'endormir pendant les planques, l'ennui sans doute – Sherlock reporta son attention sur l'âtre de la cheminée et sentit son cœur se serrer. Cette cheminée vide alors même que la température de la pièce n'était guère élevée était en soit une aberration. Pourtant il comprenait les motivations de John pour en avoir parlé avec lui le lendemain de son retour. Installé devant son petit-déjeuner John avait eu un frisson et le détective, dans son désir de tout faire pour lui être agréable, avait immédiatement proposé de faire une flambée pour réchauffer l'atmosphère. John avait refusé avec brusquerie avant de s'enfermer dans un mutisme témoignant de son mal-être. Le cadet avait mis de longues minutes pour parvenir à lui arracher une explication sommaire. John était de toute façon toujours ainsi, quand il était triste, secoué, les mots sortaient difficilement. Sherlock était alors simplement parvenu à comprendre les quelques informations essentielles, depuis sa disparition John ne faisait plus de feu, comme en témoignait l'âtre vide et parfaitement nettoyé, car cela lui rappelait trop de souvenirs douloureux qu'il était désormais incapable de supporter. Le détective s'était senti mal en intégrant cela et la culpabilité qu'il était parvenu a toujours maintenir à un niveau supportable avait pris des proportions inégalées, lui donnant un aperçu quasi insurmontable de ce que pouvait ressentir le commun des gens tellement dictés par leurs émotions.

Cette cheminée, qui égayait tant leurs longues soirées d'hiver à deux, avait tout autant que pour le médecin une place à part dans ses souvenirs. Combien d'heures n'avaient ils pas passés blottis l'un contre l'autre à regarder les flammes danser, dans des moments de paix que le génie ne connaissait que rarement ? C'était également devant cette même cheminée, sur le tapis confortable, qu'ils avaient fait l'amour la première fois avant de recommencer ensuite bien souvent, John semblant trouvé un certain romantisme à la situation. De tout l'appartement c'était l'endroit qui définissait le mieux leur relation, à tel point que les quelques mois d'été en devenaient frustrants. Et durant son exil, parfois transi de froid dans quelques caches sordides, c'était autant aux bras du blond qu'à cette place toute particulière que Holmes songeait, parvenant à se donner du courage pour continuer et rêvant de cet instant où John serait de nouveau auprès de lui.

Par il ne savait trop quelle logique, perdu dans ses pensées le brun songea alors que s'il perdait John, ce qui semblait bien être la suite logique à toute cette aventure, alors plus rien n'aurait d'importance. Il serait comme cette cheminée vide, sans utilité aucune.

Ne s'étant pas senti s'assoupir, le médecin se réveilla en sursaut, pris d'un mauvais pressentiment. L'obscurité régnait désormais dans la pièce, troublée seulement par une lampe allumée dans le couloir adjacent destinée à maintenir l'illusion pour Moran. Levant les yeux en tentant de calmer son cœur qui battait la chamade sans qu'il n'en comprenne la raison, il vit alors l'incroyable se produire. Sherlock était en train de se lever devant la fenêtre qu'il savait surveillée par le tueur, se substituant ainsi au mannequin censé lui sauver la vie. Sans cherche à savoir ce qui se passait, John agit à l'instinct, laissant ses anciens réflexes de soldat prendre le dessus, inondant ses veines d'adrénaline. Se levant d'un bond en poussant un cri, il se jeta sur son compagnon à l'exact moment où retentissait un coup de feu, qui vit voler la vivre en éclats. Les deux hommes atterrirent sur le tapis, membres emmêlés, sous une pluie de verre alors que la balle tirée se fichait dans le mur d'en face.

Prenant un instant pour reprendre ses esprits, John secoua ensuite son compagnon, qui semblait totalement hébété.

« Sherlock, tu n'as rien ?

- Je… Non, il ne m'a pas touché. »

Soupirant de satisfaction, le médecin se redressa et gifla le cadet, qui sursauta violemment de surprise.

« John ?

- Pas deux fois ! aboya le blond. Tu n'allais quand même pas me refaire le coup ! Mais c'est quoi ton problème à la fin ? »

Le visage rouge, la respiration haletante, John n'était plus que l'ombre de lui-même. Le contraste avec son ami, tout particulièrement calme, aurait pu apparaître amusant en d'autres circonstances. Mais ni l'un ni l'autre n'avait envie de rire.

« J'ai pesé le pour et le contre pendant que tu dormais et ça m'est apparu comme la meilleure des solutions.

- Quoi ? Ton suicide ? Tu es fou ! Et moi j'aurais fait quoi ? Apprendre à te survivre uns seconde fois ? Parce que tu crois que j'aurais réussi ?

- C'est pour toi que j'ai voulu le faire. »

Toujours ce ton froid, dénué de la moindre émotion, qui plus que tous les récents événements était une torture pour John.

« Pour moi ?

- J'ai enfin intégré le fait que ma présence t'insupporte.

- Sherlock…

- Je ne suis pas du genre à m'imposer inutilement. Mais je refuse de vivre loin de toi. J'ai essayé pendant trois ans et je peux t'assurer que la mort ne sera que plus douce que tout ce que j'ai alors vécu.

- Sherlock, tu te rends compte que tu es en train de dire exactement ce que j'avais besoin d'entendre ? souffla John, ému et pour le coup totalement calmé. Mais en arriver à risquer ta vie…

- Eh bien c'est parce que je t'aime », dit le cadet avec un haussement d'épaules.

D'accord, songea John avec une pointe d'amusement qu'il ne put réfréner, pour l'émotion on pouvait repasser, même pour une déclaration d'amour Sherlock n'avait pas un ton différent de celui qu'il aurait employé pour lui demander d'acheter du lait. Il n'empêche, pour quelqu'un qui n'avouait son amour qu'après le sexe en général, c'était un très net progrès que John savait apprécier à sa juste valeur.

« Alors si tu m'aimes reste en vie, plaida-t-il. Reste avec moi.

- Mais tu ne veux plus de moi.

- Je… », commença John cherchant ses mots pour tenter de faire oublier toutes le horreurs prononcées ces derniers jours.

Il avait mal, en voulait toujours à Sherlock, mais à l'avoir vu risquer sa vie, se remettre en questions de façon aussi radicale il commençait à réaliser qu'il avait peut-être un peu exagéré. Il plongea les yeux dans ceux de son compagnon et ne vit rien d'autre qu'un enfant blessé, apeuré presque. Il eut honte, se sachant responsable de cette réaction. Oui lui-même avait eu son compte de souffrance, mais cela ne pouvait justifier ce qu'il faisait subir à l'homme qu'il n'avait jamais cessé d'aimer. En se montrant tout à fait honnête, il devait admettre que Sherlock avait eu de bonnes raisons d'agir comme il l'avait fait, il n'y avait d'ailleurs certainement pris aucun plaisir. C'était des circonstances atténuantes, non ? Une raison de lui pardonner peut-être bien. John avait besoin d'y croire.

C'est sur ces entrefaites, dans un timing parfait n'aurait pu s'empêcher de faire remarquer Sherlock s'il avait eu la tête à cela, que Lestrade fit son entrée dans la pièce. Il les fixa un moment avec intérêt, surpris sans nul doute de les trouver l'un contre l'autre à même le sol, avant finalement d'esquisser un petit sourire.

« J'ai l'impression de déranger, dit-il.

- Non, tu…, commença John, réalisant du même coup qu'il ne savait pas quoi dire.

- Moran vient d'être arrêté. Je venais vous chercher pour assister à l'interrogatoire, mais je suppose qu'il peut aussi bien passer la nuit en garde à vue en nous attendant.

- Je préfèrerais effectivement rester avec John ce soir », confirma Sherlock.

Entendant cela, le médecin se sentit rosir de plaisir. Trois ans de traque et le voilà prêt à remettre sa petite victoire au lendemain pour lui. C'était la plus belle des preuves d'amour.

« Ça m'arrange en fait, reprit le policier. A la base j'avais un dîner ce soir.

- Vous saluerez mon frère pour moi », lança Sherlock avec malice.

Lestrade salua les deux hommes puis les quitta rapidement, conscient que sa présence était définitivement de trop.

Lorsqu'ils furent à nouveau seuls, John prit la main de Sherlock dans la sienne et la serra avec force un long moment. Le cadet n'osa pas esquisser le moindre geste, pas plus que prononcer le moindre mot. L'instant était fragile, même lui pouvait s'en rendre compte. Il n'avait pour une fois aucune idée de ce que John avait en tête mais il ne voulait pas prendre le risque de le perturber. Puis, toujours sans un mot, le médecin se leva, offrant son plus beau sourire, celui qui avait le don de réveiller des papillons dans l'estomac de Sherlock – d'accord cette expression était totalement absurde mais elle s'approchait tellement de ce qu'il ressentait dans ces moments-là.

« Il va me falloir du temps Sherlock comprends-le. Mais je veux te pardonner. Ce que tu as fait ce soir… D'accord c'était absurde, dangereux et même totalement idiot, mais tu m'as habitué à pire. Et je t'aime. Là pour le coup c'est moi qui suis absurde, mais c'est comme ça. Je t'aime et je ne vais certainement pas te perdre.

- C'est tout ce que je voulais entendre John. Je te promets de ne plus rien faire qui pourrait te nuire. Sauf cas de force majeur évidemment. »

John eut un petit rire. Il ne pouvait attendre mieux, estima-t-il, beau joueur. Etrangement pour la première fois depuis des jours il s'en fichait. Une part de doute et de frustration demeurerait, mais il se sentait le besoin d'aller de l'avant.

Comme s'il sentait ses dernières réticences céder, Sherlock attira son compagnon dans ses bras, satisfait de voir qu'il ne le repoussait pas.

« Je te laisserai tout le temps qu'il faut John, dit-il à son oreille. Et j'essaierai de m'améliorer, au moins un peu, ça fait trois ans que je me penche sur le sujet. »

Le médecin acquiesça en souriant puis releva la tête pour tomber sur le visage penaud de l'autre homme, ce qui eut pour effet de faire définitivement céder ses dernières réticences. Refaire confiance serait certainement long, mais il voulait essayer, quel qu'en soit les conséquences. C'est sur cette pensée qu'il attira Sherlock à lui et l'embrassa doucement. Premier baiser depuis trois ans, il avait comme un goût de retour à la vie.

« Allons dans la chambre, proposa-t-il ensuite. Pas de sexe pour l'instant mais je veux… juste me blottir contre toi.

- C'est parfait, sourit Sherlock. Alors je suis pardonné ?

- Disons que c'est en bonne voie. On va y aller doucement et plus de conneries, de cachoteries… Dorénavant on se dit tout, d'accord ?

- C'est d'accord », confirma le cadet en se levant, attrapant la main que lui tendait son compagnon.

Après son départ de Baker Street, Lestrade rejoignit Mycroft dans un restaurant à proximité. C'était un bouiboui sans prétention, dans lequel, si Greg avait ses habitudes, Mycroft dénotait tout particulièrement. Le policier était encore secoué par les récents évènements, mais comme toujours la proximité de Holmes lui permettait sans mal de faire la part des choses.

« C'est de la folie tout ce qui s'est passé. Pas mécontent que le plus gros soit derrière nous. Maintenant tu dois me parler Mycroft, parce que j'ai besoin de savoir. Pourquoi tu ne m'as rien dit durant tout ce temps ?

- Sherlock pensait que c'était mieux ainsi. Plus il y aurait eu de gens au courant plus les risques d'une fuite…

- Ça c'est du Sherlock tout craché, lâcha Greg avec amertume. Mais toi ?

- Je ne sais pas, je crois que je n'ai jamais eu les idées vraiment claires dans toute cette affaire. Je suis désolé Gregory. J'ai la plus grande estime pour toi et je te fais toute confiance, mais je me devais de faire amende honorable… Je veux dire, j'ai conscience que j'ai provoqué tout ce qui s'est passé par mon manque de discrétion, de discernement auprès de Moriarty. »

Un moment après le retour du petit génie, Lestrade en avait voulu à son ami, à présent il était loin de tout cela. Parce que le regard de Mycroft ne mentait pas, il était bouleversé. C'était tellement étrange d'assister à un tel spectacle auprès d'un homme si habitué à cultiver froideur et distance. Pris d'il ne savait trop quelle impulsion, Greg quitta sa banquette pour contourner la table et s'installer auprès de l'autre homme, passant son bras autour de ses épaules.

« Tu n'y es pour rien. Moriarty a manipulé tout le monde, toi compris. Il est le seul responsable.

- Comment tu peux réagir ainsi ? souffla Mycroft avec un sourire triste. Je t'ai trompé toi aussi. Et pire que tout, j'ai fichu ces trois ans en l'air en étant incapable d'aller de l'avant à tes côtés à cause de ma culpabilité. »

Sans un mot, Greg glissa la main sous le menton de son compagnon, le forçant à tourner la tête vers lui. Il lui sourit alors puis l'embrassa doucement. Bien sûr qu'il aurait au moins pu lui reprocher quelque chose, mais c'était plus fort que lui, lorsque Mycroft était dans le coup il n'était plus capable de se faire sévère. Après tout, eux aussi avaient trois ans à rattraper, autant donc ne pas perdre plus de temps inutilement.

« My, cesse de te torturer, murmura-t-il tandis qu'ils se tenaient fermement par la main. Je suis resté là tout ce temps, ce n'est pas pour rien. »

Holmes eut un hochement de tête, sentant un poids quitter enfin ses épaules. Il n'était pas certain de mériter l'autre homme, mais n'allait certainement pas prendre le risque de l'avouer à voix haute. Au lieu de cela il proposa plutôt qu'ils aillent finir la soirée chez lui. Greg eut un petit rire en se levant, en l'incitant à faire de même.

« Tu ne prends pas beaucoup de risque, j'attends depuis tellement longtemps que je ne vais certainement pas refuser. »

Et tandis qu'à Baker Street deux hommes reprenaient enfin le temps de se découvrir, les deux aînés prirent la route vers l'hôtel particulier de Mycroft, bien décidés à faire table rase de ce passé douloureux qui les avait tous touché quoi si durement.

THE END.