CHAPITRE UN: VOYAGEUR TEMPOREL

Le duel entre Dumbledore et Voldemort venait de se terminer, et alors que la salle de l'Atrium du Ministère de la Magie commençait à se remplir, Harry sentit ses jambes fléchir sous son poids, il n'arriverait pas à rester debout très longtemps. Dumbledore échangea quelques mots avec Fudge, puis il lui donna un portoloin, la tête en or d'une statue, en lui promettant qu'il viendrait le retrouver d'ici une demie heure.

Ne trouvant rien à redire au plan du directeur, et n'ayant de toute façon pas la force de contester l'une de ses décisions, Harry s'exécuta sans rien dire. Quand il posa sa main sur le Portoloin, il eut comme toujours la sensation désagréable d'être aspiré par le nombril, et tout autour de lui disparut. Il avait déjà utilisé des Portoloins, cette fois ce fut différent cependant. Il se sentit sombrer, sombrer dans un profond sommeil. Un sommeil sans rêve, pour la première fois de l'année.

C'est une brise légère sur son visage qui le réveilla, il ignorait combien de temps s'était écoulé depuis qu'il avait quitté le Ministère de la Magie. Il avait les yeux fermés mais il sentait qu'il était allongé, sur un sol dur et froid. Que s'était-il donc passé ? Où Dumbledore l'avait-il emmené ? Il ouvrit les yeux, et constata qu'il était dans une immense salle, au dessus de lui il pouvait voir un plafond fait de vieilles pierres, de vitres et d'une structure en acier.

Il se releva péniblement et resta assis sur le sol froid, en écarquillant les yeux.

Mais enfin qu'est ce que ça veut dire ?

Il était à Kings Cross, et plus précisément dans un coin reculé de la gare, près de l'un des quais, côté moldu. L'heure devait être encore tardive, il n'y avait que peu de voyageurs et la nuit était encore noire dehors. Personne ne semblait remarquer sa présence, ni même s'être aperçut qu'il était apparu à cet endroit par magie.

Il se releva finalement, le dos douloureux et eut comme premier réflexe de tâter son pantalon et sa veste. Horrifié, il constata qu'il n'avait pas sa baguette sur lui. Il chercha du regard autour de l'endroit où il s'était relevé mais il n'y avait rien.

C'est pas vrai ! Qu'est ce qui s'est passé ?! Dumbledore n'a pas pu se tromper en fabriquant le Portoloin !

Mais après tout, le directeur avait peut-être atteint ses limites en combattant Voldemort. Non bien sûr c'était idiot ! Il n'aurait pas fait courir de risque à Harry en lui donnant un Portoloin dont il n'était pas sûr. Quelque chose ne s'était pas passé comme prévu.

L'inquiétude commença à gagner Harry. Il était seul, dans Londres, sans baguette magique. Ce qui voulait dire qu'il n'avait aucun moyen de se défendre, et qu'il ne pouvait pas non plus faire appel aux services du Magicobus.

Pas de panique, réfléchis. Il y a peu de chance que tu te fasses attaquer par qui que ce soit. Il y a déjà eu les affrontements au Ministère, beaucoup de Mangemorts ont été arrêtés. Et Voldemort a été fragilisé par son combat contre Dumbledore. Tu ne vas croiser personne ici ce soir.

Quelque chose fit tilt dans sa tête.

Le Ministère ! Il suffit que je m'y rende. Je n'ai pas dû partir depuis longtemps, il fait encore nuit noire. Je n'aurai qu'à tout expliquer à un employé là-bas, peut-être que Mr. Weasley s'y trouve, ou Shacklebolt, ou même Tonks.

À la perspective de s'en remettre entièrement à Tonks, Harry ne put s'empêcher de rigoler. Elle était adorable, mais pas franchement la meilleure personne pour gérer les situations difficiles et délicates. Il espérait de tout cœur qu'il tomberait plutôt sur Mr. Weasley ou bien sur un Auror et qu'il pourrait savoir ce qui s'était passé.

Il prit la direction de la sortie principale de la Gare, mais en descendant les marches extérieures, une sensation étrange s'empara de lui, et il fut parcourut d'un frisson. Il reconnaissait l'endroit, et pourtant il n'avait rien à voir avec ce à quoi il ressemblait d'habitude. Bien sûr il n'était jamais venu à Kings Cross de nuit, mais les rues de Londres dans le quartier étaient entièrement désertes, et même lui savait que ce n'était pas normal.

Une ambiance pesante régnait dans l'air, comme si une menace planait au dessus de sa tête et qu'il ne pouvait rien faire pour échapper à cette sensation. Il pensa d'abord à la présence de Détraqueurs, mais il n'en voyait aucun. Et puis l'air n'était pas froid, il était doux, grâce à la petite brise légère qui venait de se lever. C'était autre chose.

Qu'est ce qui se passe ici ?

Il n'en avait vraiment aucune idée, mais commençait à être de plus en plus anxieux. Il devait absolument se rendre au Ministère de la Magie, au plus vite. Il fit quelques pas mais sentit de nouveau ses jambes flancher sous son poids. Bien sûr, ce n'était pas le petit voyage en Portoloin qui lui avait redonné des forces, bien au contraire. Il arriverait difficilement à se rendre jusqu'au Ministère dans son état. Il n'était d'ailleurs pas sûr de pouvoir en retrouver le chemin, il ne s'y était rendu que deux fois, la première il avait suivi Mr. Weasley et n'avait pas fait attention aux rues empruntées et la deuxième c'était il n'y a que quelques heures certes, mais les Sombrals n'avaient pas semblé avoir besoin qu'on leur indique le chemin à suivre.

Il pensa alors au Chaudron Baveur. Le pub n'était pas très loin, et Tom le gérant aurait certainement le moyen de contacter le Ministère, voire Dumbledore directement. Il avait toujours été très gentil avec Harry, il l'aiderait sûrement, même à une heure aussi tardive. Il se mit en route en prenant Euston Road et il ne croisa personne jusqu'au croisement avec Tottenham Court Road. Là-bas, il y avait bien certains bus et quelques taxis qui circulaient, les chauffeurs avaient d'ailleurs l'air particulièrement surpris de voir un jeune garçon de quinze ans traîner seul dans les rues à cette heure, mais Harry ne pouvait pas compter sur eux. Il n'avait pas de baguette sur lui, et pas d'argent non plus. Il n'avait pas le choix, il devait faire le trajet à pied.

Quand enfin il arriva sur Charing Cross Road, il reconnu rapidement la grande porte en bois ébène du pub, et il fut soulagé. Il frappa à la porte, mais personne ne répondit. Il frappa de nouveau, et cette fois la porte s'entrouvrit, laissant apparaître à peine un œil dans l'ouverture. Un œil marron, dont le propriétaire avait l'air fatigué, et pas seulement à cause de l'heure tardive.

-Qu'est ce que c'est ?

-Bonsoir. Excusez moi de vous déranger aussi tard mais…

-Qui êtes vous ? Qu'est ce que vous voulez ?

-C'est moi Harry.

C'était bien la première fois qu'on ne le reconnaissait pas. Surtout Tom. Harry se souvenait encore de la façon dont il l'avait accueilli la première fois qu'il était venu, avec Hagrid. Il avait été très chaleureux et depuis cette fois là, il avait toujours souhaité la bienvenue à Harry de façon très enthousiaste.

-Harry ?

-Mais oui enfin ! Je viens tous les ans, pour acheter mes affaires pour Poudlard.

Il n'était visiblement pas très bien réveillé. Harry se demandait si finalement il n'aurait pas dû tenter d'aller au Ministère malgré son état de fatigue.

-Un élève de Poudlard…Faites voir votre baguette.

-Pardon ?

-Faites voir votre baguette !

-C'est que…je ne l'ai pas sur moi actuellement.

-Comment ça ? Vous vous promenez en pleine nuit, et vous n'avez pas de baguette ? Vous me prenez pour un idiot ?

-Non ce n'est pas ça. J'ai pris ce Portoloin, et ensuite…

-L'utilisation d'un Portoloin n'a jamais fais perdre sa baguette à quiconque.

-Je le sais bien. Je ne comprends pas vraiment ce qui s'est passé mais…

-Fichez le camp !

Et il lui referma la porte au nez sans rien ajouter de plus. Harry tenta d'insister mais ça ne servait rien, personne ne réapparut à l'entrée du pub. Tom avait probablement lancé un sort d'insonorisation pour ne plus entendre Harry qui cognait de toutes ses forces sur la porte et qui criait pour l'appeler.

Mais enfin qu'est ce qui lui prend, il ne va pas bien ! Je veux bien admettre qu'il est tard et qu'il n'est pas bien réveillé. Mais me laisser comme ça, dans la rue. Fait chier, je vais devoir ma taper tous le trajet jusqu'au Ministère ! J'en ai marre de marcher.

Il commença à s'éloigner mais entendit des bruits étranges derrière lui. Il se retourna rapidement, mais il ne voyait personne. Il continua sa marche dans le centre de la ville, vers l'endroit où se trouvait le Ministère, les souvenirs lui revenant en tête. Mais plus il marchait, plus il avait l'impression d'être suivi, et il détestait cette sensation.

-Bon ça suffit, montrez-vous! s'exclama-t-il en se retournant pour la énième fois.

Il se trouvait dans une petite ruelle, qui donnait sur d'autres rues perpendiculaires. Un mouvement de robe apparût à l'un des croisements et là, avec horreur, Harry la vit apparaître sous ses yeux, Bellatrix Lestrange. Il aurait voulu se jeter sur elle, pour lui faire payer ce qu'elle avait fait à Sirius, et parce qu'il s'en voulait de l'avoir laissé s'échapper. Mais sans baguette il n'avait aucune chance. Il se tourna pour tenter de prendre la fuite, sachant pertinemment qu'il aurait du mal à la semer mais avant de pouvoir commencer sa course, il se heurta à un corps robuste.

-Tu comptes aller quelque part? lança l'homme contre lequel Harry venait de se cogner.

-Qu'est ce que tu fais tout seul dans les rues à cette heure-ci? demanda Lestrange en s'approchant du Mangemort et de Harry.

Ce dernier trouvait étrange la façon dont elle s'adressait à lui. Bien sûr il paraissait peu probable qu'il se retrouve dans les rues de Londres tout seul après ce qui s'était passé au Ministère. Mais quand même…elle agissait vraiment de façon étrange.

-Baxton, vérifie ses poches, aboya-t-elle au Mangemort près de Harry, alors que trois autres avaient fait leur apparition à côté d'eux.

Cinq Mangemorts contre lui, il n'avait vraiment aucune chance de s'en sortir pensa Harry alors que le fameux Baxton commençait à fouiller ses poches.

-Il n'a rien sur lui.

-Ohhh, lança Bellatrix d'une voix mielleuse. On dirait qu'on a à faire à un petit moldu !

-Moldu? ne peut s'empêcher de répéter Harry.

Bellatrix ricana, tout comme les autres Mangemorts, ne comprenant pas que Harry était surpris, non pas par le mot qu'elle employait, mais bien parce qu'elle l'employait à son égard.

-C'est vrai vous êtes tous des ignorants, lança la Mangemort. Ça m'amuse toujours autant de voir que vous n'avez rien dans le crâne.

Elle dit cela en lui tapotant gentiment sur la tête, comme une femme ayant affaire à un petit garçon un peu naïf. Puis elle se rapprocha de lui, son visage à quelques centimètres à peine de celui de Harry.

-Tes parents ne t'ont pas dit que c'était dangereux de te balader tout seul à une heure pareille ?

Moldu, répéta Harry dans sa tête. Parents ?

Il ne comprenait rien de ce qui se passait. Les autres Mangemorts, ils ne les avaient jamais rencontré, et peut-être que sa cicatrice était cachée par ses cheveux. Mais Bellatrix, elle, savait pertinemment à quoi il ressemblait.

À quoi est ce qu'elle joue ?

Il n'eut pas le temps de s'attarder davantage sur la question, un premier sortilège siffla aux oreilles de Harry, puis ensuite un deuxième. Un combat s'engagea entre les Mangemorts et d'autres sorciers que Harry n'avait pas vu. Il profita de la confusion pour tenter de s'enfuir, en entendant les combats faire rage près de l'endroit où se trouvait les Mangemorts.

Il prit à droite dans une autre rue mais un sortilège le toucha de plein fouet dans le dos et il fut projeté violemment contre un mur en pierre. Il eut un goût désagréable dans la bouche et cracha du sang alors qu'il tentait de se relever, mais c'était trop tard, deux sorciers pointaient déjà leurs baguettes vers lui, au niveau de son visage.

-Relève toi lentement, dit une voix familière à Harry, et donne nous ta baguette sans faire de gestes brusques.

-Professeur Lupin! s'exclama Harry en se relevant rapidement.

C'était bien Remus Lupin qu'il avait devant lui, mais il ne connaissait pas le sorcier qui l'accompagnait.

-Professeur? lança Lupin surpris, ne lâchant cependant pas sa baguette, toujours tendue vers lui.

-Mais enfin c'est moi, Harry !

-Est ce qu'on se connaît ?

-Mais enfin c'est moi je…

Quelqu'un d 'autre fit son apparition près d'eux, c'était Tonks. Harry voulu lui dire quelque chose mais elle prit la parole en premier, et visiblement elle semblait être devenue aussi amnésique que Lupin.

-Remus, les Mangemorts se sont enfuis. Mais il risque de revenir, en plus grand nombre. Il faut qu'on s'en aille. C'est qui lui? demanda-t-elle en faisant un signe de tête vers Harry. L'un des leurs ?

-Je ne l'ai jamais vu. Peut-être une nouvelle recrue.

-Mais il n'a pas transplané. Tu es sûr que ce n'est pas un moldu ?

-Non. Il n'est pas surpris par nos baguettes et il dit me connaître.

-Il te connaît ?

-Mais enfin professeur c'est moi, Harry. Harry Potter !

Lupin lança un regard d'incompréhension total à Harry, et abaissa sa baguette. Mais la seconde d'après il fronça les sourcils et l'attrapa violemment par le col de sa chemise.

-Si c'est une plaisanterie elle n'est vraiment pas drôle, lança Lupin.

-Une plaisanterie ?

-Vite Remus, on doit partir! s'exclama Tonks.

-Qu'est ce qu'on fait de lui? demanda le sorcier que Harry ne connaissait pas.

-On l'emmène pour l'interroger, il va devoir s'expliquer.

-Pourquoi une plaisanterie? demanda Harry, ne comprenant toujours pas où il avait voulu en venir.

Remus se tourna vers lui, en lui lançant un regard mauvais. C'était bien le Remus Lupin qu'il connaissait, celui qu'il avait eu comme Professeur, avec cet air toujours épuisé et ses cicatrices sur le visage. Mais pourtant il y avait quelque chose dans son regard qui était différent, et il ne comprenait pas pourquoi.

-Parce que Harry Potter est mort il y a 15 ans !

Harry ouvrit la bouche, mais n'ajouta rien et ne pu s'empêcher de rire.

-C'est une blague c'est ça ? C'est une mauvaise blague ?

Remus ne répondit pas et transplana comme les deux autres en tenant toujours Harry fermement par le col. Ce dernier compris à ce moment qu'il y avait vraiment quelque chose qui n'allait pas, sauf qu'il ne savait pas encore si le problème venait de lui, ou bien de toutes les autres personnes autour.