Attention ! Si ce n'est pas déjà fait, vous aurez remarqué que mon ancien pseudo était ROMEOWYN. Mais je suis bien la même personne. Personne ne me pique mes fics, don't worry.

J'ai été absente un bon bout de temps, et je m'en excuse, du fait de, pêle-mêle, déménagement, soucis familiaux, régime alimentaire fluctuant, cursus flou, lecture compulsive, apprentissage de nouvelles langues et découverte d'excellentes séries américaines.

Je suis actuellement en vacances, vous aurez donc le prochain chapitre d'ici peu (je m'y mets cet après-midi même), je le jure. Solennellement. Ptiou.

Chapitre 9 : Sublimation.

Sublimation : se dit d'un passage direct de l'état solide à l'état gazeux, sans intermédiaire liquide. Dans le cas de l'eau, transformation de glace en vapeur.

« J'ai failli mourir de nombreuses fois, mais la première fut la plus impressionnante, d'autant que j'y suis réellement resté. Et quand je dis « resté », ça n'est pas une manière de parler. Mon ancien moi, l'ancien Naruto, n'est jamais ressorti des montagnes. Et je pense pouvoir dire que Sasuke, ou une partie de lui, y prend soin de moi.

(…)

S'il avait su, s'il avait su… C'est une chose à laquelle je pense souvent, vous savez. Je ne sais pas s'il m'aurait tué s'il avait été au courant. Malgré tout ce qui s'est passé ensuite (un blanc), vous connaissez Sasuke, sa réputation, je veux dire. Il ne rechignait jamais devant une épreuve pour peu qu'elle soit utile. Mais celle-là… Je ne sais pas. Il aurait peut-être, je dis bien peut-être, hésité.

- Mais il ne l'a pas fait ?

- Non, bien sûr que non. Il n'a pas hésité. »

KG-1-1-649 Entretiens du 6 et 7 Avril An °°°° - Classifié 0/Strictement réservé à l'Hokage.

Mes genoux m'auraient fait terriblement souffrir si j'avais été en mesure de les sentir. Ma vue toujours trouble me permettait de distinguer la forme du chemin, gris sur vert sale, mais pas son relief, si bien que mon poids et celui de mon fardeau pesaient durement lorsque mon pied ne trouvait pas l'appui qu'il attendait, tordant mes chevilles lorsqu'un caillou se dérobait sous mes pas.

Les brins d'herbe, couchés dans le sens de la pente vers l'à-pic, semblaient m'indiquer la voie à suivre.

Je ne pouvais marcher qu'en pleine lumière, ralenti par le terrain accidenté.

Le soir, la nuit et le matin, je serrais contre moi un cadavre ficelé dans une couverture. Il commençait à peine à sentir.

Je n'avais plus d'eau, plus de nourriture. Lorsque je buvais à un ruisseau trouble, mon ventre me torturait et ma marche se faisait lourde et hésitante.

Je passais mes nuits la tête sur un corps qui, le jour, me courbait les épaules.

Je tombais parfois, mais ne le lâchais jamais. Serait-il tombé dans un ravin que j'aurais sauté à sa suite. Je l'avais tué, je le ramenais. Dussé-je en mourir.

La température s'adoucissait à mesure que nous descendions, les chemins devenaient moins abrupts et ma vision plus claire quand je ne fermais pas les yeux en marchant. J'avais perdu ma tunique et le soleil me cuisait la peau sans la réchauffer. Mes jambes flageolaient continuellement.

Je pense avoir marché plus de deux semaines avant d'arriver à Konoha. Je n'avais alors pas mangé, que peu bu et dormi davantage debout qu'allongé. Je suis tombé à quelques centaines de mètres des murs de Konoha et y suis probablement resté quelques heures avant que quelqu'un ne passe par là et ne me porte à l'intérieur de la ville, où Kakashi me reconnut.

L'encens me réveilla. De légers mouvements d'air caressaient mes tibias et la répercussion des sons m'indiquait que je me trouvais dans une pièce à plafond haut.

J'étais allongé sur une surface douce et confortable, couverte de tissu de bonne qualité. Trop affaibli pour ouvrir les yeux, une courte concentration sur la rumeur du dehors qui pénétrait par la fenêtre me confirma ce que j'avais pressenti : j'étais dans ma chambre. La chambre de mon enfance et de celle de Naruto, celle dont le lit nous avait abrités tous les deux de longues et nombreuses nuits passées à nous chuchoter des secrets, inventés pour la plupart, et de longues après-midi consacrées aux études, que j'avais pour ma part davantage employées à me gorger de la chaleur de mon ami, à me baigner les rétines dans la couleur de ses cheveux et sa peau jusqu'à ce qu'elles l'exsudent même en son absence.

L'odeur de l'encens mortuaire gonflée de cardamome et de fleurs de soucis plaquait mes souvenirs au sol, leur interdisait de s'enfler de nouveau de la vie qui les avait fait naître. Mon matelas n'étais plus le radeau imaginaire qu'il avait été mais une couche de convalescence, et mes derniers souvenir de Naruto n'étaient que vide, violence, mort et puanteur.

Je tentai d'ouvrir les paupières, mais la lumière me transperça le crâne et je poussai un gémissement en les refermant précipitamment. Quelqu'un bougea sur ma droite, comme réveillé en sursaut, tandis que je replongeai. Plus tard, je sentis dans ma demi-conscience que l'on me nourrissait de bouillon à l'aide d'un linge glissé entre mes lèvres. Je le suçotai vaguement pour finir par sombrer de nouveau.

« Sasuke. Sasuke, réveille-toi. » On me secouai gentiment mais avec insistance. J'émis une plainte et essayai une nouvelle fois d'ouvrir les yeux sans plus de résultats que la fois précédente. Ma tolérance à la lumière semblait de plus en plus désastreuse et mon besoin de voir de plus en plus pressant. Je me résignai à garder paupières closes.

« Qui est-ce ? » Ma voix était éraillée comme après avoir longtemps crié alors que je n'avais pas dit un mot depuis des jours, des semaines.

« Kakashi. » Il me prit la main. « Tu as soif ? » Je secouai la tête. Il garda le silence un moment, puis, d'une voix presque lasse : « Sasuke, qu'est-ce que tu fais là ? » Un rire nerveux me secoua. Le corps de Naruto, presque une charogne, attendait d'être brûlé quelque part, et Kakashi me demandait la raison pour laquelle je me trouvais dans ma propre demeure.

« Je l'ai ramené. » Je tournai la tête vers la direction de sa voix. « Tu ne l'aurais pas laissé non plus. Je l'ai tué, Kakashi. » Ma voix ne vacilla pas. Je rendais compte, de ninja à ninja, froidement. « Il a…» Je me raclai la gorge et me repris. « On l'a piégé avec un genjutsu très puissant. Son âme était en train de s'effondrer, j'ai épuisé toutes mes réserves sans résultat. Je suis resté aveugle pendant presque une journée.

- Où étiez-vous ?

- À trois jours de cheval de Shuuichi. J'ai été pris dans une tempête de neige au col de Yuki et je serais mort à l'heure qu'il est s'il n'était pas tombé sur moi. J'étais en train de mourir de froid, je voyageais en vêtements légers. Je n'avais pas imaginé que l'hiver puisse commencer aussi tôt. Nous nous sommes rendus à Shuuichi et… Nous avons été attaqués. » Pour une raison que je n'arrivais pas à cerner, ou peut-être étaient-elles trop nombreuses pour être discernées, je passai les détails de Shuuichi sous silence.

« Naruto a été attaqué et blessé. J'ai tué Gaara, le danseur du village. J'ai volé un cheval et nous nous sommes enfuis. Notre monture a fini par mourir sous moi. » J'avais la bouche sèche et la gorge serrée. « C'est à ce moment-là que je me suis rendu compte qu'on lui avait jeté un genjutsu. J'ai dû le tuer. Le col de Yuki est impraticable jusqu'au printemps, je suis descendu à flanc de montagne et au fond des vallées. Je crois avoir marché plus de deux semaines. »

« Je n'avais pas vu Naruto depuis des mois. » La lassitude plus que la tristesse transparaissait dans sa voix. Les émotions m'étaient plus que jamais étrangères, et je ne savais si je devais m'en inquiéter. Il me semblait tomber au fond de moi-même pour aller m'y écraser contre un sol de pierre froide. Les sons me parvenaient déformés, comme le monde bien vivant, perçu de la surface immobile du fond d'un puits. « Et maintenant, il me semble que c'est lui qui nous attend. Qui attend que nous le rattrapions. »

Je l'écoutais à peine. Je me retirais de plus en plus loin en moi-même, sans savoir si je refusais sa mort ou si c'était sa réalité qui me frappait de plein fouet et me racornissait à vue d'œil.

Je me retrouvais sans trop savoir comment derrière le manoir, au bord du torrent qui longeait le domaine, debout devant un bûcher. La forme oblongue d'un corps cousu dans un linceul clair y était allongée. L'odeur en était perceptible à quelques mètres. Mes yeux me faisaient toujours défaut : j'avais noué un tissu autour de ma tête afin de me protéger de la lumière mourante de l'après-midi. Nous devions présenter un étrange tableau, nos trois silhouettes sombres debout dans l'herbe, s'apprêtant à brûler un mort presque en catimini.

Iruka se pencha vers le foyer allumé non loin de là, en tira un brandon et le lança sur le tas de bois. La lueur orange parvint à mes yeux diminués et me jeta à genoux dans l'herbe humide et mes doigts se crispèrent dans la terre grasse tandis que mon ventre se convulsai sans pourtant qu'aucun sanglot ne passe ma gorge. Je m'entendais émettre de petits cris rauques presque inaudibles et m'affaissai jusqu'à ce que le haut de mon crâne touche le sol. Alors, un hurlement me déchira la gorge. Je ne sais s'il en fut la cause ou le résultat, mais mes mains volèrent à mon front et en arrachèrent le bandeau qui m'aveuglait. La lumière chaude du ciel et des flammes transperça mes yeux écarquillés et je me jetai dans le brasier.

J'agrippai le cadavre à bras-le-corps et roulai jusque dans l'herbe.

J'arrachai frénétiquement les coutures du linceul et découvris la figure gonflée de Naruto, puis levai la tête vers Kakashi et Iruka, étonnamment nets malgré les larmes et la douleur qui me transperçait les yeux. « Je vais le ramener. » Ils reculèrent d'un pas, une trace d'horreur flottant sur leur visage.

Je m'assis sur le ventre de Naruto et posai mes paumes contre son visage délabré. Un sourire un peu fou étirait mes lèvres malgré les larmes sombres qui tombaient sur son visage. « Je vais te ramener. » J'écartai ses paupières molles sans ménagement et découvris son regard vitreux. Mes yeux me brûlaient de plus en plus, et la douleur ne semblait plus venir de dehors mais de mes iris mêmes. Mes larmes auraient dû s'évaporer, vapeur sur les charbons ardents placés dans mes orbites, mais elles coulaient de plus en plus librement, pluie rouge s'écrasant sur son visage, teintant ses joues, le blanc dégradé de ses yeux, coulant jusqu'à la commissure de ses lèvres alors que je lui maintenais la nuque d'une main, lui lissai les cheveux de l'autre.

Je ne voyais plus qu'un masque sanglant formé de mes larmes, étalé de mes mains, moulé sur un visage voué à disparaître. Front contre front, nez entrecroisés, mon sang coulait dans ses yeux, ses narines, sa bouche, ses oreilles. J'avais si mal que je m'attendais à perdre conscience ou sentir ma tête exploser à tout instant.

Soudain, tout se figea : sa tête entre mes mains, j'arrêtai de respirer alors que quelque chose montait vers moi. À travers ses yeux. Je crus au début à un reflet des flammes ou du ciel mordoré, mais la lueur brillait à l'intérieur de ses pupilles desséchées. Et elle s'enfla. Prit de l'altitude à l'intérieur de ses globes oculaires, jusqu'à être à peine visible si vous vous étiez tenu à deux ou trois pas de nous. La vague de pouvoir qui l'accompagnait me suffoquait, me traversa de part en part, manqua me faire effondrer de tout mon long. Mes membres tremblaient alors que je le voyais se remplir littéralement, chassant le vide de la mort : sa peau reprit son éclat doré, ses yeux redevinrent lisses, ses cheveux se débarrassèrent de leur couche de crasse et de poussière, l'odeur persistante de la putréfaction se dissipa. Il tressaillait de tout son corps, sa tête partit en arrière, les paupières agitées de tremblements.

Puis il se figea, inerte, la nuque molle et le regard fixe. Je tenais toujours son visage entre mes mains, son abdomen enserré de mes cuisses, si bien que j'avais senti le frissonnement de tout son corps sans détacher les yeux des siens. « Naruto. Naruto, reviens. Reviens. Je ferais n'importe quoi. Reviens. » Ses yeux s'ouvrirent d'un coup, et avant que je ne puisse comprendre, et ce malgré mon entraînement, il m'avait renversé le dos dans l'herbe, nos positions inversées.

Ses paumes étaient aplaties de chaque côté de ma tête, et son nez dans mon cou. Je n'osai bouger, ne serait-ce que d'un souffle, et de toute manière n'aurais pas pu le faire. Je sentais sa chaleur, bien plus intense qu'un corps humain ne devrait jamais pouvoir en produire, tandis que ses cheveux me chatouillaient le menton. Il me reniflai. Son souffle chaud caressa le côté de mon cou, rapidement remplacé par une douceur infinie associée à une chaleur humide presque brûlante. Je ne saurais dire s'il embrassait, léchait, suçait ou goûtait la peau. Il progressa vers mon oreille, qu'il entreprit de mordiller, tandis que des sons que je ne saurais interpréter que comme du contentement animal s'échappaient de sa gorge. J'avalais ma salive, ayant grand mal à ne pas l'imiter.

Il poussa sur ses avant-bras et son visage apparut au-dessus du mien, ses cheveux formant une couronne traversée par les dernières lueurs de la journée. Ses yeux brillaient, comme éclairés de l'intérieur, d'un éclat bleu et doré qui donnait à son expression à fois contenue et affamée un aspect presque effrayant.

Il me fixa quelques instants étourdissants dans une immobilité parfaite avant de fondre sur ma bouche pour la dévorer avec une passion dont je ne l'aurais jamais soupçonné capable. Ses dents caressaient et malaxaient mes lèvres, sa langue lapait, caressait et pénétrait en un ballet désordonné mais d'une efficacité redoutable : brusquement, je ne pus me retenir de gémir et cherchai désespérément un souffle pour lequel je ne voulais rien interrompre. Je ne réfléchissais plus, pas même quand je sentis son corps se faire de plus en plus lourd sur le mien, pas même quand mes hanches tressaillirent, la rigidité brûlante de son sexe se pressant dans le creux de ma hanche. Le chakra coulait à flots sur moi, me baignant et m'étourdissant de sa puissance et de son parfum brûlant.

Mes mains volèrent dans sa nuque, sous les cheveux, et à sa taille, mais il les en arracha avec un grognement rauque qui me donna la chair de poule pour me maintenir les poignets de chaque côté de la tête. Je fus submergé par une vague de chaleur.

Prochain chapitre : cristallisation. Coming soon.